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unification italienne

Publié le 11/02/2013

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1   PRÉSENTATION

unification italienne (en italien Risorgimento, « renaissance « ou « résurrection «), processus politique, militaire et diplomatique à l’issue duquel est né un royaume unifié d’Italie, en 1861.

2   MORCELLEMENT TERRITORIAL ET RESTAURATIONS MONARCHIQUES

Morcelée en différents États et principautés depuis la fin de l’Antiquité, champ clos des rivalités entre les puissances européennes, l’Italie connaît un premier processus d’unification territoriale avec la proclamation des Républiques sœurs par le gouvernement révolutionnaire français, puis sous les monarchies « napoléoniennes « de Napoléon lui-même, de Joseph Bonaparte et d’Élisa Bonaparte. Mais, en 1815, après la chute de l’Aigle, cette situation est remise en cause par les grands États européens qui, par le congrès de Vienne, restaurent la situation précédant les conquêtes napoléoniennes de 1796-1797.

Avec ce mouvement de Restauration monarchique du xixe siècle, la péninsule italienne prend la forme d’une Italie fantôme qui n’a « pas d’emblème, pas de nom politique, pas de voix parmi les nations d’Europe, « comme s’en révolte bientôt le patriote Giuseppe Mazzini en un mot, elle n’est plus qu’un morcellement de territoires partagés : la Lombardie et la Vénétie entrent sous le joug autrichien ; la Sardaigne et le Piémont sont réunis en un État dirigé par la dynastie des Savoie-Carignan ; le souverain pontife exerce son pouvoir temporel sur les États du pape, au centre de la péninsule ; le royaume de Naples, contrôlé par les Bourbons, s’étend au Sud, où sont également parsemées quelques principautés indépendantes — notamment le grand-duché de Toscane et les duchés de Parme et de Modène.

Cependant, le souvenir de l’écho révolutionnaire dans la péninsule demeure vivace chez l’élite éclairée qui, dans le sillage du poète Vittorio Alfieri, conjugue un certain attrait pour les principes de 89 avec une prise de conscience d’une identité italienne propre.

3   RÉVOLUTIONS ET ÉVEIL NATIONAL (1815-1849)

Mais de fait, avant 1848, le sentiment national — aspiration à l’unité, voire à l’indépendance, de l’Italie — est limité à la portion congrue de l’aristocratie et de la bourgeoisie. Restreints dans leur action par la censure d’États absolutistes, ces patriotes sont réduits à la clandestinité et s’affilient aux sociétés secrètes. La principale de ces sociétés est la charbonnerie dont les membres, les carbonari, professent un libéralisme hostile à l’absolutisme (donc à l’Autriche).

En 1820-1821, à l’instigation des carbonari, plusieurs révoltes à Naples et dans le Piémont sont rapidement réprimées par les Autrichiens, mais elles laissent place à une fermentation intellectuelle et à une agitation récurrente. Puis en 1831-1832, à l’imitation des Trois Glorieuses parisiennes, les mouvements révolutionnaires et patriotiques se répandent à Bologne (contre le nouveau pape Grégoire XVI), Parme et Modène. Les proclamations de gouvernements provisoires, voire de provinces unies italiennes, laissent un temps croire au succès de l’élan libéral et patriotique ; mais de nouveau, les soulèvements sont écrasés par les troupes autrichiennes.

3.1   La diffusion du sentiment national

L’échec de la vague protestataire de 1831-1832 participe cependant à la radicalisation du combat indépendantiste et charge le mouvement révolutionnaire d’une dimension « nationalitaire « (à entendre dans le sens d’exacerbation d’un sentiment national préexistant, à la différence du nationalisme). Principal propagateur de ce sentiment national, Giuseppe Mazzini revendique l’indépendance et l’unité de l’Italie au sein d’un régime républicain. Déçu par l’inefficacité du carbonarisme auquel il a appartenu, il fonde en 1831, depuis son exil marseillais, la Jeune-Italie ; avec pour devise « Dieu, le peuple, l’humanité «, ce nouveau mouvement s’organise rapidement et s’étend bientôt sur toute la péninsule grâce au relais de nombreuses sections locales.

Cet effort d’éducation du peuple italien aux aspirations libérales et unitaires est relayé par de nombreux artistes et penseurs, notamment le marquis D’Azeglio, Alessandro Manzoni et Cesare Balbo. Pour sa part, le musicien Giuseppe Verdi obtient, le 9 mars 1842 à la Scala de Milan, un immense succès avec son opéra Nabucco : mettant en scène la révolte des Juifs contre Nabuchodonosor, la pièce trouve un écho immédiat chez les Italiens subissant le joug autrichien. Certains airs, notamment le chœur des esclaves, sont salués dès la première et deviennent des refrains patriotiques appelant à l’insurrection. Après 1848, le nom même de Verdi — correspondant à l’anagramme Vittorio Emanuele Re d’Italia ! (« Victor-Emmanuel roi d’Italie «) — devient un cri de ralliement des partisans du Risorgimento.

3.2   L’échec de « l’Italia farà da sé « (1848-1849)

Le philosophe et théologien néoguelfe Vincenzo Gioberti propose, quant à lui, de faire l’unité de l’Italie autour de la personne du pape. Élu en 1846, Pie IX prend au début de son pontificat l’initiative de la marche vers l’indépendance ; les premières mesures qu’il entreprend remettent en cause l’absolutisme et attisent la ferveur nationale mobilisée durant le « Printemps des peuples « de 1848. Le 12 janvier 1848 éclate en effet la première révolution en Sicile, et Ferdinand II des Deux-Siciles est contraint d’accorder une constitution à son peuple (29 janvier). L’agitation gagne alors toute l’Italie ; la nouvelle de la révolution parisienne lui imprime une telle ampleur que tous les souverains se soumettent aux revendications des révoltés. Pie IX met en place des réformes radicales à Rome. En mars, Charles-Albert de Piémont-Sardaigne promulgue à son tour un Statut constitutionnel (Statuto). La chute du chancelier autrichien Metternich embrase les villes italiennes sous le joug de l’empire : entre le 18 et le 22 mars (les « Cinq Jours «), les Milanais repoussent l’armée autrichienne de Radetzky et aboutissent au départ du gouverneur ; le 22 mars à Venise est proclamée la « république de Saint-Marc « par l’avocat Daniele Manin et le poète Niccolò Tommaseo. Dès le 23 mars 1848, Charles-Albert prend la direction du mouvement national : il adopte le drapeau tricolore, vert-blanc-rouge, symbole de l’Unité italienne, et promet aux Lombards-Vénitiens l’appui que « le frère attend de son frère «.

Tous les États italiens lui envoient des renforts pour mener à bien la guerre d’indépendance contre l’Autriche. Avec pour mot d’ordre « l’Italia farà da se « (« l’Italie se fera par elle-même «), Charles-Albert repousse toute aide extérieure et notamment l’alliance que lui offre Alphonse de Lamartine. Les duchés de Parme et de Modène, la Lombardie et la Vénétie déclarent fusionner avec le royaume de Piémont-Sardaigne. Charles-Albert pénètre en Lombardie et remporte quelques succès militaires. Mais, lorsque le pape Pie IX se retire du combat — refusant de prendre part à une guerre entre catholiques —, plusieurs souverains rappellent leurs troupes (notamment Ferdinand II des Deux-Siciles et le duc de Toscane).

En juillet 1848, les troupes autrichiennes du général Radetzky envahissent le nord de l’Italie et, le 25, battent à Custozza l’armée de Charles-Albert qui est contraint de signer un armistice (9 août). Les républicains prennent alors le relais, instaurant partout des Républiques (Rome, Venise, Florence, etc.). Pour éviter cette menace, les Piémontais reprennent l’initiative du combat, mais ils sont à nouveau vaincus, en mars 1849 à Novare, par les Autrichiens qui reprennent le contrôle de la Lombardie et de la Vénétie. Pour contrer la menace républicaine, les monarques rétablissent avec succès l’absolutisme : le roi de Naples retire sa constitution, le pape Pie IX renonce définitivement à établir ses projets libéraux dans ses États — ce en quoi il bénéficie de l’intervention des armées françaises du prince-président Louis Napoléon Bonaparte, qui écrasent en juillet 1849 la république de Rome, fondée par Giuseppe Mazzini et défendue par Giuseppe Garibaldi. À l’été 1849, seul le Piémont de Victor-Emmanuel II (Charles-Albert ayant abdiqué) résiste à l’Autriche. Le royaume conserve sa nouvelle Constitution qui fait figure, aux yeux de tous les patriotes, de matrice de la future constitution d’une Italie unifiée.

4   ACTIONS DIPLOMATIQUES ET MILITAIRES (1849-1870)

Pour surmonter l’échec de cette première guerre d’indépendance, il importe donc d’accroître la puissance du seul État qui résiste à l’Autriche : le Piémont-Sardaigne.

4.1   La préparation piémontaise

Le régime parlementaire du royaume de Piémont-Sardaigne permet l’émergence politique du comte de Cavour, président du Conseil à partir de 1852. Celui-ci pratique une politique économique active, modernise l’agriculture, conclut des traités de libre-échange, équipe le port de Gênes et construit un premier réseau ferroviaire. Il réorganise l’armée et crée un arsenal maritime à La Spezia. Les républicains eux-mêmes, excepté Giuseppe Mazzini, se rallient peu à peu à la cause piémontaise et à Cavour.

Le comte de Cavour mène également une politique extérieure active pour s’assurer le soutien diplomatique et militaire de la France de Napoléon III. Déjà, en participant à la guerre de Crimée contre la Russie, il offre au Piémont-Sardaigne la possibilité de faire entendre sa voix au congrès de Paris de 1856. De même, à la recherche de prestige et de grandeur, ému par les suppliques du régicide Felice Orsini, Napoléon III prend bientôt en main la cause italienne. L’entrevue secrète entre Napoléon et Cavour, à Plombières dans les Vosges, le 21 juillet 1858, aboutit à une alliance défensive, pour le cas où le Piémont serait attaqué. Quelques jours plus tard, le prince Jérôme Bonaparte, cousin germain de l’empereur, scelle cette alliance en épousant la fille du roi Victor-Emmanuel II, la princesse Clotilde.

4.2   La seconde guerre d’indépendance italienne (1859-1860)

Assuré de l’appui de Napoléon III, au printemps 1859, Cavour provoque une crise au cours de laquelle les Autrichiens font l’erreur de lancer un ultimatum à la capitale du Piémont, Turin, exigeant son désarmement. Cavour rejette cet ultimatum et, dans la guerre qui s’ensuit, les Français secourent les Piémontais. Vaincus lors des batailles acharnées de Magenta (4 juin) et de Solférino (24 juin), les Autrichiens doivent abandonner la Lombardie et Milan à Napoléon III, qui cède cette région à Victor-Emmanuel II.

Pour prix de ses services, la France reçoit le comté de Nice et la Savoie par le traité de Turin de mars 1860. L’accord signé par Cavour et Napoléon III est immédiatement impopulaire en Italie et révolte particulièrement le Niçois Giuseppe Garibaldi. Riche de nouveaux territoires et hostile à un Piémont-Sardaigne trop puissant, l’empereur français propose alors la paix aux Autrichiens — à l’indignation de Cavour qui attendait de l’empereur un engagement durable permettant l’aboutissement de l’unification.

4.3   Les soulèvements patriotiques

Néanmoins, le mouvement indépendantiste est désormais lancé et les patriotes italiens se soulèvent en Toscane, à Parme et à Modène. Au début de l’année 1860, ils renversent leurs souverains et réclament leur rattachement au Piémont-Sardaigne. Au mois d’avril, Palerme se révolte contre François II, roi de Naples.

Giuseppe Garibaldi n’est pas en reste pour lutter contre l’absolutisme : le 6 mai 1860 et à l’instigation du Sicilien Francesco Crispi, il embarque sur deux navires, dans les environs de Gênes, une force composée d’à peine plus de 1 000 volontaires. Le 11 mai, il débarque en Sicile à la tête de ses « chemises rouges « et, après avoir libéré l’île, chasse le roi de Naples le 7 septembre (voir expédition des Mille). Craignant que Garibaldi ne marche sur Rome, Cavour envoie l’armée piémontaise s’emparer des États pontificaux. Puis l’Ombrie et les Marches votent, à leur tour, leur rattachement à l’Italie en formation. Le 5 novembre, le royaume de Naples en fait de même. Désormais, rien ne s’oppose à ce que Victor-Emmanuel II soit désigné roi d’Italie, alors que l’étau se resserre sur Rome et sur le pape, placé sous la protection des Français.

4.4   La proclamation de l’unité

Le 17 mars 1861, le premier Parlement national italien, réuni à Turin, proclame la transformation du royaume de Piémont-Sardaigne en royaume d’Italie et Victor-Emmanuel II est couronné « roi d’Italie par la grâce de Dieu et la volonté de la nation «. C’est le couronnement du mouvement du Risorgimento. La capitale du nouveau royaume est fixée à Turin, avant d’être transférée à Florence en 1864 ; mais, selon les patriotes italiens, la seule capitale « naturelle « du royaume demeure la ville éternelle de Rome. Cependant, lorsque Cavour meurt en juin 1861, la Vénitie et le Latium (Rome) ne sont toujours pas italiens.

En 1866, l’Italie s’allie à la Prusse contre l’Autriche dans l’espoir de récupérer ces derniers territoires. Malgré les défaites de Custozza (24 juin) et de Lissa (20 juillet), la victoire prussienne de Sadowa (3 juillet) permet au royaume italien d’annexer la Vénétie. Mais il manque encore Rome, protégée par Napoléon III. Aussi, en octobre 1867, une soixantaine de volontaires garibaldiens cherche vainement à s'emparer de la ville éternelle.

À nouveau, le 3 novembre 1867, les zouaves pontificaux et l’armée française battent à Mentana les troupes de Garibaldi. Mais cet obstacle est levé en 1870, les revers de la guerre franco-allemande ayant obligé Napoléon III à rapatrier ses troupes. Les patriotes italiens du général Raffaele Cadorna entrent alors à Rome, le 20 septembre 1870, et Pie IX se réfugie au Vatican. En octobre 1870, un plébiscite confirme l’annexion et Rome devient la capitale d’un royaume de 26 millions d’habitants.

5   UNE UNITÉ INACHEVÉE ?

L’unité italienne donne naissance à la Question romaine : Pie IX et ses successeurs se considèrent désormais comme spoliés de leurs États pontificaux et prisonniers au Vatican. Pour cette raison, de nombreux catholiques sont hostiles au nouvel État unitaire. Ce n’est qu’en 1929 que les accords du Latran règlent définitivement cette question.

L’unité semble également inachevée aux yeux des militants nationalistes qui revendiquent toutes les terres de langue italienne (Trentin, Trieste, Istrie). Ils poussent à l’entrée en guerre de l’Italie en mai 1915, et estiment la victoire mutilée en 1918 car ils n’ont pas obtenu gain de cause. Cet irrédentisme pousse D’Annunzio à s’emparer de Fiume par la force en 1919 et donne bientôt à Benito Mussolini les bases de sa politique impérialiste.

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