Prétendre avoir raison est-ce être intolérant ?
Publié le 27/02/2008
Extrait du document
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reconnaissance de la légitimité de toutes les opinions.
Montaigne a bien ses propres opinions, mais il ne prétend pasles absolutiser en vérité : « nous sommes chrétiens au même titre que nous sommes périgourdins ».
Alors le discoursn'aurait plus pour vocation de dire une vérité à laquelle nous n'avons pas accès, mais ne prétendrait plus qu'exprimerce que nous sommes.
Puisque il n'y a que des perspectives singulières et innombrables, il ne s'agirait plusd'hypostasier arbitrairement une perspective parmi les autres, mais d'incarner sa propre perspective : l'idéal neconsisterait plus dans le fait d'avoir raison, mais dans la possibilité d'être ce que l'on dit.
Ainsi le respect d'autruidans sa différence exigerait la renonciation à cette prétention pour réduire l'exercice du discours à soi : « J'ose nonseulement parler de moi, mais seulement parler de moi » ( III, 8). Prétendre avoir raison, ce serait donc nécessairement être intolérant.
Mais peut-on vraiment renoncer à laprétention d'avoir raison sans paralyser le développement du dialogue ou même la recherche dans les sciences ? Aquelles conditions la prétention à avoir raison ne se confondrait pas alors avec l'intolérance ? III Les règles de l'entretien dialectique _ Prétendre avoir raison ne peut se faire dans la solitude auquel cas elle se confond avec l'intolérance.
Il faut doncque cette prétention individuelle soit mise à l'épreuve grâce à la contribution d'autrui par le moyen du dialogue.
Ledialogue consiste en effet en une mise à l'épreuve de l'universalité à laquelle prétend une thèse énoncée par unindividu.
Aussi le dialogue, pour être efficace et valide, repose sur des règles qui structurent son déroulement.
Dansle Gorgias, ( 486 e-487c), Socrate loue Calliclès pour être « une bonne pierre de touche » , c'est-à-dire un instrument de contrôle destiné à tester la valeur de ce que l'on dit.
Ses que lités sont la compétence, la franchiseet la bienveillance._ La bienveillance est une qualité nécessaire au dialogue qui empêche d'obtenir l'accord de l'interlocuteur par laforce.
C'est ce que Socrate avait reprocher auparavant à Polos : « tu ne peux me forcer être d‘accord« .
L‘accordobtenu par la raison est la règle d‘or du dialogue.
Dialoguer, c'est échanger des raisons, c'est-à-dire en donner et enaccueillir sans se soucier de leur provenance.
Ainsi, il s'agit de ne pas craindre de réfuter ou d'être réfuté.
Lesprétentions une fois énoncées se détachent de la subjectivité pour entrer dans la recherche en commun de lavérité.
Ainsi, dans le Protagoras (337 c-338 e), Socrate refuse de choisir un arbitre qui déterminera celui qui aura raison, car l'entretien est à lui-même son propre arbitre._ Toutes les règles du dialogue contribuent à faire de ce dernier non, un combat où le vainqueur ne tolèrerait pasl'opinion du vaincu, mais une fête.
Dans la fête qu'est le dialogue, les participants mettent en commun leursopinions, dans le but, non de les voir triompher, mais de rechercher ensemble entre amis la vérité.
Aussi que lavérité coïncide avec une thèse plutôt qu'à une autre, cela doit être indifférent aux participants du dialogue.
En cesens , la prétention à la raison, loin d'être un obstacle violent à la continuation de l'échange rationnel, en serait bienplutôt la nécessaire condition.
Elle constituerait l'horizon vers lequel les interlocuteurs se dirigeraient ensemble, etpartiraient à la découverte de la vérité en faisant route commune.
Conclusion : prétendre avoir raison n'est une attitude intolérante que si elle refuse la mise à l'épreuve de son universalité, mais constitue lorsqu'elle se fait dans la compagnie respectueuse d'autrui un idéal directeur pour larecherche de la vérité.
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