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Suis-je ce que ma culture a fait de moi ?

Publié le 21/05/2013

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Un constat : J'ai souvent le sentiment que les autres ne me comprennent pas, ne me connaissent pas, bref qu'ils ne savent pas
qui je suis. En revanche, j'ai, moi, le sentiment de savoir qui je suis, ce que je suis, puisque je suis conscient de moi.
Toutefois, il peut se faire que ce que je m'imagine être diffère de ce que je suis réellement, et que je fasse donc erreur sur ce
que je suis.
C'est pourquoi le problème se pose de savoir si je suis vraiment le mieux placé pour savoir ce que je suis, si je suis réellement ce
que j'ai conscience d'être en tant que je suis, ou bien si je suis un produit de la culture.
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« Cependant, Spinoza nomme sage celui qui a, « par une certaine nécessité éternelle, conscience de lui-même, de Dieu et des choses» (V, 42, sc.), qui comprend la parfaite nécessité du Tout, qui, en ce sens, a conscience de ce qu\'il est sans être prisonnier de l\'illusion dont est porteuse la conscience ordinaire. On a pu dire que Nietzsche rejoignait Spinoza « dans la critique qu\'il développe contre la notion d\'une volonté, faculté de l\'âme ». Cependant, « l\'intention est ici bien différente, car il s\'agit d\'exclure le libre arbitre du psychisme humain, ce n\'est pas pour rendre la pensée humaine radicalement dépendante de la Pensée divine, comme chez Spinoza, mais pour subordonner le moi au « Soi » de la grande raison organique » (J.

Granier, Le problème de la Vérité dans la philosophie de Nietzsche). L\'analyse psychologique de Freud rejoint à maints égards celle de Nietzsche (sur la notion d\'inconscient et les problèmes qu\'elle soulève), en réduisant elle aussi fortement l\'importance de la conscience.

Reconnaître l\'existence d\'un inconscient psychique conduit en effet Freud à poser deux thèses : Je ne suis pas ce que j\'ai conscience d\'être En effet, ce qui en moi est inconscient ne peut précisément pas être accessible au moi conscient.

Un désir refoulé, donc inconscient, s\'il était (par impossible) présenté au sujet qui l\'a effectivement refoulé de sa conscience par un processus involontaire, lui paraîtra nécessairement étranger ; il ne reconnaîtrait pas ce qui est son désir.

Bien plus, le sujet conscient, par un processus de rationalisation, remplace le désir réel inconscient qui détermine ses actes et ses pensées, par des motivations conscientes qui renforcent l\'illusion qu\'il est maître de ses choix. Mais je peux prendre une certaine conscience de cette méconnaissance Toute l\'entreprise de Freud en est le témoignage.

Dès lors, je ne suis pas que dans l\'illusion sur moi.

La conscience de soi est au moins conscience possible de l\'illusion sur soi : donc conscience d\'une certaine vérité sur soi.

Ce que je suis, je peux partiellement en prendre conscience ; du moins puis-je prendre conscience que « le Moi n\'est pas le maître dans sa propre maison ». Je suis ce que ma culture a fait de moi, car c’est en mot que nous pensons… « C\'est dans les mots que nous pensons.

Nous n\'avons conscience de nos pensées déterminées et réelles que lorsque nous leur donnons la forme objective, que nous les différencions de notre intériorité, et, par suite, nous les marquons d\'une forme externe, mais d\'une forme qui contient aussi le caractère de l\'activité interne la plus haute.

C\'est le son articulé, le mot, qui seul nous offre l\'existence où l\'externe et l\'interne sont si intimement unis.

Par conséquent, vouloir penser sans les mots, c\'est une tentative insensée [...] Et il est également absurde de considérer comme un désavantage et comme un défaut de la pensée cette nécessité qui lie celle-ci au mot.

On croit ordinairement, il est vrai, que ce qu\'il y a de plus haut, c\'est l\'ineffable.

Mais c\'est là une opinion superficielle et sans fondement ; car, en réalité, l\'ineffable, c\'est la pensée obscure, la pensée à l\'état de fermentation, et qui ne devient claire que lorsqu\'elle trouve le mot.

Ainsi le mot donne à la pensée son existence la plus haute et la plus vraie.

» Hegel, Encyclopédie des sciences philosophiques.

Philosophie de l\'esprit. Le langage est bien entendu un instrument de la pensée.

Lorsque nous avons du mal à exprimer notre pensée, celle-ci demeure confuse.

Il nous arrive de penser silencieusement, mais cette méditation est un discours intérieur.

Par conséquent, ce fait ne prouve pas du tout que l\'on puisse penser sans l\'aide du langage, mais tendrait plutôt à prouver que le langage n\'est pas un simple instrument de communication, mais bien ce qui permet de penser. Une pensée sans langage serait nécessairement intuitive.

On pourrait se demander ce qu\'il en est de la pensée animale, puisque les animaux ne disposent pas du langage au sens strict du terme.

Toutefois, il faut rester prudent.

D\'une part, nous ne pouvons nous imaginer à quoi correspondrait cette pensée animale, et l\'on sait bien que lorsque pour les besoins de la fiction un auteur veut exprimer la pensée d\'un animal il le fait parler.

D\'autre part, il faut prendre le mot « pensée » dans son sens strict, en le distinguant du souvenir ou de l\'affectivité, sans quoi le sujet serait vidé de son sens. On dit parfois que les mots sont impuissants à transcrire la profondeur de ce que l\'on éprouve ou de ce que l\'on pense.

Cette idée - ou ce préjugé, peut-être - invite à considérer qu\'une pensée sans langage ne serait pas une sous -pensée mais bien au contraire le moyen d\'accéder aux mystères les plus profonds. Cependant, il est évidemment trop facile de justifier son incapacité à s\'expliquer au nom de la profondeur de ce que l\'on pense. De plus, une telle prise de position interdit tout progrès de pensée, lequel suppose le dialogue et la confrontation des idées, ainsi que la recherche de l\'expression la plus claire possible. Ce sujet invite évidemment à s\'interroger sur les rapports entre le langage et la pensée.

Il ne faut donc pas s\'arrêter à ce qui est évident, à savoir que le langage permet d\'exprimer la pensée, ni s\'évertuer à résoudre de faux problèmes, comme celui de savoir si la langue des signes pratiquée par les sourds relève du langage ou non (la réponse est évidemment oui). Cette question des rapports entre le langage et la pensée fait d\'abord apparaître deux positions radicalement opposées, qu\'il faudra confronter.

La première fait du langage un obstacle à la pensée, obligée de se couler dans un moule de conventions qui l\'empêchent d\'atteindre la réalité profonde des choses.

Elle met au plus haut l\'ineffable, et aspire à un idéal de pensée purement contemplative, où l\'intelligence entre directement en contact avec son objet sans passer par la médiation du langage.

La seconde fait de la pensée un simple effet du langage, et renverse ainsi l\'opinion commune sur ce sujet.

Celle-ci en effet croit que nous pensons d\'abord, avant de chercher les mots pour témoigner de cette pensée à autrui.

Or, cette « première pensée » ou cette méditation est déjà en réalité un discours intérieur.

A partir de là, on pourrait supposer que nos pensées sont déterminées par la structure du langage, et qu\'il suffirait de doter une machine d\'un langage suffisant pour créer de l\'intelligence artificielle.

Bien entendu, on peut essayer d\'échapper à cette alternative.

Il serait d\'ailleurs très dommageable pour la philosophie qu\'on ne puisse. »

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