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Plotin par Michel Gourinat La principale occupation des médiocres est de tirer à eux, par la force et par la ruse, ceux qui leur sont supérieurs.

Publié le 05/04/2015

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Plotin par Michel Gourinat La principale occupation des médiocres est de tirer à eux, par la force et par la ruse, ceux qui leur sont supérieurs. Aussi faut-il savoir se défendre d'eux. C'est du moins le langage de Calliclès, dans le Gorgias de Platon, et de Plotin, au deuxième traité de la troisième Ennéade. Certes, dit Plotin, les méchants ont tout pouvoir, " car ils ne se sont jamais soucié que les meilleurs gouvernent et puissent ainsi prendre soin des autres - ils tuent, quand il naît parmi eux quelque homme supérieur ". Ainsi mourut Socrate, et cela donne aux âmes tendres l'occasion qu'elles cherchent sans cesse, et qui est de se plaindre : " Ce sont les méchants qui sont maîtres et seigneurs en politique, et les bons qui sont esclaves ! " " et à la guerre, ce sont les méchants qui dominent, et quelles hontes ne font-ils pas subir à leurs prisonniers, quand ils les emmènent en esclavage ! " Ainsi ce choeur lamentable s'en va répétant que ce monde est abandonné de Dieu. Plotin fait cette dure réponse, que le monde va bien comme il va, et que sa dureté est celle même de Dieu, qui n'est point tendre, parce qu'il est juste. Si au lycée les forts en gymnastique rossent les forts en thème, leur volent leurs livres et leur gâtent leurs beaux habits, " qu'y a-t-il dans cette affaire, sinon matière à rire ? ". Mais laissons de côté ces pugilats de lycéens, et ce qu'ils ont de puéril, laissons ces enfants grandir, qu'ils nous donnent " un plus beau spectacle " : la guerre. L'événement est le même : " Les uns ne veulent pas porter les armes - ce sont donc ceux qui sont armés qui l'emportent. " Telle est la loi, et la justice qui est celle de Dieu : " On se sauve à la guerre si l'on est homme, non en faisant des prières. " Il faut s'enfoncer dans la méchanceté des médiocres comme Socrate parmi la déroute des soldats, " tout rengorgé et le regard oblique - un tranquille regard de côté sur les amis et les ennemis " - aussi dangereux les uns que les autres sous le règne de la peur. " Aussi fit-il retraite en sûreté avec son compagnon : car ceux qui se tiennent comme ça dans la bataille, c'est bien rare qu'on y touche, mais on poursuit ceux qui fuient précipitamment. " Ce qu'il faut faire, c'est " bien faire voir, même de loin, que qui touche à pareil homme, il sera rudement reçu ", et non pas prier Dieu qu'il nous épargne les horreurs de la guerre, car à une telle prière, les cieux resteront toujours vides, et Plotin dit pourquoi : " Ce n'est tout de même pas à Dieu de prendre les armes pour les pacifiques ! " Belles âmes bêlantes, Plotin vous avertit que " les agneaux sont la proie des loups ". Doux agneaux de Dieu, il y a en vous moins de tendresse, que de véritable " mollesse ". Bien sûr, " les meilleurs sont parmi ceux qui souffrent violence ", mais cela prouve simplement qu'ils ne sont pas aussi supérieurs aux méchants qu'ils veulent bien le dire, " puisqu'ils ne se sont pas préparés à n'en pas souffrir ". " En cela qu'ils laissent prise au pouvoir des médiocres, ils sont eux-mêmes médiocres. " Calliclès le disait déjà, la philosophie est la grandeur et la noblesse de l'homme, elle seule prépare aux entreprises de grande race - et pourtant, passée la jeunesse, " elle amoindrit ", parce qu'elle déshabitue de se défendre, et de lutter. Platon le redit sans cesse, la philosophie est " jeu d'enfant ", et c'est pourquoi il y a quelque chose de puéril, pour un philosophe, à s'en prendre au cours du monde. Il vit d'une façon insensée, dans la négligence et l'incurie. Mais se laisser aller aux douceurs de la paix, cela interdit de se plaindre, quand les méchants prennent tout pouvoir : " Les méchants règnent par la lâcheté de leurs sujets ", dit Plotin, " c'est cela qui est juste, et non le contraire ". Ce dur langage est celui de la tradition grecque : " D'entre les vertus pratiques ", dit la Morale à Nicomaque, " les politiques et les guerrières l'emportent en beauté et en grandeur. " Mais au moment même où Aristote affirme ainsi que faire de la politique, et même faire la guerre, est l'acte de la plus belle vertu, il n'en situe pas moins le philosophe au-dessus du politique et du guerrier. Car sa morale est un eudémonisme, ce qui, si du moins nous traduisons correctement le mot " démon ", ne désigne pas cette platitude qu'est une morale du bonheur, mais une morale du génie. Et le " génie ", c'est Aristote sans doute qui nous a appris qu'il consiste en une certaine force de la pensée, et la pensée nous la...

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