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Est-il nécessaire d'être cultivé pour apprécier une oeuvre d'art?

Publié le 01/09/2005

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Il est indispensable, pour apprécier l'art, de savoir faire la différence entre ce qui est beau et ce qui n'est qu'agréable. "Pour ce qui est de l'agréable chacun se résigne ce que son jugement, fondé sur un sentiment individuel, par lequel il affirme qu'un objet lui plaît, soit restreint à sa seule personne. Il admet donc quand il dit : le vin des Canaries est agréable, qu'un autre corrige l'expression et lui rappelle qu'il doit dire : il m'est agréable ; il en est ainsi non seulement pour le goût de la langue, du palais et du gosier, mais aussi pour ce qui plaît aux yeux et aux oreilles de chacun. L'un trouve la couleur violette douce et aimable, un autre la trouve morte et terne ; l'un préfère le son des instruments à vent, l'autre celui des instruments cordes. Discuter à ce propos pour accuser d'erreur le jugement d'autrui, qui diffère du nôtre, comme s'il s'opposait à lui logiquement, ce serait folie ; au point de vue de l'agréable, il faut admettre le principe : à chacun son goût (il s'agit du goût des sens). Il en va tout autrement du beau. Car il serait tout au contraire ridicule qu'un homme qui se piquerait de quelque goût, pensât justifier ses prétention en disant : cet objet (l'édifice que nous voyons, le vêtement qu'un tel porte, le concert que nous entendons, le poème que l'on soumet à notre jugement) est beau pour moi. Car il ne suffit pas qu'une chose lui plaise pour qu'il ait le droit de l'appeler belle ; beaucoup de choses peuvent avoir pour lui du charme et de l'agrément, personne ne s'en soucie mais quand il donne une chose pour belle, il prétend trouver la même satisfaction en autrui ; il ne juge pas seulement pour lui mais pour tous et parle alors de la beauté comme si elle était une propriété d'objets ; il dit donc : la chose est belle, et s'il compte sur l'accord des autres avec son jugement de satisfaction, ce n'est pas qu'il ait constaté diverses reprises cet accord mais c'est qu'il l'exige. Il blâme s'ils jugent autrement, il leur dénie le goût tout en demandant qu'ils en aient ; et ainsi on ne peut pas dire : chacun son goût. Cela reviendrait à dire : il n'y a pas de goût, c'est-à-dire pas de jugement esthétique qui puisse légitimement prétendre l'assentiment universel.

Pour pouvoir apprécier l'art, il faut être initier à son langage, à ses formes. Il faut faire effort pour pénétrer dans l'univers d'un artiste. Le beau ne se donne pas immédiatement, il nécessite d'être éduquer. Mais, apprendre à regarder ou à écouter ne sert à rien. Le goût est une faculté naturelle et subjective qui ne peut se former.

« "Pour ce qui est de l'agréable chacun se résigne ce que son jugement,fondé sur un sentiment individuel, par lequel il affirme qu'un objet luiplaît, soit restreint à sa seule personne.

Il admet donc quand il dit : levin des Canaries est agréable, qu'un autre corrige l'expression et luirappelle qu'il doit dire : il m'est agréable ; il en est ainsi non seulementpour le goût de la langue, du palais et du gosier, mais aussi pour ce quiplaît aux yeux et aux oreilles de chacun.

L'un trouve la couleur violettedouce et aimable, un autre la trouve morte et terne ; l'un préfère le sondes instruments à vent, l'autre celui des instruments cordes.

Discuter àce propos pour accuser d'erreur le jugement d'autrui, qui diffère dunôtre, comme s'il s'opposait à lui logiquement, ce serait folie ; au pointde vue de l'agréable, il faut admettre le principe : à chacun son goût (ils'agit du goût des sens).

Il en va tout autrement du beau.

Car il seraittout au contraire ridicule qu�un homme qui se piquerait de quelquegoût, pensât justifier ses prétention en disant : cet objet (l'édifice quenous voyons, le vêtement qu'un tel porte, le concert que nousentendons, le poème que l'on soumet à notre jugement) est beau pourmoi.

Car il ne suffit pas qu'une chose lui plaise pour qu'il ait le droit del'appeler belle ; beaucoup de choses peuvent avoir pour lui du charmeet de l'agrément, personne ne s'en soucie mais quand il donne unechose pour belle, il prétend trouver la même satisfaction en autrui ; ilne juge pas seulement pour lui mais pour tous et parle alors de la beauté comme si elle était une propriété d �objets ; il dit donc : la chose est belle, et s'il compte sur l'accorddes autres avec son jugement de satisfaction, ce n'est pas qu'il ait constaté diverses reprises cet accordmais c'est qu'il l'exige.

Il blâme s'ils jugent autrement, il leur dénie le goût tout en demandant qu'ils en aient ;et ainsi on ne peut pas dire : chacun son goût.

Cela reviendrait à dire : il n'y a pas de goût, c'est-à-dire pasde jugement esthétique qui puisse légitimement prétendre l'assentiment universel." KANT Pour Kant, le jugement du goût, qui énonce si une chose est belle ou non, n'est pas un jugement deconnaissance.

Il n'est donc pas logique mais esthétique, c'est-à-dire que « son principe déterminant ne peutêtre que subjectif » {Critique du jugement, § 1).

Cet élément subjectif qui détermine le jugement du goût,c'est une satisfaction.

Mais cette satisfaction est désintéressée.

En effet, lorsqu'on me demande si je trouvetelle chose belle, « ce qu'on veut savoir c'est seulement si la seule représentation de l'objet est accompagnéeen moi de plaisir quelle que soit mon indifférence pour l'existence de l'objet de cette représentation » (id., §2).

En d'autres termes, je puis juger qu'une chose est belle sans désirer la posséder ou même en lacondamnant : je puis dire qu'un palais est beau sans désirer aucunement y habiter ou en estimant que saconstruction ayant coûté beaucoup de souffrance au peuple, il eût mieux valu ne pas le bâtir.

La satisfactionqui accompagne le jugement du goût est donc bien « un plaisir pur et désintéressé » (id.).

Par là le beau sedistingue du bon et de l'agréable, lesquels sont liés à un intérêt.

(Kant s'oppose ainsi à la tradition gréco-latine qui ramenait le bon au bien, comme chez Platon , et/ou à l'agréable (êdu) et à l'utile (ôphelimon),comme chez Aristote).

L'agréable est en effet « ce qui plaît au sens dans la sensation » (id., § 3) tandis quele bon est « ce qui, au moyen de la raison, plaît par simple concept ».

Dans le bon « il y a toujours le conceptd'un but, le rapport de la raison à un vouloir (tout au moins possible) ; par suite une satisfaction causée par Yexistence d'un objet ou d'une action, c'est-à-dire quelque intérêt » ( id., § 4).

Ainsi donc, l'agréable et le bonsont liés à la faculté de désirer alors que « le jugement du goût est simplement contemplatif » ( id., § 5).En résumé « on nomme agréable ce qui donne du plaisir; beau ce qui plaît simplement ; bon ce qui est estimé(approuvé), c'est-à-dire ce à quoi l'on attribue une valeur objective » (id.).

Mais seule la satisfactionprocurée par le beau est « désintéressée et libre car ici aucun intérêt ni des sens, ni de la raison ne nousoblige à donner notre assentiment » (id.).

Nous pouvons donc donner une première définition du beau de lamanière suivante :« Le goût est la faculté de juger un objet ou un mode de représentation par la satisfaction ou le déplaisird'une façon toute désintéressée.

On appelle beau l'objet de cette satisfaction.

» (Id.).Mais dès lors il apparaît que la satisfaction causée par le beau ne peut être qu'universelle, puisque toutintérêt en est absent.

» Car l'objet qui donne une satisfaction dont on a conscience qu'elle est exempted'intérêt, ne peut être jugé que comme contenant un motif de satisfaction pour tous.

En effet, celle-ci n'estpas motivée par quelque inclination du sujet (ni quelque autre intérêt réfléchi), et le juge se sent entièrementlibre par rapport à la satisfaction qu'il trouve dans l'objet; aussi ne peut-il trouver comme motifs à sasatisfaction des conditions personnelles auxquelles tienne son sujet seul ; il faut donc qu'il la considère commemotivée par quelque chose qu'il doit supposer aussi en tout autre ; par suite il doit penser qu'il a raisond'attribuer à chacun une satisfaction semblable.

(...) Mais ce n'est pas de concepts que cette universalitépeut résulter; car de concepts, on ne peut passer au sentiment du plaisir ou de la peine ( sauf dans les pureslois pratiques, mais elles contiennent un intérêt; il ne s'en joint aucun au pur jugement de goût) ».

Donc, estbeau ce qui plaît universellement sans concept. Certaines oeuvres paraissent hermétiques, il faut donc bien apprendre leur langageDe nombreuses oeuvres restent totalement incompréhensibles pour la grande majorité du public.

Elles ne leurapportent aucun plaisir pour la seule raison qu'ils n'ont pas appris a les apprécier.

Certes, les traitéstechniques et les commentaires ne sont pas une fin en soi, mais ils sont le tremplin indispensable sans lequel. »

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