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Faut-il vouloir la paix à tout prix ?

Publié le 15/02/2013

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            N’est-il pas évident que la paix est préférable à la guerre ? N’est-ce pas un scandale de mettre en question la valeur de la paix ? Qui peut vraiment souhaiter la guerre pour la guerre, la violence pour la violence ? Plus profondément demander : la paix n’est-elle pas la Valeur, la valeur de toutes les valeurs ? Certes, l’homme, tout homme veut la paix, mais objecterions-nous il est toujours ou souvent en guerre. Comment alors vouloir la paix alors que le progrès tant quantitatif que qualitatif des armements rend possible la destruction intégrale et définitive de l’humanité ? N’y a-t-il pas là un étrange et douloureux paradoxe à vouloir la paix tout en préparant la guerre ? Faut-il relancer la formule proverbiale : « Qui veut la paix doit préparer la guerre « ?

            La paix en tant que cessation définitive de la guerre est-elle la valeur absolue, par-delà de laquelle rien ne vaudrait ? Peut-on authentiquement accepter, pour sauver à tout prix la paix, renoncer à d’autres valeurs : la liberté, la fraternité, l’égalité ?

« Cette hypothèse de lecture est légitime si l’on pouvait définir la paix comme absence radicale de troubles, de conflits, de guerres, de révolutions.

En un sens purement négatif le concept de « paix » renvoie au calme, au repos, à la quiétude.

N’est -ce pas dire que la paix est alors le règne du silence dans les cimetières ? Ne convient-il pas de remonter à la notion de « paix » à la manière de Spinoza dans son Traité politique ? En effet, la « paix » comprise négative ment est lacunaire et fragmentaire.

Il est insuffisant d’approcher conceptuellement la « paix » comme absence de co nflits, de massacres qu’un État peut atteindre dans un pays en ayant recours à la terreur.

Ici, l a paix n’est rien d’autre que calme et repos, elle n’est qu’une situation de fait provisoire , presqu’un accident ou un état hasardeux.

Mais alors rien ne peut garantir sa perpétuité.

C’est pourquoi, Kant, dans le Projet de paix perpétuelle , a profondément remanié le concept de paix.

Pour le philosophe des Lumières, la paix réelle et authentique ne peut être garantie que par un accord entre les États fondé sur le droit.

En effet, la paix entre les État s se fonde sur la sortie de l’« état de nature » comme guerre généralisée pour s’installer durablement dans l’« état politique ou civil ».

Car explique Kant, tant que deux États voisins cohabitent côte -à -côte, la paix est éphémère et accidentelle.

Et la paix n’est dès lors qu’une mise en tre parenthèses momentanée de la guerre, qui n’est somme toute qu’une trêve.

Ce qui signifie que la paix n’est autre qu’une « guerre froide ».

Il faut donc contracter des Accords politico- juridiques pour assurer la paix permanente.

Nous ne pouvons vouloir la paix que lorsque celle -ci quitte l’état de guerre potentiel pour une paix qui repose sur des Traités .

Qu’est-ce que la paix ? Elle est un accord rationnel des volontés de chacun des États.

Elle n’est donc pas la « non guerre », la simple cessation ponctuelle de la guerre, elle n’est plus l’armistice qui autorise de se réapprovisionner en armes et en homm es ; elle est encore moins la résultante de l’asservissement ou d’un fragile équilibre de la terreur qui n’est que course à l’armement.

La paix doit être alors une valeur qui ne découle pas des avantages que l’on pourrait en tirer (la tranquillité, la circ ulation économique des marchandises, par exemple), mais la volonté libre de tous vers cette valeur suprême comme telle.

Lorsque l’on dit de la paix qu’elle doit être l’objet d’un vouloir, la volonté en question est à comprendre au sens fort du terme.

Vouloir n’est pas « préférer » ou encore « souhaiter », encore moins « désirer ».

Car désirer la paix n’est pas la vouloir ? Ce qui ne serait qu’ un vœu pieux fondé sur un pacifisme utopique et relevant d’un humanisme larmoyant.

Pour instaurer la paix, il est insuffisant de souhaiter l’éviction de la guerre.

Car préférer la paix à la guerre ce n’est pas, loin s’en faut, vouloir la paix.

Vouloir réellement la paix, c’est manifester une volonté continue, positive, éventuellement militante, de sauvegarder la paix à tout pri x.

C’est-à -dire mettre tout en œ uvre individuellement et collectivement pour maintenir la paix comme paix.

Alain, dans le même texte de référence, montre excellemment que les guerres proviennent de l’abnégation de la volonté de paix, de ce qu’ on ne croît plus à la paix, qu’on ne la veut pas authentiquement.

Au chapitre crucial sur ce point , « Du souverain » (LXXVI), le penseur journaliste place l’individu face à ses responsabili tés : avant de m’inquiéter de savoir si mon entourage veut vraiment la paix, il m’appartient seul mû par ma volonté libre, en toute souveraineté , de décider si elle jaillira aussi et surtout par ma seule volonté.

C’est prudemment et dans la constance du vouloir qu’il faut se garder de croire à la guerre inéluctable.

Penser la guerre comme une fatalité au nom d’une supposée nature humaine guerrière, c’est déjà se retourner contre la paix.

Pis, c’est là un facteur de guerre.

Aussi, vouloir la paix à tout prix, c’est « vouloir vouloir » la paix.

La paix est alors un devoir mor al.

Vouloir la paix, c’est ainsi vouloir la paix à tout prix.

Même si la guerre est, la paix ne doit pas être reconduite puisqu’elle est de l’ordre du devoir -être.

C’est bien ce que dit Alain : « Il faut croire au bien, car il n’est pas ».

Ce qui ne veu t pas dire que la guerre soit chimère ou simple idéal car le devoir être de la paix n’est pas une évasion du monde ou une fuite devant la dureté de la réalité.. »

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