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VERLAINE: LES ROMANCES SANS PAROLES.

Publié le 25/06/2011

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verlaine

 

La guerre et, plus encore, la Commune avaient dispersé le groupe parnassien. Leconte de Lisle et ses fidèles se déchaînaient contre le parti vaincu. Mérat, Lepelletier, Blémont, Valade s'indignaient de l'abominable répression. Le schisme était définitif et quelques gestes pacifiques ne doivent pas faire illusion. L'École parnassienne, tronquée, privée de ses meilleurs éléments, ne fait plus que se survivre. Pour ceux qui avaient partagé les espérances de la révolution parisienne, ou qui du moins réprouvaient les excès de la réaction, il s'agissait de se regrouper. Dès la première moitié d'août 1871, ils reprirent les dîners des Vilains bonshommes. Verlaine en fut, naturellement. Il y retrouva ses amis d'avant-guerre et quelques nouveaux venus, Jean Aicard, Ernest d'Hervilly, Pierre Elzéar. Au mois d'avril 1872, Émile Blémont fonda une revue, la Renaissance littéraire et artistique, avec Jean Aicard, Elzéar et Valade. Verlaine fut également parmi les collaborateurs.

 

verlaine

« volonté de faire de la poésie une pure musique.

Le titre même est riche de sens.

On a dit que Rimbaud avait écritune Ariette oubliée : c'est une erreur.

La vérité, c'est que Rimbaud goûtait fort les libretti et la musique de Favart.

Ilen avait, de Charleville, envoyé un volume à Verlaine, et les Mauté relevèrent, parmi les objets abandonnés par leurgendre, a un recueil de pièces (xviiie siècle), entr'autres Ninette à la Cour, par Favart ».

Verlaine, qui aimait lesvieilles tapisseries, la peinture du xviiie siècle, même dans ses grâces un peu fades et surannées, Verlaine devaitgoûter la musique de Favart.

Il se la fit déchiffrer.

Deux vers, dans une ariette de la comédie, deux vers sansbeauté propre, mais qui l'émurent, lui ont inspiré la première au moins de ses Ariettes.Aucun recueil peut-être de Verlaine ne satisfait aussi pleinement à l'exigence qu'énoncera un jour Mallarmé, que ledevoir du poète est de suggérer.

A la différence de la Bonne Chanson, les Ariettes ne disent jamais, mais par desimages, des sonorités et des rythmes elles nous font vivre la grande peine du poète abandonné.

Prenons le seulexemple de la première.

L'état d'âme que Verlaine veut suggérer, c'est une tristesse à peu près silencieuse et qui negémit que tout bas.

Une tristesse qui serait presque douce, tant il s'y mêle d'images tendres.

Quelque chose depoignant pourtant, car l'homme trahi se sent très seul et très faible.

Et voilà que des images jaillissent : une plaineensommeillée, des arbres grêles qui frissonnent sous le vent aigre, le cri doux de l'herbe agitée.

Un paysagegrelottant et qui étreint le coeur.

Une fatigue, une langueur pleines d'amour.

Ces images, Verlaine ne les construitpas, et parce qu'il n'ose pas encore supprimer le verbe dans ses phrases, il emploie avec insistance le plusinsignifiant, le plus incolore, le plus inactif de tous les verbes, le verbe être.

La langue s'allège et se dépouille.

Ellefait fi des exigences de la grammaire pour aboutir à l'extrême humilité, à la pauvreté la plus proche du silence.

«C'est tous les frissons des bois...

», écrit Verlaine, et l'herbe agitée expire son cri doux.Les sonorités sont choisies pour donner l'impression d'une langueur crispée.

A la rime surtout : dans chaque strophequatre vers à rimes féminines, et deux seulement à rimes masculines.

A l'intérieur du vers, des insistances, les ifrissonnants de la première strophe, l'u prolongé de ramures annonçant les rimes de la strophe suivante.

Desallitérations qui relèvent d'une note plus gaie le paysage triste, O le frêle et frais murmure..., ou au contraire des répétitions accablées : Les roulis sourd des cailloux. Enfin le vers est de sept syllabes.

Verlaine en 1872 a pleinement conscience de la valeur musicale et suggestive desmètres impairs.

Il sait que pour exprimer les humbles, les pauvres misères de sa vie, ils ont un tout autre pouvoir queles octosyllabes et les alexandrins qui dominent dans la poésie contemporaine.L'Escarpolette pousse à l'extrême la même conception de l'oeuvre poétique.

Elle est pour Verlaine le symbole de savie, ballotée entre Mathilde et Rimbaud, entre la pureté calme et l'aventure.

Ce mouvement lui donne écoeurementet vertige.

Il voit trouble.

Dans son âme en délire il entend non plus une voix nette et pure, mais l'ariette de toutesles lyres, la bonne et la mauvaise chanson.

Il voudrait choisir, se fixer.

Il ne le peut pas, et se sent si las qu'ilvoudrait mourir.

Mourir loin de Mathilde et de Rimbaud.

Mourir seul.Plus que dans la première des Ariettes, Verlaine s'attache ici à des « correspondances » qui mêlent et confondentles impressions.

Les voix anciennes ont un contour, et les lueurs qui annoncent l'avenir sont musiciennes.

Cet artsavant n'est plus ici jeu gratuit, comme dans les Fêtes Galantes.

Il traduit la confusion où Verlaine alors s'enfonce.Toutes les rimes sont féminines, et la musique des mots est plus insistante, trahit plus de subtiles intentions quejamais.Rimes féminines et mètres impairs sont les deux nettes caractéristiques des Ariettes oubliées.

Dans cet ensemble deneuf pièces, on trouve des vers de cinq, de sept, de neuf et de onze syllabes.

Quatre d'entre elles, presque lamoitié, ont des rimes uniquement féminines, Il en est une autre qui présente une particularité curieuse.

Verlaines'amuse à faire rimer une syllabe masculine avec une syllabe féminine, Jean de Nivelle avec Michel, robe bleue etpalsembleu.

Il le fait avec une intention qui se discerne vite.

Cette pièce, différente des autres par le sujet, évoqueles personnages des légendes et des chansons populaires, la mère Michel et Lustucru, Jean de Nivelle et Jean desBas-Bleus.

Elle est la seule qui subsiste d'une série qui devait, dans les projets du poète en novembre 1872, formerl'une des quatre parties du recueil et qui devait s'intituler Nuit falote.

A noter que Verlaine avait pu lire dans lesStalactites de Banville une Elégie où confus rimait avec touffues et rochers avec cachées.Le 7 juillet 1872, Verlaine a quitté Mathilde.

Il a franchi la frontière belge près de Bouillon.

Il se dirige vers Bruxelles.Il ne quittera la Belgique que le 7 septembre.

Ces deux mois lui ont inspiré la série des Paysages belges.

Ilsrappellent les étapes de sa randonnée, Walcourt, Charleroi, Bruxelles, sans oublier une excursion à Malines.N'attendons pas de ces poèmes une confidence sur son état d'esprit.

Il s'occupe uniquement à des notationspittoresques sur le capitale belge et sur les campagnes qu'il traverse.

Nul ne soupçonnerait à, le lire qu'il est en trainde vivre une tragique aventure où se jouent son amour, son bonheur.

Ces courtes pièces, simplement pittoresques,méritent une extrême attention.

Verlaine y essaie une forme d'art très neuve, un style de la description alorsinconnu.On a dit que certaines de ces pièces constituaient « une poésie très impressionniste au sens que ce mot allait avoirquinze ans après en peinture ».

Le rapport est sans aucun doute beaucoup plus étroit et précis..

C'est entre 1870et 1874 que la révolution impressionniste s'est faite.

C'est en 1869-187o que Manet change sa manière.

En 187oMonet et Pissarro font le voyage de Londres.

En 1871 Cézanne travaille à l'Estaque.

Successivement Degas, Renoir,Fantin-Latour entrent en scène.

En 1874 aura lieu la première exposition du groupe : une toile de Monet,. »

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