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La Bruyère, précurseur des « philosophes des Lumières » ?

Publié le 08/08/2014

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On appelle « philosophes des Lumières « les écrivains comme Montesquieu, Voltaire, Diderot ou Rousseau qui, par leurs écrits, ont porté atteinte au pouvoir royal. La Bruyère, par certaines de ses remarques, semble un précurseur de ces philosophes. Qu'en est-il?

« particulier».

II rêve d'une société où chacun reste à sa place, où la fonction répond à la con­ dition.

Quand il écrit: « [les grands] ont le goût de dominer et de commander, et [les petits] sentent du plaisir et même de la vanité à les servir et à leur obéir» (DG, 5), il n'entre qu'une ironie de surface dans sa réflexion.

La remarque 28 de « Du souverain ou de la république », qui critique hardiment l'absolutisme, renvoie à la conception traditionnelle du pouvoir tel que le définissaient les théoriciens politiques avant Louis XIV.

De même, quand La Bruyère évoque ces« citoyens» qui s'élèvent tandis que les grands « négligent de rien connaître » (DG, 24), il souligne moins l'accession au pouvoir de ces bourgeois méritants que la déchéance des grands.

L'auteur des Caractères est plus sensible à la crise des rouages traditionnels de la société de son temps qu'aux signes précurseurs d'une situation nouvelle.

Une orientation morale La perspective de La Bruyère n'est pas politique mais morale.

Quand dans le chapitre VI(« Des biens de fortune», 26), il oppose un jeune ecclésiastique seigneur« d'une abbaye et de dix autre bénéfices» et d'innombrables familles« qui ne se chauffent point pendant l'hiver[ ...

] et qui souvent manquent de pain», sa conclusion est:« cela ne prouve-t-il pas clairement un avenir? »Or, cet« avenir» ne désigne pas la révolte ou la nécessité d'un changement; elle renvoie au précepte évangélique « les premiers seront les derniers »et jus­ tifie la misère par le bonheur dans l'au-delà.

Dans les chapitres VIII et IX aussi, laper­ spective n'est pas un changement concret mais une nécessaire conversion des hommes à la «médiocrité», à l'absence d'ambition.

Ill.

Des point de vue nouveaux Un nouveau regard sur la société La Bruyère manifeste pour les conditions sociales un intérêt qui n'existe pas dans les ouvrages moraux avant lui.

Il est sensible aux effets que les mécanismes sociaux et économiques ont sur la société: montée de la bourgeoisie, importance croissante de l'ar­ gent, crise de la hiérarchie.

L'homme n'est pas saisi dans sa généralité mais dans une situa­ tion particulière, emblématique de son statut social (voir, par exemple, DC, 68).

L'émergence du citoyen Chacun des groupes sociaux est jugé en fonction de son utilité.

Les nobles sont définis par leur fonction militaire (DG, 40) et condamnés pour leur oisiveté (DG, 24, 27, 54); les magistrats sont vus comme un rouage de la société (DG, 40).

L' « emploi » est considéré comme un service public (DC, 44) qui entraîne des responsabilités.

Peu à peu, le statut de citoyen émerge.

Dans les chapitres VIII et IX, le mot n'est employé qu'en DG, 24, mais dans l'ensemble des Caractères, surgit une définition du bonheur qui relève de valeurs bour­ geoises, comme dans « Du souverain ou de la république », 24, où le moraliste refuse que la gloire du souverain fasse vivre le sujet« dans l'oppression ou dans l'indigence».

Un intellectuel vertueux L'esprit de raillerie« philosophique» rend légitime l'idée de liberté intellectuelle.

Cela ne sera pas oublié par les générations ultérieures.

On note souvent une ressemblance entre cer­ tains traits de la satire de Montesquieu dans les Lettres persanes et les descriptions de « De la cour», 74.

La Bruyère crée un esprit.

Même le caractère moral de son texte annonce par certains côtés l'esprit des Lumières : c'est l'homme vertueux qui parle et l'idéal de vertu recouvre à la fois la notion morale de sagesse et la notion déjà politique d' « homme de bien » qui, au nom de la vertu, a le droit de juger la société (DG, 12).. »

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