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Pouvons-nous être sûrs d'avoir compris autrui ?

Publié le 17/01/2022

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En tant que j'ai des fonctions sensorielles, un champ visuel, auditif, tactile, je communique déjà avec les autres, pris aussi comme sujets psychologiques. Mon regard tombe sur un corps vivant en train d'agir, aussitôt les objets qui l'entourent reçoivent une nouvelle couche de signification : ils ne sont plus seulement ce que je pourrais en faire moi-même, ils sont ce que ce comportement va en faire. Autour du corps perçu se creuse un tourbillon où mon monde est attiré et comme aspiré : dans cette mesure, il n'est plus seulement mien, il ne m'est plus seulement présent, il est présent à X, à cette autre conduite qui commence à se dessiner en lui. Déjà l'autre corps n'est plus un simple fragment du monde, mais le lieu d'une certaine « vue » du monde. Il se fait là-bas un certain traitement des choses jusque-là miennes. Quelqu'un se sert de mes objets familiers. Mais qui ?  Je dis que c'est un autre, un second moi-même et je le sais d'abord parce que ce corps vivant a même structure que le mien. J'éprouve mon corps comme puissance de certaines conduites et d'un certain monde, je ne suis donné à moi-même que comme une certaine prise sur le monde ; or c'est justement mon corps qui perçoit le corps d'autrui et il y trouve comme un prolongement miraculeux de ses propres intentions, une manière familière de traiter le monde ; désormais, comme les parties familières de mon corps forment un système, le corps d'autrui et le mien sont un seul tout, l'envers et l'endroit d'un seul phénomène et l'existence anonyme dont mon corps est à chaque moment la trace habite désormais ces deux corps à la fois. »   Merleau-Ponty, « Phénoménologie de la perception ».

 

Remarques sur l’intitulé du sujet :

-          « Pouvons-nous « implique de déterminer ce qui est possible soit 1) comme ce qui est réalisable, ce qu’on a les moyens de … ce que nous pouvons = ce dont nous sommes capables, soit 2) comme ce qui est permis, ce qu’on a le droit de … ce que nous pouvons = ce qui est légitime

-          Ici, la question du droit ne semble pas se poser : comment interdire une compréhension certaine d’autrui ? Alors que tant de méprises ou de mésentente sont sources de conflits, on tend davantage à faire de la compréhension d’autrui un devoir

-          Ainsi, la question du fait sera première : si autrui se définit par son altérité, comment être sûr de le comprendre comme nous nous comprenons nous-mêmes ? Il s’agira d’examiner si l’on peut combler la distance qui nous sépare d’autrui : avons-nous les moyens de rapporter du subjectif à de l’objectif ?

Problématique : Si Autrui se définit par son altérité, pouvons-nous être sûrs de le comprendre ? En effet, qu’est-ce que comprendre autrui avec certitude sinon rendre son intériorité transparente ? Une telle entreprise semble difficile. Et pourtant on ne saurait se résoudre à ne jamais s’entendre avec autrui. Par conséquent, peut-on, sans nier ce qui fait la spécificité d’autrui, parvenir à le comprendre ou bien sommes-nous condamnés à des interprétations plus ou moins juste le concernant ?

 

« Remarques sur l'intitulé du sujet :- « Pouvons-nous » implique de déterminer ce qui est possible soit 1) comme ce qui est réalisable, ce qu'on a les moyens de ...

ce que nous pouvons = ce dont nous sommes capables, soit 2) comme ce qui est permis, ce qu'ona le droit de ...

ce que nous pouvons = ce qui est légitime- Ici, la question du droit ne semble pas se poser : comment interdire une compréhension certaine d'autrui ? Alors que tant de méprises ou de mésentente sont sources de conflits, on tend davantage à faire de lacompréhension d'autrui un devoir- Ainsi, la question du fait sera première : si autrui se définit par son altérité, comment être sûr de le comprendre comme nous nous comprenons nous-mêmes ? Il s'agira d'examiner si l'on peut combler la distance quinous sépare d'autrui : avons-nous les moyens de rapporter du subjectif à de l'objectif ? Problématique : Si Autrui se définit par son altérité, pouvons-nous être sûrs de le comprendre ? En effet, qu'est- ce que comprendre autrui avec certitude sinon rendre son intériorité transparente ? Une telle entreprise sembledifficile.

Et pourtant on ne saurait se résoudre à ne jamais s'entendre avec autrui.

Par conséquent, peut-on, sans nier ce qui fait la spécificité d'autrui, parvenir à le comprendre ou bien sommes-nous condamnés à desinterprétations plus ou moins juste le concernant ? 1- NOUS NE POUVONS PAS ÊTRE SÛRS D 'AVOIR COMPRIS AUTRUI a) Qu'est-ce que comprendre ? Comprendre = savoir pourquoi ; donc « Comprendre autrui » = saisir les mobiles ou les motifs de ses actes et de ses paroles, leur donner un sens en les rapportant à leur fin.

En un mot, il s'agit de cerner les intentions rendant compte de son comportement.

Or, la difficulté tient à ce que l'intelligibilité produite n'a pas affaire à des causes au sens strict [voir dans les « repères » la différence entre « expliquer/comprendre »] mais à des intentions, à unevisée, quelque chose d'éminemment subjectif.

En un mot, la compréhension de l'autre implique de saisir une partie deson intériorité , c'est-à-dire de ce à quoi je n'ai pas directement accès. D'où le risque possible d'erreur ; nous ne pouvons donc pas être sûrs d'avoir compris autrui dans la mesure où nous devons toujours nous en remettre à des suppositions concernant son intériorité.

Voyons pourquoi. b) les phénomènes mentaux ne sont observables que d'un point de vue individuel Ce qui est donné à chacun avec certitude, sans doute possible, c'est ce qu'il pense : Descartes dit ainsi qu'on peut douter de tout sauf du fait même que l'on doute et en cela que l'on pense.

Autrement dit, la pensée est « cequi se fait immédiatement en nous de telle sorte que nous l'apercevons immédiatement par nous-mêmes ».

On voitdonc que tout mobile ou motif d'une action n'est saisissable que par le sujet de cette action. Pour être sûr d'avoir compris autrui, il faudrait donc que nous disposions des moyens de rendre sa pensée aussi claire et distincte que l'est la nôtre.

Or on sait bien que personne ne peut dire à ma place à qui ou à quoi je pense àtel instant.

Ainsi nous pouvons comprendre autrui, donner des raisons à ses actes ou ses paroles, mais néanmoins,nous ne pouvons être sûr que notre compréhension correspond bien à ce qu'autrui a voulu faire ou dire.

Pour qu'unetelle adéquation se produise, il faudrait en quelque sorte qu'autrui ne soit plus alter ego mais ego tout court.

En effet, seul le « Je » connaît avec certitude ce qu'il veut, sent, pense, conçoit... Transition- Parce que Comprendre = rapporter une série d'évènements (paroles et actes d'autrui) au principe qui a présidé à leur apparition (les intentions d'autrui), nous ne disposons donc pas des moyens nécessaires pour être sûrsd'avoir compris autrui : il faudrait pour cela « pénétrer » son intériorité – ce qui est impossible.- Cependant , une telle thèse rend-elle parfaitement compte de l'expérience ? Il semble qu'au quotidien, comprendre autrui ne passe par aucun raisonnement.

Comme le dit Merleau-Ponty, la compréhension que j'ai d'autruin'est pas postérieure mais bien contemporaine à la perception que j'ai de son corps et donc de ses gestes et de ses paroles.- Problème : thèse semble valide théoriquement mais non empiriquement : de fait, nous sommes sûrs d'avoir compris autrui.

Dès lors, demander si nous pouvons être sûrs d'avoir compris autrui est moins une question d'ordre factuel (nous constatons que nous sommes sûrs de savoir pourquoi autrui fait ou dit ceci et cela) que d'ordre critique : de quel droit pouvons-nous être sûrs d'avoir compris autrui, ou plutôt, quelles sont le conditions de possibilité de cette certitude quotidienne que nous avons concernant le sens des actions d'autrui ? 2- NOUS POUVONS ÊTRE SÛRS D 'AVOIR COMPRIS AUTRUI a) Autrui est une totalité psychophysique ... Ce qui nous amène à rendre problématique la compréhension que nous pensons quotidiennement avoir d'autrui tient à ce qu'autrui est pensé comme étant pour soi ce que je suis pour moi : ses actions sont lesmanifestations d'une intériorité à laquelle lui seul (en tant que sujet pensant) à accès avec certitude.

Ainsi, le corpsde l'autre (son être « en soi » par opposition au « pour-soi ») n'est pour nous qu'un moyen, un intermédiaire entre ce qui est visible et ce qui donne une structure à ce visible (les intentions d'autrui).

Telle est la thèse que récuse Max Scheler, dans Nature et forme de la sympathie (1928). Pour cet auteur, nous percevons autrui, non comme un corps, mais comme une unité psychophysique : ce qui nous est donné primitivement, ce ne sont pas des caractéristiques extérieures ou matérielles, mais une structured'ensemble pourvue d'un sens .

Pour le dire autrement, les mouvements du corps d'autrui sont toujours déjà signifiants.

Citation : « Il est certain que nous croyons percevoir dans le sourire d'un autre sa joie, dans ses larmes. »

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