En quoi consiste, pour Pascal, la grandeur de l'homme ?

« 76 « n'e st qu' humaine et inutile pour le salut >>.

Par le cœur, l'homme retrouve sa nature divine.

Le roseau pensant Pascal parvient ainsi à sauver en l'ho mme une faculté, le cœur, qui lui permet l'a ccès à l'i mmatériel.

Mais il insiste aussi sur le caractère primordial de la pensée dans l'homme, pensée qu'il ne faut pas confondre avec la raison.

La raison est un usage de la pensée.

La pensée définit l'homme : « Je ne puis concevoir l'homme sans pensée >> (frag.

1 02).

C'est ce que vient d'affi rmer le « Je pense, je suis >> de Descartes (Méditations, 1641) : la conscience de penser est une intuition immédiate et indubitable.

Cependant, Descartes associe pensée et raison, alors que, pour Pascal, la pensée dépasse de beaucoup la raison.

Le motif qu'il développe peu mais qui est resté célèbre est celui du « roseau pensant >> (frag.

104) : « L'ho mme n'est qu'un roseau, le plus faible de la nature, mais c'est un roseau pensant >> (frag.

186).

Même écrasé, il a conscience d'être écrasé et c'e st ce qui le rend grand.

« Toute notre dignité consiste donc en la pensée >> (ibid .), c'est-à-dire dans la conscience de notre nature.

Ill.

La grandeur tragique : con tradiction L' hom me, un être complexe et tragique Dans son entreprise de persuasion, Pascal utilise donc non seulement la faiblesse de l'homme mais aussi sa grandeur.

Il ne cesse d'insi ster sur la double nature de l' homme.

Par exemple, la sensation matériele de plaisir s'explique par « quelque chose d'immatériel >> (frag.

99).

Au fragment 25, Pascal décrit aussi la nature humaine comme faite d'allers et de retours : l' homme progresse, régresse, varie avec le temps.

Plusie urs fragments affirment que l'homme est un être complexe (frag.

50, 51), lais­ sant entendre qu'on ne peut ni l'admirer ni le condamner de façon simpliste.

En effet, dans l'argumentation de Pascal, l'homme doit apparaître paradoxal pour être tragique.

Après 1650, les classiques vont définir le héros tragique comme étant « ni complètement innocent ni complètement coupable >>, et suscitant la pitié parce qu 'il est condamné d'avance sans le savoir.

Or, on trouve déjà chez Pascal bien des peintures qui font de l'homme un héros tragique, parce que contradictoire.

L'homme est faible parce qu'il est limité ; mais il est grand par sa pensée parce que, par elle, il a conscience de sa faiblesse.

Un roi déchu Le fragment 108 explique le caractère tragique et grand de l'homme par le fait qu 'il est un roi déchu.

On ne plaint pas quelqu 'un qui n'aja mais été roi de ne pas l'être, mais on plaint quelqu'un qui a été roi de ne plus l'être.

L'homme est grand parce qu'il a conscience d'avoir eu autref ois une nature meilleure.

Et parce qu'il recherche son paradis perdu, il conserve, même dans sa misère, la capacité à être sauvé.

S'il veut aller à Dieu, l'homme ne doit pas seulement se mépriser: > (frag.

110 ).

C'e st dans cette conscience de sa grandeur, qui ne doit jamais se transf ormer en orgueil, que se situe la voie étroite de l'homme.. »