Qui est cannibale ?
Publié le 02/10/2013
Extrait du document
Les conquistadores s'autorisent du modèle chrétien et, plus encore, catholique, pour dénier aux Indiens leur qualité d'hommes et, donc, d'autant mieux les exploiter. Selon Montaigne et bien d'autres encore, ils n'appliquent certes pas les principes du Christ: «Aimez-vous les uns les autres«, «Aime ton prochain comme toi-même«. En fait, il n'existe qu'un faux modèle : la norme chrétienne ne constitue qu'un rempart illusoire contre la montée de l'individualisme, contre l'avidité des chercheurs d'or.
«
CORRIGÉ
L'intitulé du sujet semble faire allusion aux anthropophages
qui se nourrissent de chair humaine et brisent
un tabou fonda
mental dans les sociétés occidentales.
Mais, en fait, la tournure
interrogative fait porter la question sur l'identité du cannibale
qui semble bien faire
problème et renvoie au relativisme cultu
rel - dont, au
XVI< siècle, Montaigne se fait l'interprète dans
ses
Essais et, plus précisément encore, dans le chapitre célèbre
intitulé
«Des cannibales».
On se rappelle que Montaigne remet
en question l 'ethnocentrisme des conquistadores méprisant les
Indiens Tupi.
Nous nous demanderons donc comment ces
Occidentaux ont pu tenter de définir l'identité de leur groupe
social en opposition avec un autre groupe.
Nous verrons
qu'ils
se sont forgé une double représentation imaginaire, des Indiens
mais aussi
d'eux-mêmes.
1.
La société, entre nature et culture
1.
Le sauvage
Les conquistadores assimilent les Indiens à des sauvages -en
cela, ils obéissent à une tendance caractéristique des Occiden
taux.
En effet, les Grecs de l 'Antiquité traitaient de
« barbares»
tous ceux qui n'appartenaient pas à leur culture.
2.
Retournement de l'argument
Dans ses Essais, Montaigne montre que les conquitadores ont
traité les Indiens
comme des esclaves, les ont réduits à l'état
d'animal -Bartholomeo de Las Casas dénonce les pratiques
cruelles des Occidentaux, qui se demandaient même si les
Indiens étaient des hommes,
s'ils avaient une âme (cf.
la
controverse de Valladolid).
En fait, les Indiens peuvent manger
de
la chair humaine mais cette pratique répond à un code social
- donc entre dans un code culturel, celui de la vengeance.
Il
convient de relativiser les perspectives - d'autant que Mon
taigne se réfère
à Platon, autorité indiscutable à son époque,
pour signaler l'existence,
à l'aube des temps, d'un continent.
»
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