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ottoman, Empire

Publié le 07/02/2013

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1   PRÉSENTATION

ottoman, Empire (XIVe siècle-1923), empire édifié par une dynastie de Turcs oghouz et qui a perduré jusqu’au lendemain de la Première Guerre mondiale.

Érigé sur les ruines de l’État seldjoukide d’Anatolie puis sur celles de l’Empire byzantin, l’Empire osmanli (ou ottoman) — se présentant de fait comme l’héritier du califat arabe et de la puissance byzantine — a couvert à son apogée trois continents, s’étendant en Europe jusqu’aux frontières austro-hongroises et en Asie jusqu’à la Perse, s’étirant sur les côtes occidentales et orientales de la mer Rouge et sur les côtes méditerranéennes de l’Afrique du Nord.

2   ÉMERGENCE DE L’EMPIRE OTTOMAN (V. 1280-1453)
2.1   De l’émirat au sultanat (v. 1280-1402)

Au début du XIIIe siècle, les souverains seldjoukides du sultanat de Rum installent aux frontières occidentales de l’Asie Mineure les clans turcomans ayant fui l’Asie centrale envahie par les Mongols. Profitant du déclin de la puissance seldjoukide, les nouveaux arrivants constituent des émirats, devenus indépendants à la fin du siècle.

2.1.1   Osman, fondateur d’une dynastie

Selon la légende, vers 1230, Ertoğrul, le chef d’un de ces clans de Turcs oghouz, reçoit du sultan Kaykobad Ier la région frontalière de Söğüt (sur le fleuve Sakarya, en Turquie actuelle), avec pour mission de protéger les Seldjoukides contre l’Empire byzantin. Vers 1280 environ, Osman hérite de la charge de son père Ertoğrul. En juillet 1302, il défait les Byzantins et se trouve par cette victoire à la tête d’un émirat couvrant le nord-ouest de l’Anatolie. Pour avoir créé ce petit émirat, Osman est reconnu comme le premier membre de la dynastie des Osmanlis (ou Ottomans).

2.1.2   Ohrhan Gazi (v. 1326-1362)

Lorsque Osman meurt vers 1326, son fils Ohrhan Gazi reprend le commandement de l’armée et étend le territoire des Ottomans au-delà de la vallée de Sakarya : prises de Brousse (aujourd’hui Bursa, 1326), qui devient la première capitale ottomane, de Nicée (Iznik, 1331) et de Nicomédie (Izmit, 1337). En 1354, appelées par Jean VI Cantacuzène (usurpateur du trône byzantin), les troupes ottomanes prennent pied sur la rive européenne du détroit des Dardanelles, s’établissant à Gallipolli (aujourd’hui Gelibolu).

2.1.3   Murat Ier (1362-1389)

Avec le règne de Murat Ier, qui poursuit la politique de conquête d’Ohrhan, les Ottomans deviennent maîtres de presque toute l’Asie Mineure. Un an après la prise d’Andrinople (Edirne, 1361), la ville devient la nouvelle capitale des Ottomans, qui affirment par ce choix leur intention de demeurer en Europe. Murat Ier — le premier à inscrire dans sa titulature le titre de sultan — dote l’empire d’une efficace administration et d’une redoutable armée. Dans les Balkans, qui entrent en grande partie sous domination ottomane, les troupes de Murat Ier remportent également de grandes victoires sur les Serbes et les Bulgares : en 1363, il met en déroute, sur la Maritsa, la croisade menée par Louis Ier de Hongrie et prend ainsi le contrôle de la Bulgarie. Il se retourne ensuite contre les Serbes qu’il défait le 15 juin 1389, lors de la bataille de Kosovo où il trouve la mort. À la fin de son règne, l’Empire ottoman couvre l’ensemble de la Thrace, la Macédoine, ainsi qu’une grande partie de la Bulgarie et de la Serbie.

2.1.4   Bayazid Ier (1389-1402)

Le territoire serbe passe entièrement sous domination ottomane avec le quatrième souverain Bayazid Ier, qui achève également la conquête de la Thessalie et poursuit l’extension en Anatolie. Il pousse jusque sous les murs de Constantinople (aujourd’hui Istanbul), assiégée durant deux ans (1395-1397). Les souverains chrétiens s’unissent contre la poussée des Ottomans musulmans et lancent une croisade qui s’achève par l’écrasement des croisés à Nicopolis, le 25 septembre 1396. L’expansion ottomane est cependant freinée en Orient par les troupes mongoles de Tamerlan. En juillet 1402, Bayazid est vaincu près d’Ankara.

2.2   L’interrègne et la reconquête (1402-1453)

Le sultan Bayazid étant prisonnier de Tamerlan, l’Empire ottoman plonge, dix ans durant, dans la guerre civile, les fils du sultan se déchirant pour le pouvoir. En 1413, Mehmet Ier (1413-1421) parvient à évincer ses frères et se lance alors dans la consolidation de l’empire qui recouvre ses frontières d’avant 1402.

Son fils et successeur Murat II (1421-1444 ; 1446-1451) parvient, en 1424, à réduire au tribut l’empereur byzantin, et prend Thessalonique (Salonique, 1430), après avoir massacré une grande partie de la population grecque.

3   APOGÉE DE L’EMPIRE OTTOMAN (1453-1566)

L’apogée de l’Empire ottoman s’étend, de fait, de l’avènement de Mehmet II en 1451 à la mort de Soliman le Magnifique, en 1566. L’événement qui ancre la puissance ottomane est la prise de Constantinople, symbole de la chute du dernier empire issu de la splendeur romaine.

3.1   La principale puissance du Vieux Monde
3.1.1   Mehmet II et Bayazid II (1451-1512)

Le 29 mai 1453, après sept semaines de siège, le sultan Mehmet II (1444-1446 ; 1451-1481) prend la ville de Constantinople (voir prise de Constantinople). L’ancienne capitale chrétienne de l’Empire byzantin devient, en 1458, la capitale musulmane de l’Empire ottoman sous le nom d’Istanbul — l’usage, cependant, conserve le nom de Constantinople jusqu’en 1923. En 1461, le dernier réduit byzantin, Trébizonde (aujourd’hui Trabzon), tombe ; puis ce sont la Bosnie (1463), la Crimée (1475) et l’Albanie (1476-1478) qui passent sous domination ottomane. L’empire s’assure ensuite la maîtrise des mers. En 1499, sous Bayazid II (1481-1512), la flotte ottomane remporte à Lépante sa première victoire, triomphant des Vénitiens.

3.1.2   Sélim Ier le Terrible (1512-1520)

Avec Sélim Ier dit le Terrible, l’Empire ottoman affirme sa domination sur le monde musulman. Décidé à unir les peuples de l’islam, le sultan attaque les Safavides chiites d’Iran et annexe le Kurdistan et la Haute-Mésopotamie sunnite. En 1516 et 1517, il combat les mamelouks, auxquels il enlève la Syrie et l’Égypte, ainsi que le Hedjaz. La ville sainte de La Mecque étant désormais placée sous contrôle ottoman, Sélim se proclame calife et serviteur des villes saintes de l’islam.

3.1.3   Soliman le Magnifique (1520-1566)

L’empire atteint son apogée sous le règne de son fils, Soliman le Magnifique — surnommé le Législateur par les Turcs. Belgrade est prise en 1521 et, cinq ans plus tard, après la victoire ottomane à la bataille de Mohács (29 août 1526), un protectorat est établi en Hongrie. En 1529, les troupes ottomanes avancent même au-delà des frontières de l’empire des Habsbourg, menaçant la ville de Vienne en l’assiégeant (voir sièges de Vienne). L’Irak vient encore s’ajouter à l’empire en 1534, tandis que les navires ottomans dominent la Méditerranée et les États barbaresques d’Afrique du Nord.

3.2   L’organisation de l’empire
3.2.1   Le pouvoir militaire

La puissance de l’État ottoman — comme en témoignent les récits de conquête — repose sur l’armée. Les premières forces ottomanes sont constituées par les cavaliers ghazis (sipahis), motivés par leur idéal religieux et par une rémunération tirée des terres conquises. Mais bien qu’habiles et vaillants, les ghazis ne suffisent pas à fonder une puissante armée.

Ce sont surtout les jeunes chrétiens des territoires passés sous domination ottomane, enlevés dans leurs foyers et entraînés au métier des armes, qui confèrent sa puissance à l’armée ottomane. L’enlèvement est utilisé dès le règne d’Ohrhan Gazi (v. 1324-1362). Son successeur Murat Ier, véritable fondateur de l’empire, fonde le corps d’élite des janissaires, constitué par ces esclaves, qui vont bientôt également fournir des fonctionnaires à l’administration.

3.2.2   Les institutions politiques

Descendant d’Osman, le sultan doit à l’origine asseoir son pouvoir par un « bain de sang «, en faisant assassiner tous les prétendants au trône (frères, demi-frères, cousins) ; la pratique devient progressivement un enfermement de ces derniers. Murat Ier met en place la structure étatique qui va perdurer durant toute l’histoire de l’empire. Le sultan exerce une autorité absolue, dans les domaines temporel et spirituel. Jusqu’au règne de Soliman le Magnifique, celui qui est le chef suprême des armées dirige personnellement ses troupes en campagne (par la suite, cette attribution revient aux vizirs). De même, le sultan, représentant de Dieu sur Terre, est le chef de la communauté musulmane sunnite. Son empire comprenant les villes saintes de La Mecque et de Médine, il se positionne comme supérieur aux autres souverains musulmans.

Deuxième personnage de l’État, le grand vizir dirige, à partir de Mehmet II, le Conseil de gouvernement (Divan). Ce dernier est composé de vizirs, du chef des janissaires (agha), de représentants des autres forces armées et de la justice, ainsi que d’un responsable des finances. Jusqu’en 1654, les séances du Divan ont lieu dans le palais impérial de Topkapi à Istanbul, avant d’être transférées dans le palais du grand vizir, appelé « La Sublime Porte « (ou « La Porte «). Le sultan n’y assiste pas directement, mais a néanmoins la possibilité de les contrôler par une fenêtre grillagée.

L’administration des principales provinces, extrêmement centralisée, est assurée par des fonctionnaires appelés belerbeys, tandis que certains États conquis demeurent gouvernés par les princes locaux, qui payent au suzerain ottoman un tribut.

3.2.3   Une société multiculturelle

L’Empire ottoman — avec pour langue officielle le turc et pour religion de l’État l’islam — est une mosaïque de peuples, de cultures et de religions. Turcs, Arabes, Tziganes, Berbères, Coptes, Grecs et Slaves notamment composent le peuplement du vaste territoire. Et si l’islam est la religion dominante (avec principalement des sunnites, mais également des chiites), nombre de sujets du sultan sont de confession chrétienne (catholiques ou orthodoxes) ou juive (séfarades, ashkénazes, etc.). Dans ce cadre, l’État respecte, durant la plus grande partie de son existence, les particularismes des populations soumises, les populations vivant sous domination ottomane continuant à parler leur langue et à pratiquer librement leur religion.

Conformément à la tradition musulmane, les juifs et les chrétiens orthodoxes se voient accorder le statut de protégés (dhimmis), leur permettant d’avoir leurs propres tribunaux pour les affaires intérieures à leurs communautés (millets). De fait, les chrétiens orthodoxes acceptent, au moins jusqu’au XVIIe siècle, l’autorité ottomane, car ils jouissent d’une plus grande liberté que sous l’Empire byzantin. S’ils payent un impôt de capitation supérieur à la dîme versée par les musulmans, ils ne subissent pas, comme sous Byzance, le joug d’une aristocratie (inexistante dans l’Empire ottoman). L’islamisation des populations européennes sous domination ottomane n’est importante qu’en Albanie et en Bosnie. Chrétiens, mais aussi juifs, participent à l’administration et à la vie intellectuelle et artistique.

3.2.4   La vie intellectuelle et artistique

La vie intellectuelle et artistique, favorisée par les sultans et leurs épouses, se développe brillamment dans les trois premiers siècles de l’empire. Entre le XVIe et le XVIIIe siècle, Istanbul est le principal centre culturel de l’empire, voire du monde musulman, attirant des artistes de tous genres : architecture, littérature (essentiellement la poésie et l’histoire), calligraphie, enluminure, arts décoratifs (notamment la céramique et la tapisserie), musique et danse. La principale figure de cette effervescence culturelle demeure l’architecte Sinan, maître de l’art classique ottoman durant le règne de Soliman le Magnifique, dont la plus belle réalisation est la mosquée Süleymaniye à Istanbul (1550-1557).

4   ÉBRANLEMENT DU POUVOIR (1566-1774)
4.1   La « période des catastrophes «

À la mort de Soliman le Magnifique, en 1566, son fils Sélim II (1566-1574) lui succède. Sous son règne, l’Empire ottoman subit une première défaite le 7 octobre 1571, à Lépante, où la flotte est détruite par une ligue européenne (papauté, Espagnols, Autrichiens, Vénitiens et chevaliers de Malte) qui réagit à la prise de Chypre un an auparavant. Cette défaite, qui n’a pas de conséquences immédiates, marque cependant un tournant dans l’histoire de l’empire.

Les janissaires commencent à se rebeller sous le règne de Murat III (1574-1595). Les révoltes se multiplient dans l’empire. Le pouvoir du sultan est de plus en plus contesté. À partir de 1622, lorsque Osman II (1618-1622) est assassiné par les janissaires après sa déposition, l’autorité des sultans est contestée à la fois par ceux-ci et par les vizirs, qui exercent le pouvoir de fait. En août 1648, Ibrahim Ier (1640-1648) subit le même sort. C’est sous le règne de son successeur Mehmet IV (1648-1687) que se termine ce que les historiens ottomans appellent la « période des catastrophes «, lorsque arrive au grand vizirat Mehmet Koprulu (1656).

Néanmoins, le déclin de l’empire est entamé, tenant autant aux désordres intérieurs qu’à l’essor de la puissance occidentale, militaire mais surtout économique. Le courant des échanges s’inverse, l’Occident exportant désormais ses produits manufacturés vers l’empire, qui a par ailleurs perdu le monopole du commerce avec les Indes, avec l’utilisation de la route maritime du cap de Bonne-Espérance.

4.2   Les revers militaires
4.2.1   Le traité de Karlowitz (1699)

Après l’échec du second siège de Vienne (juillet-septembre 1683), la lutte entre les Habsbourg et les Ottomans tourne à l’avantage de l’Autriche. Les Autrichiens entrent en Serbie et en Bosnie, après leur victoire à Mohács, en 1687. Le sultan Mustafa II (1695-1703), ayant été vaincu en 1696, est contraint de signer le traité de Karlowitz (26 janvier 1699), premier traité défavorable aux Ottomans qui perdent la Hongrie et la Transylvanie, cédées à l’Autriche, la Podolie prise par les Polonais, la Morée et la Dalmatie abandonnées à Venise. Les territoires balkaniques sont cependant récupérés par les Ottomans et la paix de Sistova (Svitchov, 4 août 1791), consacrant le statu quo, met fin aux guerres austro-turques.

4.2.2   Les premières guerres russo-turques

L’ennemi principal est désormais la Russie. Depuis 1676, les deux États s’affrontent pour la Crimée. Une nouvelle guerre, de 1736 à 1739 (la cinquième guerre russo-turque), se solde en faveur de l’Empire ottoman, la France — qui bénéficie depuis l’alliance entre François Ier et Soliman le Magnifique d’un régime commercial spécial dans l’empire (régime des capitulations) — étant intervenue auprès des Russes. Mais un nouveau conflit, déclenché par les Ottomans en 1768, favorise la progression de la Russie. Celle-ci, étant intervenue pour soutenir le soulèvement des Grecs en Morée, détruit la flotte ottomane près de Smyrne. La puissance maritime ottomane s’effondre définitivement. Surtout, le 21 juillet 1774, le sultan Abdülhamid Ier est contraint de signer le traité de Kutchuk-Kaïnardji, par lequel la Russie obtient la Crimée, la libre navigation en mer Noire et en Méditerranée, et devient la protectrice officielle des chrétiens orthodoxes. Ce traité permet donc aux Russes d’intervenir dans les affaires ottomanes, marquant le début de la question d’Orient. Désormais, les grandes puissances européennes vont s’affronter autour de l’empire déclinant.

5   VERS LE DÉMANTÈLEMENT DE L’EMPIRE OTTOMAN (1774-1923)
5.1   « L’homme malade de l’Europe «
5.1.1   L’ère des Tanzimat

Face à la menace de démantèlement de l’empire, les sultans réagissent et veulent réformer l’État. La tentative de Sélim III (1789-1807) de réorganiser l’armée aboutit à son assassinat par les janissaires. En 1826, Mahmud II (1808-1839) fait massacrer ces derniers et peut alors entreprendre la modernisation de l’administration et de l’instruction publique. Il forme une armée de conscrits payés et disciplinés. Mais ces premières tentatives sont de peu d’effet.

En revanche, l’intervention diplomatique de l’Angleterre ayant momentanément freiné les ambitions russes, Abdülmacid Ier (1839-1861) peut poursuivre la politique de réforme (voir Tanzimat). La justice est laïcisée et l’égalité de tous les sujets ottomans, musulmans ou non, proclamée. Cette décision doit accélérer l’éclatement de l’empire, en suscitant de violents conflits entre musulmans et non-musulmans. Son successeur Abdülaziz (1861-1876) est déposé.

5.1.2   La naissance de la question d’Orient

Durant le règne de Sélim III (1789-1807), l’Égypte, après l’expédition de Bonaparte (1799-1801), passe sous le contrôle de Méhémet Ali, vassal turbulent. La Syrie proclame son indépendance ; les wahhabites se révoltent au Hedjaz, de même que les Serbes dans les Balkans.

Cependant, la guerre de l’Indépendance grecque, commencée en 1821, a de graves conséquences. Elle suscite une intervention concertée des puissances européennes contre les Ottomans, encourageant Méhémet Ali, appelé à la rescousse par le sultan, à se libérer de la suzeraineté ottomane. Signé en 1829, le traité d’Andrinople consacre l’indépendance grecque et l’autonomie serbe, accorde à la Russie la libre navigation à l’embouchure du Danube et dans la mer Noire. En 1832, l’armée égyptienne menée par Ibrahim Pacha prend la Palestine et la Syrie, et assiège Constantinople. Il faut l’aide des Russes pour sauver la ville. Désormais, les puissances européennes, qui cherchent à satisfaire leurs ambitions territoriales au détriment de l’Empire ottoman, vont se faire plus pressantes dans les affaires impériales (voir question d’Orient).

Alors qu’à l’issue de la guerre de Crimée, le traité de Paris (30 mars 1856) a préservé contre les appétits russes l’intégrité territoriale ottomane, mais consacré l’intervention des Européens, en 1860 s’élèvent de toutes parts des révoltes, dont chacune va contribuer au démembrement de l’Empire ottoman. La révolte des Druzes, en 1860, et le massacre perpétré contre les chrétiens maronites au Liban, provoquent l’intervention militaire de la France dans le pays, qui passe sous domination française. En 1875 et 1876, la Bosnie, la Bulgarie, la Serbie et le Monténégro se soulèvent à leur tour. Les bachi-bouzouks (cavaliers mercenaires de l’armée ottomane) ayant répondu par un massacre des chrétiens, la Russie intervient en 1877.

5.1.3   Le congrès de Berlin (1878)

En 1878, le sultan Abdülhamid II (1876-1909) doit accepter le traité de San Stefano, dont les termes sont revus au congrès de Berlin. Les puissances européennes décident du destin de l’empire : la Serbie, le Monténégro et la Roumanie deviennent indépendantes. La Thessalie et l’Épire reviennent à la Grèce, la Bessarabie à la Russie, tandis que l’Autriche occupe la Bosnie-Herzégovine.

Dans le même temps, le coût des réformes conjugué à la perte des revenus d’un empire amputé conduit l’État ottoman à la banqueroute. L’économie du pays est mise sous tutelle franco-anglaise. Le sultan, sous la pression des libéraux du mouvement des « Jeunes-Ottomans «, accepte en 1876 de doter l’État d’une Constitution, instaurant un régime de monarchie parlementaire et inscrivant dans les lois fondamentales les libertés individuelles et religieuses. Dès 1878, cependant, il rétablit un gouvernement absolutiste.

Le déclin se poursuit. Après le massacre des Arméniens, entre 1894 et 1896, l’État ottoman est mis au ban des nations. En 1897, les Grecs prennent la Crète, cependant qu’en Macédoine sévit le terrorisme des comitadjis.

5.2   Les mouvements libéraux et nationaux
5.2.1   Enver Pacha et les Jeunes-Turcs

Les officiers libéraux et nationalistes, qui ont constitué en 1895 le mouvement des Jeunes-Turcs, organisent en 1908 un soulèvement des troupes basées en Macédoine qui oblige le despote à rétablir la Constitution et le Parlement. La Bulgarie ayant proclamé son indépendance en 1908 et l’Autriche annexé la Bosnie-Herzégovine en 1909, l’armée de Thessalonique, dominée par les Jeunes-Turcs, marche sur Istanbul, dépose Abdülhamid II et porte au pouvoir Mehmet V. En fait, le pouvoir est jusqu’en 1918 aux mains des Jeunes-Turcs, dirigés par Enver Pacha.

5.2.2   La poudrière des Balkans

L’État ottoman est continuellement en guerre jusqu’à sa fin : contre l’Italie d’abord qui prend la Tripolitaine en 1912 ; dans les Balkans ensuite où il doit affronter une coalition formée par la Serbie, le Monténégro, la Bulgarie et la Grèce (voir guerres des Balkans). En 1913, après la signature des traités de Londres et de Constantinople, ne subsistent plus de l’empire que l’Anatolie, la Thrace occidentale et Istanbul en Europe, ainsi que le Hedjaz dans la péninsule Arabique.

Le démembrement est achevé après la Première Guerre mondiale. Enver Pacha a en effet engagé la Turquie aux côtés de l’Allemagne et de l’Autriche-Hongrie. Les Anglais favorisent en 1916 la révolte arabe contre la domination ottomane. Vaincus en 1915 dans les Dardanelles, les Alliés reprennent l’offensive et contraignent les Turcs à signer l’armistice de Mudros, en octobre 1918. L’empire est réduit à l’Anatolie.

5.3   Le coup de grâce : le traité de Lausanne (1923)

Le sultan Mehmet V ayant nommé en mars 1919 un gouvernement dévoué aux vainqueurs, Mustafa Kemal (Atatürk) prend la tête d’un mouvement nationaliste. En octobre 1919, il organise des élections et devient chef du gouvernement en avril 1920. Après l’offensive grecque en Anatolie, Mehmet V accepte de signer le traité de Sèvres (août 1920), qui prévoit la perte des provinces arabes et le démembrement de l’Anatolie. Mustafa Kemal dirige la contre-offensive nationaliste contre les Grecs, refoulés en 1922.

En juillet 1923, les Alliés reconnaissent, par le traité de Lausanne, la victoire de Mustafa Kemal. Le 20 octobre 1923 est proclamée la république de Turquie, dont Mustafa Kemal est le premier dirigeant. L’année suivante, le califat — dernier héritage de l’Empire ottoman — est aboli.

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