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Ainsi parlait Zarathoustra.

Publié le 30/10/2013

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Ainsi parlait Zarathoustra. Le devin « ... et je vis une grande tristesse descendre sur les hommes. Les meilleurs se fatiguèrent de leurs oeuvres. Une doctrine fut mise en circulation et à côté d'elle une croyance : « Tout est vide, tout est pareil, tout est passé ! « Et de toutes les collines résonnait la réponse : « Tout est vide, tout est pareil, tout est passé ! « Il est vrai que nous avons moissonné : mais pourquoi nos fruits ont-ils pourri et bruni ? Qu'estce qui est tombé la nuit dernière de la mauvaise lune. Tout travail a été vain, notre vin a tourné, il est devenu du poison, le mauvais oeil a jauni nos champs et nos coeurs. Nous avons tous desséché ; et si le feu tombe sur nous, nos cendres s'en iront en poussière : - Oui, nous avons fatigué même le feu. Toutes les fontaines se sont desséchées pour nous et la mer s'est retirée. Tout sol veut se fendre, mais les abîmes ne veulent pas nous engloutir ! « Hélas ! Où y a-t-il encore une mer où l'on puisse se noyer ? « Ainsi résonne notre plainte - cette plainte qui passe sur les plats marécages. En vérité, nous nous sommes déjà trop fatigués pour mourir, maintenant nous continuons à vivre éveillés - dans des caveaux funéraires ! « Ainsi Zarathoustra entendit parler un devin ; et sa prédiction lui alla droit au coeur et elle le transforma. Il erra triste et fatigué ; et il devint semblable à ceux dont avait parlé le devin. En vérité, dit-il à ses disciples, il s'en faut de peu que ce long crépuscule ne descende. Hélas ! comment ferai-je pour sauver ma lumière au delà de ce crépuscule ! Comment ferai-je pour qu'elle n'étouffe pas dans cette tristesse ? Il faut qu'elle soit la lumière des mondes lointains et qu'elle éclaire les nuits les plus lointaines ! Ainsi, préoccupé dans son coeur, Zarathoustra erra çà et là ; et pendant trois jours il ne prit ni nourriture ni boisson, il n'eut point de repos et perdit la parole. Enfin il arriva de tomber dans un profond sommeil. Mais ses disciples passaient de longues veilles, assis autour de lui, et ils attendaient avec inquiétude qu'il se réveillât pour se remettre à parler et pour guérir de sa tristesse. Mais voici le discours que leur tint Zarathoustra lorsqu'il se réveilla ; cependant sa voix leur semblait venir du lointain : Écoutez donc le rêve que j'ai fait, mes amis, et aidez-moi à en deviner le sens ! Il est encore une énigme pour moi, ce rêve ; son sens est caché en lui et voilé ; il ne vole pas encore librement au-dessus de lui. J'avais renoncé à toute espèce de vie ; tel fut mon rêve. J'étais devenu veilleur et gardien des tombes, là-bas sur la solitaire montagne du château de la Mort. C'est là-haut que je gardais les cercueils de la Mort : les sombres voûtes s'emplissaient de ces trophées de victoire. À travers les cercueils de verre les existences vaincues me regardaient. Je respirais l'odeur d'éternités en poussières : mon âme était là, lourde et poussiéreuse. Et qui donc eût été capable d'alléger son âme ? La clarté de minuit était toujours autour de moi et, accroupie à ses côtés, la solitude ; et aussi un silence de mort, coupé de râles, le pire de mes amis. Je portais des clefs avec moi, les plus rouillées de toutes les clefs ; et je savais ouvrir avec elles les portes les plus grinçantes. Pareils à des cris rauques et méchants, les sons couraient au long des corridors, quand s'ouvraient les ailes de la porte : l'oiseau avait de mauvais cris, il ne voulait pas être réveillé. Mais c'était plus épouvantable encore, et mon coeur se serrait davantage, lorsque tout se taisait et que revenait le silence et que seul j'étais assis dans ce silence perfide. C'est ainsi que se passa le temps, lentement, s'il peut encore être question de temps : qu'en sais-je, moi ! Mais ce qui me réveilla finit par avoir lieu. Trois fois des coups frappèrent à la porte, semblables au tonnerre, les voûtes retentirent et hurlèrent trois fois de suite : alors je m'approchai de la porte. Alpa ! M'écriais-je, qui porte sa cendre vers la montagne ? Alpa ! Alpa ! qui porte sa cendre vers la montagne ? Et je serrais la clef, et j'ébranlais la porte et je me perdais en efforts. Mais la porte ne s'ouvrait pas d'un doigt ! Alors l'ouragan écarta avec violence les ailes de la porte : avec des sifflements et des cris aigus qui coupaient l'air, il me jeta un cercueil noir : Et, en sifflant et en hurlant, le cercueil se brisa et cracha mille éclats de rire. Mille grimaces d'enfants, d'anges, de hiboux, de fous et de papillons énormes ricanaient à ma face et me persiflaient. Je m'en effrayais horriblement : je fus précipité à terre et je criais d'épouvante, comme jamais je n'avais crié. Mais mon propre cri me réveilla : - et je revins à moi. - Ainsi Zarathoustra raconta son rêve, puis il se tut : car il ne connaissait pas encore la signification de son rêve. Mais le disciple qu'il aimait le plus se leva vite, saisit la main de Zarathoustra et dit : « C'est ta vie elle-même qui nous explique ton rêve, ô Zarathoustra ! N'es-tu pas toi-même le vent aux sifflements aigus qui arrache les portes du château de la Mort ? N'es-tu pas toi-même le cercueil plein de méchancetés multicolores et plein des angéliques grimaces de la vie ? En vérité, pareil à mille éclats de rire d'enfants, Zarathoustra vient dans toutes les chambres mortuaires, riant de tous ces veilleurs et de tous ces gardiens des tombes, et de tous ceux qui agitent leurs clefs avec un cliquetis sinistre. Tu les effrayeras et tu les renverseras de ton rire ; la syncope et le réveil prouveront ta puissance sur eux. Et quand même viendrait le long crépuscule et la fatigue mortelle, tu ne disparaîtrais pas de notre ciel, affirmateur de la vie ! Tu nous as fait voir de nouvelles étoiles et de nouvelles splendeurs nocturnes ; en vérité, tu as étendu sur nos têtes le rire lui-même, comme une tente multicolore. Maintenant des rires d'enfants jailliront toujours des cercueils ; maintenant viendra, toujours victorieux des fatigues mortelles, un vent puissant. Tu en es toi-même le témoin et le devin. En vérité, tu les as rêvés eux-mêmes, tes ennemis : ce fut ton rêve le plus pénible ! Mais comme tu t'es réveillé d'eux et que tu es revenu à toi-même, ainsi ils doivent se réveiller d'eux-mêmes - et venir à toi ! « - Ainsi parlait le disciple ; et tous les autres se pressaient autour de Zarathoustra et ils saisissaient ses mains et ils voulaient le convaincre de quitter son lit et sa tristesse, pour revenir à eux. Cependant Zarathoustra était assis droit sur sa couche avec des yeux étranges. Pareil à quelqu'un qui revient d'une longue absence, il regarda ses disciples et interrogea leurs visages ; et il ne les reconnaissait pas encore. Mais lorsqu'ils le soulevèrent et qu'ils le placèrent sur ses jambes, son oeil se transforma tout à coup ; il comprit tout ce qui était arrivé, et en se caressant la barbe, il dit d'une voix forte : « Allons ! tout cela viendra en son temps ; mais veillez, mes disciples, à ce que nous fassions un bon repas, et bientôt ! - c'est ainsi que je pense expier mes mauvais rêves ! Pourtant le devin doit manger et boire à mes côtés : et, en vérité, je lui montrerai une mer où il pourra se noyer ! «

« Le devin « … etjevis une grande tristesse descendre surleshommes.

Lesmeilleurs sefatiguèrent de leurs œuvres. Une doctrine futmise encirculation etàcôté d’elle unecroyance : « Toutestvide, toutest pareil, toutestpassé ! » Et de toutes lescollines résonnait laréponse : « Toutestvide, toutestpareil, toutestpassé ! » Il est vrai que nous avons moissonné : maispourquoi nosfruits ont-ils pourrietbruni ? Qu’est- ce qui esttombé lanuit dernière delamauvaise lune. Tout travail aété vain, notre vinatourné, ilest devenu dupoison, lemauvais œilajauni nos champs etnos cœurs. Nous avons tousdesséché ; etsile feu tombe surnous, noscendres s’eniront enpoussière : – Oui, nous avons fatigué mêmelefeu. Toutes lesfontaines sesont desséchées pournous etlamer s’est retirée.

Toutsolveut se fendre, maislesabîmes neveulent pasnous engloutir ! « Hélas ! Oùya-t-il encore unemer oùl’on puisse senoyer ? » Ainsirésonne notreplainte – cette plainte quipasse surlesplats marécages. En vérité, nousnoussommes déjàtropfatigués pourmourir, maintenant nouscontinuons à vivre éveillés –dans descaveaux funéraires ! » Ainsi Zarathoustra entenditparlerundevin ; etsa prédiction luialla droit aucœur etelle le transforma.

Ilerra triste etfatigué ; etildevint semblable àceux dont avait parlé ledevin. En vérité, dit-ilàses disciples, ils’en fautdepeu quecelong crépuscule nedescende.

Hélas ! comment ferai-jepoursauver malumière audelà dececrépuscule ! Comment ferai-jepourqu’elle n’étouffe pasdans cette tristesse ? Ilfaut qu’elle soitlalumière des mondes lointains etqu’elle éclairelesnuits lesplus lointaines ! Ainsi, préoccupé danssoncœur, Zarathoustra erraçàetlà ; etpendant troisjours ilne prit ni nourriture niboisson, iln’eut point derepos etperdit laparole.

Enfinilarriva detomber dans un profond sommeil.

Maissesdisciples passaient delongues veilles,assisautour delui, etils attendaient avecinquiétude qu’ilseréveillât pourseremettre àparler etpour guérir desa tristesse.

Mais voicilediscours queleur tintZarathoustra lorsqu’ilseréveilla ; cependant savoix leur semblait venirdulointain : Écoutez donclerêve quej’aifait, mes amis, etaidez-moi àen deviner lesens ! Il est encore uneénigme pourmoi,cerêve ; sonsens estcaché enluietvoilé ; ilne vole pas encore librement au-dessus delui. J’avais renoncé àtoute espèce devie ; telfut mon rêve.

J’étais devenu veilleuretgardien des tombes, là-bassurlasolitaire montagne duchâteau delaMort. C’est là-haut quejegardais lescercueils delaMort : lessombres voûtess’emplissaient deces trophées devictoire.

Àtravers lescercueils deverre lesexistences vaincuesmeregardaient. Je respirais l’odeurd’éternités enpoussières : monâmeétait là,lourde etpoussiéreuse.

Etqui donc eûtétécapable d’alléger sonâme ? La clarté deminuit étaittoujours autourdemoi et,accroupie àses côtés, lasolitude ; etaussi un silence demort, coupé derâles, lepire demes amis. Je portais desclefs avec moi,lesplus rouillées detoutes lesclefs ; etjesavais ouvrir avecelles les portes lesplus grinçantes. Pareils àdes crisrauques etméchants, lessons couraient aulong descorridors, quand s’ouvraient lesailes delaporte : l’oiseau avaitdemauvais cris,ilne voulait pasêtre réveillé. Mais c’était plusépouvantable encore,etmon cœur seserrait davantage, lorsquetoutse taisait etque revenait lesilence etque seul j’étais assisdans cesilence perfide.. »

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