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A l'aube du XXIème siècle, le genre romanesque est remis en question : après la crise du personnage et « l'ère du soupçon », les lecteurs doutent de plus en plus de la réalité des personnages romanesques, ils préfèrent croire les images ayant une valeur considérée comme objective.

Publié le 20/08/2013

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A l'aube du XXIème siècle, le genre romanesque est remis en question : après la crise du personnage et « l'ère du soupçon «, les lecteurs doutent de plus en plus de la réalité des personnages romanesques, ils préfèrent croire les images ayant une valeur considérée comme objective. C'est pour cette raison qu'ils réclament de plus en plus de biographies, des récits de voyage, c'est-à-dire les « petits faits vrais « que Sarraute avait déjà désignés dans son essai « L'Ere du soupçon « comme ayant d' « incontestables avantages « sur « l'histoire inventée «. Ce constat amène à l'interrogation suivante qui devient de plus essentielle : « A quelles conditions un personnage de roman peut-il passer pour réaliste ? « Il est vrai que, depuis sa création au Moyen Age, le genre romanesque a cherché, de plus en plus à atteindre les réalités. Au départ, les romans de chevalerie, comme ceux de Chrétien de Troyes, mêlaient légendes et aventures fantasques, héros idéaux, courtois sans défauts qui triomphaient dans un univers manichéen, taillé sur mesure pour vanter leurs exploits. On est encore très loin du personnage réaliste. En effet, la première condition pour créer un personnage réaliste, c'est de regarder dans un miroir et non dans un portrait. On y voit le laid comme le beau, le sacré comme le profane et surtout le romancier s'ouvre à la complexité de l'Homme pour créer des personnages dialectiques, complexes, divisés à l'inverse des idées pures qui tiennent un discours unilatéral. Trois conditions sont essentielles pour qu'un personnage de roman puisse passer pour réaliste : il doit d'abord être un Homme, animal de la famille des hominidés, être social jouissant d'une conscience d'être et subissant des pulsions inconscientes. Il doit être présenté à l'intérieur d'un milieu social, légal et physique qui prend en compte les réalités de l'époque choisis par le romancier. Enfin, ce ne doit être ni un symbole, ni une allégorie (si le père Goriot est la paternité il n'est pas un personnage réaliste), c'est pour cela que le Nouveau Roman se dirigera vers l'anonymat total du personnage. Le personnage réaliste est « un homme, fait de tous les hommes et sui les vaut tous, et qui vaut n'importe qui «, le personnage doit être au dessus de tout soupçon. Cette citation des Mots de Sartre conduit à ce raisonnement, extrêmement simple, mais principe de base à la création d'un personnage réaliste : le personnage est un être humain. Or un être humain, c'est d'abord une réalité physique : composé d'eau, de chair et d'os, le mammifère de la famille des hominidés est le premier référent pour le personnage. Il mange, boit, dort et se reproduit ; activités que les personnages pratiquent peur avant le XVIIIème siècle. Le roman est un monde à part. Ainsi les premiers pas vers le réalisme et les personnages furent accomplis par les libertins et leurs imitateurs. Même s'il ne s'agit encore de détails insérés dans la narration, l'intrigue sociale prévalant, des romanciers comme Marivaux ont donné à leur personnage une consistance physique. Ne serait-ce que dans les portraits, qui, au lieu de se conformer aux codes médiévaux et baroques, décrivent le personnage physiquement et de façon individuée. Mais l'exemple le plus probant de l'introduction des réalités physiques du personnage reste cette scène du Paysan parvenu dans laquelle une cuisinière fait cuire des oeufs pour Jacob. Bien sûr, Marivaux en est encore à justifier sa scène par une portée symbolique, l'oeuf représente la fécondité et la cuisinière « nourrit « Jacob dans tous les sens du terme ; mais il n'en reste pas moins dans cette scène, Jacob est affamé, ressent également du désir et tout cela dans une cuisine, lieu dont le roman parlait encore très pe...
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« à part.

Ainsi les premiers pas vers le réalisme et les personnages furent accomplis par les libertins et leurs imitateurs.

Même s’il ne s’agit encore de détails insérés dans la narration, l’intrigue sociale prévalant, des romanciers comme Marivaux ont donné à leur personnage une consistance physique.

Ne serait -ce que dans les portraits, qui, au lieu de se conformer aux codes médiévaux et baroques, décrivent le personnage physiquement et de façon individuée.

Mais l’exemple le plus probant de l’introduction des réalités physiques du personnage reste cette scène du Paysan parvenu dans laquelle une cuisinière fait cuire des œufs pour Jacob.

Bien sûr, Marivaux en est encore à justifier sa scène par une portée symbolique, l’œuf représente la fécondité et la cuisinière « nourrit » Jacob dans tous les sens du terme ; mais il n’en reste pas moins dans cette scène, Jacob est affamé, ressent également du désir et tout cela dans une cuisine, lieu dont le roman parlait encore très peu.

Le personnage prend donc corps, il se couche auprès de sa femme, consomme son mariage, comme tout le monde et dort plutôt que de passer ses nuits dans la forêt de Brocéliande à combattre.

C’est dont un être ordinaire, profane mais également un animal social. Qui dit homme dit tout de suite groupes d’hommes et donc société.

Même dans la définition de son individualité, l’être humain est normé pas la société dans laquelle il vit, d’où l’obligation pour le romancier qui veut créer un personnage réaliste de le définir socialement.

C’est d’ailleurs ce qui est fait dans le titre même de l’ouvrage cité ci-dessus : le paysan parvenu c’est la classe sociale suivie de l’indication de l’ascension vers les autres, le rédacteur des « mémoires » ne donnant un nom que par commodité.

La société définit donc en partie l’Homme, et elle lui indique sa place, sa fonction, des droits, ce qui modèle jusqu’à sa nature même d’où l’importance pour le romancier de le définir socialement.

Un paysan n’est logiquement pas lettré, un citadin connaît les grands noms de son temps, le nombre s’exprime différemment du prolétaire.

Chrétien de Troyes n’aurait jamais fait le portrait de la société féodale qui aurait eu pour héros un serf.

Les romans qui mettent le plus en exergue, par leur forme même, les composantes sociales de l’individu sont les romans épistolaires, comme les Liaisons dangereuses.

L’échange de lettres est un acte social et les discours profitent de la diversité des voix narratives pour acquérir un autre niveau de complexité : dans l’intimité des personnages, Laclos nous montre avec un regard différent leurs actions sociale.

Le vicomte de Valmont ne se définit que par son statut social : ainsi quand Madame de Merteuil li écrit qu’ « on remarque vos absences », la menace est bien réelle, le « on » est tout puissant.

La déchéance des personnages est sociale : déshonneur, persiflage, réputation.

Valmont, même dans l’intimité la plus physique, s’adonne encore des jeux sociaux : « l’air que je respire est brûlant de volupté, la table même sur laquelle je vous écris, consacrée. »

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