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PLATON: Tous au fond de la Caverne !

Publié le 12/05/2005

Extrait du document

platon
- Tu décris là, dit-il, une image étrange et de bien étranges prisonniers. - Ils sont semblables à nous, dis-je. Pour commencer, crois-tu en effet que de tels hommes auraient pu voir quoi que ce soit d'autre, d'eux-mêmes et les uns des autres, si ce ne sont les ombres qui se projettent, sous l'effet du feu, sur la paroi de la grotte en face d'eux ? - Comment auraient-ils pu, dit-il, puisqu'ils ont été forcés leur vie durant de garder la tête immobile ? - Qu'en est-il des objets transportés ? N'est-ce pas la même chose ? - Bien sûr que si. - Alors, s'ils avaient la possibilité de discuter les uns avec les autres, n'es-tu pas d'avis qu'ils considéreraient comme des êtres réels les choses qu'ils voient ? - Si, nécessairement. - Et que se passerait-il si la prison recevait aussi un écho provenant de la paroi d'en face ? Chaque fois que l'un de ceux qui passent se mettrait à parler, crois-tu qu'ils penseraient que celui qui parle est quelque chose d'autre que l'ombre qui passe ? - Par Zeus, non, dit-il, je ne le crois pas. - Mais alors, dis-je, la situation qui résulterait de la libération de leurs liens et de la guérison de leur égarement, dans l'éventualité où, dans le cours des choses, il leur arriverait ce qui suit. Chaque fois que l'un d'entre eux serait détaché et contraint de se lever subitement, de retourner la tête, de marcher et de regarder vers la lumière, à chacun de ces mouvements il souffrirait, et l'éblouissement le rendrait incapable de distinguer ces choses dont il voyait auparavant les ombres. Que crois-tu qu'il répondrait si quelqu'un lui disait que tout à l'heure il ne voyait que des lubies, alors que maintenant, dans une plus grande proximité de ce qui est réellement, et tourné davantage vers ce qui est réellement, il voit plus correctement ? Surtout si, en lui montrant chacun des choses qui passent, on le contraint de répondre à la question : qu'est-ce que c'est ? Ne crois-tu pas qu'il serait incapable de répondre et qu'il penserait que les choses qu'il voyait auparavant étaient plus vraies que celles qu'on lui montre à présent ? - Bien plus vraies, dit-il. PLATON, La République, VII, 515a-515d.

Ce passage, l’un des plus célèbres de Platon, intervient dans le cadre d’un entretien continu entre Socrate et quelque uns de ses disciples et amis sur la nature du politique. Platon fait ici émerger, par le biais d’une allégorie (une métaphore), le thème du rapport des hommes au monde sensible. Platon expose ici la problématique de l’ignorance humaine. La thèse platonicienne est que l’homme est originellement prisonnier de l’illusion qu’exerce sur lui le monde sensible.

Nous pouvons discerner trois moments distincts dans l’exposition platonicienne de sa thèse :

Platon, par l’intermédiaire de Socrate, présente les hommes comme prisonniers d’une réalité illusoire (lignes 1 à 6).

Cette illusion persiste par la représentation des objets réels (lignes 7 à 15).

Finalement la force de l’illusion contraste avec l’aveuglement qui résulte de l’exposition de la vérité au regard humain (lignes 16 à 28).

 

platon

« nous incline à la croire sans réserve.

Elle n'est, en réalité, qu'une « représentation », un « simulacre » de la vérité.Les hommes sont, comme ces prisonniers, contraints par cette nature illusoire à ne voir que « les ombres qui se projettent, sous l'effet du feu, sur la paroi de la grotte en face d'eux ».

Les ombres projetées sur la paroi de la caverne symbolisent les objets du monde sensible, simples copies des objets vrais.

La caverne est le symbole denotre nature corporelle, obscure et soumise à la déchéance.

Le feu est la vérité elle-même dont le monde sensiblen'est qu'une représentation fallacieuse.

Le fait est que cette illusion est contraignante et persuasive puisque noussommes tous enclins à donner notre assentiment à la nature sensible de notre réalité initiale.

Notre regard, à l'imagede la « tête immobile » des prisonniers, est contraint par la nature sensible à se fixer sur ses objets.

Les hommessont donc plongés, originellement, dans un monde obscur et trompeur.

II) Les ombres de la vérité Platon introduit alors, par le biais de son allégorie, une dualité entre le monde réel et la représentation sensible(aisthêton ) de ce monde.

Paradoxalement les prisonniers prennent pour réelles les ombres, projetées par le feu sur la paroi en face d'eux, des objets transportés par ceux qui sont à l'extérieur de la caverne.

Les objets de notremonde sont donc de simples ombres, des projections des vrais objets.

Ce que décrit Platon ici, c'est le plus basdegré de la connaissance : la conjecture ( eikasia ).

Les objets connus ne sont alors que des images, des ombres, des apparences de vérité.

Platon opère alors astucieusement un renversement.

En effet son allégorie inversel'opinion commune, en faisant des objets perçus par les sens (ici le regard des prisonniers) de simples projections dela réalité.

La vérité devient alors un « au-delà » du monde sensible qu'est la caverne.De la même manière, les sons perçus par notre ouïe sont des illusions de vérité.

Les prisonniers prennent pour vraice que leurs sens ont l'habitude de percevoir.

Les sens sont donc trompeurs, ils donnent à sentir de simplesreprésentations de la réalité.

Mais si celle-ci n'est pas sensible, qu'elle est-elle ? La vérité est, chez Platon,accessible non par les sens, mais par l'intellect.

Elle est donc de nature « intelligible ».

Mais cet extrait, avant dedéfinir la méthode d'accès à la vérité platonicienne, est tout entier une critique radicale du rapport entre leshommes et le monde sensible.

Tant que l'homme reste prisonnier de ses sens et de ses perceptions, il reste dansl'ignorance, dans l'illusion sensible.

Celle-ci est d'autant plus forte qu'elle est originaire et continuelle.

III) Une vérité aveuglante À partir de la ligne 16, Platon imagine la possibilité que les hommes se libèrent de leurs chaînes.

Que se passerait-il,en effet, si ceux-ci étaient exposés à la vérité ? Elle serait aveuglante, à l'image de cette lumière à laquelle leprisonnier n'est pas habitué.

Resté durablement dans la pénombre de la caverne, le prisonnier sera aveuglé à mesurequ'il se rapprochera de la sortie de la caverne.Ici Platon désigne enfin le parcours vers la connaissance.

Il s'agit, en fait, d'un véritable arrachement à la situationoriginaire de l'homme comme prisonnier de l'obscurité de la caverne.

L'homme commun aura grand peine à se délivrer,se tourner vers la lumière entrante et se mettre en chemin pour gravir la pente qui le sépare de la sortie de lacaverne.

Le prix de la libération, de la vérité, est lourd et peu aisé.

Il s'agit d'une véritable « ascension » vers lalumière d'abord aveuglante de la vérité.

Si bien que cet homme ordinaire ne sera pas à même de la regarder.

Làintervient le philosophe, celui qui s'adresse au prisonnier aveuglé par cette lumière en lui disant « que tout à l'heure il ne voyait que des lubies, alors que maintenant, dans une plus grande proximité de ce qui est réellement, ettourné davantage vers ce qui est réellement, il voit plus correctement ».

Héro tragique puisque Platon admet l'idée qu'il n'arrivera pas à convaincre l'ex-prisonnier, ce dernier préférant croire que le monde de la caverne est le mondevéritable.

Chez Platon la connaissance est acte de l'esprit humain, philosophant, c'est-à-dire se détachantprogressivement du monde sensible, de la croyance, pour accéder enfin à la contemplation du monde « intelligible »(monde des « Idées »).

Seul le philosophe a le courage et l'intelligence nécessaires pour parvenir à cetteconnaissance rationnelle.

L'homme ordinaire, selon Platon, reste enfermé par un monde sensible, certes, tenace etpersuasif.

Conclusion De manière négative, Platon explique ici en quoi le chemin vers la vérité, la lumière, est difficile et aveuglant pour l'opinion commune.

La croyance et l'ignorance exercent, par leurs « ombres » de vérité, un fort pouvoir surles hommes, Platon peut être taxé d'élitiste car seul le philosophe peut parvenir à la vérité.

Sans oublier sa mission tragique puisqu'il se rebute, redescendant au fond de la caverne pour transmettre son savoir aux autres, au déni deceux-ci au profit de l'illusion. Cependant cette exposition négative permet à Platon de métaphoriser sa thèse philosophique de l'erreur et de la vérité et de déterminer la manière avec laquelle il convient de juger les apparences et les opinions qui endécoulent.. »

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