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Sierra Leone, guerre de

Publié le 05/04/2013

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leone

1   PRÉSENTATION

Sierra Leone, guerre de, conflit civil ayant opposé les forces gouvernementales sierra-léonaises au Front révolutionnaire (Revolutionary United Front, RUF) de 1991 à 2001.

Sanglant, le conflit sierra-léonais a fait plus de 50 000 morts ; cibles et instruments de la guerre, des milliers de civils ont été victimes d’amputations, de viols, d’enrôlements forcés (notamment parmi les enfants) et de pillages. Environ deux millions de personnes ont été déplacés ou ont dû se réfugier dans les pays voisins (principalement en Guinée et au Libéria).

2   LA PROPAGATION DE LA GUERRE CIVILE LIBÉRIENNE

La guerre civile sierra-léonaise trouve son origine dans l’extension de la guerre civile au Liberia voisin, qui débute en 1989, et son moteur dans la lutte pour le contrôle des gisements de diamants du pays. Dès 1991, la Sierra Leone offre un refuge aux civils libériens qui fuient les combats, puis elle devient un front de la guerre civile libérienne lorsque Charles Taylor, qui mène la rébellion au Liberia, traverse la frontière sierra-léonaise. Celui-ci provoque la création du Front révolutionnaire uni (Revolutionary United Front, RUF) réunissant une centaine de combattants libériens, burkinabés et sierra-léonais autour du rebelle Foday Sankoh, dans les zones diamantifères proches de la frontière libérienne. La Sierra Leone sort d’une longue dictature instaurée par Siaka Stevens (1968-1985), caractérisée par la répression, la corruption, le népotisme et le pillage des ressources du pays, et le gouvernement du général Joseph Momoh (1985-1992) suscite un fort mécontentement populaire sur fond de marasme économique. Aussi, lorsque le 23 mars 1991 le RUF attaque deux villages situés dans l’est du pays, le mouvement rebelle bénéficie-t-il d’une certaine sympathie auprès de la population.

3   LES « DIAMANTS DU SANG «, L’UNE DES CLÉS DU CONFLIT

L’objectif premier du RUF est de s’emparer des gisements de diamants, dont l’extraction illicite et le négoce au Liberia vont financer les deux rébellions. Cet objectif ne permet toutefois pas d’expliquer la cruauté et la terreur auxquelles le RUF va avoir recours pour asseoir sa domination sur la population civile. Dévoyant les rituels traditionnels d’intégration sociale, Foday Sankoh parvient à constituer son armée en utilisant largement l’enlèvement d’enfants dans les villages de brousse pour en faire des combattants à sa dévotion, les coupant de la société en leur faisant commettre des actes excluant tout retour dans leur milieu (assassinats de proches, anthropophagie). Dès 1992, les Kamajors, une confrérie de chasseurs traditionnels victimes de ces enlèvements, organisent une milice d’autodéfense contre les rebelles.

4   L’ÉCHEC DE L’ACCORD D’ABIDJAN (NOVEMBRE 1996)

Le coup d’État militaire du 29 avril 1992, qui porte au pouvoir un jeune officier, Valentine Strasser, oriente le pays vers une transition démocratique, mais ne parvient pas à mettre fin à la guerre civile, qui touche les régions agricoles et minières. Alors que le pays sombre dans l’anarchie, le général Julius Maada Bio renverse Valentine Strasser en janvier 1996 et, fort de l’aide de mercenaires sud-africains, entame des négociations avec le RUF, qui contrôle les trois quarts du pays. Des élections démocratiques, soutenues par les Nations unies, portent à la présidence de la République Ahmad Tejan Kabbah, un ancien diplomate onusien. Dans ce nouveau contexte, un accord est signé le 30 novembre 1996 à Abidjan (Côte d’Ivoire) entre le président Kabbah et Foday Sankoh. En dépit de cet accord, les rebelles ne baissent pas les armes et, face à une armée en déliquescence, le président Kabbah s’appuie sur les Kamajors. L'armée régulière sierra-léonaise, qui se sent désavouée, renverse le 25 mai 1997 le président Kabbah, sous la conduite du commandant Johnny Paul Koroma, et laisse pénétrer les rebelles du RUF dans la capitale, Freetown, livrée au pillage et à la terreur. La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) confie à sa force d’interposition (l’Ecomog), conduite par le Nigeria, la mission de rétablir le président Kabbah. Tandis que la Sierra Leone est suspendue du Commonwealth, la junte sierra-léonaise est frappée par le Conseil de sécurité des Nations unies d’un embargo sur l’importation de pétrole et d’armes.

En février 1998, Freetown est reconquise par les forces de l’Ecomog. Cette offensive victorieuse de l’Ecomog, interprétée par certains comme une tentative du Nigeria visant à prendre le contrôle des diamants sierra-léonais, permet à Ahmad Tejan Kabbah de rentrer de son exil guinéen en mars 1998. Elle ne supprime pas une des causes essentielles du conflit : l’enjeu que représente la Sierra Leone pour ses voisins. En effet, à la volonté de Charles Taylor, devenu président du Liberia en 1997, d’étendre son influence sur le pays voisin et sur ses richesses minières, s’oppose celle du président nigérian Sani Abacha, soucieux de conserver son influence à travers le président Kabbah, auquel il est lié personnellement. En outre, la présence de la Mission d’observation des Nations unies en Sierra Leone (Monusil), créée en juillet 1998 pour veiller notamment au désarmement des anciens combattants et au respect des droits de l’homme, n’empêche pas les combats de reprendre ni les rebelles du RUF de commettre des atrocités contre la population civile.

5   L’ACCORD DE LOMÉ (JUILLET 1999) ET L’INTERVENTION MILITAIRE DE L’ONU

Réclamant la libération de leur chef Foday Sankoh, capturé par les Nigérians à Abuja en 1997, le RUF, mené par Sam Bockarie, lance une attaque surprise contre Freetown en janvier 1999 et met la capitale à feu et à sang (6 000 morts). Des pourparlers de paix mettent en présence à Lomé, la capitale du Togo, le président Kabbah et le chef du RUF, toujours prisonnier, sous l’égide du président Eyadéma et du pasteur noir américain Jesse Jackson. Ceux-ci aboutissent, le 7 juillet 1999, à un accord de cessez-le-feu, prévoyant la mise en liberté de Foday Sankoh, l’impunité pour ses combattants auteurs d’atrocités et la création d’une commission chargée des ressources minières et de la reconstruction, dont la présidence est concédée au chef du RUF.

Créée en octobre 1999 afin de garantir le respect de l’accord de Lomé et de remplacer les 15 000 hommes de l’Ecomog, une mission militaire des Nations unies en Sierra Leone (Minusil), forte d’une dizaine de milliers d’hommes, est chargée de surveiller le désarmement des combattants et de prendre le contrôle des zones minières. C’est alors la plus importante opération de l’ONU dans le monde en termes d’effectifs militaires (17 500 à leur maximum en 2001).

6   NE PAS « SACRIFIER LA JUSTICE À LA PAIX «

Mais le processus de paix est interrompu par le RUF, en mai 2000 : pour empêcher le redéploiement des forces de l’ONU près des mines de diamants, le mouvement rebelle lance une offensive en direction de Freetown, tandis que quelque 500 Casques bleus sont pris en otage. Les Occidentaux, qui ont patronné l’accord de paix de Lomé, et estimé, contrairement à l’avis de la population, qu’il était préférable de « sacrifier la justice à la paix «, se voient contraints par l’opinion internationale d’intervenir pour empêcher la prise de la capitale. Le débarquement d’un contingent en provenance du Royaume-Uni (l’ancienne puissance coloniale) contribue à une reprise de l’initiative par l’armée gouvernementale, tandis que Foday Sankoh, en fuite, est arrêté. Les Casques bleus sont libérés après des interventions internationales auprès de Charles Taylor. Le 5 juillet 2000, la résolution 1306 du Conseil de sécurité de l’ONU décrète un embargo sur le trafic illégal de diamants issus de Sierra Leone. Cette mesure touche à la fois le RUF, qui contrôle l’extraction illicite des diamants de la guerre, et le Liberia, où s’organise leur négoce.

7   L’ACCORD DE CESSEZ-LE-FEU D’ABUJA (NOVEMBRE 2000) ET LE PROCESSUS DE PACIFICATION

Après la signature d’un accord de cessez-le-feu à Abuja (Nigeria), en novembre 2000, entre le gouvernement et les rebelles, la communauté internationale intensifie la lutte contre le trafic de diamants et l’aide extérieure dont bénéficie la rébellion. Parallèlement, les combattants du RUF montrent des signes durables de lassitude, qu’accentue la perte d’influence de leur leader, Foday Sankoh, emprisonné et en passe d’être jugé. De son côté, le gouvernement sierra-léonais prépare une transition démocratique sous l’égide des Nations unies et procède au désarmement de plus de 45 000 combattants (dont environ 25 000 rebelles et 20 000 hommes issus des milices villageoises pro-gouvernementales). À la suite de l’achèvement du processus de désarmement, la fin de la guerre civile est officiellement proclamée le 18 janvier 2002, avec une cérémonie symbolique de destruction de 3 000 armes légères, à laquelle assistent le président Kabbah et le chef par intérim de la rébellion, Issa Sessay.

La paix est consolidée dans les années qui suivent par la présence de la Minusil (2005), la réussite du processus de transition démocratique sous l’autorité du président Kabbah, la chute de Charles Taylor au Liberia (2003), ainsi que par la mise en place d’instruments favorisant la justice et la réconciliation nationale, avec la création d’une Commission vérité et réconciliation et du Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL). Chargé de juger les responsables des crimes commis en Sierra Leone depuis le 30 novembre 1996, date de l’accord de paix d’Abidjan entre le gouvernement et le RUF, le TSSL ne peut poursuivre que les personnes âgées de 15 ans au minimum et portant la responsabilité la plus lourde dans les crimes visés. Cette modalité, qui exclut les enfants soldats, permet d’inculper Foday Sankoh (dont la mort, en juillet 2003, vient cependant interrompre le procès ouvert un an auparavant), Johnny Paul Koroma (décédé en 2003 alors qu’il était en fuite) et Charles Taylor (arrêté en 2006), ainsi que les leaders kamajors.

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