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Peut-on être juste?

Publié le 03/03/2005

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L'identité serait une relation non pas entre objets, mais entre des noms d'objets, de sorte que l'existence même d'êtres identiques serait exclue par cette analyse sémantique. Dans ce cas, notre première formulation de la règle de justice, qui a paru aller tout à fait de soi, devient malheureusement sans application. Pour qu'elle puisse effectivement nous guider dans l'action, la règle de justice devrait nous indiquer, non pas comment il faut traiter deux êtres identiques, mais comment il faut traiter de façon juste des êtres qui ne sont pas identiques. Pratiquement, d'ailleurs, celui qui se plaint d'avoir été traité injustement, et qui se compare, pour justifier ses plaintes, à d'autres que lui, ne dira jamais que ceux auxquels il se compare lui sont identiques. Au contraire, il fera toujours état de quelque différence qui le distingue des autres il dira, par exemple, que son concurrent, ou son rival, avait auprès de ceux qui devaient prendre la décision, des protections dont lui-même était dépourvu; il fait donc état, nettement, d'une différence. Mais il insistera sur le fait que ces différences qu'il reconnaît, et qui lui semblent avoir été décisives, n'auraient dû jouer, en l'occurrence, aucun rôle. Il se plaindra de ce que des éléments, étrangers d'après lui à la question, ont été déterminants; en d'autres termes, il prétend que certains éléments, considérés par lui comme essentiels, et rien que ces éléments, au raient dû être pris en considération. Cette analyse nous permet de conclure que, en pratique, la règle de justice exige que soient traités de la même façon, non pas des êtres identiques ce qui serait un cas particulier très rare, sinon inexistant mais des êtres considérés comme essentiellement semblables. Et nous entendrons par essentiellement semblables des êtres entre lesquels n'existent pas des différences essentielles, des différences qui importent en l'occurrence , et dont on doit tenir compte.   - 5 La justice totale n'est pas possible, car il subsistera toujours une certaine inégalité, malgré nos efforts pour être juste comme le montre Durkheim dans  Le Suicide (1897) : à l'héritage social qui diffère selon les personnes en les faisant riche ou pauvres, à cette inégalité foncière entre les individus subsistera toujours une autre forme d'inégalité , une inégalité naturelle, celle des talents plus difficile à congédier.

Les pouvoirs de l’homme pour dompter la nature témoignent certainement de sa capacité à dépasser par son travail la simple nécessité. Pourtant ces pouvoirs sont bien limités lorsque les hommes doivent faire face aux relations sociales beaucoup plus complexes entre les hommes et, doit-on le reconnaître,  bien des progrès restent à accomplir dans ces domaines, et c’est notamment le cas de la justice, de notre pouvoir d’être juste en n’importe quelles circonstances envers nous-mêmes mais aussi et surtout envers autrui.  

D’où la question du sujet : peut-on être juste ? la question pourrait être surprenante mais elle questionne bien notre capacité à être juste, elle ne nous demande pas si on doit être juste car tout le monde plus ou moins répondrait naivement par l’affirmative, mais si on le peut. Sommes-nous capables d’être juste envers autrui et ceci en n’importe quelle circonstance ?

Pour répondre à la question, faudra-t-il préalablement nous demander ce que peut bien vouloir signifier être juste, et tout dépendra de cette réponse pour questionner par la suite nos prétendues possibilités, pouvoirs, capacités d’être juste, autrement dit nous essayerons de voir les conditions de possibilité du juste, enfin et surtout nous verrons qu’il existe des limites à notre souci d’être juste.    

« 2 Le pouvoir d'être juste ? 1 On peut être juste si on le veut ( il y a certainement des limites) Pour être juste, il faut le vouloir, c'est-à-dire agir pour la justice et traiter autrui de la même manière qu'onsouhaiterait potentiellement qu'il nous traite.

On peut le vouloir parce que cela est dans notre intérêt, pour notrepréservation.

2 On peut être juste si tout le monde est d'accord sur les règles dujuste et de l'injuste au travers d'une règle générale , la loi.

C'est la position de Rousseau dans le Contrat Social .

Le chapitre 6 du Contrat social montre que seule la loi peut assurer l'égalité entre les individus. Simplement encore faut-il se mettre d'accord sur ce type d'égalité : c'estbien parce que la loi est générale en son principe , et qu'elle ne considère jamais un homme comme individu ni une action particulière, mais les sujets encorps, et les actions comme abstraites, qu'elle est générale.

Affirmer cettegénéralité de la loi, c'est insister chez Rousseau sur deux points précis : lepremier, c'est que chacun doit s'y conformer pour que la situation entre lessujets ne dégénère en une injustice brutale et ruineuse.

Le second pointconcerne l'idée que la loi est une potentialité limitée pour Rousseau : elleinstitue des prérogatives aux individus, instituant par exemple des privilèges,classe sociale , droit à ces classes sociales, établissant un gouvernementhéréditaire, mais elle est dans l'impossibilité de décider de ses choix , car seulle peuple est le commanditaire d'une telle action.

‘'Elle peut mais elle ne peutpas'’ affirme souvent Rousseau dans ce chapitre 6 , montrant qu'en définitif ,les lois sont l'acte d'une volonté générale, le peuple soumis au lois doit enêtre l'auteur.

Mais la volonté générale doit être éduquée , car le peuple nesait jamais trop ce qu'il veut.

3 On peut être juste si on parvient à réduire les inégalités entre les hommes : pourtant l'idéal d'égalité se heurte chez Kant à l'émergence d'un pouvoir arbitraire héréditaire qui hypothèque, c'est-à-dire annule, supprime, sans cesse la promotion socialedes individus, à cause de leurs origines sociales.

Kant alors critique cetteinégalité institutionnalisée : « il faut que tous les membres y puissent atteindre tout niveau de situation où peuvent l'élever à son talent, sontravail et sa chance ; et il n'est pas permis à ses co-sujets de lui barrerla route en vertu de prérogative héréditaire qui le retienneéternellement lui et ses descendants à un rang inférieur au leur.

» Si cette notion d'égalité se base sur des critères sociaux, promulgués, édictéespar une partie de la population du fait de son rang, de ces attributions, il estfort à parier que cette égalité n'en est pas une, mais qu'elle se base sur unedécision qui est arbitraire parce qu'elle fait justement la distinction entre lesindividus , et plus particulièrement entre les êtres humains et leurs dignitésmorales.

N'allons surtout pas croire que Kant considère les distinctionssociales entre les individus comme le mal absolu : non seulement Kant affirmeque ces distinctions sociales comportent une certaine utilité, puisqu' ellespermettent à certain individus d'exercer pleinement leurs compétences enfaveur de la société dans son ensemble , mais aussi qu'elle donne à cettesociété un certain ordre, une certaine structure hiérarchique, qui évite ladéperdition des talents, et qui permet surtout de poser ce qui ont réussi,comme des modèles à atteindre.

En fait Kant affirme des dépendances irréductibles entre les individus qui fait dire àKant que « l'égalité de droit est toute à fait compatible avec l'inégalité de fait » .voir7.

Mais alors d'où peut-on venir le problème ? Ce que nous souhaiterions montrer , c'est qu' il y a une conception de l'égalité chez Kant tout àfait originale en ce sens qu'elle ne repose pas simplement sur une conception de l'égalité comme équilibre absoluentre les individus.

En effet , l'égalité est un droit de l'homme en tant que demande effective des individus àaccéder à davantage de droit, eu égard à une inégalité de fait intolérable.

Ce n'est pas seulement un simple calcul arithmétique dans lequel les individus veulent être au même niveau que leurs semblables, mais aussi et surtout la conscience qu'ils ont d'avoir moins de droit par rapport aux autres.

En analysant en terme de « supériorité » et « d'infériorité » , Kant critique surtout les fondements tout à fait arbitraires sur lesquels reposent les statuts héréditaires de certains individus, statuts qui supposent en fin de compte que les individus n'ont pas à se battre comme les autres pour l'acquisition de leurs droits. 4 On peut être juste si l'on parvient à définir les règles du mien et du tien, bref les règles de la propriété.Cette inégalité structurelle connaît une analyse beaucoup plus poussée lorsque Kant s'interroge sur la distinction àl'intérieur même de la propriété entre « les grands propriétaires et les artisans ».

La propriété est un droit de l'homme fondamental qui garantie à un individu la possession effective et durable de son bien grâce à la loi, ce quilui permet d'éviter les désagréments d'une spoliation illégale ou d'un empiétement d'autrui.

Kant ne cesse del'affirmer, c'est même d'ailleurs ce qu'une société unie permet pour lui de garantir : « le droit des hommes sous des. »

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