Devoir de Philosophie

Les vingt et une conditions d'adhésion à la IIIe Internationale

Publié le 04/04/2013

Extrait du document

 (1920)

Le 2 mars 1919 est formée à Moscou la IIIe Internationale, sous le nom de Komintern. Présidée par Zinoviev, elle prophétise la victoire du communisme dans toute l'Europe. Pendant l'été 1920, le IIe Congrès de l'Internationale adopte les 21 conditions, rédigées par Lénine, que doit accepter tout parti candidat à l'adhésion. Chaque parti membre se transforme alors en Parti communiste, lié à l'URSS et conçu comme un détachement d'une armée internationale destinée à prendre le pouvoir par tous les moyens. L'acceptation des 21 conditions entraîne la scission des partis sociaux-démocrates entre partis socialistes hostiles au Komintern d'un côté et partis communistes membres du Komintern de l'autre, comme c’est le cas en France au congrès de Tours (décembre 1920).

Les vingt et une conditions d’adhésion à la IIIe Internationale (1920)

 

I Toute la propagande et l’agitation doivent avoir un caractère réellement communiste et être conformes au programme et aux décisions de la IIIe Internationale. Tous les organes de presse du parti doivent être rédigés par des communistes de confiance, qui ont prouvé leur dévouement à la cause du prolétariat. On ne doit pas parler de dictature du prolétariat comme d’une formule banale ; mais elle doit être propagée de telle manière que sa nécessité soit démontrée aux simples ouvriers, ouvrières, soldats et paysans au moyen de faits de la vie quotidienne qui doivent être systématiquement observés par notre presse et exploités jour par jour. La presse périodique et autre et toutes les librairies du parti doivent être entièrement soumises au comité du parti, sans considérer si, à ce moment-là, le parti est dans son ensemble légal ou illégal. Il est inadmissible que les libraires abusent de leur autonomie et mènent une politique qui ne correspond pas absolument à celle du parti. Dans les colonnes de la presse, dans les réunions populaires, dans les syndicats, les coopératives, partout où les adhérents à la IIIe Internationale ont accès, il est nécessaire de flétrir impitoyablement non seulement la bourgeoisie, mais aussi ses complices et les réformistes de toutes nuances. II Toute organisation qui veut adhérer à la IIIe Internationale communiste doit régulièrement et méthodiquement éloigner de tous les postes plus ou moins responsables du mouvement ouvrier (organisations du parti, rédactions, syndicats, groupes parlementaires, coopératives, administrations communales) les réformistes et les centristes et les remplacer par des communistes éprouvés sans s’arrêter au fait que, au début surtout, des opportunistes capables seront remplacés par de simples ouvriers. III Presque dans tous les pays d’Europe et d’Amérique, la lutte de classes entre dans la phase de la lutte civile. Dans ces circonstances, les communistes ne peuvent avoir aucune confiance dans la légalité bourgeoise. Ils sont tenus de créer partout un ensemble parallèle d’organisations illégales qui, au moment décisif, aideront le parti à remplir ses devoirs vis-à-vis de la révolution. Dans tous les pays où les communistes, par suite de l’état de siège et des lois d’exception, sont dans l’impossibilité d’exécuter légalement leur travail, il est nécessaire de combiner sans conditions l’activité légale avec l’illégale. IV Le devoir de répandre les idées communistes implique l’obligation particulière de mener une propagande vigoureuse et systématique dans l’armée. Quand cette agitation est ligotée par des lois d’exception, il faut la mener illégalement. Le renoncement à ce travail équivaudrait à une trahison envers le devoir révolutionnaire et serait incompatible avec l’adhésion à la IIIe Internationale. V Une agitation systématique et méthodique est nécessaire dans les campagnes. La classe ouvrière ne peut pas vaincre si elle n’a pas les prolétaires des champs et au moins une partie des plus pauvres paysans derrière elle et si, par sa politique, elle ne s’est pas assuré la neutralité d’une partie de la population rurale. Le travail communiste dans les campagnes est actuellement d’une importance considérable. Il doit être principalement mené avec l’aide des ouvriers révolutionnaires communistes de la ville et de la campagne qui sont en rapport avec la population rurale. Renoncer à ce travail ou le confier à des mains douteuses mi-réformistes serait renoncer à la révolution prolétarienne. VI Tout parti qui désire appartenir à la IIIe Internationale est tenu de démasquer non seulement le franc social-patriotisme, mais aussi la malhonnêteté et l’hypocrisie du social-pacifisme ; il doit montrer systématiquement aux ouvriers que, sans renversement révolutionnaire du capitalisme aux ouvriers, aucune cour d’arbitrage international, aucun accord sur la limitation des armements, aucun renouvellement démocratique de l’union des peuples ne sera capable d’empêcher de nouvelles guerres impérialistes. VII Les partis qui désirent appartenir à la IIIe Internationale sont tenus de reconnaître la rupture complète avec le réformisme et la politique du centre et de propager cette rupture dans les plus larges cercles d’adhérents. Une politique communiste ferme n’est pas possible autrement. L’Internationale communiste exige, impérieusement et sans conditions, l’accomplissement de cette rupture dans le délai le plus court. L’Internationale communiste ne peut s’accommoder de ce que des opportunistes notoires comme ceux qui sont représentés actuellement par Turati, Kautsky, Hilderding, Hillquit, Longuet, Macdonald, Modigliani et autres, puissent avoir le droit de se dire affiliés à la IIIe Internationale. VIII Dans les questions des colonies et des nations opprimées, il est nécessaire qu’une attitude particulièrement marquée et claire soit prise par les partis des pays dont la bourgeoisie est en possession des colonies et opprime d’autres pays. Tout parti qui désire appartenir à la IIIe Internationale est tenu de démasquer les manigances de ses impérialistes dans ses colonies, d’appuyer non seulement par des paroles, mais par des faits, les mouvements libérateurs des colonies, d’exiger l’expulsion immédiate de ses impérialistes nationaux hors de ses colonies, de cultiver dans le cœur des ouvriers de son pays les relations vraiment fraternelles, avec les populations ouvrières des colonies, et dans les troupes de son pays, une agitation systématique contre toute oppression des peuples coloniaux. IX Tout parti qui désire appartenir à la IIIe Internationale communiste doit, systématiquement, avec persévérance, déployer une activité communiste au sein des syndicats, des conseils d’ouvriers et d’usines, des coopératives et autres organisations de masses d’ouvriers. Il est nécessaire d’organiser, au sein de ces organisations, des cellules communistes qui, par un travail constant et persévérant, devront gagner les syndicats, les conseils d’ouvriers d’usines, les coopératives et les autres organisations de masse d’ouvriers, à la cause du communisme. Au cours de leur travail quotidien, les cellules sont tenues de démasquer partout la trahison des social-patriotes et l’irrésolution du centre. Les cellules communistes doivent être entièrement subordonnées à l’ensemble du parti. X Tout parti appartenant à l’Internationale communiste est obligé de mener une lutte opiniâtre contre l’Internationale d’Amsterdam des unions syndicales jaunes. Il doit propager le plus énergiquement possible, parmi les ouvriers organisés syndicalement, la nécessité de la rupture avec l’Internationale jaune d’Amsterdam. Par tous les moyens, il doit appuyer la naissante union internationale des syndicats rouges affiliés à l’Internationale communiste. XI Les partis qui veulent appartenir à la IIIe Internationale sont tenus de soumettre à une révision la composition des groupes parlementaires, d’en expulser les éléments douteux, de soumettre ces fractions, pas seulement en paroles, mais en fait, aux conseils généraux des partis, en même temps qu’il sera exigé de tout parlementaire communiste qu’il puisse soumettre toute son activité aux intérêts d’une propagande et d’une agitation vraiment révolutionnaire. XII Les partis appartenant à l’Internationale communiste doivent être constitués sur la base du centralisme démocratique. Dans l’époque actuelle de guerre civile aiguë, le parti communiste ne sera en état de remplir son devoir que s’il est organisé de la manière la plus centraliste possible, si une discipline de fer règne en lui, et si le centre du parti chargé par la confiance de ses membres de toute la puissance est pourvu de l’autorité et des pouvoirs les plus étendus. XIII Les partis communistes des pays dans lesquels les communistes effectuent leur travail légalement doivent de temps en temps opérer des épurations (par le remplacement des membres) de la composition de leurs organisations et épurer systématiquement le parti des éléments petit-bourgeois qui s’y glissent. XIV Tout parti qui désire appartenir à la IIIe Internationale communiste est obligé de porter, sans répit, assistance à toute république soviétique dans sa lutte contre les forces contre-révolutionnaires. Les partis communistes doivent mener une propagande nette pour empêcher le transport des munitions de guerre aux ennemis de la république des Soviets. De plus, par tous les moyens, légalement ou illégalement, ils doivent faire de la propagande parmi les troupes expédiées pour étrangler les républiques ouvrières. XV Les partis qui ont encore gardé, jusqu’à présent, leur vieux programme socialiste, sont maintenant obligés de changer ce programme dans le plus court délai possible et, en rapport avec les conditions particulières de chaque pays, d’élaborer un nouveau rapport communiste dans l’esprit des décisions de l’Internationale communiste. Régulièrement, le programme de tout parti appartenant à l’Internationale communiste doit être ratifié par le Congrès ordinaire de l’Internationale communiste ou par son comité exécutif. Dans le cas de non-ratification du programme de l’un ou de l’autre parti par le comité exécutif de l’Internationale communiste, le parti intéressé a le droit d’en appeler au congrès de l’Internationale communiste. XVI Toutes les décisions du congrès de l’Internationale communiste, de même que les décisions de son comité exécutif, engagent tous les partis appartenant à l’Internationale communiste. L’internationale communiste agissant dans les conditions de la guerre civile la plus aiguë, doit être plus centralisée que ne fut la IIe Internationale. Par contre, il va de soi que l’Internationale communiste et son comité exécutif, dans leur action générale, doivent tenir compte des conditions diverses dans lesquelles les différents partis ont à lutter et ne doivent prendre de décisions d’une portée générale que dans les questions où de telles décisions sont possibles. XVII En connexion avec ce qui précède, les partis qui veulent appartenir à l’Internationale communiste doivent changer leur dénomination. Tout parti qui veut adhérer à l’Internationale communiste doit porter le nom de parti communiste du pays (section de la IIIe Internationale). La dénomination n’est pas une simple question de forme ; mais c’est, dans une grande mesure, une question politique de grande importance. L’Internationale communiste déclare la guerre à tout le monde bourgeois et à tous les partis socialistes jaunes. Il est nécessaire qu’à tout simple ouvrier apparaisse clairement la différence qu’il y a entre les partis communistes et les vieux partis officiels social-démocratiques et socialistes qui ont trahi la bannière de la classe ouvrière. XVIII Tous les grands organes de presse des partis de tous les pays sont obligés de publier tous les documents officiels importants du comité exécutif de l’Internationale communiste. XIX Tous les partis qui appartiennent à l’Internationale communiste ou ont adressé une demande d’adhésion sont obligés de convoquer, aussi vite que possible, au plus tard quatre mois après le deuxième congrès communiste, un congrès extraordinaire pour examiner toutes ces questions. À cette fin, les centrales doivent veiller à ce que les décisions du deuxième congrès de l’Internationale communiste soient connues de toutes les organisations locales. XX Les partis qui peuvent dès maintenant entrer dans le IIIe Internationale, mais n’ont pas encore, jusqu’à présent, changé radicalement leur tactique, doivent, avant leur entrée dans la IIIe Internationale, veiller à ce que les deux tiers au moins des membres de leurs comités centraux et de toutes les importantes institutions centrales, soient composés de camarades qui, avant le deuxième congrès de l’Internationale communiste, se sont déjà prononcés nettement et publiquement en faveur de l’entrée du parti dans la IIIe Internationale. Des exceptions seront permises avec l’autorisation de l’exécutif de la IIIe Internationale. L’exécutif de l’Internationale communiste a le droit légalement de faire des exceptions en faveur des représentants de la tendance centriste désignés dans le paragraphe 7. XXI Les membres des partis qui rejettent en principe les conditions posées par l’Internationale communiste doivent être exclus du parti. Cette disposition s’applique notamment aux délégués des congrès extraordinaires.

 

 

Source : Lefranc (Georges), le Mouvement socialiste sous la Troisième République, Paris, Payot, 1963.

 

Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

Liens utiles