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Argumentaire du livre La Haine, de Gunther Anders

Publié le 02/01/2016

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Cet essai intitulé La Haine, ou La Haine à l’état d’antiquité, devait figurer dans le troisième tome de L’Obsolescence de l’homme. Anders tente de dégager une réflexion sur la place du sentiment de haine dans la destruction en cours de l’humanité. A la question de savoir si le sentiment de haine doit être requis dans une guerre ou a contrario en être totalement absent au point de nous rendre incapable d’haïr, Anders répond que la haine était essentielle sur un champ de bataille, puis est devenue inutile dans une guerre moderne et serait ce qui sauvera l’humanité. On peut distinguer dans ce texte quatre étapes successives. D’abord, du début du texte à « le cas singulier du marquis de Sade, un syndrome », Anders définit le sentiment de haine comme nous étant primordial. Ensuite, de « “Est-ce que vos sujets“ » jusqu’à « Mais l’inverse n’est pas vrai », l’entretien relève l’importance d’insuffler la haine au soldat. Puis, de « Notre entretien d’hier » jusqu’à « On ne l’eût pas cru possible », le deuxième échange démontre la fin des champs de bataille par obsolescence, due au potentiel de la technique moderne. Enfin, de « Je me souviens que dans mon enfance » jusqu’à la fin du texte, Anders nous questionne sur la fin du sentiment de haine. Anders entend donc montrer dans ce texte que l’emploi de la haine a évolué suite à l’amélioration de la technicité de la guerre. Dans un premier temps, nous verrons que le sentiment de haine nous est primordial par son omniprésence, le fait qu’il est constitutif de notre identité, puis par son unité. Nous relevons l’omniprésence de la haine par Zénon qui dit haïr la haine et surtout haïr « l’obligation de haïr » (p.31). Ainsi, la haine est un sentiment permanent. Anders reprend le « principe-ergo » de Descartes pour définir la haine comme étant « l’affirmation de soi et la constitution de soi par négation et destruction de l’autre » (p.33) : ainsi, « Je hais, donc je suis » (p.33). Il va donc plus loin que Fichte en énonçant que « le moi se pose lui-même par l’anéantissement du non-moi » (p.34). Par conséquent, Anders fonde l’ « objet intentionnel » (p.34) sur le modèle du prédateur et de la pr...

« fabrication du sentiment de haine.

Traufe soutient qu’il fait « ingurgiter » (p.43) la haine aux soldats en leur offrant une personne à combattre et à détester – un ennemi donc – car « ils aiment la haine en tant que telle, davantage qu’ils ne haïssent ceux qui en font chaque fois l’objet » (p.43) : c’est la première phase de la haine.

La deuxième arrive lorsque les soldats haïssent « réellement » (p.45) du fait qu’ils combattent : « L’appétit vient en mangeant, la haine vient en luttant » (p.45).

Donc, le soldat a besoin de se nourrir de haine : « haine et combat, s’intensifient réciproquement » (p.45). Selon Traufe, combattre « comme ça » – sans motif, sans plaisir, sans ressenti donc sans haine ou l’illusion de haine – enlèverait toute dignité au soldat.

Ainsi, Traufe fabrique la haine car le soldat en a besoin mais lui également : en effet, les soldats haïssants ont « envie » et « plaisir » à anéantir ce qui les rendent fiables (p.49). Le discours du président – « mes gens n’ont pas besoin de savoir [...] pourquoi ils haïssent ceux qu’ils combattent » (p.50) – révèle les différents stades de l’avilissement progressif du soldat dont l’ultime est la disparition du besoin de connaissance.

Pourtant, le soldat pense connaitre l’objet de sa haine : « haïssent-ils quelqu’un, ils croient également le connaitre par la haine qu’ils en ont » (p.52).

Par ailleurs, le cadavre de l’ennemi donne raison au haïssant de l’avoir haï et par conséquent tué : donc, « la prétendue haine et la prétendue connaissance s’intensifient mutuellement » (p.52). Comme nous l’avons vu, il est nécessaire de fabriquer l’illusion de haine pour que le soldat combatte convenablement.

Cependant, cela vaut pour les combats rapprochés.

Nous allons alors voir s’il en est aussi question dans la guerre moderne. Dans un troisième temps, nous aborderons la fin des champs de bataille par obsolescence due au potentiel de la technique moderne, en observant l’obsolescence de la haine, sa place future, puis les ennemis à haïr. Dans un deuxième dialogue, Pyrrhon affirme l’obsolescence de la haine par le fait que d’une part, le progrès technique permet d’agir à distance, partout et sans discrimination entre civils et militaires ; d’autre part, le soldat ne rencontre plus ses ennemis : peut-il et doit-il alors encore haïr des ennemis imaginaires et leur faire la guerre sans champ de bataille ? Le soldat n’haït plus car il ne combat plus mais « travaille » (p.64) – ses produits étant les « millions de cadavres et de déserts » (p.65).

Ainsi, la haine n’est pas une constante et dépend de « l’appareillage technique » (p.66). Après la fin des combats, Pyrrhon évoque la fin du travail par « un simple déclic » (p.71).

En effet, ce seront des humains puis des instruments qui déclencheront ceux menant à la guerre : « Les déclencheurs déclenchent le déclenchement de déclencheurs » (p.72).

Ainsi, Pyrrhon nomment ces effets « supraliminaires » (p.73) tellement ces derniers dépassent les limites du perceptible et du concevable. Pyrrhon ajoute que seule la proximité du combat rend possible la haine.

Par conséquent, ce sentiment est totalement superflu dans la guerre moderne et est insufflé au soldat par la fabrication d’ennemis de substitution : « Si vous souhaitez que vos gens combattent ou éradiquent un élément A [...] impossible à percevoir et à haïr, vous engendrez Page 1 sur 4. »

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