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Que vaut une preuve contre un préjugé ?

Publié le 29/01/2011

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Chapitre 1 : -------------------------------------------------Que vaut la preuve contre le préjugé ? « La raison du plus fort est toujours la meilleure » (La Fontaine, Le loup et l’agneau). Cette fable de Jean de La Fontaine pourrait servir d’allégorie pour le combat de la preuve contre le préjugé : l’agneau a beau apporter les preuves les plus irréfutables (il n’était pas né ; il n’a pas de frère ; …), le loup, avant même d’examiner ses preuves, a décidé (a pré-jugé) que l’agneau était coupable de troubler son breuvage, et le pseudo jugement est sans appel : il doit mourir. « Le loup l’emporte et puis le mange, sans autre forme de procès » : notons l’allusion juridique qui montre ici le manque d’efficacité de la preuve lorsque le préjugé emporte la conviction des jurés. Un préjugé est en effet un jugement précipité, une affirmation posée avant d’avoir procédé à un examen critique. Or l’exemple de la fable nous montre qu’il ne suffit pas de lui opposer un argument rationnel (« je n’étais pas né ») ou une preuve de fait (« je n’en ai point ») pour l’éliminer. La force démonstrative de la preuve semble parfois impuissante face au préjugé, alors même qu’elle semblerait la plu apte à le combattre, elle qui se définit comme un jugement réfléchi appuyé sur un raisonnement cohérent ou sur une vérification expérimentale. La preuve ne semble donc pas avoir toujours une réelle efficacité réelle sur le préjugé. Que vaut la preuve contre le préjugé ? La preuve, apportée par les scientifiques, que la notion de race humaine est un non sens, parvient-elle à détruire le préjugé savamment entretenu par les démagogues selon lequel certaines races seraient supérieures à d’autres ? Le sujet n’invite donc pas à une comparaison qui aplanirait les difficultés (dans certains domaines la preuve est supérieure, dans d’autres le préjugé perdure), mais bien plutôt à se demander si la preuve a réellement les moyens de lutter contre la force du préjugé, et quelle forme elle doit prendre dans ce combat. Il semble en effet à première vue que la preuve, argument rationnel et construit, soit le moyen le plus efficace pour lutter contre le préjugé. Mais cela serait sans compter sur la force propre du préjugé, qui empêche la preuve d’imposer la vérité. Comment donc faire valoir la preuve contre le préjugé ? I. La preuve, argument rationnel et construit, semble-t-il être le meilleur moyen pour établir la vérité ?1. La preuve est objective, universelle et absolue alors que le préjugé est subjectif, particulier et relatif • Objectif : extérieur à l’individu et qui ne dépend pas de lui.• Subjectif : qui dépend du sujet ou est lié à lui. • cf. FOC : Universel - Général - Particulier - Singulier • Absolu : qui ne dépend de rien d’autre que lui-même.• Relatif : qui dépende de l’individu, parfois de sa personnalité. Relativisme : Doctrine ique qui soutient : « Chacun de nous est mesure de ce qui n’est et de ce qui n’est pas, et de l’un à l’autre existe des différences ». = « A chacun sa vérité » => Opinion subjective.Le relativisme exclut donc tout accès à la vérité, mais plutôt utilité subjective et opinion. Ex : Homme malade jugera boisson amère vs homme sain la trouvera douce. => Pbs iques du relativisme :    * Opinion vraie par hasard et non parce qu’elle est fondée rationnellement (= pas de valeur).   * Relativisme rend impossible la science, car il n’y a plus de vérité objective et universelle.   * Le relativisme rend impossible la morale. 2. Le préjugé est souvent illusoire, il nous éloigne de la vérité PLATON, République, VII, « l’allégorie de la caverne ». • Préalable : Différentes manières d’appréhender les choses : image de la ligne (PLATON)   Visible / Sensible Intelligible  Objets : ImageRefletsOmbres VivantsObjets fabriqués Objets rationnels(Maths) Formes = idées  États de l’âme : Illusion Croyance Raison Science   OPINION PENSEE Éducation : passage de l’illusion à la science, du sensible à l’intelligible • Allégorie de la caverne : image concrète qui représente une idée abstraite. Remarque : c’est une image car pour l’instant nous ne pouvons pas accéder aux idées de Platon.Remarque : Voir : Vision sensibleRemarque : Voir : Compréhension 3 étapes : a. État initial d’ignorance  Tout est souterrain : topologie symbolise infériorité, impuissance, ignorance Prisonniers « depuis l’enfance » : préjugés depuis l’enfance ; maturité difficile (« ligotés ») Feu : Source lumineuse : condition de possibilité de la visionPbs : Si le feu disparaît : on ne voit plusPbs : c’est la cause des ombres mais elle est inconnue des prisonniers Ombres : reflet déformé, sans épaisseur ni couleur ni poids ni matière. Les prisonniers sont dans l’illusion. Ils ignorent la partie réelle des choses ; ils ont une réalité très pauvre. Montreur de marionnettes : Qui ? Pourquoi ? => Ils connaissent le subterfuge mais pas la réalité extérieure.Ce sont ceux qui nous font prendre pour réel des choses fausses. (Hypothèse : hommes politiques, artistes, sophistes (= professeurs de rhétorique qui se faisaient payer))  Les prisonniers ne voient d’eux-mêmes qu’une ombre : méconnaissance totale de leur être réel. => Ils ne se connaissent pas ! b. L’éducation de l’âme (la remontée) Quelqu’un ( ?) force le prisonnier à se relever, marcher, regarder, … => ContrainteL’éducation exige qq’un qui nous arrache à nos habitudes de pensée = ie Jusqu’à la fin le prisonnier est tenté de faire demi-tour car difficile, douloureux.Mais risque : resté paralysé par la découverte de son ignorance et sombrer dans scepticisme. Le prisonnier sait comment fonctionne les choses, mais pas encore leurs causes 1ère, leur origine. Prisonnier sort : éblouissement. Quand on voit la vérité pour la 1ère fois on a du mal à la reconnaître, il faut s’y habituer. Sorti, le prisonnier est heureux. La connaissance source de bonheur de l’Homme mais on ne le comprend qu’à la fin. Pas seulement changement dans les connaissances mais changement radical dans l’existence. c. La redescente et ses conséquences Utilité du e qui, après avoir contemplé la vérité, retourne dans la caverne pour retrouver les prisonniers. Difficultés à se réhabituer à l’obscurité => Décalage e / autres hommes => Moqueries. Risque : être tué par les prisonniers (cf. Socrate -399) Conclusion sur le texte : Pourquoi cette distinction entre sensible / intelligible ?Non pas pour renier le sensible, mais pour le saisir à sa juste valeur (croyance). Le savoir ne se trouve pas dans nos sensations ou opinions mais dans la vérité intelligible. Éduquer l’âme ce n’est pas imposer à l’extérieur de nouvelles connaissances mais c’est convertir son regard vers les idées. Mais c’est une convertion difficile car elle est radicale et dangereuse. Il faut reconnaître en tout homme la présence de l’intelligible qui lui permet de dépasser ses propres intérêts et ses préjugés. Le meilleur homme politique est le φφe et on l’y forcera. 3. La preuve vient d’un travail de l’esprit alors que le préjugé est synonyme de passivité et d’hétéronomie KANT, Qu’est ce que les Lumières ?  But de cette œuvre : libérer le peuple de l’obscurantisme mais aussi montrer pourquoi la liberté de penser est difficile à obtenir et à conserver alors qu’elle est vitale. Mot d’ordre : Penser par soi-même ! -------------------------------------------------KANT, Sapere aude ! (Qu’est-ce que les Lumières ? §1 et 2, 1784)------------------------------------------------- -------------------------------------------------« Accéder aux Lumières consiste pour l’homme à sortir de la minorité où il se trouve par sa propre faute. Être mineur, c’est être incapable de se servir de son propre entendement sans la direction d’un autre. L’homme est par sa propre faute dans cet état de minorité quand ce n’est pas le manque d’entendement qui en est la cause, mais le manque de décision et de courage à se servir de son entendement sans la direction d’un autre. Sapere aude ! [Ose savoir] Aie le courage de te servir de ton propre entendement ! Telle est la devise des Lumières.-------------------------------------------------La paresse et la lâcheté sont les causes qui font qu’un aussi grand nombre d’homme préfèrent rester mineurs leur vie durant […] ; et ces mêmes causes font qu’il devient si facile à d’autres de se prétendre leurs tuteurs. Il est si aisé d’être mineur ! Avec un livre qui tient lieu d’entendement, un directeur de conscience qui me tient lieu de conscience, un médecin qui juge pour moi de mon régime, etc, je n’ai pas vraiment besoin de me donner moi-même de la peine. Il ne m’est pas nécessaire de penser, pourvu que je puisse payer ; d’autres se chargeront bien pour moi de cette ennuyeuse besogne. » => Problème : Penser par soi même ne va pas de soi et présente de réelles difficultés :   * Chacun tient et croit à ses opinions personnelles mais sont-ce vraiment nos pensées et pas plutôt des préjugés, c’est-à-dire des croyances dont nous ne sommes pas maîtres, et qui viennent de notre histoire, de notre culture.Pb : nous nous trompons nous même !Il est difficile de nous séparer de ce que nous pensons pour part de nous même.   * Rendre raison de nos croyances, de les fonder. Demande du travail, effort, courage, doute…Refuser le confort de pensées toutes faites, des clichés (= prêt à penser)   * Exige de se connaître pour distinguer ce que nous comprenons vraiment (savoir) vs ce que nous croyons savoir (cf. FOC Croire/Savoir)   * Il faut devenir des hommes libres.Homme libre : Homme dont les pensées et les décisions ne découlent ni des préjugés ni des passions ni des intérêts subjectifs. Pour dépasser sa subjectivité, Kant nous donne 3 maximes :   1. « Penser par soi-même » : pensée active libérée des préjugés notamment la superstition => Refuser l’hétéronomie = les autres pensent et décident à ma place.   2. « Penser en se mettant à la place de tout autre » : pensée élargie, objective, universelle.   3. « Toujours penser en accord avec moi-même » : pensée conséquente (= cohérente). Transition : Le sujet suggère un combat : preuve vs préjugé. Du point de vue de valeur de vérité : preuve qui l’emporte mais préjugé a une force autre qui le fait souvent triompher. II. Mais le préjugé a une force propre qui empêche la vérité prouvée de s’imposer 1. Le préjugé se donne l’apparence de la preuve (Vérité formelle ≠ vérité matérielle) ARISTOTE (IVème siècle avant J.C.), fondateur de la logique Syllogisme : raisonnement qui à partir de deux prémisses (= 2 propositions logiques) aboutit à une conclusion qui n’était contenu dans une prémisse en tant que telle. Ex : Tous les hommes sont mortels Ex : Or Socrate est un homme Ex : Donc Socrate est un mortel  Ex : => Valide et vrai Ex : Tous ce qui est rare est cher Ex : Or un cheval bon marché est rare Ex : Donc un cheval bon marché est cher Ex : => Valide et faux Ex : Toutes les grenouilles sont mortelles Ex : Or Socrate est mortel Ex : Donc Socrate est une grenouille  Ex : => Non valide et faux Ex : Tous les écrivains ont du style Ex : Or Balzac a du style Ex : Donc Balzac est un écrivain Ex : => Non valide et vrai Les principes d’Aristote permettent de différencier raisonnements valides ou non en fonction de la forme.Mais cela ne suffit pas pour établir la vérité matérielle de ces raisonnements. Limites du formalisme logique :   * Absence de découverte (expose vérité, mais ne la découvre pas)   * Syllogisme n’est que hypothétiquement nécessaire : sa vérité dépend de la vérité des prémisses.   * Vérité des prémisses est souvent établie par évidence=> Pb : les évidences sont parfois trompeuses   * Raisonnements formalisés ne permettent pas à exprimer vérité qualitative 2. Les faiblesses de la preuve démonstrative Au principe de toute démonstration => indémontrable : axiomes, postulats, définitions… Pour Aristote, ces principes 1ers sont évidents, il serait ridicule de chercher à les démontrer sinon risque régression à l’infini.Conséquence : on peut choisir à changer axiomes et postulats de départ et construire malgré tout un système cohérant (Ex : Géométrie non euclidienne). Une démonstration n’est valide qu’à l’intérieur d’un système admis au départ. Si l’on admet ces principes 1er, c’est parce que l’on sent leur principe et la vérité. Cela dépasse le calcul rationnel. C’est de l’intuition. Pour B. Pascal, c’est le « Cœur ». Extrait des Pensées : « Nous connaissons la vérité non seulement par la raison mais encore par le cœur […]. Les principes se sentent, les propositions se concluent, et le tout avec certitude, quoi que par différentes voies. » 3. Quelle est la valeur de la vérité prouvée par la science ? a. La place de la croyance dans la science  cf. FOC : Croire/Savoir « Sans la croyance qu’il est possible de saisir la réalité avec nos constructions théoriques, sans la croyance en l’harmonie interne de notre monde, il ne pourrait pas y avoir de science. » Einstein & Infield b. La réfutabilité des théories scientifiques K. POPPER  La science procède par rejet d’hypothèses« Le résultat des tests est la sélection des hypothèses qui ont résisté aux épreuves, au moyen de l’élimination de celles qui ne l’ont pas fait, et qui ont en conséquence été rejetées. Il est important de se rendre compte des conséquences de cette conception. Ce sont celles-ci : tous les tests peuvent être interprétés comme des tentatives d’élimination des théories fausses – des essais pour découvrir les points faibles d’une théorie, afin de la rejeter si elle est falsifiée. On estime parfois que cette conception est paradoxale ; notre but, dit-on, est d’établir des théories, non pas d’éliminer celles qui sont fausses. Mais précisément parce que notre but est d’établir des théories du mieux que nous le pouvons, nous devons les tester aussi sévèrement que nous le pouvons ; c’est-à-dire que nous devons essayer de les mettre en défaut, de les réfuter. Ce n’est que si nous ne pouvons pas les réfuter, en dépit des plus grands efforts, que nous pouvons dire qu’elles ont résisté aux tests de les plus sévères. C’est la raison pour laquelle la découverte d’exemples qui confirment une théorie a très peu de signification, si nous n’avons pas essayé, sans succès, de découvrir des réfutations. Car si nous ne prenons pas une attitude critique, nous trouverons toujours ce que nous désirons : nous rechercherons, et nous trouverons, des confirmations ; nous éviterons, et nous ne verrons pas, tout ce qui pourrait être dangereux pour nos théories favorites. De cette façon, il n’est que trop aisé d’obtenir ce qui semble une preuve irrésistible en faveur d’une théorie qui, si on l’avait approchée d’une façon critique, aurait été réfutée. Afin de faire fonctionner la méthode de sélection par élimination, et de garantir que seules les théories les plus convenables survivent, leur lutte pour la vie [allusion à la théorie de Darwin] doit être rendue sévère. »Karl POPPER, Misère de l’historicisme (1945)« J’admettrai certainement qu’un système n’est empirique ou scientifique que s’il est susceptible d’être soumis à des tests expérimentaux. Ces considérations suggèrent que c’est la falsifiabilité et non la vérifiabilité d’un système, qu’il faut prendre comme critère de démarcation.En d’autres termes, je n’exigerai pas d’un système scientifique qu’il puisse être choisi, une fois pour toutes, dans une acception [= signification] positive, mais j’exigerai que sa forme logique soit elle qu’il puisse être distingué, au moyen de tests empiriques dans une acception négative : un système faisant partie de la science empirique doit pouvoir être réfuté par l’expérience. »Karl POPPER, La logique de la découverte scientifique (1973) 1) Expliquez et trouver (si besoin inventez) un exemple pour appuyer cet argument : « la découverte d’exemple qui confirment une théorie a très peu de signification ». Les êtres vivants marchent car les hommes adultes marchent. Un exemple peut être un cas particulier / singulier alors que la théorie scientifique doit être une loi universelle (cf. FOC Universel-Général…). C’est le contre exemple qui est significatif. 2) Pourquoi la démarche scientifique consiste-t-elle à éliminer plutôt qu’à prouver des hypothèses ? Pour éliminer il suffit d’un contre exemple assez facile à produire alors que pour prouver il faut fonder en raison de manière universelle. C’est long et difficile. Avec le temps on risque d’entasser des théories fausses ou incomplètes : les tests de réfutation permettent de circonscrire le domaine de validité de la théorie. 3) Expliquer l’analogie que fait l’auteur avec la sélection naturelle darwinienne. Darwin : la sélection naturelle élimine les moins adaptés à l’environnement et à la survie, c'est-à-dire à la reproduction. De même, en science, ne conserver que les théories adaptées à un ensemble et fécondes pour d’autres théories ultérieures. Comme Darwin qui a remis en cause la fixité pour penser l’évolution des vivants, de même Popper a une vision diachronique (= évolutive) de la vérité scientifique. 4) Selon Popper, à quoi se mesure la valeur scientifique d’une théorie (par rapport à d’éventuelles réfutations) ? En quoi est-ce une « acception négative » de la vérité d’une théorie scientifique ? La valeur d’une théorie scientifique se mesure à son acception des tests de réfutation et aux possibilités qu’elle offre pour être testée (contrairement hypothèse freudienne de l’inconscient).Conséquence : la vérité d’une théorie scientifique est toujours provisoire.Négative car la vérité est provisoire et non éternelle. 5) Comment qualifier les liens entre expérience et théorie selon Popper ? La théorie est appuyée sur l’expérience en amont : les expériences permettent d’échafauder des hypothèses mais aussi en aval pour tester et tenter de réfuter la théorie. 4. Le préjugé est enraciné dans l’affection et dans l’inconscient • Annexe A Inconscient : partie du psychisme humain qui est caché à la conscience et à laquelle on n’a jamais d’accès direct. Partie composée de pulsions, de plaisirs refoulés. Problèmes :   * Quelles connaissances peut-on en avoir ? connaissances indirectes, interprétatives. De quelle objectivité ?   * Quelle valeur scientifique pour cette hypothèse ?   * Quelles libertés pour l’Homme ? => Quelle responsabilité ? 3 « blessures narcissiques » :   * Copernic : la Terre n’est pas le centre de l’univers mais une planète parmi d’autres.   * Darwin : l’Homme n’a pas été créé par Dieu mais c’est un animal issu d’une évolution.   * Freud : « le moi n’est pas maître en sa propre maison ». Double perspective :   * Théorique : fonder une nouvelle discipline scientifique : psychanalyse.   * Pratique : soigner les maladies mentales grâce à des méthodes adaptées. 5. L’utilité des illusions NIETZSCHE, Par delà Bien et Mal  Quelle est la valeur de la vérité ? NIETZSCHE, Par delà Bien et Mal, §34 (1886)« C’est un simple préjugé moral que de croire que la vérité vaille mieux que l’apparence ; c’est même l’hypothèse la plus mal fondée qui soit. Il faut bien l’avouer, la vie ne serait pas possible sans toute une perspective d’estimations et d’apparences, et si l’on voulait supprimer totalement « le monde apparent », […] à supposer que ce fût possible, il ne resterait rien non plus de votre « vérité ». En effet, qu’est-ce qui nous force à admettre qu’il y ait opposition radicale entre le vrai et le faux ? Ne suffit-il pas d’admettre des degrés dans l’apparence comme qui dirait des nuances et des harmonies plus ou moins claires, plus ou moins sombres, des valeurs diverses, pour user du langage des peintres ? » Le développement des sciences depuis le XVIIème a réduit toute valeur à la valeur scientifique, en oubliant totalement la valeur vitale. Il y a eu surestimation de la vérité au dépend de l’apparence et de l’illusion. Critique de PLATON : sa dévalorisation du monde sensible au profit d’un monde intelligible que Nietzsche refuse. Pour lui, il n’y a pas « d’arrières-mondes » où se cacherait la vérité ; il n’y a que ce monde ci avec ses apparences et ses illusions. Par là, il critique la religion et l’idée d’une vie après la mort. Il faut accepter des nuances parmi les illusions et les apparences qui ne sont pas toutes néfastes. Les illusions sont absolument nécessaires pour la vie : elles sont « une atmosphère protectrice ». Transition : Faut-il alors renoncer à lutter contre le préjugé ? Ne peut-on donner à la preuve la force du préjugé ? III. Comment faire en sorte que la preuve puisse malgré tout lutter contre le préjugé ? 1. Reconnaître son ignorance et chercher la vérité dans le dialogue d’autrui  Socrate : humilité intellectuelle  Platon, Ménon : esclave sans éducation parvient à résoudre le problème de la duplication du carré grâce au dialogue avec Socrate qui le débarrasse de ses préjugés et utilise une pédagogie adaptée. Il a ainsi trouvé par lui-même la vérité grâce au dialogue => MAÏEUTIQUE : art d’accoucher les esprits. 2. Accepter de mettre en doute ce qu’on avait admis sans examen  cf. FOC : Origine / Fondement  cf. Ouverture d’année : DESCARTES, Méditations métaphysiques, I 3. Adapter la forme de la preuve à la personne qui la reçoit  cf. FOC : Convaincre / Persuader  PASCAL, De l’art de persuader   PASCAL, De l’art de persuader « Il y a deux entrées par où les opinions sont reçues dans l’âme, qui sont ses deux principales puissances, l’entendement et la volonté. La plus naturelle est celle de l’entendement, car on ne devrait jamais consentir qu’aux vérités démontrées ; mais la plus ordinaire, quoique contre nature, est celle de la volonté ; car tout ce qu’il y a d’hommes sont presque toujours emportés à croire non pas par la preuve, mais par l’agrément. […] Nous ne croyons presque que ce qui nous plaît. […] C’est alors qu’il se fait un balancement douteux entre la vérité et la volupté, et que la connaissance de l’une et le sentiment de l’autre font un combat dont le succès est bien incertain. […] Il paraît de là que, quoi que ce soit qu’on veuille persuader, il faut avoir égard à la personne à qui on en veut, quelles choses il aime. […] De sorte que l’art de persuader consiste autant en celui d’agréer qu’en celui de convaincre, tant les hommes se gouvernent plus par caprice que par raison ! » Le pari de PASCAL : 4. Prendre conscience de ses déterminations inconscients et s’en libérer FREUD & RICŒUR  Cure psychanalytique : parole (catharsis)Le soi n’est pas transparent à lui-même (opacité originaire) => tâche d’être soi-même nécessitant éclaircissement et unification. Rôle d’autrui : médiateur avec moi-même permet de comprendre origine de nos préjugés grâce à l’interprétation. Conclusion (Que vaut la preuve contre le préjugé ?) : Si le préjugé résiste à la force rationnelle de la preuve, c’est parce qu’il se situe sur un autre terrain, malgré la ruse qui consiste à le présenter sous une apparence rationnelle : le préjugé puise sa force dans la sensibilité, l’imagination, la culture et plus généralement la psychologie humaine. Se contenter d’opposer à la force de persuasion du préjugé, la force de conviction rationnelle de la preuve, c’est se condamner à l’échec, dans la mesure où un argument rationnel ne pourra jamais être par lui-même efficace contre un argument passionnel ou un sentiment. Pour être efficace contre le préjugé, la preuve doit donc elle aussi jouer de persuasion et toucher l’homme là où le préjugé est ancré. Néanmoins, il faut noter que l’efficacité de la preuve demeure limitée, car certains préjugés sont trop profondément ancrés dans la culture des individus ou des peuples, et ils semblent indéracinables. Mais ceci n’enlève rien au devoir que nous avons de les dénoncer, dans la mesure où le préjugé est le signe d’un affaiblissement de la réflexion et le risque d’une propagation de la violence. « L’homme, seul être raisonnable, est le seul aussi qui puisse suspendre son existence à des choses déraisonnables » (Bergson).

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