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DENIS DIDEROT : LE REVE DE D'ALEMBERT (Résumé & Analyse)

Publié le 17/01/2022

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Sous ce titre il est d'usage de désigner un triptyque composé de l'Entretien entre d'Alembert et Diderot, du Rêve d'Alembert, à proprement parler et de la Suite de l'Entretien. Ces trois textes publiés très tardivement (en 1830 !) exposent, sous la forme dialoguée familière à la philosophie, les idées matérialistes de Diderot. De fait, l'encyclopédiste pousse ces thèses matérialistes dans leurs conséquences ultimes : tout est matière, l'homme n'est qu'une combinaison parmi d'autres, il se trouve pris au même titre que n'importe quel vivant dans cette permanente ébullition de la matière que le médecin Bordeu (l'un des protagonistes du dialogue mais aussi l'ami de Diderot) appelle un « biochimisme universel ». Cette représentation d'une nature où rien ne se perd ni se crée, où se déroule selon un processus épigénétique (il y a épigenèse lorsque chez un être vivant apparaît une forme nouvelle qui n'est pas préexistante) une interminable chaîne du vivant, Diderot l'attribue, avec humour, à son ami le mathématicien d'Alembert qui rêve à voix haute. Sous la forme d'un délire le matérialisme de Diderot peut donc s'accorder tous les excès. « Cela est de la plus haute extravagance, écrit Diderot à Sophie Volland en septembre 1769, et tout à la fois de la philosophie la plus profonde ; il y a quelque adresse à avoir mis mes idées dans la bouche d'un homme qui rêve : il faut souvent donner à la sagesse l'air de la folie, afin de lui procurer ses entrées. »

« Le Rêve de d'Alembert, de Denis Diderot Pour ses contemporains, Denis Diderot (1713-1784) est d'abord l'éditeur de l'Encyclopédie avec puis sans d'Alembert(1717-1783).

Son œuvre plus personnelle, elle, est réservée à un public restreint : l'essentiel de ses « grands »textes n'a pas été diffusé au-delà du cercle immédiat des « philosophes », où ils circulaient sous forme manuscrite.Si cette clandestinité l'a longtemps empêché d'occuper la place majeure qui est ensuite devenue la sienne dans lepanthéon des Lumières, elle lui a aussi permis de développer une pensée radicale, rigoureusement matérialiste etrésolument athée, alors que la plupart de ses contemporains, comme Voltaire et Rousseau, adoptaient un déismeplus ou moins détaché de l'orthodoxie.

De ce point de vue, comme de celui du genre romanesque (avec Jacques leFataliste et son maître, rédigé à partir de 1771) ou de la réflexion artistique (avec les Salons, 1759-1780), Diderotest la figure la plus moderne des Lumières françaises. Un matérialisme tranquille Le Rêve de d'Alembert (rédigé en 1769) est le texte où s'exprime de la façon la plusdécisive le matérialisme tranquille de Diderot - qui contraste par exemple avec l'inquiétude sacrilège d'un marquis deSade (1740-1814).

11 s'agit d'une série de trois dialogues fictifs, où Diderot représente malicieusement quelques-uns de ses amis intimes, et où il explore, à l'aide d'images évocatrices plutôt que de développements académiques, différents aspects de sa conception de l'hommeet de l'univers.

Le premier dialogue expose le principe de base de tout matérialisme depuis Démocrite (v.

460-v.

370av.

J.-C.) : pour expliquer le monde en l'occurrence, les facultés sensibles et intellectuelles traditionnellementattribuées à l'âme -, la matière n'a besoin que d'elle-même, sans recours à un principe supérieur.

Le secondentretien tire quelques conséquences biologiques, physiques et psychologiques de ce principe.

S'interrogeantnotamment sur l'unité du moi - de ce moi changeant composé par l'assemblage de molécules sensibles, et que negarantit plus une âme immatérielle -, les personnages proposent une vision (déjà) neuronale de l'homme, faisceausensible dont l'origine cérébrale est représentée comme une araignée au centre de sa toile.

Le dernier dialogue, dontsont tirés les extraits ci-contre, est une sorte de bouquet final.

Diderot y poursuit la réflexion matérialiste enabordant la question de la morale sexuelle, qu'il reprendra dans le Supplément au voyage de Bougainville (vers1772).

Deux personnages, Mlle de Lespinasse et le docteur Bordeu (porte-parole de l'auteur), entraînés par lagalanterie et le vin de Malaga, se laissent porter à des hypothèses de plus en plus osées.

Empruntant au poète latinHorace (65-8 av.

J.-C.) le principe de l'« utile » et de l'« agréable », le docteur procède à un renversementsystématique des valeurs.

Condamnée la chasteté, à la fois inutile et dénuée d'agrément; valorisées, au contraire,la masturbation et l'homosexualité, assimilées à une douce saignée, solitaire ou partagée.

La bestialité elle-même estenvisagée moins comme une monstruosité que comme un champ d'expérimentation.

Au-delà de son caractèreamusant et paradoxal (ou des questions bioéthiques qu'elle pourrait susciter...), la fiction finale du « chèvre-pied »renvoie à l'absurdité de la servitude elle-même, à l'injustice de l'esclavage et de l'exploitation coloniale.

Dans cedomaine aussi, la parole de Diderot franchit les siècles, et s'adresse directement aux lecteurs d'aujourd'hui.. »

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