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Parfum exotique de Baudelaire

Publié le 07/09/2013

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baudelaire

 

Le Paradis perdu

Quelle que soit la part du poète américain dans la genèse de

cette conception, il serait cependant erroné de réduire la

poétique de Baudelaire à cette influence. En fait, Baudelaire

avait très tôt mis en pratique les notions clés de sa philosophie

de l'art telles qu'il les exposera par la suite dans ses écrits

théoriques. La pratique avait précédé la théorie, comme on

peut s'en convaincre à la lecture du poème que l'on peut

considérer comme le premier poème véritablement abouti de

Baudelaire. Il s'agit de« Parfum exotique« qui, comme je l'ai

déjà mentionné 1

, a été écrit fort probablement après le voyage

dans l'océan Indien, et que Prarond cite parmi les poèmes de

jeunesse que Baudelaire lui aurait montrés en 1843:

"Quand, les deux yeux fermés, en un soir chaud d'automne,

Je respire l'odeur de ton sein chaleureux,

Je vois se dérouler des rivages heureux

Qu'éblouissent les feux d'un soleil monotone;

Une île paresseuse où la nature donne

Des arbres singuliers et des fruits savoureux;

Des hommes dont le corps est mince et vigoureux,

Et des femmes dont l'oeil par sa franchise étonne.

Guidé par ton odeur vers de charmants climats,

Je vois un port rempli de voiles et de mâts

Encor tout fatigués par la vague marine,

Pendant que le parfum des verts tamariniers,

Qui circule dans l'air et m'enfle la narine,

Se mêle dans mon âme au chant des mariniers ...

«Parfum exotique« est important à plus d'un titre. Il inaugure

dans l'oeuvre de Baudelaire un cycle marqué par le thème du

paradis perdu. L'axe central de cette série est composé par les

deux poèmes avec lesquels il constitue un véritable triptyque,

«La Chevelure« et le poème en prose «Un hémisphère dans

une chevelure«, mais ses résonances se prolongent bien audelà

et on les retrouve dans tous les textes qui évoquent Je

monde idéal. Toutefois, «Parfum exotique« n'est pas seulement

le témoignage d'une maîtrise précoce et la marque

tangible, l'inscription dans un texte, d'un territoire mental qui,

pour Baudelaire, a toujours été« la vraie vie«. Il révèle la mise

en oeuvre de moyens d'expression propres à produire cet

«enlèvement de l'âme« dont parlera plus tard Baudelaire dans

son étude sur Poe et que suscitera en lui la musique de Wagner.

Sous son apparente simplicité, ce poème recèle une richesse

d'associations qui autorisent à le situer à tous égards comme

un texte fondateur de la poétique des correspondances.

Le passage de «Parfum exotique« à «La Chevelure« n'est

pas seulement affirmé par leur proximité dans Les Fleurs du

Mal, où les deux poèmes se succèdent. Dans «La Chevelure

«, Baudelaire reprendra presque textuellement le

deuxième vers du premier tercet de «Parfum exotique « :

"Tu contiens, mer d'ébène, un éblouissant rêve

De voiles, de rameurs, de flammes et de mâts ..

La confrontation des deux textes laisse apparaître à la fois

une continuité et une amplification. Du sonnet de jeunesse au

grand poème synthétique de la maturité, on assiste à cet

«approfondissement« qui est l'une des principales marques

de la création poétique baudelairienne.

Certes, dans «La Chevelure«, Baudelaire portera beaucoup

plus loin sa quête d'une grande synthèse fondée sur les

correspondances. La poésie baudelairienne accomplira alors

une véritable transfiguration de l'expérience vécue en fondant

le réel et le rêve. Dans «Parfum exotique«, Baudelaire ne

parvient pas encore à cette élaboration souveraine, à cette

intégration totale de toutes les données du poème. Pourtant,

cette oeuvre a une existence autonome et ne saurait être

considérée comme une simple ébauche du chef-d'oeuvre à

venir. Déjà s'y affirme une association qui prouvera sa fécondité

entre la femme et la nature, entre la passion amoureuse

et la contemplation esthétique.

Cette oeuvre de jeunesse nous fait entrer dans l'intimité de

la création baudelairienne, elle nous montre cette création à

sa source.

C'est l'un des rares sonnets dont les rimes sont absolument

régulières, ABBA, ABBA, CCD, EDE. Ce choix s'explique

par la parfaite adéquation de la forme au sujet qui caractérisera

la poétique baudelairienne fondée sur la discipline et la

rigueur. Rien de fortuit, rien de gratuit dans ces vers marqués

par une recherche véritablement artisanale de justesse de

l'expression et de cohérence structurale. Dans ce sens, bien

qu'ouvrant la voie à la modernité, Baudelaire est aux antipodes

des surréalistes qui, à tant d'égards, appartiennent à sa

lignée.

baudelaire

« Guidé par ton odeur vers de charmants climats, Je vois un port rempli de voiles et de mâts Encor tout fatigués par la vague marine, Pendant que le parfum des verts tamariniers, Qui circule dans l'air et m'enfle la narine, Se mêle dans mon âme au chant des mariniers ...

«Parfum exotique» est important à plus d'un titre.

Il inaugure dans l'œuvre de Baudelaire un cycle marqué par le thème du paradis perdu.

L'axe central de cette série est composé par les deux poèmes avec lesquels il constitue un véritable triptyque, «La Chevelure» et le poème en prose «Un hémisphère dans une chevelure», mais ses résonances se prolongent bien au­ delà et on les retrouve dans tous les textes qui évoquent Je monde idéal.

Toutefois, «Parfum exotique» n'est pas seule­ ment le témoignage d'une maîtrise précoce et la marque tangible, l'inscription dans un texte, d'un territoire mental qui, pour Baudelaire, a toujours été« la vraie vie».

Il révèle la mise en œuvre de moyens d'expression propres à produire cet «enlèvement de l'âme» dont parlera plus tard Baudelaire dans son étude sur Poe et que suscitera en lui la musique de Wagner.

Sous son apparente simplicité, ce poème recèle une richesse d'associations qui autorisent à le situer à tous égards comme un texte fondateur de la poétique des correspondances.

Le passage de «Parfum exotique» à «La Chevelure» n'est pas seulement affirmé par leur proximité dans Les Fleurs du Mal, où les deux poèmes se succèdent.

Dans «La Cheve­ lure», Baudelaire reprendra presque textuellement le deuxième vers du premier tercet de «Parfum exotique » : "Tu contiens, mer d'ébène, un éblouissant rêve De voiles, de rameurs, de flammes et de mâts ..

La confrontation des deux textes laisse apparaître à la fois une continuité et une amplification.

Du sonnet de jeunesse au grand poème synthétique de la maturité, on assiste à cet «approfondissement» qui est l'une des principales marques de la création poétique baudelairienne.

Certes, dans «La Chevelure», Baudelaire portera beau­ coup plus loin sa quête d'une grande synthèse fondée sur les. »

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