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à quelque distance.

Publié le 30/10/2013

Extrait du document

à quelque distance. Ses vaches passaient leurs têtes par les fenêtres de la vieille maison des Sanchez. Les Bordini n'avaient pas d'enfants. Et lorsque l'épouse mourut, à un âge mûr, le mari, abandonné à lui-même, sentit résonner l'appel de ses Alpes natales. Il voulait vendre et retourner chez lui. Adam Trask n'était pas pressé d'acheter. Bordini demandait un gros prix et le maintenait. Il savait qu'Adam achèterait, bien avant qu'Adam s'y soit décidé. Adam voulait s'établir et créer un foyer pour l'enfant à naître. Il avait peur d'acheter une terre et de s'apercevoir trop tard qu'il en préférait une autre. Toutefois, c'était celle des Sanchez qui l'attirait le plus. Cathy à ses côtés, la vie s'offrait, longue et agréable. Mais il voulait s'entourer de toutes les précautions. Il examina chaque pouce carré de la terre. Il fit sonder la couche de terre végétale pour examiner, tâter, sentir le sous-sol. Il demanda les noms de toutes les plantes sauvages qui croissaient dans les champs, le long de la rivière et sur les collines. Aux endroits humides, il s'agenouilla pour examiner les traces dans la boue. Il reconnut celles du cougouar, du daim, du coyote, du chat sauvage, du putois, du raton laveur, de la belette, du lapin et de la caille. Il erra au milieu des peupliers et des sycomores, au milieu des mûriers le long de la rivière, il caressa les troncs des chênes et des lauriers. Bordini le regardait faire d'un oeil ironique et versait de pleins gobelets d'un vin rouge de sa petite vigne à flanc de colline. Bordini aimait s'enivrer légèrement tous les aprèsmidi. Et Adam qui n'avait jamais bu de vin commençait à y prendre goût. Il demandait sans cesse à Cathy son opinion sur l'endroit. L'aimait-elle ? Y serait-elle heureuse ? Et il ne prêtait pas attention à ses réponses vagues. Il croyait qu'elle partageait son enthousiasme. Dans le hall de l'hôtel, il discutait avec les hommes réunis autour du poêle pour lire les journaux de San Francisco. « C'est à l'eau que je pense, dit-il un soir. Je me demande jusqu'où il faut creuser pour aller chercher l'eau ? Un des fermiers croisa ses jambes. « Vous devriez voir Sam Hamilton, dit-il. Pour ce qui est de l'eau, il en connaît plus que n'importe qui. C'est un sourcier et un bon puisatier. Il vous dira. Il a creusé la moitié des puits dans cette partie de la vallée. « Son compagnon eut un petit rire. « Sam a de bonnes raisons de s'intéresser à l'eau. Il n'en trouve pas une foutue goutte sur sa terre. - Où puis-je le trouver ? demanda Adam. - Je vais vous dire. Il faut que j'aille le voir pour qu'il me forge des équerres. Je vous emmènerai avec moi si vous voulez. Mr. Hamilton vous plaira. C'est un homme de bien. - Et un rigolo «, ajouta son compagnon. Louis Lippo emmena Adam à la ferme Hamilton dans sa charrette. Les plaques de fer à forger sautaient au fond de la boîte et un cuissot de chevreuil enveloppé dans un chiffon mouillé était posé dessus. À l'époque, la coutume voulait que l'on apportât un substantiel présent de nourriture lorsque l'on allait en visite, car il fallait rester à déjeuner. À moins, bien entendu, que l'on ne veuille insulter la famille. Quelques invités pouvaient vider le garde-manger. Il était tout naturel d'apporter de quoi le regarnir. Un quartier de porc ou un morceau de boeuf faisait l'affaire. Louis apportait donc le chevreuil et Adam une bouteille de whisky. « Il faut que je vous prévienne, dit Louis. Mr. Hamilton sera très touché, mais sa femme vous regardera de travers. Si j'étais vous, je cacherais la bouteille sous le siège et je ne la sortirais que lorsque nous serons devant la forge. C'est ce que nous faisons toujours. - Elle empêche son mari de boire ? - Elle est grosse comme un pruneau, dit Louis. Mais elle a des opinions bien arrêtées. Mettez donc la bouteille sous le siège. « Ils quittèrent la route de la Vallée et pénétrèrent dans les collines par un chemin cahoteux. Les ornières tracées dans la boue de l'hiver avaient durci, formant deux rails. Les chevaux peinaient dans leurs harnais et la charrette sautait et tanguait. L'année avait été mauvaise et, bien que ce fût seulement le mois de juin, les collines étaient déjà sèches et les silex brillaient dans les pâturages jaunis. L'avoine s'élevait tout au plus à six pouces du sol comme si elle avait su que, si elle ne germait pas rapidement, elle risquait de ne pas germer du tout. « Ce n'est pas un pays agréable, dit Adam. - Agréable ? Mais Mr. Trask, c'est un pays à tuer un homme et à le dévorer. Agréable ! Mr. Hamilton a un beau morceau de terrain, mais il aurait pu y mourir de faim avec tous ses enfants. La ferme ne les nourrit pas. Il fait toutes sortes de travaux et ses garçons commencent à rapporter. C'est une bonne famille. « Adam fixa son regard sur un buisson de bouteloue qui sortait du sol. « Pourquoi s'est-il établi sur une terre pareille ? « Louis Lippo, comme tout un chacun, aimait jouer le guide, avec un étranger plus spécialement, si aucun indigène n'était présent pour le contredire. « Je vais vous expliquer. Tenez, moi, par exemple, mon père était Italien. Il était venu ici après les troubles, mais il a apporté un peu d'argent. Ma terre n'est pas grande, mais elle est bonne. Mon père l'a achetée. Il l'a choisie. Et vous, par exemple - je ne sais pas à combien se monte votre fortune et je ne me permettrai pas de vous le demander, mais on raconte que vous allez acheter la terre des Sanchez et on sait que Bordini n'a pas l'habitude de faire des cadeaux. Ça veut dire que vous avez ce qu'il faut, sans ça vous n'y songeriez pas. - Je suis à mon aise, dit modestement Adam. - Si je ne vais pas droit au but. C'est pour mieux vous expliquer, dit Louis. Quand Mr. et Mrs. Hamilton sont arrivés dans la Vallée, ils n'avaient même pas un pot pour pisser dedans. Ils ont pris ce qui restait : des terres du gouvernement dont personne ne voulait. Sur vingt-cinq arpents, on ne peut pas nourrir une vache, même les bonnes années. Et on dit que même les coyotes ne s'en contentent pas les mauvaises années. Il y a des gens qui se demandent comment les Hamilton ont vécu. C'est parce que Mr. Hamilton s'est mis tout de suite au travail. Il s'est loué à la journée jusqu'à ce qu'il ait construit sa batteuse. - Il a dû réussir. J'ai entendu parler de lui un peu partout. - Il a réussi, comme vous dites. Il a réussi à élever neuf enfants. Il n'a pas quatre sous devant lui. Comment aurait-il fait ? « Une des roues de la charrette se souleva, roula sur une grosse pierre et retomba. Les chevaux étaient luisants de sueur et leurs harnais étaient noirs. « Je serai content de faire sa connaissance, dit Adam. - Parfaitement, monsieur. Une belle moisson a levé chez lui. De bons enfants, bien élevés. Ils se débrouillent tous, à part Joe - c'est le plus jeune. Ils disent qu'ils vont l'envoyer au collège. Mais les autres feront leur chemin dans la vie. Mr. Hamilton peut être fier. La maison est derrière le prochain coteau. Et n'oubliez surtout pas. N'allez pas montrer votre bouteille. Elle vous changerait en statue de sel. « La terre sèche se craquelait sous le soleil et les criquets chantaient. « C'est vraiment une terre oubliée du Seigneur, dit Louis. - Cela me rend mesquin, dit Adam. - Comment cela ? - Je me réjouis d'avoir assez d'argent pour être dispensé de vivre dans un endroit comme celui-ci. - Moi aussi j'en suis dispensé et je ne me sens pas mesquin. Je suis même plutôt heureux. « Lorsque la charrette arriva en haut du coteau, Adam put voir dans le contrebas les bâtiments qui composaient la résidence des Hamilton. Une maison, une étable, un atelier et une remise. L'ensemble paraissait sec et mangé de soleil. Pas d'arbres et un tout petit jardin arrosé à la main.

« Les chevaux peinaient dansleurs harnais etlacharrette sautaitettanguait.

L’année avait étémauvaise et,bien quecefût seulement lemois dejuin, lescollines étaientdéjà sèches etles silex brillaient danslespâturages jaunis.L’avoine s’élevaittoutauplus àsix pouces dusol comme sielle avait suque, sielle negermait pasrapidement, ellerisquait de ne pas germer dutout. « Ce n’est pasunpays agréable, ditAdam. – Agréable ? MaisMr.Trask, c’estunpays àtuer unhomme etàle dévorer.

Agréable ! Mr.

Hamilton aun beau morceau deterrain, maisilaurait puymourir defaim avectous ses enfants.

Laferme neles nourrit pas.Ilfait toutes sortesdetravaux etses garçons commencent àrapporter.

C’estunebonne famille. » Adam fixasonregard surunbuisson debouteloue quisortait dusol. « Pourquoi s’est-ilétablisurune terre pareille ? » Louis Lippo, comme toutunchacun, aimaitjouerleguide, avecunétranger plus spécialement, siaucun indigène n’étaitprésent pourlecontredire. « Je vaisvous expliquer.

Tenez,moi,parexemple, monpèreétait Italien.

Ilétait venu ici après lestroubles, maisilaapporté unpeu d’argent.

Materre n’estpasgrande, maiselle est bonne.

Monpèrel’aachetée.

Ill’a choisie.

Etvous, parexemple –je ne sais pasà combien semonte votrefortune etjene me permettrai pasdevous ledemander, mais on raconte quevous allezacheter laterre desSanchez eton sait que Bordini n’apas l’habitude defaire descadeaux.

Çaveut direquevous avezcequ’il faut, sansçavous n’y songeriez pas. – Je suisàmon aise,ditmodestement Adam. – Si jene vais pasdroit aubut.

C’est pourmieux vousexpliquer, ditLouis.

Quand Mr.et Mrs.

Hamilton sontarrivés danslaVallée, ilsn’avaient mêmepasunpot pour pisser dedans.

Ilsont pris cequi restait : desterres dugouvernement dontpersonne nevoulait. Sur vingt-cinq arpents,onnepeut pasnourrir unevache, mêmelesbonnes années.

Et on dit que même lescoyotes nes’en contentent paslesmauvaises années.Ilya des gens qui sedemandent commentlesHamilton ontvécu.

C’estparce queMr.Hamilton s’est mis tout desuite autravail.

Ils’est louéàla journée jusqu’àcequ’il aitconstruit sa batteuse.

– Il adû réussir.

J’aientendu parlerdelui un peu partout. – Il aréussi, comme vousdites.

Ilaréussi àélever neufenfants.

Iln’a pas quatre sous devant lui.Comment aurait-ilfait ? » Une desroues delacharrette sesouleva, roulasurune grosse pierreetretomba.

Les chevaux étaientluisants desueur etleurs harnais étaientnoirs. « Je serai content defaire saconnaissance, ditAdam. – Parfaitement, monsieur.Unebelle moisson alevé chez lui.Debons enfants, bien élevés.

Ilssedébrouillent tous,àpart Joe–c’est leplus jeune.

Ilsdisent qu’ilsvont l’envoyer aucollège.

Maislesautres ferontleurchemin danslavie.

Mr.

Hamilton peut être fier.

Lamaison estderrière leprochain coteau.Etn’oubliez surtoutpas.N’allez pas montrer votrebouteille.

Ellevous changerait enstatue desel. » La terre sèche secraquelait souslesoleil etles criquets chantaient. « C’est vraiment uneterre oubliée duSeigneur, ditLouis. – Cela merend mesquin, ditAdam. – Comment cela ? – Je meréjouis d’avoir assezd’argent pourêtredispensé devivre dansunendroit comme celui-ci. – Moi aussij’ensuis dispensé etjene me sens pasmesquin.

Jesuis même plutôt heureux. » Lorsque lacharrette arrivaenhaut ducoteau, Adamputvoir dans lecontrebas les bâtiments quicomposaient larésidence desHamilton.

Unemaison, uneétable, un atelier etune remise.

L’ensemble paraissaitsecetmangé desoleil.

Pasd’arbres etun tout petit jardin arrosé àla main.. »

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