Le récit dans Les Confessions
Publié le 23/10/2013
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Tout au long de son existence, Rousseau apparaît comme un rêveur romanesque. Lecteur passionné de romans, auteur de La Nouvelle Héloïse - le plus grand succès de librairie au xviiie siècle -, Rousseau associe dans Les Confessions la narration et la peinture du moi.
«
...
Il -LES ASPECTS DU RÉCIT
La distance entre le narrateur et le lecteur
Au long du récit autobiographique, !'écrivain sait jouer de toutes les modalités
narratives et de tous les tons.
Le « Je » initial lance un récit qui va être parsemé de
remarques signalant la première apparition et la cause de tel trait de son caractère.
La narration
de la rencontre avec le paysan accablé par des collecteurs d'impôts se
clôt par une de ces mises à distance* (« ce fut le germe d'une haine inextin
guible» p.201) qui font l'originalité des Confessions.
Elles associent un récit et un
portrait, tout en permettant une complicité entre l'auteur et son lecteur : « Mais
c'est assez de réflexions pour
un voyageur ; il est temps de reprendre ma route »
(p.94).
Parfois le procédé, loin de recentrer le récit, le fait dévier sur une autre his
toire ou un portrait pittoresque.
Romancier omniscient*, Rousseau consacre trois
pages au juge mage Simon en les annonçant avec une certaine désinvolture :
« J'aurais tort de ne pas parler de sa figure, que, sur sa qualité de magistrat, et sur le
bel esprit dont il se piquait, on n'imaginerait pas si je n'en disais rien» (p.180).
La théâtralisation
Rousseau sait aussi admirablement confondre Jean-Jacques et le narrateur
quand
il théâtralise certaines anecdotes.
L'art de la mise en scène, avec ses rebon
dissements successifs, apparaît dans la lamentable histoire
du ruban volé où rien
n'est inutile, ni la comparution de l'accusée,
ni le public, ni la présence intimidante
de Monsieur
de la Roque, ni la douceur de Marion dont les attitudes paraissent
venir d'une didascalie* de Diderot.
«On la [Marion] fit venir; l'assemblée était
nombreuse,
le comte de la Roque y était.
Elle arrive, on lui montre le ruban, je la
chargé effrontément ; elle reste interdite, se tait, me jette
un regard qui aurait
désarmé les démons et auquel mon barbare cœur résiste.
» (p.120).
L'évocation de la première rencontre avec Madame de Warens relève du même souci de ressusci
ter l'émotion par les techniques
du coup de théâtre et du suspense, ménagé par
le retardement narratif.
(Voir Fiches-œuvres, Livre Il, p.88)
La dramatisation
L'habileté du narrateur consiste à présenter souvent les événements comme les
éléments
d'un drame.
Rousseau cherche ainsi à donner une intensité profonde
aux actes et aux sentiments.
Ce souci explique pourquoi chaque moment drama
tique de la vie
de Jean-Jacques est présenté comme offrant une césure brutale dans
son existence.
Il confère donc à certains épisodes une apparence théâtrale : « Sur le
lieu-même je jurai de ne retourner jamais chez mon maître» (p.78).
La fatalité joue également une fonction
dramatique.
Les Confessions donnent
l'impression qu'un obscur dessein conspire contre la liberté de Rousseau.
La porte
de Genève se referme et Jean-Jacques frémit
« en voyant en l'air ces cornes ter
ribles, sinistre
et fatal augure du sort inévitable que ce moment commençait pour
[lui]
» (p.78).
Cette dramatisation confère une unité à un récit qui montre le héros
ballotté par
le destin.
Conclusion : La variété des modèles et des techniques romanesques offre
une prose spontanée, où le récit s'interrompt pour permettre à l'autobio
graphe
de souligner la formation et la permanence de son être.
Rousseau
superpose constamment la narration et son commentaire..
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