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La Liberté selon Spinoza

Publié le 23/11/2013

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spinoza
Corrigé de l'explication de texte de Baruch SPINOZA. Traité théologico-politique « On pense que l'esclave est celui qui agit par commandement et l'homme libre celui qui agit selon son bon plaisir. Cela cependant n'est pas absolument vrai, car en réalité être captif de son plaisir et incapable de rien voir ni faire qui nous soit vraiment utile, c'est le pire esclavage, et la liberté n'est qu'à celui qui de son entier consentement vit sous la seule conduite de la Raison. Quant à l'action par commandement, c'est-à-dire l'obéissance, elle ôte bien en quelque manière la liberté, elle ne fait cependant pas sur- le-champ un esclavage, c'est la raison déterminante de l'action qui le fait. Si la fin de l'action n'est pas l'utilité de l'agent lui-même, mais de celui qui commande, alors l'agent est un esclave, inutile à lui-même ; au contraire, dans un Etat et sous un commandement pour lesquels la loi suprême est le salut de tout le peuple, non de celui qui commande, celui qui obéit en tout au souverain ne doit pas être dit un esclave inutile à lui-même, mais un sujet. Ainsi cet Etat est le plus libre, dont les lois sont fondées en droite Raison, car dans cet Etat chacun, dès qu'il le veut, peut être libre, c'est-à-dire vivre de son entier consentement sous la conduite de la Raison ». Baruch SPINOZA. Traité théologico-politique. Eléments d'introduction Thème: la liberté Thèmes associés: la raison, le bonheur, le sujet, l'Etat. Thèse: La liberté consiste à obéir à une loi raisonnable. Elle est tout entière dans l'autonomie de la raison qui obéit volontairement à sa propre loi et non dans la licence des passions. Problème: En quel sens peut-on à la fois obéir et être libre ? La liberté ne suppose-t-elle pas, comme on le croit habituellement, une indépendance absolue par rapport à toute autorité qui viendrait la limiter ? Comment peut-on donc soutenir que la liberté nécessite d'obéir à un ordre alors qu'on pense plutôt que la liberté ne doit pas avoir de limites ? Plan Critique de l'opinion commune: La liberté n'est pas la licence mais la conduite raisonnable et autonome (l.1 à l.4 ) "On pense que l'esclave est celui qui agit par commandement et l'homme libre celui qui agit selon son bon plaisir. Cela cependant n'est pas absolument vrai, car en réalité être captif de son plaisir et incapable de rien voir ni faire qui nous soit vraiment utile, c'est le pire esclavage, et la liberté n'est qu'à celui qui de son entier consentement vit sous la seule conduite de la Raison." 1. Être libre n'est pas "agir selon son bon plaisir" L'esclavage et la liberté ne sont pas là où « on » les croit habituellement. Selon l'opinion commune en effet, le point de vue impersonnel du « on » influencé par le «ouï-dire » et le « on-dit », niveau le plus bas de la pensée selon Spinoza, obéir, c'est nécessairement perdre sa liberté, et être libre, c'est être indépendant de toute limite et de toute loi, faire ce que l'on veut en étant soumis à aucun ordre et à aucune autorité supérieure à soi. C'est à ces deux préjugés que Spinoza s'attaque d'abord pour montrer que, s'il y a bien une part de vérité dans ces idées reçues, elles restent cependant encore confuses. Être réduit en esclavage est évidemment une négation de la liberté : l'homme n'est pas maître de soi parce qu'il est contraint par la force d'un autre. En obéissant à la puissance et à l'autorité arbitraire d'un maître qui nous force à agir sans notre consentement, nous lui sommes absolument soumis, nous perdons ainsi le pouvoir d'agir par nous-même. Nous ne nous appartenons plus mais nous appartenons à un autre : nous sommes absolument assujettis, réduits en esclavage. Mais si l'esclavage est obéissance contrainte à l'autorité d'un maître, cela signifie-t-il pour autant que la liberté soit une absence d'obéissance ? L'opinion commune a tendance à faussement généraliser ce qui n'est valable que pour un type d'expérience. Spinoza soutient alors le paradoxe suivant: si l'esclave a perdu sa liberté parce qu'il obéit, l'homme libre en dispose parce que lui aussi obéit. Ce n'est donc pas l'obéissance qui permet de distinguer la situation de l'esclave et de l'homme libre: ce critère est trop général et insuffisant pour comprendre l'essence de la liberté, pour en saisir clairement le concept. En quel sens la liberté suppose-t-elle donc l'obéissance ? Pourquoi l'indépendance absolue n'est-elle qu'une illusion de liberté, idée paradoxale qui déstabilise nos croyances habituelles puisque nous sommes d'abord convaincus qu'être libre, c'est faire absolument tout ce qui nous plaît, autrement dit agir sous l'autorité de notre bon plaisir ? N'avons-nous pas en effet le sentiment d'être pleinement libres dans la licence, lorsqu'aucune loi ne nous limite et que nous pouvons satisfaire tous nos désirs, lorsque nous faisons tout ce que nous voulons selon les décisions de notre bon vouloir ? Comment Spinoza peut-il donc soutenir qu'agir en ne se laissant guider que par ses désirs, ce qu'il appelle dans son traité les instincts de l'appétit, autrement dit les impulsions ou tendances spontanées de notre nature animale qui visent leur satisfaction en vue d'un plaisir sensuel immédiat, est le contraire même de la liberté et le "pire esclavage"? Pour deux raisons. La première tient au fait que l'homme qui ne cultive que le plaisir par la satisfaction continuelle de ses désirs finit par ne plus être maître de lui-même mais esclave de ses passions, de ses appétits. Être dépendant de ses passions, c'est être incapable d'y résister et de les contrarier, c'est être tout entier à la merci des humeurs imprévisibles de son caractère et des caprices de ses désirs, c'est être absolument déterminé par nos pulsions sans pourvoir les maîtriser. L'homme qui tombe ainsi dans la satisfaction excessive des désirs est bien convaincu qu'en assouvissant ses envies au maximum il est le plus libre possible, mais en réalité il ne fait que s'emprisonner lui-même en se condamnant à être son propre esclave. Il se croit libre tout en s'enfermant lentement dans une prison dont il est lui-même l'artisan, la prison de la passion et de la dépendance absolue au désir. Prisonnier de lui-même, captif de la tyrannie des désirs qui le font agir sans qu'il soit capable de les maîtriser, il est incapable de raisonner sa nature et ses tendances impulsives. L'homme est alors comparable à un animal exclusivement motivé par ses besoins et ses pulsions. Toutes les expériences addictives montrent par exemple qu'en proie à une addiction, on devient incapable d'y résister, et même quand on prend conscience de sa puissance et de la dépendance qu'elle a occasionnée. L'alcoolique voudrait bien s'arrêter de boire tellement il souffre désormais de sa drogue, mais il en est incapable: la passion a pris le pas sur la raison et c'est le désir qui fait désormais autorité dans son âme en lui dictant ses actes. Il a ainsi perdu une des facultés qui font la dignité d'un homme, à savoir l'intelligence de sa raison qui donne le pouvoir d'agir dans son propre intérêt. D'où la seconde raison de la thèse de Spinoza: la dépendance aux passions est nuisible à l'homme et conduit in fine au malheur. En plus d'être un esclavage, elle est le pire qui soit tellement elle abandonne l'homme au vice et au mal, le déshumanisant progressivement jusqu'à l'abêtir et le rendre incapable de résister à ses pulsions. On voit bien que l'excès des désirs, s'il procure d'abord du plaisir, se transforme finalement en souffrance et en servitude. Il nuit au corps et à l'esprit, détruisant les facultés physiques et mentales, devenant par ailleurs souvent le motif de la perversion morale ou du crime. Combien d'actes malveillants ont été commis sous l'empire de la passion ? Et ne parle-t-on pas d'ailleurs des "crimes passionnels" ? Dans ces états-là, l'homme finit par perdre le contrôle de sa raison et de lui-même. Devenant inconscient, il ne sait plus clairement ce qu'il fait et prend le risque de devenir dangereux pour lui-même et pour autrui. Ses actes lui sont nuisibles et il n'est pas capable de faire un usage utile de sa raison qui puisse augmenter sa puissance. C'est donc parce que la licence des passions rend l'homme mauvais et esclave de ses désirs qu'elle est la négation même de la liberté. 2. Être libre, c'est obéir volontairement à la Raison. C'est pourquoi Spinoza a...

spinoza

« 2 même quand on prend conscience de sa puissance et de la dépendance qu'elle a occasionnée.

L'alcoolique voudrait bien s'arrêter de boire tellement il souffre désormais de sa drogue, mais il en est incapable: la passion a pris le pas sur la raison et c'est le désir qui fait désormais autorité dans son âme en lui dictant ses actes.

Il a ainsi perdu une des facultés qui font la dignité d'un homme, à savoir l'intelligence de sa raison qui donne le pouvoir d'agir dans son propre intérêt. D'où la seconde raison de la thèse de Spinoza: la dépendance aux passions est nuisible à l'homme et conduit in fine au malheur.

En plus d'être un esclavage, elle est le pire qui soit tellement elle abandonne l'homme au vice et au mal, le déshumanisant progressivement jusqu'à l'abêtir et le rendre incapable de résister à ses pulsions.

On voit bien que l'excès des désirs, s'il procure d'abord du plaisir, se transforme finalement en souffrance et en servitude.

Il nuit au corps et à l'esprit, détruisant les facultés physiques et mentales, devenant par ailleurs souvent le motif de la perversion morale ou du crime.

Combien d'actes malveillants ont été commis sous l'empire de la passion ? Et ne parle-t-on pas d'ailleurs des "crimes passionnels" ? Dans ces états-là, l'homme finit par perdre le contrôle de sa raison et de lui-même.

Devenant inconscient, il ne sait plus clairement ce qu'il fait et prend le risque de devenir dangereux pour lui-même et pour autrui.

Ses actes lui sont nuisibles et il n'est pas capable de faire un usage utile de sa raison qui puisse augmenter sa puissance.

C'est donc parce que la licence des passions rend l'homme mauvais et esclave de ses désirs qu'elle est la négation même de la liberté. 2.

Être libre, c'est obéir volontairement à la Raison. C'est pourquoi Spinoza affirme que la liberté authentique tient dans l'obéissance à la raison, faculté de l’esprit par laquelle nous pouvons connaître ce qui utile à notre nature d'homme.

La lucidité de la raison s'oppose à l'inconscience et à l'irréflexion de l'appétit, qui finit par nuire à l'homme s'il gouverne sa conduite.

La pleine liberté suppose la combinaison de deux forces: le choix de la volonté qui est "l'entier consentement" du sujet, et l'intelligence de la raison qui est la connaissance claire et distincte de qui nous est utile.

Chez Spinoza, intelligence et volonté ne font finalement qu'un, car celui qui connaît sa nature tend nécessairement à son propre bien.

Nul être ne recherchant naturellement son propre mal, il peut arriver qu'il confonde ce qui lui est nuisible avec ce qui lui est utile par défaut de compréhension.

Tout homme étant naturellement enclin à persévérer dans son être pour augmenter sa puissance et gagner en sécurité, confort et bien-être, la raison est la faculté de connaître à partir de laquelle nous pouvons savoir ce qui nous est utile.

Si l'homme tend naturellement à bien vivre, Spinoza suppose que la connaissance claire du bien détermine nécessairement la justesse de l'action, renouant par là avec un argument de type socratique selon lequel la connaissance de la vertu rend nécessairement vertueux.

L'homme ne peut ainsi jamais agir contre lui-même s'il sait où est vraiment son bien.

On objectera alors qu'il ne suffit pas de savoir où est le bien pour le faire, en prenant pour preuves l'imbécilité ou la criminalité humaine.

Je sais clairement que fumer m'est nuisible, et pourtant je le fais.

Suivant Spinoza, il faut alors répondre que si l'on continue à agir contre soi, c'est qu'on n'a pas encore assez clairement compris ce qui est bon pour nous.

On peut cependant raisonnablement douter que la connaissance du bien et du mal suffise pour déterminer la volonté car on observe bien des hommes qui savent qu’ils font le mal mais qui n’ont pas ou plus la volonté de faire le bien.

Aristote affirme par exemple que c'est l'habitude du bien qui nous fait devenir bon et non pas seulement sa science.

Il ne suffit pas de savoir où est le bien pour le faire, mais il faut le faire pour effectivement tendre au bien-être.

Quoiqu'il en soit, l'homme libre n'obéit pas à une volonté ignorante, déréglée et irrationnelle, mais il s'oblige à respecter les règles de la raison qu'il a spontanément choisies de suivre.

Pour être pleinement libre, il faut savoir choisir ce qui nous convient, connaissance qui nous est donnée par l'usage de la raison, en décidant de vivre sous son autorité.

Autrement dit, il est nécessaire d'éclairer le choix de la volonté par la lumière de l'intelligence qui montre ce qu'il faut faire pour agir en sa propre faveur. L'homme esclave de ses passions a en revanche l'esprit obscur sur ses véritables intérêts: il confond l'intérêt immédiat des passions, le faux plaisir de la satisfaction immédiate et éphémère et le bonheur durable de vivre dans la connaissance de notre nature.

Ne sachant pas la différence entre la contrainte, qui est l'action d'une force extérieure imposée au sujet indépendamment de sa volonté, et l'obligation, qui est l'action de la raison morale du sujet quand il s'engage spontanément à être l'auteur responsable de sa conduite, l'opinion commune croit que s'en remettre aux commandements de la raison est un assujettissement.

Elle prend indistinctement l'obligation pour la contrainte, la contrainte pour la violence, la violence pour l'obéissance et l'obéissance pour la servitude.

Mais être obligé n'est pas être asservi, et choisir d'obéir à un ordre raisonnable n'est pas un renoncement mais une augmentation de la liberté.

Le sujet libre est en effet à lui-même sa propre autorité: il n'est pas contraint et forcé d'être dirigé par une autorité autre dont il ne décide pas, mais il est lui-même et à lui-même sa propre autorité s'obligeant spontanément à respecter ses devoirs.

Est libre l'homme qui n'obéit qu'à lui-même, qui s’autodétermine, qui est souverain et directeur de sa propre conduite.

Comme le précise Spinoza, si elle est nécessaire, cette condition n'est pas encore suffisante (" cela cependant n'est pas absolument vrai») car un homme licencieux peut encore n'obéir qu'à lui-même sans pour autant être, on l'a vu, pleinement libre.

Il s'agit donc bien de n'obéir qu'à soi, mais plus précisément encore, à ce qui en soi a le pouvoir de savoir comment être libre: non pas aux passions irrationnelles, qui peuvent devenir destructrices et tyranniques, mais à la raison qui est la faculté de connaître ce qui nous est objectivement utile.

C'est la Raison comme faculté de bien juger qui doit faire autorité pour diriger la volonté à bon escient en lui montrant les causes, les moyens et les fins qui règlent l'action.

La raison permettant d'avoir une idée claire et adéquate de ce qui est utile au sujet, elle est la condition d'une action vertueuse.

La liberté suppose donc bien ici une volonté libre et capable de choisir par elle- même les fins et les moyens de son action.

Mais elle suppose aussi nécessairement une intelligence de la raison pour que les choix soient vraiment utiles au sujet et que la volonté choisisse bien.

On ne saurait être pleinement libre contre soi-même, par où l'on voit que la liberté suppose non seulement le choix de la volonté mais aussi la qualité morale de ce choix, l'essentiel n'étant pas ici de choisir mais de bien choisir.

Il n'y a d'ailleurs pas de contradiction ici entre le choix utile et le plaisir, mais bien au contraire une continuité constructive.

Alors que le plaisir occasionné par la satisfaction des désirs excessifs finit par une rupture destructrice de la liberté et du bonheur, le plaisir occasionné par la réalisation de la volonté raisonnable conduit à unir la maîtrise de soi et la satisfaction durable.

Approfondissement C'est pourquoi Platon insiste notamment sur le divorce moral qui a lieu dans l'âme de l'homme tyrannique en proie aux désirs irrationnels: sa raison ne parvenant plus à diriger sa volonté et sa volonté n'ayant plus le courage de modérer ses désirs, il est en contradiction avec lui-même.

En revanche, dans l'âme de l'homme " musical ", âme dans laquelle l'harmonie de la justice a lieu en accordant ces trois facultés sous le règne de la raison, le plaisir s'associe à la raison.

N'étant pas contraint par ses désirs, un tel homme fait l'expérience d'une liberté réelle, et le sentiment heureux qu'il éprouve à réaliser ses projets en. »

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