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BOILEAU Nicolas, dit Boileau-Despréaux : sa vie et son oeuvre

Publié le 18/11/2018

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BOILEAU Nicolas, dit Boileau-Despréaux (1636-1711). Malgré une jeunesse frondeuse et peu disciplinée, Nicolas Boileau obtint de son vivant le certificat déjugé suprême en matière de goût littéraire. Ses choix, ses préjugés, ses exclusives, ses admirations et ses incompréhensions — souvent sur les mêmes objets —, reflets des positions esthétiques triomphantes sous Louis XIV, furent considérés comme intangibles et présidèrent à la
 
constitution de l’image pédagogique, explicitement bourgeoise, de notre littérature dite « classique » au cours du xixe siècle. Aujourd’hui, longtemps après la révolte romantique, après les redécouvertes de la littérature préclassique et du baroque, nous tendons à rejeter la loi dont Boileau fut le greffier dans l’insignifiance, sinon dans l’abjection objective des « poubelles de l’histoire ». La loi, mais pas forcément ses législateurs.
 
Une carrière littéraire réussie
 
Né le 1er novembre 1636, quinzième enfant d’un « commis au greffe de la cour du parlement », Boileau voulut accréditer plus tard une aristocratie ancienne. En fait, Gilles Boileau, le père, n’est qu’un bourgeois de robe enrichi par son travail. A sa mort (1657), Nicolas hérite d’un revenu qui le met en partie à l'abri du besoin. Il avait perdu sa mère, seconde épouse du greffier, un an et demi après sa naissance. Sa petite enfance fut pénible, triste, souffreteuse. L’enfant était atteint de la pierre, et une opération malencontreuse le priva « des dons de la nature ». On ne saurait surestimer l’effet de cette terrible disgrâce sur la vision du monde, misogyne, janséniste, amère, moraliste, de l’écrivain; ni sur la force des sublimations dans sa vie comme dans son œuvre. L'année littéraire (1756, 3e volume) attribue l’impuissance de Despréaux à une bataille enfantine avec un dindon cas-trateur. Helvétius (De l'esprit, III, chap. I, note 1) voyait dans l’anecdote la cause de « l’aversion qu’il eut toujours contre les jésuites, qui [...] ont apporté [les dindons] en France ». On évitera ici, malgré son charme, cette méthode critique.
 
Après d'excellentes études au collège d’Harcourt, Boileau s’initia au droit de 1652 à 1656; admis avocat, il n’exerça guère. La théologie ne l’avait pas plus retenu. Dès qu’il hérite, devenu clerc tonsuré, il balance entre l’Église et la mondanité littéraire, où il se laisse entraîner par ses frères, Jérôme, Pierre (Puymorin), Jacques et surtout Gilles, critique redouté, protégé de Chapelain, qui l’impose à F Académie en 1659. Voilà Despréaux (ce nom le distingue) engagé dans le jeu des coteries, aux côtés de l’abbé Cotin, de Furetière, dans les cercles puristes et antiprécieux. Antoine Adam a finement analysé ces milieux et leurs débats : le primat cartésien de la raison, la tradition malherbienne en poésie, l’hostilité à l’égard du romanesque, de la galanterie, des précieux, la dénonciation du culte de l’argent ont pour finalité assumée une morale. « Un sens vif des devoirs de l’écrivain, de sa dignité et de sa vocation..., une exigence de pureté et d’exactitude dans l’expression, voilà ce que Despréaux a surtout retenu de la fréquentation de ses amis » (A. Adam). Derrière ce noble programme, une idéologie montante de l’efficacité et de sa justification morale, un goût personnel irrépressible pour l’ordre, les classifications claires, les modèles (les Anciens), une profonde angoisse devant les risques de la liberté, incarnée par le dynamisme dangereux du baroque, qu’il repère dans le foisonnement du xvie siècle, dans le burlesque, dans le « mauvais goût » galant et précieux.
 
Les Satires que Boileau compose alors sont le fruit d’un faisceau d’influences : celles de Régnier; celle, immédiate et difficilement appréciable, de Furetière, ami de son frère Gilles; celle, rassurante, des Anciens. Les six premières Satires, surtout dans leur forme initiale, que conserve l’édition pirate de 1666 — immédiatement dénoncée par l’auteur comme « monstrueuse » —, manifestaient une verve, une vitalité rares dans la littérature critique de l’époque, et surtout une maîtrise technique exceptionnelle. Ces pièces se transmettaient oralement, de variante en allusion, et suffirent à établir la notoriété de leur auteur. Boileau fut dès lors caractérisé comme un écrivain de premier plan, comme un partisan de Molière et de Racine, comme un ennemi impitoyable de la poésie à la mode et, s’agissant de ridiculiser ses ennemis, comme un redoutable farceur. Cette image pouvait être fatale à sa carrière; il s’employa dès lors à la corriger.
 
A la fin des années 1660, le satiriste, le mauvais esprit, le pilier de cabaret, l’auteur — ou le collaborateur — de la parodie du Cid dirigée contre le dispensateur des pensions littéraires (le Chapelain décoiffé, 1665) est un personnage à faire oublier. Les écrivains classiques, bourgeois et aristocrates mêlés, se rallient à Colbert, délégué de la classe montante dans l’élaboration de la culture louis-quatorzienne. C’est, pour Boileau, qui se veut l’émule d’Horace, l’heure des Épîtres. La première (« Au Roi », 1668) manifeste un louable désir de moraliser les relations entre l’écrivan et le pouvoir, par la dénonciation de la guerre. Mais, otage volontaire, Boileau apportera rapidement sa caution d’homme intègre à la politique de conquête (Épître IV). Puis les échos vulgarisés de Descartes, déjà sensibles dans l'Arrêt burlesque de 1671, qui brocardait la faculté de théologie et son aristotélisme, se font entendre dans l’Épître III, dédiée au grand Arnauld, idole intellectuelle et morale de Boileau.

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« et de Racine, comme un ennemi impitoyable de la poésie à la mode et.

s'agissant de ridiculiser ses ennemis, comme un redoutable farceur.

Cette image pouvait être fatale à sa carrière; il s'employa dès lors à la corriger.

A la fin des années 1660, le satiriste, le mauvais esprit, le pilier de cabaret, l'auteur- ou le collaborateur - de la parodie du Cid dirigée contre le dispensateur des pensions littéraires (le Chapelain décoiffé, 1665) est un personnage à faire oublier.

Les écrivains classiques, bourgeois et aristocrates mêlés, se rallient à Colbert, délégué de la classe montante dans 1' élaboration de la culture louis-quatorzienne.

C'est, pour Boileau, qui se veut l'émule d'Horace, l'heure des Épîtres.

La première («Au Roi », 1668) manifeste un louable désir de morali­ ser les relations entre l'écrivan et le pouvoir, par la dénonciation de la guerre.

Mais, otage volontaire, Boi­ leau apportera rapidement sa caution d'homme intègre à la politique de conquête (Épître IV).

Puis les échos vulga­ risés de Descartes, déjà sensibles dans l'Arrêt burlesque de 1671, qui brocardait la faculté de théologie et son aristotélisme, se font entendre dans l'É pîtr e 111, dédiée au grand Arnauld, idole intellectuelle et morale de Boileau.

A cette époque, Despréaux est au plus vif de son activité créatrice.

Il termine l'art poétique (1674), dont les vers circulaient depuis deux ans déjà, à la grande admiration du Tout-Paris littéraire.

JI achève la traduc­ tion du Traité du sublime de Long in, qui fonde et justifie ses idées (assez peu) personnelles, et utilise peut-être un travail antérieur de son frère Gilles, mort en 1669, et avec qui Nicolas s'était brouillé [voir BoiLEAU Gilles].

Pour balancer ces importants textes théoriques, Boi­ leau met la dernière main aux quatre premiers chants du Lutrin -1669?-1674 -,jeu rhétorique qui dévoile les possibilités ludiques du classement en genres et en tons.

Couronnant sa réussite sociale, il parvient enfin à se faire présenter au «plus grand des monarques », grâce à de puissantes protections (Mme de Montespan, Mme Scar­ ron).

Il est immédiatement pensionné.

Il édite alors un volume d'Œuvres diverses du sieur D•••, indiquant par là que l'ensemble de ses textes, sous une forme défini­ tive, est digne d'ê{!e rassemblé.

De fait, les écrits posté­ rieurs, à part trois Epîtres et les Satires tardives, n'appor­ teront rien à S> ibid., III).

C'est précisément pour atteindre lOU! le réel, pour exprimer l'excès et la passion que le créateur en langage doit s'adonner avec obstination au travail formel et respecter les lois de chaque genre.

L'art classique selon Despréaux est d'abord un art classifica­ teur, c'est-à-dire définitoire : Boileau croit au concept, au «sens>> avant toute chose.

Mais ses classifications impliquent la perception du désordre qu'il aime à évo­ quer (la satire des Embarras de Paris, le Lutrin); ses disciplines, une reconnaissance de l'inspiration toute­ puissante; sa répression, une violence sous-jacente.

Ajoutons qu'une lecture moderne affadit et déforme bien des formulations (. »

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