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apprendront tout ce qui s’est passé

Publié le 30/03/2014

Extrait du document

apprendront tout ce qui s’est passé. Je me suis battu pour la Tour contre ces rats puants de Morgul, mais vous avez fait un beau gâchis, vous autres, les deux beaux capitaines, à vous battre pour le butin. «

« En voilà assez, gronda Shagrat. J’avais mes ordres. C’est Gorbag qui a tout commencé en essayant de chiper cette jolie chemise. «

« Enfin, vous l’avez mis en colère en prenant vos grands airs. Et il avait plus de bon sens que vous, en tout cas. Il vous a dit plus d’une fois que le plus dangereux de ces espions était encore en liberté, et vous n’avez pas voulu l’écouter. Et vous ne voulez pas non plus écouter à présent. Gorbag avait raison, je vous dis. Il y a un grand combattant par-là, un de ces Elfes aux mains sanglantes, ou un des infects torques. Il vient par ici, je vous dis. Vous avez entendu la cloche. Il a dépassé les Guetteurs, et ça c’est de l’ouvrage de torque. Il est dans l’escalier. Et tant qu’il y sera, je ne descendrai pas. Fussiez-vous même un Nazgûl, je n’irais pas. «

« Ah, c’est donc cela ! hurla Shagrat. Tu feras ceci, et tu ne feras pas cela ? Et quand il arrivera, tu déguerpiras en me laissant tout seul ! Que non ! Je te flanquerai d’abord des trous de ver rouges dans le ventre. «

Le plus petit orque jaillit de la porte de la tourelle. Derrière lui, venait Shagrat, un grand orque dont les longs bras, tandis qu’il courait ramassé sur lui-même, arrivaient jusqu’à terre. Mais l’un des bras pendait, flasque, et semblait saigner, l’autre serrait un gros ballot noir. Sam, tapi derrière la porte de l’escalier, eut au passage un aperçu de sa vilaine face dans la lueur rouge : elle était toute striée, comme déchirée par des griffes, et barbouillée de sang, de la bave dégouttait de ses crocs saillants, les lèvres étaient retroussées comme celles d’une bête.

Pour autant que Sam en pût voir, Shagrat poursuivait Snaga autour du toit jusqu’au moment où, l’ayant esquivé, l’orque plus petit se rua avec un glapissement dans la tourelle et disparut. Shagrat s’arrêta alors. De la porte de l’est, Sam pouvait maintenant le voir près du parapet, haletant, sa griffe gauche se crispant et se desserrant faiblement. Il posa le ballot sur le sol, et de sa griffe droite il sortit un long poignard rouge, sur lequel il cracha. Il alla ensuite au parapet et se pencha pour regarder dans la cour extérieure, loin en contrebas. Par deux fois il cria, mais aucune réponse ne vint.

Soudain, tandis que Shagrat était courbé sur le parapet, le dos contre le toit, Sam vit avec étonnement que l’un des corps étendus remuait. Il rampait. Il tendit une griffe et saisit le paquet. Il se releva en chancelant. Dans l’autre main, il tenait une lance à large fer avec un court manche brisé. L’arme était en position pour frapper. Mais à ce moment même, un sifflement s’échappa de ses dents, hoquet de douleur ou de haine. Vif comme un serpent, Shagrat esquiva, se retourna et plongea son poignard dans la gorge de son ennemi.

« Je t’ai eu, Gorbag ! s’écria-t-il. Pas tout à fait mort, hein ? Eh bien, je vais achever mon ouvrage, maintenant « il bondit sur le corps tombé, le foula aux pieds et le piétina dans sa fureur, se penchant de temps à autre pour le poignarder et le taillader. Enfin satisfait, il releva la tête et lança un horrible hurlement gargouillant de triomphe. Puis il lâcha son poignard, le mit entre ses dents, et, après avoir saisi le paquet, il s’avança par petits bonds vers la proche porte de l’escalier.

Sam n’eut pas le temps de la réflexion. Il aurait pu se glisser par l’autre porte, mais guère sans être vu, et il n’aurait pu longtemps jouer à cache-cache avec ce hideux orque. Il fit ce qu’il avait sans doute de mieux à faire. Il bondit à la rencontre de Shagrat en poussant un cri. Il ne tenait plus l’Anneau, mais celui-ci était présent, pouvoir caché, menace accouardante pour les esclaves du Mordor, et dans sa main, il avait Dard, dont la lueur frappait les yeux de l’orque comme le scintillement des cruelles étoiles aux terribles pays des elfes, dont l’évocation en rêve donnait une peur froide à toute sa race. Et Shagrat ne pouvait en même temps se battre et tenir son trésor. Il s’arrêta, dénudant ses crocs dans un grognement. Puis derechef il bondit de côté à la manière des orques et, comme Sam s’élançait sur lui, il se servit du lourd ballot comme d’un bouclier et d’une arme, le lançant brutalement dans la figure de son ennemi. Sam chancela et, avant qu’il n’eût pu se ressaisir, Shagrat avait passé comme une flèche et descendait l’escalier.

Sam lui courut après, jurant, mais il n’alla pas loin. La pensée de Frodon lui revint bientôt, et il se rappela que l’autre orque était reparti à l’intérieur de la tourelle. Il se trouvait de nouveau devant un choix terrible, et il n’avait pas le temps de réfléchir. Si Shagrat s’échappait, il trouverait vite de l’aide et il reviendrait. Mais si Sam le poursuivait, l’autre orque pourrait accomplir là-haut quelque acte horrible. Et, de toute façon, Sam pouvait manquer Shagrat ou être tué par lui. Il se retourna vivement et remonta l’escalier quatre à quatre. « Je me trompe encore, je suppose, dit-il en soupirant, mais mon boulot est de monter jusqu’en haut avant tout, quoi qu’il puisse arriver ensuite. «

Loin en dessous, Shagrat bondissait le long de l’escalier, il traversa la cour et franchit la porte, portant toujours son précieux fardeau. Si Sam avait pu le voir et connaître l’affliction que cette évasion amènerait, peut-être aurait-il fléchi. Mais il avait l’esprit fixé à présent sur le dernier stade de sa recherche. Il s’avança précautionneusement jusqu’à la porte de la tourelle et la franchit. Elle ouvrait sur des ténèbres. Mais bientôt ses yeux écarquillés perçurent une lueur indécise à droite. Elle provenait d’une ouverture qui menait à un autre escalier, noir et étroit : celui-ci paraissait monter en suivant l’intérieur du mur circulaire de la tourelle. Une torche brillotait quelque part au-dessus.

Sam commença à monter à pas de loup. Il parvint à la torche coulante, fixée au-dessus d’une porte qui faisait face, à gauche, à une fenêtre en hauteur donnant sur l’ouest : l’un des yeux rouges que lui et Frodon

avaient vus d’en bas à la sortie du tunnel. Sam franchit vivement la porte et se hâta de gagner le second étage, craignant à tout moment d’être attaqué et de sentir des doigts étrangleurs lui saisir la gorge de derrière. Il arriva près d’une fenêtre donnant sur l’est et d’une autre torche placée au-dessus de la porte d’un couloir au milieu de la tourelle. La porte était ouverte, le couloir noir hormis le reflet de la torche et la lueur rouge qui filtrait de l’extérieur par la fente de la fenêtre. Mais l’escalier s’arrêtait là et ne montait pas plus haut. Sam se glissa dans le couloir. Il y avait une porte basse de part et d’autre : toutes deux étaient fermées à clef. Il n’entendit pas le moindre son.

« Un cul de sac, murmura Sam, et après toute cette grimpée ! Ce ne peut-être le sommet de la tour. Mais que puis-je faire à présent ? «

Il redescendit en courant à l’étage inférieur et essaya d’ouvrir la porte. Elle ne bougea pas. Il courut derechef en haut, et la sueur commença à dégouliner sur son visage. Il sentait que les minutes mêmes étaient précieuses, mais elles s’échappaient une à une, et il ne pouvait rien faire. Il ne se souciait plus de Shagrat, de Snaga ou aucun autre orque jamais engendré. Il ne pensait qu’à son maître, ne désirait qu’un seul aperçu de son visage, un seul contact de sa main.

Enfin, fatigué, se sentant finalement vaincu, il s’assit sur une marche sous le niveau du sol du couloir et courba la tête dans ses mains. Tout était silencieux, horriblement silencieux. La torche, qui ne brûlait déjà que faiblement à son arrivée, grésilla et s’éteignit, et il sentit les ténèbres le recouvrir comme une marée. Et puis, doucement, à sa propre surprise, là, à la vaine fin de son long voyage et de son chagrin, mû par il ne savait quelle pensée dans son coeur, Sam se mit à chanter.

Sa voix avait un son ténu et chevrotant dans la froide tour noire, c’était la voix d’un hobbit abandonné et las qu’aucun orque, l’entendant, n’aurait pu prendre pour le chant clair d’un seigneur-elfe. Il murmura de vieux airs enfantins de la Comté et des bribes des vers de M. Bilbon qui lui revenaient comme des visions fugitives de son pays natal. Et puis soudain une nouvelle force s’éleva en lui, et sa voix résonna tandis que des paroles de son propre cru venaient spontanément s’adapter au simple air.

Dans les pays de l’ouest sous le Soleil

les fleurs peuvent sortir au Printemps,

les arbres bourgeonner, les eaux courir,

les joyeux pinsons chanter.

Ou ce peut-être une nuit pure

où les hêtres ondoyants portent les étoiles elfiques tels des joyaux blancs

parmi leur chevelure rameuse.

Bien qu’ici enfin de voyage je sois

dans les ténèbres profondément enfoui,

au-delà de toutes les tours fortes et hautes,

au-delà des montagnes escarpées

au-dessus de toutes les ombres vogue le Soleil

et les Étoiles à jamais demeurent :

je ne dirai pas « le Jour est fini «, je ne ferai pas aux Étoiles mes adieux.

« Au-delà de toutes les tours fortes et hautes «, reprit-il, et il s’arrêta court. Il croyait avoir entendu une faible voix en réponse. Mais il n’entendait plus rien. Si, quelque chose, mais pas une voix. Des pas approchaient. À présent, on ouvrait doucement une porte dans le couloir au-dessus, les gonds grincèrent. Sam se tapit, l’oreille tendue. La porte se referma avec un bruit sourd, et puis retentit une voix grondeuse d’orque :

« Holà ! Toi là-haut, rat de fumier ! Arrête tes vagissements, ou je vais aller m’occuper de toi. T’entends ? «

Il n’y eut pas de réponse.

« Bon, grogna Snaga. Mais je vais aller jeter un coup d’oeil sur toi tout de même et voir ce que tu manigances. «

Les gonds grincèrent de nouveau, et Sam, qui regardait alors par-dessus le coin du seuil du couloir, vit une petite lueur tremblotante dans l’entrebâillement d’une porte d’où sortait la forme indistincte d’un orque. Celui-ci semblait porter une échelle. La solution vint brusquement à Sam : on atteignait la chambre supérieure par une trappe ménagée dans le plafond du couloir. Snaga éleva vivement l’échelle, l’affermit, puis y grimpa et disparut. Sam entendit claquer un verrou tiré, puis de nouveau la voix hideuse parla.

« Reste tranquille, ou je te le ferai payer cher ! Tu n’as pas longtemps à vivre en paix, je suppose, mais si tu ne veux pas que la rigolade commence tout de suite, garde ta trappe fermée, compris ? Voilà toujours un petit avertissement ! « Il y eut comme un claquement de fouet.

À ce son, la rage s’embrasa dans le coeur de Sam et le rendit soudain furieux. Il se releva d’un bond et s’élança le long de l’échelle comme un chat. Sa tête émergea au centre du sol d’une grande chambre ronde. Une lanterne rouge pendait au plafond, l’étroite fenêtre à l’ouest était haute et sombre. Quelque chose gisait sur le sol près du mur, mais une forme noire d’orque se tenait au-dessus, jambes écartées de part et d’autre. Elle levait un

fouet pour la seconde fois, mais le coup ne retomba jamais.

Avec un cri, Sam bondit à travers la pièce, Dard au poing. L’orque fit volte-face, mais avant qu’il n’eût pu agir, Sam trancha la main qui tenait le fouet. Hurlant de douleur et de peur, mais éperdu, l’orque le chargea, tête baissée. Le coup suivant de Sam tomba dans le vide et, perdant l’équilibre, il bascula en arrière, se cramponnant à l’orque dans sa chute par-dessus lui. Avant qu’il n’eût pu se remettre sur pied, il entendit un cri et un choc sourd. L’orque, dans sa hâte sauvage, avait trébuché sur le haut de l’échelle et était tombé par la trappe ouverte. Sam ne lui accorda plus d’attention. Il courut à la forme repliée sur le sol. C’était Frodon.

Il était nu, étendu comme évanoui sur un tas de chiffons infects : son bras était relevé pour abriter sa tête, et en travers de son côté courait une vilaine marque de fouet.

« Frodon ! Monsieur Frodon bien-aimé ! cria Sam, presque aveuglé par les larmes. C’est Sam, je suis arrivé ! « Il souleva à demi son maître et le serra contre sa poitrine. Frodon ouvrit les yeux.

« Suis-je encore en train de rêver ? murmura-t-il. Mais les autres rêves étaient horribles. «

« Vous ne rêvez pas du tout, Maître, dit Sam. C’est vrai. C’est moi. Je suis arrivé. «

« J’ai peine à le croire, dit Frodon, l’étreignant. Il y avait un orque avec un fouet, et puis il s’est transformé en Sam ! Alors, je ne rêvais pas après tout lorsque j’ai entendu ce chant en bas et que j’ai essayé de répondre ? Était-ce toi ? «

« Oui, bien sûr, Monsieur Frodon. J’avais presque renoncé à tout espoir. Je n’avais pas pu vous trouver. «

« Eh bien, c’est fait maintenant, Sam, cher Sam «, dit Frodon, et il se laissa aller dans les doux bras de Sam, fermant les yeux comme un enfant rassuré, quand les peurs nocturnes ont été chassées par une voix ou une main aimée.

Sam sentit qu’il aurait pu rester assis ainsi dans un bonheur sans fin, mais ce ne lui était pas permis. Il ne lui suffisait pas d’avoir trouvé son maître, il lui fallait encore essayer de le sauver. Il baisa le front de Frodon. « Allons ! Réveillez-vous, Monsieur Frodon ! « dit-il, s’efforçant d’avoir l’air aussi gai qu’en ouvrant les rideaux de Cul de Sac un matin d’été.

Frodon soupira et se mit sur son séant. « Où sommes-nous ? Comment suis-je venu ici ? « demanda-t-il.

« Il n’y a pas le temps de raconter des histoires avant d’être ailleurs, Monsieur Frodon, dit Sam. Mais vous êtes en haut de la tour que nous avions vue d’en bas près du tunnel avant que les orques ne vous eussent pris. Je ne saurais dire combien de temps cela fait. Plus d’une journée, je pense. «

« Seulement ? dit Frodon. Cela me paraît des semaines. Il faudra tout me raconter, si nous en avons une chance. Quelque chose m’a frappé, n’est-ce pas ? Et j’ai été plongé dans les ténèbres et des rêves affreux, et quand je me suis réveillé, j’ai vu que le réveil était pire. Il y avait des orques tout autour de moi. Je crois qu’ils venaient de me verser dans la gorge une horrible boisson brûlante. Ma tête est devenue claire, mais j’étais tout endolori et fatigué. Ils m’ont tout enlevé, et puis deux grandes brutes sont venues m’interroger, elles m’ont questionné au point que j’ai cru devenir fou, se tenant au-dessus de moi, me couvant du regard, tripotant leurs poignards. Jamais je n’oublierai leurs griffes ni leurs yeux. «

« Vous ne les oublierez pas si vous en parlez, Monsieur Frodon, dit Sam. Et si nous ne voulons pas les revoir, plus tôt nous partirons, mieux cela vaudra. Pouvez-vous marcher ? «

« Oui, je peux, dit Frodon, se levant lentement. Je ne suis pas blessé, Sam. Je me sens seulement très fatigué, et j’ai mal là. « Il porta la main au dos de son cou au-dessus de l’épaule gauche. Il se tint debout, et il parut à Sam qu’il était vêtu de flammes : sa peau nue était écarlate à la lueur de la lanterne suspendue au-dessus de lui. Il arpenta deux fois la pièce.

« Ça va mieux ! dit-il, reprenant un peu courage. Je n’osais pas bouger quand j’étais seul, ou un des gardiens venait aussitôt. Jusqu’au moment où ont commencé les hurlements et la lutte. Les deux grandes brutes : elles se sont querellées, je crois. À propos de moi et de mes affaires. Je restai étendu là, terrifié. Et puis il y a eu un silence de mort, et c’était encore pis. «

« Oui, ils se sont querellés, apparemment, dit Sam. Il devait y avoir ici deux centaines de ces sales créatures. Un peu beaucoup pour Sam Gamegie, on peut le dire. Mais ils ont fait tout le massacre d’eux-mêmes. C’est de la veine, mais c’est trop long pour en faire une chanson, avant d’être hors d’ici. Que faire, maintenant ? Vous ne pouvez pas aller marcher dans le Pays Noir sans autre vêtement que votre peau, Monsieur Frodon. «

« Ils ont tout pris, Sam, dit Frodon. Tout ce que j’avais. Tu comprends ? Tout. « Il se tapit de nouveau sur le sol, la tête baissée, comme ses propres mots lui rappelaient la plénitude du désastre, et que le désespoir l’accablait. « La mission a échoué, Sam. Même si nous sortons d’ici, nous ne pouvons échapper. Seuls des Elfes le peuvent. Loin, loin de la Terre du Milieu, bien loin au-delà de la Mer. Si elle-même est assez large pour barrer la route à l’Ombre. «

« Non, pas tout, Monsieur Frodon. Et la mission n’a pas encore échoué. Je l’ai pris, Monsieur Frodon, sauf votre respect. Et je l’ai gardé en sécurité. Il est autour de mon cou en ce moment même, et c’est un terrible fardeau, d’ailleurs. « Sam tâtonna à la recherche de l’Anneau et de sa chaîne. « Mais je suppose que vous devez le reprendre. « Maintenant qu’il y était, Sam éprouvait une certaine répugnance à rendre l’Anneau et à en charger de nouveau son maître.

« Tu l’as ? s’écria Frodon, le souffle coupé. Tu l’as ici ? Sam, tu es prodigieux ! « Et puis rapidement son ton changea d’une façon étonnante. « Donne-le-moi ! cria-t-il, se dressant et tendant une main tremblante.

« avaient vus d’en bas à la sortie du tunnel.

Sam franchit vivement la porte et se hâta de gagner le second étage, craignant à tout moment d’être attaqué et de sentir des doigts étrangleurs lui saisir la gorge de derrière.

Il arriva près d’une fenêtre donnant sur l’est et d’une autre torche placée au - dessus de la porte d’un couloir au milieu de la tourelle.

La porte était ouverte, le couloir noir hormis le reflet de la torche et la lueur rouge qui filtrait de l’extérieur par la fente de la fenêtre.

Mais l’escalier s’arrêtait là et ne montait pas plus haut.

Sam se glissa dans le couloir.

Il y avait une porte basse de part et d’autre : toutes deux étaient fermées à clef.

Il n’entendit pas le moindre son. « Un cul de sac, murmura Sam, et après toute cette grimpée ! Ce ne peut -être le sommet de l a tour.

Mais que puis -je faire à présent ? » Il redescendit en courant à l’étage inférieur et essaya d’ouvrir la porte.

Elle ne bougea pas.

Il courut derechef en haut, et la sueur commença à dégouliner sur son visage.

Il sentait que les minutes mêmes étaie nt précieuses, mais elles s’échappaient une à une, et il ne pouvait rien faire.

Il ne se souciait plus de Shagrat, de Snaga ou aucun autre orque jamais engendré.

Il ne pensait qu’à son maître, ne désirait qu’un seul aperçu de son visage, un seul contact de sa main.

Enfin, fatigué, se sentant finalement vaincu, il s’assit sur une marche sous le niveau du sol du couloir et courba la tête dans ses mains.

Tout était silencieux, horriblement silencieux.

La torche, qui ne brûlait déjà que faiblement à son arrivée , grésilla et s’éteignit, et il sentit les ténèbres le recouvrir comme une marée.

Et puis, doucement, à sa propre surprise, là, à la vaine fin de son long voyage et de son chagrin, mû par il ne savait quelle pensée dans son cœur, Sam se mit à chanter. Sa v oix avait un son ténu et chevrotant dans la froide tour noire, c’était la voix d’un hobbit abandonné et las qu’aucun orque, l’entendant, n’aurait pu prendre pour le chant clair d’un seigneur -elfe.

Il murmura de vieux airs enfantins de la Comté et des bribe s des vers de M.

Bilbon qui lui revenaient comme des visions fugitives de son pays natal.

Et puis soudain une nouvelle force s’éleva en lui, et sa voix résonna tandis que des paroles de son propre cru venaient spontanément s’adapter au simple air. Dans le s pays de l’ouest sous le Soleil les fleurs peuvent sortir au Printemps, les arbres bourgeonner, les eaux courir, les joyeux pinsons chanter. Ou ce peut -être une nuit pure où les hêtres ondoyants portent les étoiles elfiques tels des joyaux blancs parmi leur chevelure rameuse. Bien qu’ici enfin de voyage je sois dans les ténèbres profondément enfoui, au -delà de toutes les tours fortes et hautes, au -delà des montagnes escarpées au -dessus de toutes les ombres vogue le Soleil et les Étoiles à jamais d emeurent : je ne dirai pas « le Jour est fini », je ne ferai pas aux Étoiles mes adieux.

« Au -delà de toutes les tours fortes et hautes », reprit - il, et il s’arrêta court.

Il croyait avoir entendu une faible voix en réponse.

Mais il n’entendait plus rien. Si, quelque chose, mais pas une voix.

Des pas approchaient.

À présent, on ouvrait doucement une porte dans le couloir au -dessus, les gonds grincèrent.

Sam se tapit, l’oreille tendue.

La porte se referma avec un bruit sourd, et puis retentit une voix grond euse d’orque : « Holà ! Toi là -haut, rat de fumier ! Arrête tes vagissements, ou je vais aller m’occuper de toi.

T’entends ? » Il n’y eut pas de réponse.

« Bon, grogna Snaga.

Mais je vais aller jeter un coup d’œil sur toi tout de même et voir ce que tu man igances.

» Les gonds grincèrent de nouveau, et Sam, qui regardait alors par - dessus le coin du seuil du couloir, vit une petite lueur tremblotante dans l’entrebâillement d’une porte d’où sortait la forme indistincte d’un orque.

Celui -ci semblait porter une échelle.

La solution vint brusquement à Sam : on atteignait la chambre supérieure par une trappe ménagée dans le plafond du couloir.

Snaga éleva vivement l’échelle, l’affermit, puis y grimpa et disparut.

Sam entendit claquer un verrou tiré, puis de nouveau la voix hideuse parla.

« Reste tranquille, ou je te le ferai payer cher ! Tu n’as pas longtemps à vivre en paix, je suppose, mais si tu ne veux pas que la rigolade commence tout de suite, garde ta trappe fermée, compris ? Voilà toujours un petit avertisse ment ! » Il y eut comme un claquement de fouet.

À ce son, la rage s’embrasa dans le cœur de Sam et le rendit soudain furieux.

Il se releva d’un bond et s’élança le long de l’échelle comme un chat.

Sa tête émergea au centre du sol d’une grande chambre ronde .

Une lanterne rouge pendait au plafond, l’étroite fenêtre à l’ouest était haute et sombre.

Quelque chose gisait sur le sol près du mur, mais une forme noire d’orque se tenait au -dessus, jambes écartées de part et d’autre.

Elle levait un. »

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