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Peut-ont parler pour ne rien dire ?

Publié le 27/12/2005

Extrait du document

Il continue d'être un médiateur essentiel, et un médiateur ambivalent. Ce qui a été modifié avec l'apparition des nouveaux médias, c'est la multiplication exponentielle des mises en relation.   Un langage pour dominer :   L'idée que le langage est un instrument en appelle une autre, qu'il sert à manipuler son objet en vue d'une fin quelconque. Effectivement. Le langage peut-être utilisé comme moyen de pression, de domination et même de manipulation. Dès que nous posons une fin à réaliser  par le langage : vendre un produit, ramener à soi les suffrages de l'opinion publique, assurer devant autrui le bien-fondé d'une croyance, d'un choix etc. nous admettons que le langage doit être un moyen efficace de persuasion.     On appelle rhétorique l'art de bien parler en vue d'obtenir par la parole les fins que l'on poursuit. Le rhéteur est celui qui sait déployer toutes les ressources du langage pour tenter de plier la volonté de celui à qui il s'adresse, pour obtenir de lui ce que l'on désire. Gorgias, face à Socrate, est intarissable, il est l'homme de l'éloquence, l'homme d'esprit qui brille en société.
  •  ANALYSE DE L'ÉNONCÉ

Le verbe pouvoir, en français, renvoie à deux sens distincts. Il peut signifier une capacité. (En ce sens le sujet est le même que « Peut-on vraiment parler pour ne rien dire ? «. Il peut signifier avoir le droit de. (En ce sens il faut s'interroger s'il est légitime de parler pour ne rien dire). Dans le cas où Von aurait pu faire admettre qu'il est impossible de parler pour ne « rien dire «, il y aurait lieu cependant de se demander s'il ne peut y avoir une « dégradation « telle de l'usage de la parole que ce qui est « dit « équivaut non dans les faits mais en valeur à ce « rien « qui ne manquerait pas — en ce sens — de faire problème.  

  • PROBLÉMATIQUE

C'est une réflexion sur le langage qu'il s'agit de faire. Il faut donc ici considérer le langage comme une puissance de mettre en relation, tout d'abord ce qui apparaît et ce qui est caché. Ensuite, les signes linguistiques entre eux, « nous appelons signe, la combinaison du concept et de l'image acoustique...Nous proposons de conserver le mot signe pour désigner le remplacer concept et image acoustique respectivement par signifié et signifiant « F. de Saussure Cours de linguistique général. Enfin, deux utilisateurs au moins, entre lesquels circulent une information : un locuteur, un auditeur, un émetteur, un récepteur. Lorsque l'on se demande à quoi sert le langage, on répond sans réfléchir qu'il sert à la communication. Si l'on part de cette affirmation du langage comme étant essentiellement communication, et que l'on interroge celui-ci nous répondrons alors à la question de savoir à quoi sert le langage et serons alors en mesure de savoir si l'on peut parler pour ne rien dire.

 

« Puisqu'il a pour fonction essentielle l'expression de la pensée et la communication entre les hommes, il est clair que lelangage joue un rôle éminent dans les phénomènes de pouvoir.

Il permet ou facilite l'action; il l'interdit ou la sanctionne;le droit se dit et s'écrit et ceux qui dirigent la Cité exercent leur fonction par l'intermédiaire du langage, tout comme ilssont attentifs à en capter les signes. Dans toutes les sociétés, les titulaires du pouvoir ont possédé la maîtrise du langage ou des langages propres àorienter l'action d'autrui.

Ceux-là sont détenteurs de ce "maître-mot" que Kipling attribuait dans la jungle à l'enflant démuni mais qui finirait par s'emparer de la fleur rouge.

Prêtres et scribes, pontifes et rois, légistes et avocats,journalistes et hommes des médias connaissent tour à tour cette puissance.

L'agora d'Athènes était le lieu de disputes,de collusions oratoires.

De même, Dieu se manifeste par cet acte de langage: " Au commencement était le Verbe" disait déjà Saint-Jean. Dans les sociétés complexes, le langage est l'expression du pouvoir.

A tel point que le fait de nommer, dequalifier un Pouvoir, lui donne sa cohérence, sinon son existence: qui dit monarchie se met en mesure d'élaborer lesystème monarchique, formule la série des concepts qui se trouvent mis dans la langue. Toutes les institutions majeures ont pour rôle de tester et d'élaborer le langage du Pouvoir.

L'un des privilègesles plus incontestables du milieu dirigeant est précisément de conserver la langue.

Le langage de la culture se confondavec celui de la classe dirigeante.

Les faits langagiers montrent la capacité "performative" des classes dirigeantes.

Et,le propre de ces dernières est d'éviter ou d'intégrer la "gheottisation" du langage: culture jeune (BD, musique,expressions "branchées"...).

Dès lors, si le pouvoir manifeste son emprise sur le langage, ce dernier à son tourinfluence le Pouvoir, à tel point que l'évolution des phénomènes langagiers a une signification historique et politiqueconsidérable: l'invasion du franglais traduit ainsi notre infériorité à l'égard de l'Amérique anglophone, lorsque la Franceétait puissante, on parlait français à Saint-Pétersbourg.

De même, à la limite, on obtient le phénomène de la langue debois qui est une conséquence de la glaciation du langage et/ou de la glaciation du Pouvoir. Aussi, il faut bien qu'un jour, change ce langage jugé rétrograde.

Et, la révolution se manifeste aussi par un acte delangage.

La prise du pouvoir ne s'accompagne pas par hasard de déclarations solennelles, de thèses ou de professionde foi. En bref, on peut dire que le rêve de puissance est un rêve de langage.

Il fonde et manifeste le Pouvoir et celui-cis'exerce par celui-la. Un langage pour penser : Il ne faut pas confondre le langage dans son essence et son usage instrumental, soit comme outil decommunication, ou comme instrument de domination.

Quand on parle d'instrument, on oppose l'homme et la Nature.Or le langage n'est pas un outil pour fabriquer une chose et ne se situe pas dans une opposition à la nature.

Il estdans la nature de l'homme qui ne l'a pas fabriqué, au lieu d'être un instrument de communication, il est le lieu del'exercice de la pensée de l'homme.

C'est ce que nous devons appeler la vocation logique du langage.

Prenons garde donc à ce qui est implicite dans l'acception courante de la valeur du langage comme un instrument.

Dire que lelangage est un instrument implique qu'entre le langage et le sujet, il y a une distance telle que le sujet peut se saisir du langage comme d'un outil parmi d'autres. En un sens, si le langage peut être dit servir à quelque chose, c'est qu'il sert à penser.

Le verbe penser désigne alors l'acte de la pensée se moulant dans les mots, la pensée raisonnant dans le langage, pour se trouver et se dire.Dans ce cas, ce n'est plus la pensée au sens des modes de conscience qui me traverse l'esprit, non pas "une"pensée en général, mais la Pensée au sens de la réflexion , privilège de l'homme comme être pensant.

Dire que le langage sert à penser, c'est dire que sa vocation s'accomplit comme expression de la raison raisonnante.

La penséerationnelle, la pensée discursive suppose une forme de verbalisation, même quand elle est un dialogue de la penséeavec elle-même.

La pensée suppose la logique et la logique ramène au logos. «La langue est un instrument à penser.

Les esprits que nous appelons paresseux, somnolents, inertes, sontvraisemblablement surtout incultes, et en ce sens qu'ils n'ont qu'un petit nombre de mots et d'expressions; et c'estun trait de vulgarité bien frappant que l'emploi d'un mot à tout faire.

Cette pauvreté est encore bien riche, commeles bavardages et les querelles le font voir; toutefois la précipitation du débit et le retour des mêmes mots montrentbien que ce mécanisme n'est nullement dominé.

L'expression "ne pas savoir ce qu'on dit" prend alors tout son sens.On observera ce bavardage dans tous les genres d'ivresse et de délire.

Et je crois même qu'il arrive à l'homme dedéraisonner par d'autres causes; l'emportement dans le discours fait de la folie avec des lieux communs.

Aussi est-ilvrai que le premier éclair de pensée, en tout homme et en tout enfant, est de trouver un sens à ce qu'il dit.

Siétrange cela soit, nous sommes dominés par la nécessité de parler sans savoir ce que nous allons dire; et cet étatsibyllin est originaire en chacun ; l'enfant parle naturellement avant de penser, et il est compris des autres bienavant qu'il se comprenne lui-même.

Penser c'est donc parler à soi.» Alain Au terme de cette réflexion, nous pouvons conclure que parler pour ne rien dire n'a pas de sens, ou tout du moinspas de sens philosophique.. »

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