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Spinoza: L'utilité de la vie sociale.

Publié le 08/04/2009

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spinoza
Il est rare que les hommes vivent sous la conduite de la Raison; mais c'est ainsi: la plupart se jalousent et sont insupportables les uns aux autres. Néanmoins ils ne peuvent guère mener une vie solitaire, de sorte que la plupart se plaisent à la définition que l'homme est un animal politique ; et, de fait, les choses sont telles que, de la société commune des hommes, on peut tirer beaucoup plus d'avantages que d'inconvénients. Que les Satiriques rient donc autant qu'ils veulent des choses humaines, ... et que les Mélancoliques louent, tant qu'ils peuvent, la vie inculte et sauvage, qu'ils méprisent les hommes et admirent les bêtes : les hommes n'en feront pas moins l'expérience qu'ils peuvent beaucoup plus aisément se procurer par un mutuel secours ce dont ils ont besoin, et qu'ils ne peuvent éviter que par l'union de leurs forces les dangers qui les menacent de partout ; pour ne pas dire d'ailleurs qu'il est de beaucoup préférable, et plus digne de notre connaissance, de considérer les actions des hommes que celles des bêtes. Spinoza.

Ce texte de Spinoza propose un contraste entre la manière dont les hommes se comportent, d'un côté, et le manière dont il devrait se comporter. De ce fait, on retrouve ici deux axes entremêlés, entre d'une part un point de vue factuel, et de l'autre un point de vue éthique proprement dit. Bien évidemment, ces deux plans sont loin de coïncider entre eux, bien que ce soit là un enjeu capital dans une perspective politique. En effet, s'il va de soi que les hommes ont besoins de l'association civile pour pouvoir exister, il n'est pas certain qu'il fasse bon usage de cette association. Dire que l'homme est un animal politique comme le veut la tradition, et notamment Aristote, ce n'est pas simplement, voire pas du tout, dire qu'il vit en groupe. La notion de politique suppose toujours plus que la simple association comme peut l'être par exemple, sans le monde animal, celle d'une meute de loups, ou d'un groupe de grands singes. Il y a compris en elle, l'idée de rationalité, une rationalité qu'il faut se charger de mettre à l'œuvre, pour le bien même de la collectivité, ainsi que pour réaliser ses véritables potentialités.

spinoza

« destins collectifs coïncident pleinement avec les décisions et les destins collectifs.

En d'autres termes, et pourprendre un exemple, une abeille n'aura jamais un comportement qui nuit au devenir de son espèce ou même audevenir de sa colonie, précisément parce qu'elle n'a pas à choisir. Elle obéit à une série de comportements qui sont déterminés et non libres .

Avec l'apparition de la génétique, nous pourrions dire aujourd'hui que tous les comportements de l'abeille sont issus d'un patrimoine génomique qui détermine de façon innée ce que l'abeilleexécutera durant son existence.

L'abeille n'a pas choix entre tel ou tel comportement, elle fait ce que lui dictent sesgènes, des gènes qui sont précisément des gènes spécifiques, c'est-à-dire un patrimoine commun à toute l'espèce.Chez l'homme, il n'en va pas de même puisque l'intérêt particulier ne coïncide pas spontanément avec l'intérêt collectif .

On pourrait même signaler une fracture évidente dans le passage de l'individu au collectif, de telle sorte que chacun est amené dans l'existence à promouvoir prioritairement son intérêt personnel parfois contre l'intérêt dela société même. Pourtant, si la cohésion sociale n'est pas immédiate, spontanée, il va de soi pour Spinoza que la raison peut participer au chantier politique de manière active .

L'utiliser, c'est en somme assurer la pérennité et le bien-être de la communauté, assurer un nombre considérable d'avantage dont serait bénéficiaire toute personne participant àl'association politique.

D'ailleurs, nous parlons ici de politique, ce qui est essentiel, puisque l'animal n'a précisémentpas besoin de l'instrument politique.

Puisqu'il est spontanément dévoué de manière inconditionnel au devenir dugroupe dans lequel il s'insère, la question de la gouvernance et du vivre-ensemble ne se pose proprement pas.

Aucontraire, l'homme, en raison de cette fracture évoquée, doit s'intéresser à la collectivité et la penser sans cesse pour en améliorer la teneur. Aussi, on ne peut ignorer, si l'on tente de penser une organisation politique, l'apport de la raison qui demeureessentiel puisque c'est d'elle en dernier lieu que dépend sa viabilité.

Abaisser l'homme à l'état d'animal, en plus d'êtreune insulte jetée à la face de l'humanité, est une erreur fondamentale qui promet à tout tentative d'édification d'unsystème politique un échec certain.

Les actions humaines ne peuvent prendre sens qu'à partir de ce donnéfondamental qu'est la raison, c'est à elle qu'il revient de tisser un ensemble où chacun peut « se procurer … un mutuel secours] » et assurer une juste économie .

Lorsque nous parlons d'économie, nous entendons bien ici la juste répartition des biens et des ressources entre homme .

L'homme, par cette répartition précisément, et cette organisation de la trame sociale, peut pour ainsi dire gagner sur le temps.

Contrairement à l'animal, il ne va pas vivreimmergé dans le présent, mais il va prévoir l'avènement de risque ou de problématique qui peuvent mettre en périll'ensemble social.

Le problème peut être proprement économique, puisqu'un mauvaise répartition, en plus de créerdes injustices, peut entraîner un conflit civil.

Il s'agit donc d'assurer une sécurité intérieur par une habile gestion dupatrimoine générer par l'ensemble de la collectivité, mais également une sécurité extérieure.

En effet, l'homme setrouve menacer de toute part: le mythe de Protagoras nous le dépeint toujours comme un être oublié lors de ladistribution originelle, un être fragile auquel on n'a guère accorder d'amples défenses naturelles.

Il y a une incomplétude fondamentale au sein de la nature humaine , une incomplétude qu'il ne peut gérer qu'en faisant précisément usage de la raison.

Cette dernière le guidera en ce sens, le long du chemin qu'il lui reste à faire: là oùles bêtes naissent prêtes pour ainsi dire, ayant au sein de leur patrimoine une solide base instinctive leur dictant ensomme leur comportement, l'homme doit se fier à cette faculté particulière qu'est la raison pour devenir ce qu'il est proprement . Politique et risque III. Il faut saisir ici en filigrane une mise en garde de l'auteur.

En effet, si Spinoza tient tant à l'usage de la raison enmatière de politique, c'est précisément parce qu' il y voit une manière de ne pas subir l'asservissement d'un tyran .

Il s'agit de revenir un instant à l'introduction du Traité théologico-politique .

Spinoza nous parle d'Alexandre le Grand: ce dernier était, en matière de stratégie martiale, un des plus grand et plus habile dirigeant.

En principe, ilconnaissait tout de la bataille qu'il allait mené, il ne laissé jamais quoique ce soit au hasard.

Tout devait êtrecalculé, réfléchi, prévu, anticiper.

Pour cela, Alexandre accumulait une grande base de données concernant sonennemi, le terrain du conflit, les possibles pièges...

etc.

Ceci explique d'ailleurs en grande partie la réussite de sescampagnes militaires, précisément par l'épuisement de tous les facteurs qui pouvaient à un moment ou à un autrerentrer en jeu.

Cependant, Spinoza remarque qu'il lui arrivait d'avoir moins d'informations concernant certainesbatailles, qu'il demeurait même parfois dans l'expectative, le probable.

Dans ce cas là, nous explique Spinoza, ilfaisait appel à des voyants, des sorciers capables de lire dans les entrailles des bêtes, et toutes autres sortes depersonnages au pouvoir occulte.

En somme, lorsqu'il ne disposait que de peu d'informations, il avait alors recours àd'ancestrales superstitions. Spinoza se rend compte que le manque de connaissance, en plus – comme nous l'avons précisé en première partie –de nous rendre passif et triste, nous met sous le pouvoir de charlatans qui usent d'illusions pour persuader .

Il s'agit donc de faire en sorte que le peuple use de sa raison afin 1) de ne pas être asservi, et 2) d'être tout simplementheureux.

Si l'homme optimise l'effectivité de la trame sociale, il assure son bien-être ainsi que celui des autres, il semet à l'écart de tous conflits et de tous risque de conflit.

Pour cela, il doit donc faire usage de la raison, penser lasociété, faire œuvre de prospection, faire précisément un ratio , soit un calcul élégant et efficace qui assure le. »

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