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happy meal

Publié le 29/10/2013

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Parcours 1 : Petites histoires à lire entre les lignes  Séance 1 : Happy Meal Objectifs : Je dégage les premières caractéristiques du genre de la nouvelle. Je définis la nouvelle à chute. Je travaille le point de vue interne à la première personne. Dominante : Lecture Support : Happy Meal, d'Anna Gavalda Etape 1 : Une relation «amoureuse« ? Combien de personnages (principaux) apparaissent dans ce texte ? Quel sentiment les deux personnages ressentent-ils l'un pour l'autre d'après le texte ? La tendresse est le sentiment dominant que les deux personnages ressentent l'un pour l'autre. Relevez toutes les manifestations de tendresse entre les deux personnages dans la nouvelle. -Manifestations de la tendresse du narrateur = du personnage masculin (= du père) : JAUNE FLUO -Manifestations de tendresse de la fille : NOIR ?La tendresse entre les deux personnages est réciproque ; chacun prend soin de l'autre. Comment expliquez-vous que nous ayons plus d'éléments concernant le personnage masculin ? C'est le personnage masculin qui raconte l'histoire : narrateur interne, narrateur personnage. ?Il exprime ses sentiments Comment le personnage masculin envisage-t-il l'amour qu'il porte à Valentine ? Que pensez-vous de la façon dont il envisage son amour pour la jeune femme ? -Le texte insiste à plusieurs reprises sur les sentiments forts éprouvés par le personnage masculin : «je préfère la rendre heureuse un jour après l'autre« (ligne 20-21), «avec mon immense amour« (lignes 69-70). Le narrateur aime la regarder, il la trouve belle et se demande si elle s'est faite belle pour lui (p 14 et p 15).   -Le narrateur envisage leur avenir commun : «si on reste ensemble assez longtemps« (ligne 11), «Où irons-nous en vacances cet été ?« (ligne 153) -Le narrateur se considère, agit comme un «preux chevalier« (ligne 142). ?Allusion à l'amour courtois : forme très codée de l'amour que l'on retrouve dans la littérature du Moyen Age et notamment dans les romans de chevalerie de Chrétien de Troyes comme Yvain ou le chevalier au lion, Lancelot ou le chevalier de la charrette? L'amour courtois consiste à passer par une série d'épreuves pour séduire celle que l'on appelle sa dame et pour qui l'on brûle d'un feu chaste. C'est un amour qui s'exprime de façon particulièrement raffinée.   Sur quel personnage le texte met-il l'accent ? Quel est le personnage le plus largement présenté dans ce texte ? C'est le personnage de Valentine qui est mis en valeur dans ce texte. Dressez le portrait de la jeune fille : nom, vêtements-physique, réflexions, gestes-mouvements-attitudes. ELEMENTS SOULIGNES EN BLEU ?Les désignations de la petite fille pourraient s'appliquer à une femme : Valentine, «cette jeune fille« (ligne 1), «jeune personne« (ligne 9), «la plus jolie fille de la rue« (ligne 26), «ma chérie« (ligne 154).     ?Les vêtements qui sont décrits pourraient être des vêtements de femme : *Vêtements : jupe, chemisier, sac écharpe, manteau. *Lorsque le narrateur fait allusion aux chaussures de Valentine (lignes 22 et suivante), cette dernière se montre offusquée qu'il ne les ait pas remarquées plus tôt : stéréotype des comportements masculin et féminin ! ?Les réflexions de Valentine sont parfois ceux d'une adulte réfléchie : «Tu me regarderas plus tard. Ca va être froid« (ligne 59), «Tu n'es pas heureux ?« (ligne 72), «Qu'est-ce que tu ferais sans moi, hein ?« (ligne 119)     ?Les comportements de Valentine sont parfois ceux d'une séductrice, d'une jeune femme qui mène les hommes par le bout du nez : «Ca fait si longtemps?si longtemps« (ligne 6-7), «Elle retrousse son mignon petit nez et tortille une mèche de cheveux« (ligne 43), «Impalpable dédain de celles qui se savent belles« (ligne 51), «elle a senti que je regarde et minaude en pinçant sa paille« (ligne 115), «elle refait le n?ud de son écharpe et sort ses cheveux de dessous son manteau« (ligne 167) Le portrait est-il complet ? Pourquoi s'intéresser à CES éléments en particulier ? Pourquoi ces éléments ont-ils été choisis selon vous ? Ce portrait est incomplet : il ne permet pas au lecteur d'imaginer, de représenter le personnage de Valentine. Il y a sélection de l'information : on suppose que ces éléments sont importants, font sens, sont intéressants pour le lecteur. ?Tous ces éléments sont autant de (faux) indices pour mener le lecteur sur une (fausse) piste : les deux personnages formeraient un couple d'amoureux. Etape 2 : Une nouvelle à chute Lecture de la fin du texte : que constatez-vous ? Les deux dernières phrases révèlent la véritable nature des relations entre les deux personnages : il s'agit d'un père et de sa fille. «Cette fille, je l'aime. C'est la mienne. Elle s'appelle Valentine et n'a pas sept ans.«  Quelle est votre réaction face à cette fin ? Que pensez-vous de cette fin ? S'attendait-on à cette fin ? Cette fin est surprenante, au regard de ce que l'on a étudié auparavant : tout était fait pour laisser penser au lecteur qu'il était face à un couple d'amoureux (voir éléments surlignés). Retour sur la question précédente : tous les éléments du portrait de Valentine précédemment cités étaient en fait autant de faux indices pour mener le lecteur sur une fausse piste : les deux personnages formeraient un couple d'amoureux. On parle de CHUTE = fin inattendue, surprenante. Qu'est-ce qui induit le lecteur en erreur, le lance sur une fausse piste ? Dès la première phrase, le texte semble indiquer quel lien unit les deux personnages. La relation amoureuse est clairement, explicitement posée : cela permet d'induire le lecteur en erreur. «Cette fille, je l'aime.« Après cette première phrase, le lecteur peut ne plus se poser de questions sur les liens qui unissent les deux personnages. Mais en réalité, cette fin n'était pas si imprévisible? En relisant la nouvelle, relevez quels éléments devaient guider le lecteur et pouvaient lui permettre d'anticiper la chute. -Le titre : «Happy meal« fait allusion au menu enfant proposé dans les restaurants Mac Donald. -Valentine est qualifiée de «jeune personne« (ligne 9) et le narrateur précise qu'elle aime les «nuggets« qui composent souvent le menu enfant. -Elle porte du «vernis violet nacré sur ses ongles« (ligne 77) et de «minuscules barrettes« (ligne 80) dans les cheveux. -«Elle me fait sentir que je suis un ringard« (ligne 93) : typique du conflit de générations entre parents et enfants.     Synthèse : En vous appuyant sur ce texte, proposez une définition de la nouvelle (premières caractéristiques) et de la nouvelle à chute. -Une nouvelle est un genre narratif bref (en opposition au roman). -De part sa brièveté, tout ce qui y est mentionné est primordial. -Il y a peu de personnages et on ne nous dit d'eux que ce qui est important pour la compréhension du récit. -La nouvelle contient peu de descriptions. Tout ce qui est décrit aura une importance dans la suite du récit. -Souvent, la nouvelle se termine par une chute, c'est-à-dire une fin inattendue. Etape 3 : Le point de vue interne Quelle image est globalement donnée du Mac Do dans ce texte ? Relevez tous les éléments négatifs dans la description du Mac Do. La description du Mac Do est très négative, péjorative. On insiste sur la laideur de la scène avec des éléments qui font allusion à la vue : «serveuses enlaidies« (ligne 30), «visière insensée« (ligne 31), «gens en survêtement« (ligne 33), «femmes laides« (ligne 34) et «hommes gros« (ligne 34), «table dégueulasse« (ligne 54). Les odeurs et les goûts semblent également peu agréables, attractifs : -l'odeur : «le graillon« (ligne 29) -le goût : «morceaux de poulet décongelés dans leur sauce chimique« (ligne 86-87) La vulgarité, le manque de raffinement qui émane de l'atmosphère du Mac Do est à plusieurs reprises signalé : «un énergumène s'essuie la bouche et se mouche dans la même serviette« (ligne 100-101)  Les gens «raclent leur chaise« (ligne 50) «un garçon au crâne rasé est interpellé par deux braillards?morveux« (lignes 66-67) «musique d'ambiance« (ligne 32) «machins emballés« (ligne 66) «j'ai ce réflexe imbécile de chercher un couteau et une fourchette« (ligne 71) «reposer nos plateaux« (ligne 165)     Comment expliquez-vous que cette description soit aussi péjorative ? La description qui est faite du Mac Do est péjorative car elle est réalisée par le narrateur qui est en même temps un personnage de l'histoire : le père. Il est plus âgé, a des goûts plus raffinés et n'aime pas ce genre d'endroits. On peut remarquer le contraste entre la description vulgaire qui est faite du Mac Do et celle de la brasserie au début du texte : «une brasserie avec de grands miroirs et des nappes en tissu« ? opposition avec la «table dégueulasse«. «la sauce gribiche et les crêpes Suzette« ? recettes plus élaborées que les «nuggets« et leur «sauce barbecue« «chimique« ou les «sundae« avec des «éclats de cacahuètes« et du «caramel«. «les garçons des grandes brasseries n'ont pas le droit de toucher nos serviettes, ils les font glisser en soulevant la première assiette« ? opposition avec l'énergumène qui «s'essuie la bouche et se mouche dans la même serviette« et le fait de devoir «reposer nos plateaux«.            ?Dans ce texte, tout passe par le regard du père, tout est perçu selon son point de vue. Dans les deux premières pages du texte, relevez des éléments qui soulignent que tout est envisagé selon le point de vue du père. Les laisser relever et classer moi-même. Demander ensuite de donner un titre aux différentes colonnes. -Utilisation de la première personne du singulier : le père parle en son nom. -Expression des sentiments, émotions : «je l'aime« (ligne 1) «je bougonne« (ligne 6) «je préfère l'emmener dans ce putain de Mc Do et la rendre heureuse« (ligne 21).  «d'une fois sur l'autre, j'oublie à quel point je hais les Mac Donald« (ligne 27)  «j'ai du mal avec l'humanité« (ligne 35) «mon c?ur fait zigzague« (ligne 40) ? expression ici tout à fait personnelle et inattendue «je suis ému« (ligne 44)    -Marques de jugements : «je sais comment sont les filles avec l'avenir« (ligne 19) ? point de vue personnel qui n'engage que lui.       «Elle s'en offusque« (ligne 23) ? c'est le narrateur qui déduit cette réaction de la façon dont sa fille lui répond. Est-elle vraiment offusquée ? Pas nécessairement.  «Tu penses si je le savais« (ligne 26)  «C'est la plus jolie fille de la rue« (ligne 26) ? point de vue tout à fait subjectif et personnel.  «graillon, laideur et vulgarités mélangés« (ligne 29) ? termes péjoratifs «les femmes sont laides« (ligne 34)    -Perceptions «j'éprouve un haut-le-c?ur« (ligne 27) «je me sens mieux« (ligne 39)  -Questions rhétoriques que le personnage se pose à lui-même, intérieurement «Pourquoi les serveuses se laissent-elles ainsi enlaidir ? Pourquoi porter cette visière insensée ? Pourquoi les gens font-ils la queue ? Pourquoi cette musique d'ambiance ? Et pour quelle ambiance ?« (lignes 29 à 32)    On parle du point de vue interne : Chercher le point de vue utilisé dans un texte revient à se poser la question qui voit, qui entend ? qui ressent ? qui pense ? Il existe trois points de vue. Le point de vue interne à la première personne : l'auteur choisit de rapporter la scène telle qu'elle a été vue, pensée, ressentie par l'un des personnages. Dans ce cas, les verbes de perception ont tous le même sujet : le personnage en question. L'auteur est alors prisonnier du point de vue qu'il a choisi d'adopter, et il rapporte uniquement ce que ce personnage-là peut voir, entendre ou penser. Etant donné que ce texte est écrit selon le point de vue interne du père, que le lecteur ne peut-il pas savoir ? Le lecteur doit se contenter des actions réalisées par les autres personnages, que le narrateur-personnage peut voir, entendre, constater : «Elle retrousse son mignon petit nez et tortille une mèche de cheveux« (lignes 43-44) «Elle défait lentement son écharpe, dodeline trois fois de la tête avant de laisser voir son cou gracile« (ligne 56) «Un garçon au crâne rasé est interpellé par deux braillards« (ligne 66-67)  MAIS on ne plonge jamais dans la conscience des autres personnages, le lecteur n'a pas accès aux pensées de la petite fille par exemple. Il doit se contenter des suppositions faites par son père, de ses déductions : «Elle ouvre délicatement la boîte de nuggets COMME S'il s'était agi d'une boîte à bijoux« (ligne 75-76) «Elle me FAIT SENTIR que je suis un ringard, CA SE VOIT DANS SES YEUX« (ligne 93) «Les bouquinistes peut-être? Elle va râler? «Encore !« Non, elle ne va pas râler, elle aime aussi me faire plaisir« (ligne 159-160)       Etape 4 : Prolongement : Ecriture -Rédigez la description du Mac Donald du point de vue de la petite fille. -Imaginez le portrait que la petite fille pourrait faire du narrateur. -Imaginez la description que la petite fille pourrait faire d'un restaurant comme le narrateur les aime en utilisant les éléments du texte (lignes 12 à 16). Vous prendrez soin de développer une vision négative en utilisant entre autres le procédé des questions rhétoriques. Cette fille, je l'aime. J'ai envie de lui faire plaisir. J'ai envie de l'inviter à déjeuner. Une grande brasserie avec des miroirs et des nappes en tissu. M'asseoir près d'elle, regarder son profil, regarder les gens tout autour et tout laisser refroidir. Je l'aime. «D'accord, me dit-elle, mais on va au McDonald.« Elle n'attend pas que je bougonne. «Ça fait si longtemps? ajoute-t-elle en posant son livre près d'elle, si longtemps?« Elle exagère, ça fait moins de deux mois. Je sais compter. Mais bon. Cette jeune personne aime les nuggets et la sauce barbecue, qu'y puis-je ? Si on reste ensemble assez longtemps, je lui apprendrai autre chose. Je lui apprendrai la sauce gribiche et les crêpes Suzette par exemple. Si on reste ensemble assez longtemps, je lui apprendrai que les garçons des grandes brasseries n'ont pas le droit de toucher nos serviettes, qu'ils les font glisser en soulevant la première assiette. Elle sera bien étonnée. Il y a tellement de choses que je voudrais lui montrer? Tellement de choses. Mais je ne dis rien. Je prends mon pardessus en silence. Je sais comment sont les filles avec l'avenir : juste prometteuses. Je préfère l'emmener dans ce putain de McDo et la rendre heureuse un jour après l'autre. Dans la rue, je la complimente sur ses chaussures. Elle s'en offusque: «Ne me dis pas que tu ne les avais jamais vues, je les ai depuis Noël !«. Je pique du nez, elle me sourit, alors je la complimente sur ses chaussettes. Elle me dit que je suis bête. Tu penses si je le savais. C'est la plus jolie fille de la rue. J'éprouve un haut-le-coeur en poussant la porte. D'une fois sur l'autre, j'oublie à quel point je hais les McDonald. Cette odeur : graillon, laideur et vulgarité mélangés. Pourquoi les serveuses se laissent-elles ainsi enlaidir ? Pourquoi porter cette visière insensée ? Pourquoi les gens font-ils la queue ? Pourquoi cette musique d'ambiance ? Et pour quelle ambiance ? Je trépigne, les gens devant nous sont en survêtement. Les femmes sont laides et les hommes sont gros. J'ai déjà du mal avec l'humanité, je ne devrais pas venir dans ce genre d'endroit. Je me tiens droit et regarde loin devant, le plus loin possible: le prix du menu best-of McDeluxe. Elle le sent, elle sent ces choses. Elle prend ma main et la presse doucement. Elle ne me regarde pas. Je me sens mieux. Son petit doigt caresse l'intérieur de ma paume et mon coeur fait zigzague. Elle change d'avis plusieurs fois. Comme dessert, elle hésite entre un milkshake ou un sundae caramel. Elle retrousse son mignon petit nez et tortille une mèche de cheveux. La serveuse est fatiguée et moi, je suis ému. Je porte nos deux plateaux. Elle se tourne vers moi : -Tu préfères le coin fumeur, j'imagine ? Je hausse les épaules. -Si. Tu préfères. Je le sais bien. Elle m'ouvre la voie. Ceux qui sont mal assis raclent leur chaise à son passage. Des visages se tournent. Elle ne les voit pas. Impalpable dédain de celles qui se savent belles. Elle cherche un petit coin où nous serons bien tous les deux. Elle a trouvé, me sourit encore, je ferme les yeux en signe d'acquiescement. Je pose notre pitance sur une table dégueulasse. Elle défait lentement son écharpe, dodeline trois fois de la tête avant de laisser voir son cou gracile. Je reste debout comme un grand nigaud. - Je te regarde. -Tu me regarderas plus tard. Ça va être froid. -Tu as raison. - J'ai toujours raison. - Presque toujours. Petite grimace. J'allonge mes jambes dans l'allée. Je ne sais pas par quoi commencer. J'ai déjà envie de fumer. Je n'aime rien de tous ces machins emballés. Un garçon au crâne rasé est interpellé par deux braillards, je replie mes jambes pour laisser passer ce morveux. J'ai un moment de doute. Que fais-je ici ? Avec mon immense amour et ma pochette turquoise. J'ai ce réflexe imbécile de chercher un couteau et une fourchette. Elle me dit : -Tu n'es pas heureux ? - Si, si. - Alors mange ! Je m'exécute. Elle ouvre délicatement sa boîte de nuggets comme s'il s'était agi d'un coffret à bijoux. Je regarde ses mains. Elle a mis du vernis violet nacré sur ses ongles. Couleur aile de libellule. Je dis ça, je n'y connais rien en couleur de vernis, mais il se trouve qu'elle a deux petites libellules dans les cheveux. Minuscules barrettes inutiles qui n'arrivent pas à retenir quelques mèches blondes. Je suis ému. Je sais, je radote, mais je ne peux rn' empêcher de penser: «Est-ce pour moi, en pensant à ce déjeuner, qu'elle s'est fait les ongles ce matin ?« Je l'imagine, concentrée dans la salle de bains, rêvant déjà à son sundae caramel. Et à moi, un petit peu, fatalement. Elle trempe ses morceaux de poulet décongelés dans leur sauce chimique. Elle se régale. -Tu aimes vraiment ça ? - Vraiment. - Mais pourquoi ? Sourire triomphal. - Parce que c'est bon. Elle me fait sentir que je suis un ringard, ça se voit dans ses yeux. Mais du moins le fait-elle tendrement. Pourvu que ça dure, sa tendresse. Pourvu que ça dure. Je l'accompagne donc. Je mastique et déglutis à son rythme. Elle ne me parle pas beaucoup mais j'ai l'habitude, elle ne me parle jamais beaucoup quand je l'emmène déjeuner: elle est bien trop occupée à regarder les tables voisines. Les gens la fascinent, c'est comme ça. Même cet énergumène qui s'essuie la bouche et se mouche dans la même serviette juste à côté a plus d'attrait que moi. Comme elle les observe, j'en profite pour la dévisager tranquillement. Qu'est-ce que j'aime le plus chez elle ? En numéro un, je mettrais ses sourcils. Elle a de très jolis sourcils. Très bien dessinés. Le bon Dieu devait être inspiré ce jour-là. En numéro deux, ses lobes d'oreilles. Parfaits. Ses oreilles ne sont pas percées. J'espère qu'elle n'aura jamais cette idée saugrenue. Je l'en empêcherai. En numéro trois, quelque chose de très délicat à décrire? En numéro trois, j'aime son nez ou, plus exactement, les ailes de son nez. Ces deux petites courbes de chaque côté, délicates et frémissantes. Roses. Douces. Adorables. En numéro quatre? Mais déjà le charme est rompu: elle a senti que je la regardais et minaude en pinçant sa paille. Je me détourne. Je cherche mon paquet de tabac en tâtant toutes mes poches. - Tu l'as mis dans ta veste. - Merci. - Qu'est-ce que tu ferais sans moi, hein ? - Rien. Je lui souris en me roulant une cigarette. - ? mais je ne serais pas obligé d'aller au McDo le samedi après-midi. Elle s'en fiche de ce que je viens de dire. Elle attaque son sundae. Du bout de sa cuillère, elle commence par manger tous les petits éclats de cacahuètes et puis tout le caramel. Elle le repousse ensuite au milieu de son plateau. - Tu ne le finis pas ? - Non. En fait, je n'aime pas les sundae. Ce que j'aime, c'est juste les bouts de cacahuètes et le caramel mais la glace, ça m'écoeure? - Tu veux que je leur demande de t'en remettre ? - De quoi ? - Eh bien des cacahuètes et du caramel. - Ils ne voudront jamais. - Pourquoi ? - Parce que je le sais. Ils ne veulent pas. - Laisse-moi faire? Je me lève en prenant son petit pot de crème glacée et me dirige vers les caisses. Je lui fais un clin d'oeil. Elle me regarde amusée. Je balise un peu. Je suis son preux chevalier investi d'une mission impossible. Discrètement, je demande à la dame un nouveau sundae. C'est plus simple. C'est plus sûr. Je suis un preux chevalier prévoyant. Elle recommence son travail de fourmi. J'aime sa gourmandise. J'aime ses manières. Comment est-ce possible ? Tant de grâce. Comment est-ce possible ? Je réfléchis à ce que nous allons faire ensuite? Où vais-je l'emmener ? Que vais-je faire d'elle ? Me donnera-t-elle sa main, tout à l'heure, quand nous serons de nouveau dans la rue ? Reprendra-t-elle son charmant pépiement là où elle l'avait laissé en entrant ? Où en était-elle d'ailleurs ? ?Je crois qu'elle me parlait des vacances? Où irons-nous en vacances cet été ? ? Mon Dieu ma chérie, mais je ne le sais pas moi-même? Te rendre heureuse un jour après l'autre, je peux essayer, mais me demander ce que nous ferons dans six mois? Comme tu y vas? Il faut donc que je trouve un sujet de conversation en plus d'une destination de promenade. Preux, prévoyant et inspiré. Les bouquinistes peut-être? Elle va râler? «Encore!« Non, elle ne va pas râler. Elle aussi aime me faire plaisir. Et puis, pour sa main, elle me la donnera, je le sais bien. Elle plie sa serviette en deux avant de s'essuyer la bouche. En se levant, elle lisse sa jupe et réajuste le col de son chemisier. Elle prend son sac et me désigne du regard l'endroit où je dois reposer nos plateaux. Je lui tiens la porte. Le froid nous surprend. Elle refait le noeud de son écharpe et sort ses cheveux de dessous son manteau. Elle se tourne vers moi. Je me suis trompé, elle ne me donnera pas sa main puisque c'est mon bras qu'elle prend? Happy Meal, Anna GAVALDA Quel sentiment les deux personnages ressentent-ils l'un pour l'autre d'après le texte ? Relevez toutes les manifestations de tendresse entre les deux personnages dans la nouvelle. -Manifestations de la tendresse du narrateur = du personnage masculin = du père : JAUNE FLUO «J'ai envie de lui faire plaisir« (ligne 1), «M'asseoir près d'elle?refroidir« (lignes 3-4), «Je préfère? la rendre heureuse un jour après l'autre« (lignes 20-21), «je suis ému« (ligne 44 et 81), «je regarde ses mains« (ligne 76), «J'en profite pour la dévisager tranquillement? ce que j'aime le plus chez elle ?« (lignes 100-103), «Je lui fais un clin d'?il« (ligne 140), «j'aime sa gourmandise« (ligne 145-147), «Me donnera-t-elle la main, tout à l'heure, quand nous serons de nouveau dans la rue ?« (lignes 149-150), «Et puis, pour sa main, elle me la donnera, je le sais bien« (lignes 160-161).            -Manifestations de tendresse de la fille : NOIR SOULIGNE «elle me sourit« (ligne 24), «Elle prend ma main et la presse doucement« (ligne 38), «son petit doigt caresse l'intérieur de ma paume et mon c?ur fait zigzague« (ligne 39-40), «Mais du moins le fait-elle tendrement. Pourvu que ça dure, sa tendresse« (lignes 94-95), «Elle me regarde amusée« (lignes 140-141), «Elle aime aussi me faire plaisir« (ligne 160), «c'est mon bras qu'elle prend« (ligne 169).       ?La tendresse entre les deux personnages est réciproque ; chacun prend soin de l'autre. -Physique : jolie fille, mignon petit nez, elle se sait belle, cou gracile, vernis violet sur les ongles, deux petites libellules dans les cheveux, mèches blondes, jolis sourcils bien dessinés, lobes d'oreilles parfaits, oreilles non percées, courbes délicates et frémissantes des ailes du nez, roses, douces, adorables, tant de grâce. -Moral : Aime le Mc Do, elle sent les choses, tendre, irrésolue, minaude, gourmande, observatrice, altruiste. -Gestes : retrousse son nez, tortille une mèche de cheveux, défait lentement son écharpe, dodeline la tête, ouvre délicatement sa boîte de nuggets, plie sa serviette en deux avant de s'essuyer.

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