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VALERY-LARBAUD: Fermina Marquez

Publié le 11/02/2011

Extrait du document

valery

Nous étions maintenant l'escorte habituelle de la jeune fille. Une dizaine, à peu près. Tous ceux qui l'approchaient, ceux auxquels elle parlait, ceux qui jouaient avec elle, formaient, autour d'elle, une sorte de cour d'amour ; c'étaient ses chevaliers. Les chevaliers de Fermina Marquez, donc, étaient admirés de tous les élèves, et peut- être même des plus jeunes parmi les surveillants. De ces belles promenades dans le parc, nous ne rapportions plus^ l'odeur du tabac fumé en cachette, mais le parfum des petites Américaines. Était-ce le géranium ou le réséda ? C'était un parfum indéfinissable, un parfum qui faisait penser à des robes bleues et mauves, et blanches, et roses, à de grands chapeaux de paille souple ; et à des rouleaux et à des coquilles de cheveux noirs, et à des yeux noirs, tellement grands que le ciel doit s'y refléter tout entier.

Pilar n'était qu'une enfant; elle avait ses doigts toujours tachés d'encre et ses coudes toujours écorchés, ces grands gestes bêtes des fillettes de onze à treize ans. Mais Fermina était une vraie, une grande jeune fille. C'est pour cela que son aspect avait pour nous quelque chose de si émouvant. Une jeune fille ! on voudrait battre des mains en la voyant ; on voudrait danser autour d'elle.

VALERY-LARBAUD

Fermina Marquez, 1911.

Méthode : Voici quelques renseignements qui permettraient de situer ce texte et son auteur. Les indications pourraient être rem-

placées par une étude plus déterminée des thèmes et de la tonalité de cette page.

Valery-Larbaud fait partie des écrivains de l'aventure et des voyages qui jalonnent le xxe siècle. Riche et même fortuné, il parcourt l'Europe. Dès 1898, il séjourne en Espagne, visite les grandes villes de Tolède, Séville... et habite jusqu'en 1920 à Valence. Il découvre la littérature de langue espagnole et en traduit les grands auteurs : Eugénio d'Ors, Alfonso Roys et aussi l'Argentin Jorge Luis Borges...

valery

« L'école : On relève d'abord les termes qui se rattachent au monde scolaire en remarquant l'absence des adultes (les surveillants évoquéssont les plus jeunes, proches des élèves).L'école est le lieu où s'opposent l'enfance et l'adolescence.Autant les figures féminines sont assez différenciées par leur âge, autant les garçons témoignent d'une évolution récente (l'épisode où l'on fume en cachette n'est pas loin). La courtoisie : Là aussi, il faut relever les termes qui évoquent cette période : Décrire la « hiérarchie » de la courtoisie :a. le peupleles chevaliersla dame. Enfin, revenir sur la période contemporaine et insister sur le mélange des époques. Ce plan rassemble les idées.

Il procède de façon succincte. L'étude des thèmes entre davantage dans le détail du texte mais traite chacun d'entre eux de façon « statique ».

L'élève qui souhaite aboutir à uncommentaire achevé organisera la partie suivante en fonction du plan proposé et aura soin de marquer lesliens qui existent entre les autres thèmes (portrait de la jeune fille — les sentiments des jeunes garçons / école et courtoisie), comme nous venons de le suggérer. étude thématique 1.

Le portrait de la jeune fille • Pour désigner Fermina, le narrateur utilise par trois fois le mot « jeune fille », particulièrement mis en valeur dans le dernier paragraphe : effet des trois adjectifs qui se suivent : « vraie », « grande », « jeune » (même si le nom de « jeune fille » est perçu comme un tout) ; a. exclamation : « une jeune fille ! »b. b. Ce terme résume d'ailleurs toutes les raisons qui conduisent les jeunes garçons à admirer Fermina : « Fermina était une vraie, une grande jeune fille.

C'est pour cela que son aspect avait pour nous quelque chose de si émouvant.

» Le portrait ne décrit pas le caractère de la jeune fille.

Il se limite à l'aspect physique et encore avec une certaine discrétion : le narrateur parle simplement des « cheveux noirs » et « des yeux noirs » des Sud-Américaines mais ne détaille pas les traits du visage. Comment expliquer cette imprécision ? Sans doute parce que les garçons se forgent une image très idéalisée de cette jeune fille.

A ce titre, il estintéressant de remarquer comment un « parfum indéfinissable » engendre une série de visions : « des robes bleues et mauves, et blanches...

à des coquilles de cheveux noirs et à des yeux noirs ».

L'imagination ne se fixe pas surune toilette, elle se disperse en rêvant de robes et de coiffures féminines.

Les « rouleaux » et les « coquilles de cheveux noirs » font référence aux cheveux souples, bouclés et peut-être aux tresses roulées qui couvrent enpartie les oreilles. L'indécision, signe du mystère, et la complexité de ce charme inconnu s'expriment par l'interrogation : « Était-ce le géranium ou le réséda ? » ; par l'adjectif « indéfinissable » ; par l'énuméra- tion des couleurs et même par les « grands chapeaux » qui dissimulent les traits du visage. La fraîcheur : la couleur sombre des yeux et des cheveux s'oppose aux tonalités pâles des robes « bleues, mauves, blanches et roses ».

Ces teintes de pastels équivalent aux références florales puisque les mauves et les roses sont aussi des fleurs. Dans ce registre, le géranium et le réséda ont des parfums plus entêtants.

Mais l'accent mis sur ces parfums s'explique parce qu'il se réfère sans doute au sens le plus subtil. Enfin, la pureté, proche de la fraîcheur, se retrouve à la fin du premier paragraphe : « des yeux noirs, tellementgrands que le ciel doit s'y refléter tout entier ».

Après les énumérations entrecoupées de virgules, cette phrase se déploie sur un rythme plus ample, à la mesure du ciel.

A ce propos, on note un changement de temps : le récitquitte le passé pour le présent.

Cet effet crée une rupture qui attire l'attention et exprime la permanence du charme.. »

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