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Ai-Je Un Corps Ou Suis-Je Un Corps ?

Publié le 05/12/2010

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  A l'heure où le diktat de la minceur, de la beauté des corps pèse sur la population (que ce soit hommes ou femmes) et génère de nombreuses réactions directement liées à cette image de perfection que véhicule les médias et certaines personnes, l'on peut s'interroger sur l'importance qu'un sujet donne à son corps. Est ce que l'apparence est primordiale? Est ce que mon corps est le reflet de ce que je suis? "Nous ne sommes pas seulement corps, ou seulement esprit; nous sommes corps et esprit tout ensemble." affirme George Sand dans Histoire de ma vie. Ainsi posons nous la question suis-je étranger à mon corps ou est ce que tout mon esprit l'habite pour que l'on puisse dire que mon esprit et mon corps ne font qu'un? Ai-je un corps ou suis-je plutôt un corps ou même suis-je mon corps?
 
 
                Si l'on me posait la question : as-tu un corps, ma réponse spontanée serait oui bien entendu. Je ne suis pas qu'un esprit pensant et conscient transparent, flottant dans l'air comme un spectre. On peut me toucher et constater que mon corps est bien fait de matière et qu'il n'est pas une illusion. Ces caractéristiques sont valables pour toutes personnes. De ce fait, ce corps me définit en tant qu'humain. 
            Comme un objet, un corps humain a des des caractéristiques que l'on retrouve pour chaque corps et qui permettent sa reconnaissance. L'utilisation de l'article défini "un" met en avant le coté objectif du corps. Cependant avoir un corps est fondamentalement différent que d'avoir une voiture ou stylo. Je ne peux pas prendre le même recul par rapport à mon corps et l'observer de dessus, de dessous sous toutes ses coutures sauf s'il ne s'agit pas de mon corps, par exemple lorsqu'un médecin pratique une dissection pour pouvoir observer l'anatomie du corps humain. Ce corps sera donc perçu comme un corps en tant qu'il est objet avec des caractéristiques et un fonctionnement spécifiques qui sont propres à tous les corps. On utilise d'ailleurs l'article indéfini "du" qui donne une portée généralisante au corps.
            De plus, je ne possède pas mon corps de la même manière que je possède un objet, je ne peux en disposer comme je le veux, faire tous les gestes que j'aimerais : le corps a ses limites. Par exemple lorsque l'on demande à un musicien de jouer de plus en plus vite, à un certain moment il atteint sa vitesse maximale, cette limite est corporelle et non pas spirituelle car le musicien peut penser les notes à jouer plus vite que ce que sa main ne les jouent. Ainsi le corps peut être vécu et perçu comme un espèce de carcan dont on ne peut se libérer. 
            Tout ce qui est dit précédemment montre que le corps est différent de l'objet mais le plus important est le fait que notre pensée et notre conscience sont intimement liées à ce corps et lui procure donc une subjectivité irréductible. 
 
 
               La réponse à la question suis-je un corps ne vient pas spontanément. Ce qui est certain est que je ne me réduis pas à un corps. Malheureusement certaines actions humaines comme un viol nous invite à penser que l'on peut être réduit à un corps. 
           C'est ma pensée, consciente qu'elle est en train de penser, qui me permet d'affirmer Je suis. La conscience que j'ai de mon corps et ma pensée lui donne vie. Même si mon corps n'est pas un objet, il est avant tout une extériorité contrairement à ma pensée. Il est ce qui insère un individu dans la société car mon corps permet la communication sous toutes ses formes. 
            Le corps est aussi une sorte de façade que l'on façonne selon l'image que l'on veut donner à ceux qui nous entourent, notre façon de nous vêtir, de nous maquiller, parer, de marcher sont des signes et révèlent forcément quelque chose. Mais devant la si grande importance que l'on accorde à l'apparence et au corps dans notre société, le corps peut être vécu comme une douleur ou un poids à porter. Justement, si l'on dit que nous façonnons notre apparence, l'inverse est aussi vrai. Par exemple, une personne se trouvant laide et repoussante aura dans certains cas du mal à aller vers les autres et sera peut être moins sure d'elle. Mon corps est donc ce qui me permet complètement d'être un sujet. 
            En outre, il arrive parfois que ma conscience et mon corps entre en complète osmose par exemple lorsque je reçois un coup très fort, mes nerfs envoient des signaux au cerveau et mon corps ressent la douleur, une douleur tellement intense que ma conscience n'est plus consciente que de la douleur. Malgré cela, est ce que mon corps et ma conscience coïncident-ils toujours au point de pouvoir dire qu'il ne font qu'un ?
 
               Tout d'abord, il y a de nombreux phénomènes dont nous n'avons pas conscience tant que l'on n'y prête pas une grande attention et qui ont pourtant lieux à l'intérieur de notre corps comme la digestion ou la respiration. De plus, notre esprit n'a pas toujours conscience que l'on est malade car contrairement à notre pensée dans laquelle on peut se plonger, on ne peut s'introduire dans notre propre corps par la pensée; et c'est en cela que nous sommes toujours un peu étranger à notre corps. Parfois, certaines personnes ne se reconnaissent pas dans leur corps. Leur corps n'est pas en harmonie avec la conscience qu'ils ont d'eux même et cela provoque le plus souvent un profond mal être. Comme des personnes qui ont grossi ou maigri subitement par exemple. D'autres n'ont pas toujours conscience de leurs corps, ainsi une personne se sentira femme alors qu'elle a un corps d'homme. Le corps n'est donc pas un pur reflet de ce que l'on est bien entendu, ni de ce que l'on a l'impression d'être. "Mon moi ne dépend pas de mon corps" même si la plupart des individus essayent de faire coïncider leur "moi" et leur corps.
 
 
                En conséquence, l'on ne peut pas dire que l'on a un corps à partir du moment ou avoir signifie posséder, comme un objet que l'on possède car le corps a une subjectivité irréductible. Cependant, on ne peut pas dire je suis un corps car le corps n'est pas toujours en harmonie avec l'esprit. Ainsi l'on ne peut pas faire de généralité, peut être qu'une personne pourra affirmer au moment M, je suis un corps, je suis mon corps car elle aura conscience pendant un instant que son esprit et son corps seront en fusion totale mais quelques minutes après ce ne sera peut être plus le cas. Le corps a donc une dimension assez mystérieuse et ambiguë qui fait de nous aussi des sujets ambiguës.

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