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« L'ESPRIT DES LOIS » DE MONTESQUIEU

Publié le 06/09/2018

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esprit

à des tendances directrices dont la raison rend compte ; que l'intelligence en un mot est capable de débrouiller le chaos apparent des législations qui, dans le temps et l'espace, ont régi ou régissent les sociétés.

Un Gascon de génie, Michel de Montaigne, avait pris un maiin plaisir à faire défiler devant le lecteur, dans le chapitre des Essais intitulé << De la coutume », la procession hétéroclite des prescriptions humaines, lois, usages et abus, institutions et mœurs. Quel gâchis ! Quelle histoire sans queue ni tête, pour paraphraser Shakespeare, contée par un idiot ! Royaume de l'arbitraire, du caprice et de la fantaisie ! C'est cet autre Gascon, de génie égal, mais tout autre, Montesquieu, qui lui apporte, après plus d'un siècle et demi, la réplique : < J'ai d'abord examiné les hommes, écrit-il dans sa préface, et j'ai cru que dans cette infinie diversité de lois et de mœurs, ils n'étaient pas uniquement conduits par leurs fantaisies. » Pas plus que, dans l'histoire, ils ne sont simplement les jouets d'une succession capricièuse d'accidents particuliers. Historien de la grandeur et de la décadence de Rome, dans ses Considérations (1734), Montesquieu refuse à la fortune, si chère à Machiavel, le privilège de dominer le monde. Il croit constater que les Romains avaient été constamment heureux quand ils s'étaient gouvernés sur un certain plan, constamment malheureux quand ils en avaient suivi un autre ; il écrit avec une vigueur lapidaire :

Il y a des causes générales, soit morales, soit physiques, qui agissent dans chaque monarchie, l'élèvent, la maintiennent, ou la précipitent ; tous les accidents sont soumis à ces causes ; et, si le hasard d'une bataille, c'est-à­dire une cause particulière, a ruiné un État, il y avait une cause générale qui faisait que cet État devait périr par une seule bataille ; en un mot l'allure principale entraine avec elle tous les accidents particuliers.

Allure principale, causes générales, soit morales, soit physiques . .. ce qui explique rationnellement l'histoire, ce qui l'explique humainement, sans qu'il soit besoin de faire appel, comme les chrétiens, comme un Bossuet, à la Providence, doit aussi pouvoir expliquer, rationnellement et humainement, les lois, les mœurs, < cette infinie diversité de lois et de mœurs n. Là où la première apparence ne laisse voir qu'une juxtaposition toute gratuite d'institutions, l'examen rationnel découvre des liaisons logiques et comme des harmonies concertées. Ainsi - dira Taine - d'une horloge, où, du ressort principal, du grand rouage central, dépendent une << multitude de rouages secondaires n.

Le tout, pour l'observateur, est de savoir chercher ce ressort principal. Dans les sciences exactes : physique, chimie, histoire naturelle, le succès dépend d'une bonne méthode expérimentale. Or ces sciences exactes sont fort à la mode au· xvme siècle : les mondains se piquent de travailler en laboratoire ; les écrivains, qui sont aussi des mondains, de même. Qui donc décapite quarante escargots et limaces pour vérifier l'assertion d'un naturaliste ? Voltaire. Qui dissèque des grenouilles ? Montesquieu, précisément. C'est d'ailleurs pour lui plus qu'un << flirt » avec la mode ; ces tâton­nements scientifiques expriment, Dedieu l'a montré, une tendance profonde de son

 

esprit.       ·

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