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Ai-je un corps ou suis-je un corps?

Publié le 22/03/2015

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On constate une identification forte au corps. Si quelqu’un critique mon aspect physique, je me sens moi-même critiqué. Dans ce cas, je suis ce corps. Mais souvent prenant mes distances avec ce corps, j’estime qu’il me trahit ou qu’il me faut lui donner un autre aspect, le modeler autrement. Dans ces cas-là, j’ai un corps, je ne le suis pas. Le corps vécu l’est donc sous le mode de l’avoir et de l’être : suis-je un corps ou ai-je un corps ? On dit volontiers que l’on a un corps mais ce corps est-il n’importe quel corps comme le suggère l’article indéfini ? Puis-je prétendre entretenir avec lui le rapport impliqué dans le verbe avoir qui suggère qu’il serait possible de distinguer radicalement le sujet de son corps, celui-ci étant assimilable à un objet extérieur susceptible d’être perçu comme on perçoit les objets et instrumentalisé comme on dispose des choses.  Mais ce corps que je dis avoir n’est-il pas plutôt celui que je suis ? Qu’il s’agisse du corps pour soi ou pour les autres, il ne se donne pas comme un simple objet. Il a une subjectivité irréductible de telle sorte qu’il semble moins être un corps-objet qu’un corps-sujet.  Pour autant, ce corps que je dis être mien, le suis-je au point de coïncider avec lui ? N’est-il pas possible de le vivre parfois comme une enveloppe dans laquelle il est impossible de se reconnaître entièrement?  Alors quel est le statut du corps s’il n’est ni pure objectivité, ni pure subjectivité ? Ne sommes-nous pas condamnés à admettre son ambiguïté et l’impossibilité de la dépasser?     Dire «j’ai un corps» consiste à disjoindre le sujet de ce qu’il est censé posséder : un corps. L’expression s’inscrit dans un schéma dualiste, le «je» renvoyant au sujet et «un corps» à l’objet. Nous présupposons qu’il y a un sujet de la pensée et de la parole, ce qui est très clair chez Descartes. Ce qu’il décrit dans le cogito n’est pas l’homme concret, mais ce qui lui permet d’exister en tant que sujet. Aussi je peux me détacher mentalement de mon corps mais je ne le peux pas de ma pensée. Le cogito, c’est la pensée se pensant elle-même. Par le procès même de la pensée, le sujet se positionne donc de telle sorte que tout ce qu’il saisit est objectivé. Le corps, à l’égal de tout ce qui a un statut de chose, est exposé à cela. Il s’offre au regard, il a une extériorité qui lui confère la dimension d’un objet. Pour le biologiste, le corps est une réalité matérielle caractérisée par une str...

« de mon corps mais je ne le peux pas de ma pensée.

Le cogito, c'est la pensée se pensant elle-même.

Par le procès même de la pensée, le sujet se positionne donc de telle sorte que tout ce qu'il saisit est objectivé.

Le corps, à l'égal de tout ce qui a un statut de chose, est exposé à cela.

Il s'offre au regard, il a une extériorité qui lui confère la dimension d'un objet.

Pour le biologiste, le corps est une réalité matérielle caractérisée par une structure et un fonctionnement.

Ses lois sont celles de la matière organisée.

Le corps du biologiste est un corps-objet.

Mais on peut se demander si ce corps-objet, ce corps impersonnel, est bien le corps humain. Celui-ci, semble en effet moins être un corps objectif qu'un corps fantasmé.

Le corps humain est ce qui se construit au cours d'une histoire lui donnant le statut d'une image destinée à demeurer par rapport à la réalité physiologique de l'individu.

En témoigne la pratique des chirurgiens plasticiens.

Ils nous apprennent qu'il y a souvent parmi leurs patients des personnes aveugles à leur beauté et qui s'acharnent à demander des modifications incompréhensibles de l'extérieur.

On méconnaît donc le corps humain en tant qu'il est un corps vécu de l'intérieur.    L'expérience de mon corps est donc fondamentalement différente de l'expérience que j'ai des simples objets. De ceux-ci je peux faire le tour, mais pas avec mon corps.

Il se présente toujours du même côté, il est avec moi plutôt que devant moi.

Ce n'est pas le corps que j'ai, c'est celui que je suis.

C'est un corps-sujet.

Il se caractérise par le fait de ne jamais me quitter.

Les objets qui m'entourent ont aussi une permanence, mais c'est celle de la diversité des points de vue sur eux.

C'est d'ailleurs la possibilité de varier à l'infini les perspectives sur l'objet qui nous assure qu'il n'est pas une simple image ou un fantasme.

 Jamais devant moi, mon corps est moi-même comme condition de toute exploration du monde.

Il s'ensuit que la conscience ou le sujet n'est pas un sujet pur, délié de toute corporéité comme l'analyse Descartes.

Le corps n'est pas une simple structure de la conscience.

Il est la réalité d'où elle émerge sans doute en qualité d'intellect, mais le sujet corporel est le véritable sujet de la perception.

Ainsi ce sont les opérations du corps en débat avec le monde qui l'organise de manière immédiate.

Cette forme de «savoir physique» permet d'approprier ses gestes à des tâches précises sans avoir recours à la réflexion.

La conscience n'est pas d'abord un «je pense», elle est un «je peux».

La phénoménologie disqualifie par cette analyse le propos cartésien.

En déliant le sujet de son enveloppe charnelle, Descartes est accusé de trahir l'expérience humaine.

Il place la conscience en situation de surplomb. »

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