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Cours sur art et technique.

Publié le 19/03/2021

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technique

... Cours sur art et technique.

 

 

Présentation.

Commençons par fixer le sens des termes.

Art et technique ont même racine, le grec, techné (ou tekhné) que l’on peut traduire par savoir-faire.

A ce titre, la techné se différencie du savoir pur, theoria, épistémé, celui qui a pour fin la seule vérité. En effet, la techné est un savoir qui a vocation à produire (poiésis) quelque chose, un ouvrage ou une œuvre. La science a pour seule tache la découverte de la vérité, indépendamment de ses éventuelles applications pratiques. Ainsi trouve-t-elle son modèle de rationalité dans les mathématiques.

La techné, indifféremment art ou technique, œuvre sur la nature, phusis. Essayons de préciser à partir d’un exemple.

Le sculpteur se rend à la carrière de marbre (=la matière, ulé) pour choisir un bloc dans lequel il se propose de réaliser une statue d’Athéna (=la forme, eidos ou morphé). Il ne prendra pas n’importe quel bloc de marbre mais celui qui lui paraîtra le plus propre à recevoir la forme qu’il veut lui imprimer. Sculpter consiste à dégager une forme d’une certaine matière dans laquelle celle-ci est en quelque sorte en attente par le moyen des instruments (technai). C’est un art de la soustraction : il s’agit d’ôter ce qui recouvre la forme qui est déjà-là présente, en puissance, dans la matière. Le travail de la sculpture consiste à mettre à jour la forme, l’amener à la lumière, à la faire resplendir, elle qui était tapie dans sa gangue de matière en attendant d’être dévoilée. Le travail est actualisation, par le moyen d’instruments, en l’occurrence ciseaux et marteaux, de ce qui existe à titre de puissance dans la matière.

Ainsi pourrions-nous soutenir que la statue d’Athéna est déjà-là et que le travail du sculpteur ne cherche qu’à la révéler au grand jour. A ce titre, rappelons que « mettre à jour », « dévoiler », « révéler » sont des manières de traduire le grec aléthéia qui signifie « vérité ». Il faut donc entendre que le sculpteur révèle, en vérité, la forme d’Athéna, que celle-ci n’est pas arbitraire mais bien à l’image de la déesse elle-même. Pourquoi cela ? Parce que les dieux ont déposé leur empreinte dans la matière laissant le soin aux hommes de la manifester par leur travail ou encore de l’amener à sa fin, à son télos. C’est cela actualiser (= parfaire, parachever). 

 

 Trois conséquences sont à tirer de cette remarque :

-        Les statues représentent effectivement les divinités par principe de ressemblance. Ce que je vois d’Athéna est bel et bien à l’image de ce qu’elle est. Il n’y a pas d’arbitraire des formes. D’où une standardisation des formes dans l’art des Anciens qui peut de nos jours paraître ennuyeuse.

-        L’art des Anciens ne crée pas de formes, il les dévoile. L’idée de création lui est étrangère. Elle ne s’imposera qu’avec le judéo-christianisme en référence au Dieu créateur de toutes choses.  Notons que les dieux grecs ne sont pas eux-mêmes créateurs puisque la matière leur préexiste (la matière première, sans forme). Ils lui donnent forme, toutes les formes que nous lui connaissons, comme le potier peut le faire avec l’argile qu’il façonne dans ses mains. Les dieux anciens sont des démiurges (démiourgos), c’est-à-dire des artisans, des ouvriers.  

-        L’artisan est un modèle dans le monde grec, plus que l’artiste d’une certaine façon. L’éperon forgé avec talent représente davantage à leurs yeux que l’éperon peint sur une fresque, ce dernier ayant pour principale vertu d’être à la ressemblance du premier. Plus généralement, les anciens ont valorisé l’art d’imitation dont le rideau de Parrhasius ou les raisins de Zeuxis sont présentés comme un comble. Leur fidélité à la réalité était tellement parfaite qu’ils ont trompé l’homme ainsi que l’animal. L’art a abusé la nature elle-même.

Art et technique, pour les anciens, consistent à produire (poiésis, action dont la fin est externe et non praxis, action dont la fin est interne telle que penser ou voir) quelque chose, ouvrage ou œuvre, par le moyen d’instruments, non dans une perspective créatrice de formes, mais dans le cadre d’une imitation standardisée de ce qui est, dieux, hommes, animaux ou plantes, afin d’en magnifier la beauté, d’en souligner la noblesse ou encore de les proposer en modèle à suivre pour l’édification des âmes. Dans cette perspective, art et technique sont inséparables de considérations morales, l’idéal étant de réunir en un seul ouvrage le beau et le bon. L’esthétique est éthique et l’éthique est esthétique. C’est ce que les Anciens appellent kalokagathie, contraction de Kalos kai agathos, signifiant ce qui est à la fois beau et bon, évoquant l’harmonie du corps et de l’âme (que l’on retrouvera dans le fameux précepte de Juvénal, mens sana in corpore sano) ou encore un idéal de perfection. Toutefois, comment peut-on distinguer art et technique ?

 

I.                 Art et technique :

 

1.      Artisan et artiste : [référence : Alain, Système des beaux-arts, 1926].

 

 

 

Historiquement, les arts mécaniques se sont séparés des arts dits libéraux dès lors que l‘on s’est proposé d’opposer les arts serviles parce que soumis à des fins utilitaires ou plus généralement pratiques et ayant pour fin le corps (médecine, chirurgie mais aussi l’art du barbier) et les arts libéraux n’ayant pour seule fin que de plaire en s’adressant à l’âme. Léonard de Vinci définit à ce titre la peinture comme « cosa mentale ».  Ainsi ce sont peu à peu constitués aux siècles suivants les beaux-arts (dessin, peinture, sculpture, architecture, gravure, musique, chant, poésie, danse) en Académies. Mais il faut tenter de distinguer art et technique intrinsèquement.

Si le mot techné signifie métier, savoir-faire, et si l’on identifie « savoir à « théorie » et « faire » à « pratique » ou encore, le premier à l’esprit et le second à la main, nous pourrions dire que lorsque l’esprit commande à la main, nous sommes dans la technique alors que lorsque la main commande à l’esprit, nous sommes dans l’art proprement dit, thèse paradoxale puisqu’il s’agit de considérer la technique comme une entreprise relevant de l’intellect alors que l’art relèverait davantage du manuel.

L’homme de la technique (ou des arts mécaniques) autrement dit l’artisan, doit penser son ouvrage avant de le réaliser. Ici la conception précède et détermine l’exécution. Ou encore, pour reprendre des termes proprement philosophiques, l’essence précède et détermine l’existence. Il faut penser avant de faire et faire consiste à appliquer, sur le plan de l’existence, ce qui a été préalablement pensé sur le plan de l’essence. L’exécution doit tout à la conception préalable, c’est-à-dire à la phase proprement intellectuelle du travail de production. Dans l’industrie, il s’agit simplement de confier la réalisation à des machines, ce qui montre combien la phase de conception est déterminante, non la phase d’exécution.

Aussi un bon artisan est-il d’abord quelqu’un qui sait penser son ouvrage jusqu’en ses moindres détails. Il n’y a pas de place ici pour l’improvisation. L’esprit, ou l’intelligence si l’on préfère, commande à tout le processus de production. L’artisan est littéralement maître d’œuvre : il domine l’ensemble du procès depuis l’idée préalable jusqu’à la réalisation terminale. Par ailleurs, on peut constater qu’entre l’idée et le produit achevé, il n’y a aucune différence sinon celle-ci, que l’ouvrage est l’idée incarnée dans une matière.

Il arrive cependant que l’artisan trouve mieux, au moment où il fait, que ce qu’il avait préalablement pensé. Alors la main vient en quelque sorte corriger et redresser l’esprit, l’idée jaillit de la confrontation directe avec la matière. Dans ces moments privilégiés, l’artisan fonctionne comme un artiste. Certes cela ne constitue pas le cours normal du processus de production artisanale mais intervient « par éclairs », brisant la simple application de l’idée préalablement conçue, ce qui s’accroît avec le métier, c’est-à-dire avec l’expérience répétée du travail de la matière. Aussi un bon artisan ayant de l’expérience aura-t-il tendance à sacrifier davantage l’idée préalable à l’exécution elle-même, comme si ses mains, à force de métier, étaient habitées par une intelligence de la matière. Au contraire, le jeune artisan ou bien celui qui n’est pas particulièrement doué, consacrera beaucoup de temps à la phase de conception préalable et s’y tiendra rigoureusement dans le temps de l’exécution. 

technique

« connaissons, comme le potier peut le faire avec l’argile qu’il façonne dans ses mains .

Les dieux anciens sont des démiurges ( démiourgos ), c’est -à-dire des artisans , des ouvriers.

- L’artisan est un modèle dans le monde grec, plus que l’artiste d’une certaine façon.

L’éperon forgé avec talent représente davantage à leurs yeux que l’éperon peint sur une fresque , ce dernier ayant pour principale vertu d’être à la ressemblance du premier.

Plus généralement, les anciens ont valorisé l’art d’imitation dont le rideau de Parrhasius ou les raisins de Zeuxis sont présentés comme un comb le.

Leur fidélité à la réalité était tellement parfaite qu’ils ont trompé l’homme ainsi que l’animal.

L’art a abusé la nature elle -même.

Art et technique , pour les anciens, consistent à produire ( poiési s, action dont la fin est externe et non praxis , action dont la fin est interne telle que penser ou voir ) quelque chose, ouvrage ou œuvre, par le moyen d’instruments, non dans une perspective créatrice de formes, mais dans le cadre d’une imitation standardisée de ce qui est, dieux, hommes, animaux ou plantes , afin d’en magnifier la beauté , d’en souligner la noblesse ou encore de les proposer en modèle à suivre pour l’édification des âmes.

Dans cette perspective, art et technique sont inséparables de considérations morales, l’idéal étant de réunir en un seul ouvrage le beau et le bon.

L’esthétique est éthique et l’éthique est esthétique.

C’est ce que les Anciens appellent kalokagathie , contraction de Kalos kai agathos , signifiant ce qui est à la fois beau et bon, évoquant l’harmonie du corps et de l’âme (que l’on retrouvera dans le fameux précepte de Juvénal, mens sana in corpore sano ) ou encore un idéal de perfection.

Toutefois, c omment peut -on distinguer art et technique ? I.

Art et technique : 1.

Artis an et artiste : [référence : Alain, Système des beaux -arts , 1926] .

:istoriquement, les arts mécaniques se sont séparés des arts dits libéraux dès lors que l‘on s’est proposé d’opposer les arts serviles parce que soumis à des fins utilitaires ou plus généralement pratiques et ayant pour fin le corps (médecine, chirurgie mais aussi l’art du barbier) et les arts libéraux n’ayant pour seule fin que de plaire en s’adressant à l’âme.

Léonard de Vinci définit à ce titre la peinture comme « cosa menta le ».

Ainsi ce sont peu à peu constitués aux siècles suivants les beaux -arts (dessin , peinture, sculpture, architecture, gravure, musique , chant, poésie, danse) en Académies.

M ais il faut tenter de distinguer art et technique intrinsèquement .

Si le mot techné signifie métier, savoir -faire, et si l’on identifie « savoir à « théorie » et « faire » à « pratique » ou encore, le premier à l’esprit et le second à la main , nous pourr ions dire que lorsque l’esprit commande à la main, nous sommes dans la techniqu e alors que lorsque la main commande à l’esprit, nous sommes dans l’art proprement dit , thèse paradoxale puisqu’il s’agit de considérer la technique comme une entreprise relevant de l’ intellect alors que l’art relèverait davantage du manuel .

L’homme de la technique (ou des arts mécaniques) autrem ent dit l’artisan , doit penser son ouvrage avant de le réaliser.

Ici la conception précède et détermine l’exécution.

Ou encore, pour reprendre des termes proprement philosophiques, l’essence précède et détermine l’existence .

Il faut penser avant de faire e t faire consiste à appliquer, sur le plan de l’existence, ce qui a été pré alable ment pensé sur le plan de l’essence.

L’exécution doit tout à la conception préalable, c’est -à-. »

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