Devoir de Philosophie

Suis-je le mieux placé pour savoir ce que je suis ?

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

Parler de place, c'est en premier lieu une place dans l'espace, dans ce cas là la meilleure par rapport à une personne, pour pouvoir parler de cette personne, la comprendre, la connaître, et essayer de savoir ce qu'elle est. On peut donc penser pour l'instant que la personne la mieux placée pour me connaître est une personne proche de moi. Les amis proches, et la famille, sont donc les premières personnes qui nous viennent à l'esprit. Ce sont eux qui connaissent le mieux ma vie, mes opinions, mes goûts, mes envies, mes malheurs. Mais qui peut être plus proche de moi que moi-même ? J'occuperais donc une place privilégiée dans l'espace, par rapport aux autres. Ma conscience personnelle serait celle qui connaîtrais et interpréterais le mieux tous les caractères qui me définissent, qui font que je suis ce que je suis. Mais être le plus proche de quelqu'un ou quelque chose, ne signifie pas forcément avoir la place la plus appropriée pour observer, et tenter de comprendre ce quelque chose, ou cette personne. Prenons pour exemple une salle de cinéma, les places les plus proches sont celles les plus près de l'écran, et s'y asseoir revient en général à sortir de la salle avec un torticoli.

« L'identité d'une personne émerge dans le « je » que je suis seul à pouvoir prononcer pour moi.

Mon intimité, la réalitéintime et personnelle qui constitue la personne que je suis est engagée à chaque fois que – grâce à laconscience immédiate que j'ai de mon existence – je dis « je ».

Ainsi, n'est-ce pas la conscience immédiateque j'ai de moi qui détermine qui je suis et ne saurait donc permettre aux autres de me connaître mieux que je neme connais ? En effet, si la connaissance de mon identité ne peut appartenir à personne d'autre mieux qu'à moi, c'est bien que laconscience, démarche personnelle, ne peut être entreprise que par moi et personne d'autre.

La conscience, c\'est-à-dire la certitude que j'ai de mon existence et des divers pensées et sentiments qui me traversent et m'animent,est un acte immédiat, lié à une personne et une seule.

Qui mieux que moi pourrait décrire mes sentiments,développer mes envies, défendre mes idées ? Mon identité, toutes ces qualités qui me caractérisent, est ainsiconstituée de tous ces mouvements qui m'animent et dont seul j'ai conscience.

La conscience constitue ainsi lepoint fixe d'où part tout le reste et donc le fondement de toute connaissance adéquate de moi-même.

Même si jene peux pas nécessairement l'exprimer dans le langage adéquat, le fait que je sente un sentiment ou pense unepensée me constitue, détermine qui je suis, et moi seul peut en avoir une saisie immédiate.

C'est bien ce qu'expliqueDescartes dans Les Méditations Métaphysiques.

La conscience constitue non seulement une substance, c\'est-à-dire un point fixe et immuable, mais aussi et surtout une certitude que je peux acquérir seul, sans jamais recourir àl'extériorité, puisqu'au contraire c'est de cette certitude que nous pourrons partir pour explorer tout le reste.L'expérience du doute, développée par Alain, montre bien donc que la conscience est le n½ud de l'identité du sujet,le point de départ de tout le reste.Ainsi, je suis le mieux placé pour savoir qui je suis au sens où qui je suis c'est d'abord l'ensemble des qualités qui medéfinissent, des mouvements qui animent mon intimité, et dont seule la conscience immédiate que j'en ai constitueun savoir adéquat.

Autrui n'aura jamais qu'un accès indirect et donc déformé à ces informations.

Si par savoir onentend connaître, disposer des informations relatives à un objet, je suis alors à l'évidence le mieux placé pour meconnaître.

En effet, la séparation entre intériorité et extériorité constitue un obstacle fondamental à laconnaissance que les autres ont de moi et rend pour autrui définitivement perdu le savoir de qui je suis, c\'est-à-dire de tout ce qui m'anime et me détermine. Mais on peut en revanche se demander si la conscience de soi est vraiment analogue a la connaissance de soi.

Eneffet, savoir comment me décrire par expérience, connaître un grand nombre d'informations à mon sujet, n'est passavoir comment me décrire de manière entièrement vraie et objective.

Ma position supposée avantageuse par saproximité ne serait elle donc pas un obstacle à une vision objective de ce que je suis ? Les autres ne me seraient-ilspas nécessaires pour avoir une vraie vision de ce que je suis ? Si j'ai ainsi un sentiment de certitude immédiate de qui je suis, si spontanément, je répondrais « oui » si l'on medemande « sais-tu qui tu es ? », pour autant serais-je capable de me décrire comme pourraient le faire mes parentsou mes amis les plus proches ? Ce qui me manque avant tout, c'est la possibilité de me saisir dans descaractéristiques générales et fixes.

L'introspection m'amène à prendre conscience de quelque chose en moi, pourautant est-ce connaître cette chose, ce sentiment et cette idée, et est-ce même connaître comme un objet qui aun ensemble de qualités générales ? Prendre conscience de mon vécu ne suffit à me connaître ni à me rendrecapable de me définir puisque me rendre compte d'un sentiment me traverse, cela ne suffit pas pour me permettrede poser l'ensemble des caractéristiques qui me sont propres et me définissent comme objet.Ainsi, si la conscience de soi est une condition nécessaire de la connaissance de soi, elle ne suffit pas et, on peutpar conséquent se demander si elle constitue aussi le meilleur point de vue.

La différence entre moi et le sauvageest que moi je suis le sujet et l'objet de ma connaissance.

Comment alors m'aborder moi-même comme un objet ?Comment accéder à une connaissance objective de moi ? Ne peut-on pas alors dire que les autres sont les mieux placés pour savoir qui je suis, c\'est-à-dire accéder à laconnaissance de l'objet que je constitue dans le monde ? En effet, seuls eux sont capables de me considérer commeun objet précisément, car je ne suis pour eux rien d'autre que cela, une entité dans le monde mais qui comme lesautres objets, leur est extérieure.

Or, considérer quelque chose comme un objet est la condition de l'objectivité etdonc du savoir.

En effet, l'objectivité est la caractéristique d'un point de vue neutre, qui ne décrit que ce qui peutêtre tiré de l'objet lui-même, jamais de ce qui est propre au sujet en train de s'exprimer.

La vérité se doit d'êtreobjective, car la vérité qualifie un discours en harmonie avec son objet, c\'est-à-dire précisément, qui décrit cequ'est l'objet réellement.

Ainsi, la vérité est universelle et absolue, c\'est-à-dire n'est pas relative aux conditions deson expression, ne varie pas dans le temps ni dans l'espace.

Pour savoir qui je suis, il faut donc pouvoir accéder àce type de connaissance, objective et donc vraie, c\'est-à-dire me départir de tout point de vue sur l'objet que jeconsidère.C'est bien ce qu'explique Sartre dans La Naissance de Huis Clos.

« Les autres sont au fond ce qu'il y a de plusimportant en nous-mêmes pour notre propre connaissance de nous-mêmes.

» Si les autres se trouvent ainsi accéderà un statut privilégié, c'est bien que seuls eux peuvent nous considérer extérieurement comme des objets.

Ce n'estpas tant que nous pensons être ce que les autres pensent de nous, mais plutôt que pour nous connaître vraimentnous adoptons le point de vue que les autres ont sur nous, celui extérieur que nous ne pouvons simuler qu'en nous «mettant à la place des autres ».

Ainsi, notre point de vue n'est pas le meilleur.

D'ailleurs, on peut comparer ce queje peux connaître de moi et ce que je peux voir de moi.

Si je me contente de mon propre point de vue pour me voir,je n'aurai qu'une vision très partielle de moi.

Pour me voir, je dois utiliser cet outil qu'est le miroir qui me permet. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles