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L'INTELLIGENCE (COURS DE PSYCHOLOGIE ET DE PHILOSOPHIE)

Publié le 29/08/2014

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philosophie

 

Hartmann définit l'intelligence comme «la fonction qui adapte des moyens à des fins«. Une conduite intelligente apparaît en effet comme un ensemble d'opérations qui ne sont pas quelconques mais qui sont subordonnées à un but, qui visent la solution d'un problème.

Une telle définition est insuffisante, car elle n'est pas discrimi-natrice, elle ne «convient pas au seul défini «. L'instinct, l'habitude sont eux aussi des comportements finalisés, adaptés à un but, des façons de résoudre un problème ; mais par bien des caractères ils se distinguent de l'intelligence.

Considérons des guêpes maçonnes qui construisent des cellules d'argile ; ces opérations sont adaptées à une fin: les guêpes vont pondre leurs oeufs dans ces cellules. Elles captureront ensuite des chenilles, les paralyseront en les piquant à l'endroit où se trouvent les ganglions nerveux, les déposeront dans le nid

 

avant de le clôturer; ainsi les larves venues à éclosion trouve¬ront dans les chenilles paralysées une provision de nourriture fraîche. Cette suite d'opérations si bien coordonnées n'a pour¬tant rien à voir avec ce que nous appelons l'intelligence ; et voici pourquoi :

1° Si un expérimentateur perce la cellule qui vient d'être construite, la guêpe négligera de colmater la brèche. Elle découvre généralement le trou béant, l'explore avec ses antennes, mais poursuit, sans faire de réparation, ses opérations devenues absurdes. Elle apporte les chenilles, pond son œuf et tout cela tombe évidemment par le trou d'en bas, ce qui n'empêche pas la guêpe de clôturer méticuleusement, pour ter¬miner, le dessus de l'alvéole !

La technique de la guêpe maçonne est un comportement ins¬tinctif, rigide et aveugle. Des hommes construisant un immeuble répareront avant d'aller plus loin les dégâts causés dans leur construction par quelque accident ; cette souplesse, cette plasticité du comportement paraît caractériser l'intelli¬gence.

2° Le savoir-faire instinctif est étroitement spécialisé. L'abeille si habile aux travaux compliqués de la ruche est incapable de sortir d'une bouteille dont le goulot est à l'ombre et le fond exposé à la lumière. Voltaire disait « hors de la ruche, l'abeille n'est plus qu'une mouche «. A l'instinct strictement spécialisé s'oppose l'intelligence, «instrument universel« (Descartes), capable de résoudre des problèmes nouveaux, de s'adapter à d'autres conditions d'existence (par exemple les paysans mon¬tagnards, lorsque la neige recouvre les champs, fabriquent de menues pièces d'horlogerie). Tandis que l'insecte hérite d'un savoir-faire instinctif, d'une adaptation «de confection«, ose¬rons-nous dire, prévue pour un univers restreint, l'intelligence de l'homme lui taille une adaptation souple, à la mesure de toutes les circonstances possibles. Tandis que l'instinct semble déclencher un comportement préfabriqué — toujours le même dans une espèce donnée —, l'intelligence choisit ses procédés ce qui implique d'ailleurs une grande diversité dans les solutions adoptées (des individus intelligents résolvent sou¬vent le même problème par des procédés différents), ce qui

 

implique aussi la nécessité de l'apprentissage, l'existence de tâtonnements (la rigidité de l'instinct donnant parfois au contraire l'apparence fallacieuse de perfection).

L'intelligence apparaît donc essentiellement opposée à l'ins¬tinct parce qu'elle est, selon la définition de Claparède, «une adaptation à des situations nouvelles «.

Pour la même raison nous distinguons aisément les solutions de l'intelligence et celles de l'habitude.

L'habitude n'est pas comme l'instinct un savoir-faire inné ; elle est au contraire, et par définition, acquise ; elle peut donc avoir l'intelligence à son origine, mais une fois constituée l'habitude ressemble à l'instinct. Ravaisson la décrivait comme «tendance à une fin, sans volonté et sans conscience «. W. James disait que l'habitude était aveugle; il cite l'exemple de personnes qui, s'étant déshabillées pour changer de vêtements, avant d'aller dîner chez des amis, se mettent machinalement dans leur lit une fois déshabillées. Comme l'instinct, l'habitude est spé¬cialisée; on peut être un excellent patineur et ne pas savoir nager. L'habitude comme l'instinct résout automatiquement le problème précis pour lequel elle a été montée. Au contraire l'intelligence est avant tout novatrice ; elle intervient précisé¬ment quand des difficultés se présenteront pour lesquelles la routine ne suffit plus.

B ÉTUDE EXPÉRIMENTALE

DE L'INTELLIGENCE ANIMALE

Si l'intelligence s'oppose incontestablement à l'instinct, ce serait une erreur, cependant, de refuser aux animaux et particu¬lièrement aux vertébrés supérieurs toute intelligence. Car il ne faut pas réduire arbitrairement l'intelligence à la raison, c'est-à-dire à la faculté spécifiquement humaine de penser par idées générales, par concepts, avec l'aide du langage. Jusqu'au XXe siècle les psychologues se contentaient d'opposer l'ins 

 

tinct animal (remarquable surtout dans les sociétés d'insectes) et la pensée logique de l'homme raisonnable. Comme le rap¬pelle très justement M. Viaud, « on ignorait, suivant un mot de Pierre Janet, les terrae incognitae qui s'étendent entre l'instinct et l'intelligence' «.

Pourtant, il existe une intelligence pratique, concrète, anté¬rieure au langage. L'homme lui-même fut un artisan avant d'être un logicien. C'est Bergson, dans une page fameuse de l'Évolution créatrice, qui attira sur ce point l'attention des psychologues : l'homo faber, dit-il, a précédé l'homo sapiens. L'intelligence, en sa démarche originelle, apparaît chez l'homme comme la faculté de «fabriquer des outils «. A vrai dire cette intelligence artisanale, dont Bergson signala l'impor¬tance, n'a pas encore été étudiée chez l'homme d'une façon très approfondie. En revanche l'intelligence pratique, chez les ani¬maux et les enfants, a été l'objet de travaux très importants. Et nous allons analyser sommairement les résultats essentiels de l'étude de l'intelligence animale pratique.

Le psychologue allemand Kohler a étudié entre 1914 et 1920 des chimpanzés de la station de Ténériffe. Il propose de mesu¬rer l'intelligence de l'animal par son aptitude à faire des détours plus ou moins compliqués.

philosophie

« avant de le clôturer; ainsi les larves venues à éclosion trouve­ ront dans les chenilles paralysées une provision de nourriture fraîche.

Cette suite d'opérations si bien coordonnées n'a pour­ tant rien à voir avec ce que nous appelons l'intelligence; et voici pourquoi : 1° Si un expérimentateur perce la cellule qui vient d'être construite, la guêpe négligera de colmater la brèche.

Elle découvre généralement le trou béant, l'explore avec ses antennes, mais poursuit, sans faire de réparation, ses opérations devenues absurdes.

Elle apporte les chenilles, pond son œuf et tout cela tombe évidemment par le trou d'en bas, ce qui n'empêche pas la guêpe de clôturer méticuleusement, pour ter­ miner, le dessus de l'alvéole! La technique de la guêpe maçonne est un comportement ins­ tinctif, rigide et aveugle.

Des hommes construisant un immeuble répareront avant d'aller plus loin les dégâts causés dans leur construction par quelque accident ; cette souplesse, cette plasticité du comportement paraît caractériser l'intelli­ gence.

2° Le savoir-faire instinctif est étroitement spécialisé.

L'abeille si habile aux travaux compliqués de la ruche est incapable de sortir d'une bouteille dont le goulot est à l'ombre et le fond exposé à la lumière.

Voltaire disait «hors de la ruche, 1 'abeille n'est plus qu'une mouche».

A l'instinct strictement spécialisé s'oppose 1 'intelligence, «instrument universel» (Descartes), capable de résoudre des problèmes nouveaux, de s'adapter à d'autres conditions d'existence (par exemple les paysans mon­ tagnards, lorsque la neige recouvre les champs, fabriquent de menues pièces d'horlogerie).

Tandis que l'insecte hérite d'un savoir-faire instinctif, d'une adaptation «de confection», ose­ rons-nous dire, prévue pour un univers restreint, l'intelligence de l'homme lui taille une adaptation souple, à la mesure de toutes les circonstances possibles.

Tandis que l'instinct semble déclencher un comportement préfabriqué - toujours le même dans une espèce donnée -, l'intelligence choisit ses procédés ce qui implique d'ailleurs une grande diversité dans les solutions adoptées (des individus intelligents résolvent sou­ vent le même problème par des procédés différents), ce qui. »

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