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chance s'est maintenu plus longtemps.

Publié le 01/10/2013

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chance s'est maintenu plus longtemps. Ce qui aussi rend les choses faciles, c'est que le prince, pour n'avoir pas d'autres Etats, est contraint de venir en personne y habiter. Mais pour en venir à ceux qui par leur mérite propre et non par chance sont devenus princes, je dis que les plus excellents sont Moïse, Cyrus, Romulus, Thésée et autres semblables. Et bien que de Moïse on ne doive point raisonner, puisqu'il ne fut qu'un simple exécuteur de ce qui lui était ordonné par Dieu, il faut cependant l'admirer, ne fût-ce que pour cette grâce qui le rendait digne de parler avec Dieu. Mais considérons Cyrus et les autres qui ont acquis ou fondé des royaumes : vous les trouverez tous admirables ; et si l'on considère leurs actions et méthodes particulières, elles ne paraîtront pas en discordance avec celles de Moïse, qui eut un si grand précepteur. Et à examiner leurs actions et leur vie, on ne voit pas que la chance leur ait rien apporté, que l'occasion ; laquelle leur donna une matière où ils pussent introduire telle forme qui leur parut bonne 12 : et sans cette occasion, les vertus de leur esprit se seraient éteintes ; et sans ces vertus, c'est en vain que serait venue l'occasion. Il, était donc nécessaire que Moïse trouvât le peuple d'Israël en Egypte, esclave et opprimé par les Égyptiens, de façon que, pour sortir de servitude, ils fussent disposés à le suivre. Il convenait que Romulus fût rejeté d'Albe, qu'il eût été exposé à sa naissance, si l'on voulait qu'il devînt roi de Rome et fondateur de cette patrie. Il fallait que Cyrus trouvât les Perses mécontents de la domination des Mèdes, et les Mèdes amollis et efféminés par une longue paix. Thésée ne pouvait manifester son génie s'il n'eût trouvé les Athéniens dispersés. Ces occasions, donc, ont fait l'heureux succès de ces hommes, et l'excellence de leur génie a fait connaître l'occasion ; ce qui valut à leur patrie la gloire et le plus grand bonheur. Ceux qui, semblablement, doivent à leur mérite de devenir princes ont de la difficulté à y parvenir, mais le demeurent avec facilité ; et les difficultés qu'ils ont à parvenir au pouvoir naissent en partie des institutions et usages nouveaux qu'ils sont forcés d'introduire pour fonder leur régime et leur sécurité. Et il faut prendre garde qu'il n'y a chose plus difficile à entreprendre, ni à réussir plus douteuse, ni à conduire plus périlleuse que de s'aventurer à introduire de nouvelles institutions ; car celui qui les introduit a pour ennemis tous ceux à qui les institutions anciennes sont profitables, et il trouve de tièdes défenseurs en tous ceux que les institutions nouvelles avantageraient. Tiédeur qui naît, partie de la peur des adversaires, qui ont les lois pour eux, partie de l'incrédulité des hommes, qui ne font pas véritablement crédit aux nouveautés, avant d'en avoir vu paraître une ferme expérience. D'où s'ensuit que chaque fois que ceux qui sont ennemis ont occasion d'attaquer, ils le font en partisans, et que les autres sont tièdes à résister ; de sorte qu'avec eux on se trouve en danger. Aussi faut-il, si l'on veut raisonner correctement sur ce point, examiner si ces novateurs s'appuient sur leurs propres forces, ou s'ils dépendent d'autrui ; c'est-à-dire si, pour mener à bien leur entreprise, il leur faut procéder par prières ou s'ils sont en mesure de contraindre. Dans le premier cas, ils finissent toujours mal, et ne viennent à bout de rien ; mais quand ils dépendent d'eux-mêmes et sont en mesure de contraindre, il est alors rare qu'ils soient en danger. De là vient que tous les prophètes armés triomphèrent, et que les désarmés s'effondrèrent. Car outre ce qu'on a dit, la nature des peuples est changeante ; et il est aisé de leur persuader une chose, mais difficile de les tenir fermes en cette persuasion. Aussi faut-il être organisé de façon que, lorsqu'ils ne croiront plus, on puisse les faire croire de force. Moïse, Cyrus, Thésée et Romulus n'auraient pu leur faire observer longtemps leurs Constitutions s'ils eussent été désarmés ; comme de notre temps il arriva à frère Jérôme Savonarole, qui s'effondra au milieu de ses institutions nouvelles lorsque la multitude commença à ne plus le croire ; et lui n'avait aucun moyen pour tenir fermes ceux qui avaient cru, ni pour faire croire les incrédules. C'est pourquoi les gens de cette sorte ont grande difficulté à mener les affaires, c'est en chemin qu'ils trouvent tous leurs dangers, et il leur faut assez de génie pour les surmonter ; mais une fois qu'ils les ont surmontés et qu'ils commencent à être en vénération, après avoir fait périr ceux qui étaient jaloux de leur élévation, ils trouvent puissance, sûreté, honneur et bonheur. À de si hauts exemples j'en veux ajouter un plus humble, mais qui néanmoins peut se comparer à ceux-là, et je veux qu'il me tienne lieu de tous les autres de même espèce. C'est Hiéron de Syracuse. Celui-ci, d'homme privé, devint prince de Syracuse ; et à lui non plus la fortune n'accorda rien d'autre que l'occasion ; en effet, comme les Syracusains étaient opprimés, ils l'élurent pour leur capitaine ; et c'est alors qu'il se montra digne d'être fait leur prince. Et son mérite était si grand, dès avant son élévation, qu'on a écrit de lui « que rien ne lui manquait pour régner, que le royaume «. Il détruisit l'ancienne armée, en organisa une nouvelle ; il laissa les amitiés anciennes, en forma de nouvelles, et lorsqu'il eut amitiés et soldats qui fussent siens, il put sur un tel fondement édifier ce qu'il voulut : de sorte qu'il eut beaucoup de peine à acquérir et peu à se maintenir.

« il faut prendre garde qu'il n'y a chose plus difficile à entre- prendre, ni à réussir plus douteuse, ni à conduire plus périlleuse que de s'aventurer à introduire de nouvelles institutions ; car celui qui les introduit a pour ennemis tous ceux à qui les institu- tions anciennes sont profitables, et il trouve de tièdes défenseurs en tous ceux que les institutions nouvelles avantageraient.

Tié- deur qui naît, partie de la peur des adversaires, qui ont les lois pour eux, partie de l'incrédulité des hommes, qui ne font pas véritablement crédit aux nouveautés, avant d'en avoir vu paraître une ferme expérience.

D'où s'ensuit que chaque fois que ceux qui sont ennemis ont occasion d'attaquer, ils le font en partisans, et que les autres sont tièdes à résister ; de sorte qu'avec eux on se trouve en danger.

Aussi faut-il, si l'on veut raisonner correctement sur ce point, examiner si ces novateurs s'appuient sur leurs propres forces, ou s'ils dépendent d'autrui ; c'est-à-dire si, pour mener à bien leur entreprise, il leur faut procéder par prières ou s'ils sont en mesure de contraindre.

Dans le premier cas, ils finissent toujours mal, et ne viennent à bout de rien ; mais quand ils dépendent d'eux-mêmes et sont en mesure de contraindre, il est alors rare qu'ils soient en dan- ger.

De là vient que tous les prophètes armés triomphèrent, et que les désarmés s'effondrèrent.

Car outre ce qu'on a dit, la nature des peuples est changeante ; et il est aisé de leur persua- der une chose, mais difficile de les tenir fermes en cette persua- sion.

Aussi faut-il être organisé de façon que, lorsqu'ils ne croiront plus, on puisse les faire croire de force.

Moïse, Cyrus, Thésée et Romulus n'auraient pu leur faire observer longtemps leurs Constitutions s'ils eussent été désarmés ; comme de notre temps il arriva à frère Jérôme Savonarole, qui s'effondra au milieu de ses institutions nouvelles lorsque la multitude commença à ne plus le croire ; et lui n'avait aucun moyen pour tenir fermes ceux qui avaient cru, ni pour faire croire les incré- dules.

C'est pourquoi les gens de cette sorte ont grande diffi- culté à mener les affaires, c'est en chemin qu'ils trouvent tous leurs dangers, et il leur faut assez de génie pour les surmonter ; mais une fois qu'ils les ont surmontés et qu'ils commencent à. »

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