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Faut-il avoir un don pour être artiste ?

Publié le 17/08/2009

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Faut-il avoir un don pour être artiste ?

 

Lorsque nous disons qu’il « faut faire « ou qu’il « faut avoir « quelque chose, nous énonçons l’existence d’une nécessité. Il apparaît nécessaire de faire ou d’avoir quelque chose, soit parce que cette action ou cette chose ont une valeur intrinsèques qui font d’elles des fins légitimes de notre action, soit parce qu’elles sont les moyens d’une autre chose que nous recherchons efficacement par leur intermédiaire.

Par « don « on entend un avantage que reçoit quelqu’un sans avoir rien fait pour l’obtenir ou le mériter. Il peut s’agir d’un bienfait, d’une faveur, ou d’une aptitude innée, c'est-à-dire d’une disposition qu’un individu possède en naissant, qu’il n’a rien fait pour faire naitre et qui n’a nul besoin d’être cultivée.

Un artiste est un individu qui pratique cette activité singulière qu’est l’art. Jusqu’au dix-huitième siècle, le terme « art « désignait l’ensemble des techniques de production d’artefacts : tel était encore le cas dans le Discours sur les sciences et les arts (1750) de  Jean-Jacques Rousseau. Aujourd’hui, par art nous entendons plutôt une activité créatrice gratuite, mais sérieuse, qui représente dans des œuvres un état de la sensibilité et de la pensée d’une époque, en s’opposant à la fois à la disgrâce qui frappe les activités techniques utilitaires, jugées serviles, et à la futilité des activités ludiques vouées au divertissement. Ni labeur, ni distraction, l’œuvre d’art incarne et suggère un sentiment de la vie.

A première vue, nous commencerons par dire qu’il est tout à fait erroné d’affirmer qu’il faut avoir un don pour être un artiste. En effet, un artiste ne se distingue nullement des autres hommes par les qualités prétendument innées qui sont les siennes, il est un individu qui fait l’usage de la chose la mieux partagée du monde, à savoir son bon sens, ou sa raison. Cependant, un artiste n’est-il pas par définition un individu qui possède des qualités innées qui le distinguent des autres hommes ? Loin d’avoir un seul don qui fait de lui non seulement un artiste, mais un être à part, n’a-t-il pas été doté de qualités diverses selon les époques : imagination, génie, préscience ? Mais nous verrons si pour être un artiste, la seule qualité nécessaire, acquise et non innée, n’est pas celle qui consiste à travailler incessamment ? En ce sens, personne ne saurait un artiste en vertu de qualités innées sur lesquelles l’expérience n’aurait pas de prise, mais on deviendrait artiste suite à l’acquisition, provoquée par l’emprise du surmoi sur le moi, d’une prodigieuse capacité de travail.

La question au centre de notre réflexion sera donc de déterminer si être artiste signifie avoir un talent inné en particulier ou la capacité à faire fructifier tous ses talents par le travail. 

 

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« b.

L'activité rationnelle prépondérante dans l'acte de création par l'artiste « Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée ; car chacun pense en être si bien pourvu, que ceuxmême qui sont les plus difficiles à contenter en toute autre chose n'ont point coutume d'en désirer plus qu'ils enont.

En quoi il n'est pas vraisemblable que tous se trompent : mais plutôt cela témoigne que la puissance de bienjuger et distinguer le vrai d'avec le faux, qui est proprement ce qu'on nomme le bon sens ou la raison, estnaturellement égale en tous les hommes ; et ainsi que la diversité de nos opinions ne vient pas de ce que les unssont plus raisonnables que les autres, mais seulement de ce que nous conduisons nos pensées par diverses voies,et ne considérons pas les mêmes choses.

Car ce n'est pas assez d'avoir l'esprit bon, mais le principal est del'appliquer bien.

Les plus grandes âmes sont capables des plus grands vices aussi bien que des plus grandes vertus; et ceux qui ne marchent que fort lentement peuvent avancer beaucoup davantage s'ils suivent toujours le droitchemin, que ne font ceux qui courent et qui s'en éloignent .

» Discours de la méthode . Ce texte de Descartes affirme que le bon sens est une faculté que tous les hommes partagent, l'indiscutabledifférence qui existe entre eux résultant davantage de l'usage qu'ils en font que de la faculté elle-même.

A lalumière de cette thèse, nous pouvons dire qu'il ne faut pas un don pour être un artiste, mais uniquement une raisonbien formée, bien éduquée.

En effet, si nous quittons le domaine de la préparation de l'œuvre que nous avonsabordé dans le précédent développement, pour nous intéresser à celui de l'acte de création lui-même, nous dironsune fois encore que c'est la raison qui est nécessaire à l'artiste.

En effet il semble que l'artiste déploie dans lemoment de la création non une faculté de production d'images, sorties toute entières de son imagination, maisplutôt une variation sur un thème déjà donné.

Si l'on considère la peinture de l'Ancien Régime, nous n'y trouveronspas ce que les siècles suivant apporteront, à commencer une expression de l'intériorité de l'artiste.

Il s'agit le plussouvent de traitements de thèmes déjà illustrés par le passé, trouvés dans l'histoire ou la littérature.

Par exemple, lapeinture de David emprunte ses sujets à l'histoire romaine, et traite des sujets déjà abordés par d'autres peintres(comme la mort des enfants de Brutus ou le serment des Horace).

Si nous considérons les auteurs de l'AncienRégime, nous dirons que pour eux il n'était pas indispensable de se signaler par leur imagination ou par l'originalité deleurs sujets, mais plutôt pour leur maîtrise d'un thème ou d'un style : preuve en est la rivalité de Racine, auteur deBérénice, et de Corneille, auteur de Titus et Bérénice, à quelques mois d'écart.

On dira donc pour conclure que pourêtre un artiste il n'est pas nécessaire d'avoir un don, mais uniquement une raison bien éduquée et une maitrisetechnique de l'art singulier et du genre précis auquel il s'adonne.

II.

L'artiste se définit par la possession de dons qui font de lui un être à part a.

L'artiste : l'être doué d'imagination Cependant, nous ne pouvons en rester à une semblable thèse, car il semble que la pensée de l'art de l'âge classiqueméconnaissait entièrement la nécessité d'avoir un don pour être un artiste, et dans quelle mesure ce dernier est unecondition déterminante pour en être un.

Nous dirons que non seulement il faut un don pour être un artiste, maisqu'en vérité il en faut même plusieurs, dont le premier est sans doute aucun l'imagination, qui a un rôle déterminantdans l'activité de l'artiste.

Bachelard nous aide à comprendre ce qu'est véritablement l'imagination : « On veut toujours que l'imagination soit la faculté de former des images.

Or, elle est plutôt la faculté de déformerles images fournies par la perception, elle est surtout la faculté de nous libérer des images premières, de changerles images.

S'il n'y a pas changement d'images, union inattendue des images, il n'y a pas imagination ».

L'air et les songes, Essai sur l'imagination du mouvement. Il semble donc que l'imagination joue en vérité un rôle fondamental dans la production d'une œuvre d'art, car elleseule permet le dépassement de ce qui a déjà été réalisé en art et l'avènement du nouveau.

Les surréalistes ontparticulièrement insisté sur cette dimension, sur cette valeur prépondérante de l'imagination : elle leur apparaissaitcomme le pouvoir de créer des images poétiques par la déformation d'images mortes dans le langage, ce que l'onnomme des catachrèses, comme dans le fameux « la terre est bleue comme une orange ».

Ainsi, l'artiste peut biennous apparaître comme celui qui maîtrise cette « folle du logis » qu'était l'imagination d'après Malebranche.

Nousdirons donc que le premier don qu'il faut avoir pour être un artiste est l'imagination.

A l'inverse de la raison, tous les. »

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