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    Chapitre XLVII   Conséquences fatales.

Publié le 15/12/2013

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    Chapitre XLVII   Conséquences fatales.   C'était environ deux heures avant l'aube du jour, à cette heure qu'en automne on peut bien appeler le fort de la nuit, quand les rues sont désertes et silencieuses, que le bruit même paraît sommeiller et que l'ivrogne et le débauché ont egagné leur maison d'un pas chancelant. À cette heure de calme et de silence, le juif veillait dans son repaire, le visage si pâle et si contracté, les yeux si rouges et si injectés de sang qu'il ressemblait moins à un homme qu'à un hideux fantôme échappé du tombeau et poursuivi par un esprit malfaisant. Il était accroupi devant son feu éteint, enveloppé dans une vieille couverture déchirée et le visage tourné vers la chandelle qui était posée sur la table, à côté de lui. Il portait sa main droite à ses lèvres et, absorbé dans ses réflexions, il se mordait les ongles et laissait voir ses gencives dégarnies de dents et armées seulement de quelques crocs comme en aurait un chien ou un rat. Noé Claypole dormait profondément sur un matelas étendu sur le plancher. Parfois le vieillard tournait un instant ses regards vers lui, puis les ramenait vers la chandelle dont la longue mèche brûlée attestait, ainsi que les gouttes de suif qui tombaient sur la table, que les pensées du juif étaient occupées ailleurs. Elles l'étaient en effet. Mortification de voir ses plans renversés, haine contre la jeune fille qui avait osé entrer en relation avec des étrangers, défiance profonde de sa sincérité quand elle avait refusé de le trahir, amer désappointement de perdre l'occasion de se venger de Sikes, crainte d'être découvert, ruiné, peut-être pendu ; tout cela lui donnait un accès terrible de rage furieuse ; toutes ces réflexions se croisaient rapidement et se heurtaient dans l'esprit de Fagin, et mille projets criminels plus noirs les uns que les autres s'agitaient dans son coeur. Il resta ainsi complètement immobile et sans avoir l'air de faire la moindre attention au temps qui s'écoulait, jusqu'à ce qu'un bruit de pas dans la rue vint frapper son oreille exercée et attirer son attention. « Enfin ! murmura-t-il en essuyant ses lèvres sèches et agitées par la fièvre ; enfin ! » Au même instant un léger coup de sonnette se fit entendre. Il grimpa l'escalier pour aller ouvrir et revint presque aussitôt accompagné d'un individu enveloppé jusqu'au menton et qui portait un papier sous le bras. Celui-ci s'assit, se dépouilla e son manteau et laissa voir les formes athlétiques du brigand Sikes.  Tenez, dit-il en posant le paquet sur la table ; serrez cela et tâchez d'en tirer le meilleur parti possible. J'ai eu assez de al à me le procurer. Il y a trois heures que je devrais être ici. » agin mit la main sur le paquet, l'enferma dans l'armoire et se rassit sans dire un mot. Mais il ne perdit pas de vue le rigand un seul instant, et, quand ils furent assis de nouveau face à face et tout près l'un de l'autre, il le regarda fixement. Ses lèvres tremblaient si fort et ses traits étaient si altérés par l'émotion à laquelle il était en proie, que le brigand recula involontairement sa chaise et examina Fagin d'un air effrayé. « Eh bien ! quoi ? dit Sikes ; qu'avez-vous à me regarder ainsi ? Allons, parlez ! » Le juif leva la main droite et agita un doigt tremblant, puis sa fureur était telle qu'il fut hors d'état d'articuler un seul mot. « Morbleu ! dit Sikes qui n'avait pas l'air trop rassuré, il est devenu fou ; il faut que je prenne garde à moi. - Non, non, dit Fagin en retrouvant la voix, ce n'est pas... ce n'est pas vous, Guillaume ; je n'ai rien... rien du tout à vous reprocher. - Oh ! vraiment ! dit Sikes en le regardant d'un air sombre et en mettant ostensiblement un pistolet dans une poche plus à sa portée. C'est heureux, pour l'un de nous du moins. Lequel est-ce, peu importe. - Ce que j'ai à vous dire, Guillaume, dit le juif en rapprochant sa chaise de celle du brigand, vous rendra encore plus furieux que moi. - En vérité ? répondit Sikes d'un air d'incrédulité ; parlez et dépêchez-vous, ou Nancy me croira perdu. - Perdu ! dit Fagin, elle s'est arrangée pour ça, n'ayez pas peur. » Sikes regarda le juif d'un air très inquiet, et ne lisant sur ses traits aucune explication satisfaisante, il lui mit sa grosse main sur le collet et le secoua rudement. « Voulez-vous parler, dit-il, ou je vous étrangle. Desserrez les dents et dites clairement ce que vous avez à dire. Assez de grimaces, vieux mâtin que vous êtes, finissons-en. - Supposons, commença Fagin, que ce garçon qui est là couché... » Sikes se tourna vers l'endroit où Noé était endormi, comme s'il ne l'avait pas remarqué tout à l'heure. « Après ? dit-il en reprenant sa première position. - Supposons, continua Fagin, que ce garçon ait jasé pour nous perdre tous ; qu'il ait cherché d'abord les gens propres à réaliser ses vues, et qu'il ait eu avec eux un rendez-vous dans la rue pour donner notre signalement, pour indiquer tous es signes auxquels on pourrait nous reconnaître et les souricières où l'on pourrait le mieux nous prendre. Supposons qu'il it voulu faire tout cela de son plein gré sans être arrêté, interrogé, espionné ou mis au pain et à l'eau pour faire des veux : mais, de son plein gré ! pour sa propre satisfaction ! allant rôder la nuit pour rencontrer nos ennemis déclarés et asant avec eux ! m'entendez-vous, s'écria le juif, dont les yeux lançaient des flammes. Supposons qu'il ait fait tout cela, u'arriverait-il ?  Ce qui arriverait ! répondit Sikes avec un affreux jurement. S'il avait vécu jusqu'à mon arrivée, je lui broierais le crâne ous les talons ferrés de mes bottes en autant de morceaux qu'il a de cheveux sur la tête.  Et si moi j'avais fait cela, hurla le juif, moi qui en sais si long et qui pourrais faire pendre tant de gens, sans me compter ? - Je ne sais, dit Sikes en grinçant des dents et en pâlissant rien qu'à l'idée d'une telle trahison : je ferais dans la prison quelque chose qui me ferait mettre aux fers ; et si on me mettait en jugement en même temps que vous, je tomberais sur ous en plein tribunal et je vous briserais le crâne devant tout le monde. J'aurais assez de force, murmura le brigand en brandissant son bras nerveux, j'aurais assez de force pour vous écraser la tête comme si une lourde charrette eût passé essus.  Vous !  Moi ! dit le brigand. Essayez. Et si c'était Charlot, ou le Matois, ou Betsy, ou...  Peu importe qui, interrompit Sikes avec colère. Celui-là, quel qu'il soit, peut être sûr de son affaire. » agin se remit à considérer fixement le brigand ; puis, lui faisant signe de garder le silence, il se pencha vers le matelas où ormait Noé et secoua le dormeur pour l'éveiller : Sikes, penché aussi sur sa chaise et les mains appuyées sur les genoux, egardait de tous ses yeux, comme s'il se demandait avec surprise à quoi allaient aboutir ce manège et toutes ces uestions.  Bolter ! Bolter ! dit Fagin en levant la tête avec une expression diabolique et en appuyant sur chaque parole. Le pauvre arçon ! il est fatigué... fatigué d'avoir épié si longtemps les démarches de cette fille... les démarches de cette fille, ntendez-vous, Guillaume ?  Que voulez-vous dire ? » demanda Sikes en se redressant de toute sa hauteur. e juif ne répondit rien, mais se pencha de nouveau vers le dormeur et le fit asseoir sur le matelas. Après s'être fait épéter plusieurs fois son nom d'emprunt, Noé se frotta les yeux et regarda autour de lui en bâillant.  Redites-moi encore tout cela, encore une fois, pour qu'il l'entende, dit le juif en montrant du doigt le brigand.  Redire quoi ? demanda Noé à demi endormi.  Ce qui concerne... Nancy, dit le juif en saisissant le poignet de Sikes, comme pour l'empêcher de s'en aller avant d'avoir

« – Ce quej’aiàvous dire,Guillaume, ditlejuif enrapprochant sachaise decelle dubrigand, vousrendra encore plus furieux quemoi. – En vérité ? répondit Sikesd’unaird’incrédulité ; parlezetdépêchez-vous, ouNancy mecroira perdu. – Perdu ! ditFagin, elles’est arrangée pourça,n’ayez paspeur. » Sikes regarda lejuif d’un airtrès inquiet, etne lisant surses traits aucune explication satisfaisante, illui mit sagrosse main sur lecollet etlesecoua rudement. « Voulez-vous parler,dit-il,oujevous étrangle.

Desserrez lesdents etdites clairement ceque vous avezàdire.

Assez de grimaces, vieuxmâtin quevous êtes, finissons-en. – Supposons, commençaFagin,quecegarçon quiestlàcouché... » Sikes setourna versl’endroit oùNoé était endormi, commes’ilnel’avait pasremarqué toutàl’heure.

« Après ? dit-ilen reprenant sapremière position. – Supposons, continuaFagin,quecegarçon aitjasé pour nous perdre tous ;qu’ilaitcherché d’abordlesgens propres à réaliser sesvues, etqu’il aiteuavec euxunrendez-vous danslarue pour donner notresignalement, pourindiquer tous les signes auxquels onpourrait nousreconnaître etles souricières oùl’on pourrait lemieux nousprendre.

Supposons qu’il ait voulu fairetoutceladeson plein grésans êtrearrêté, interrogé, espionnéoumis aupain etàl’eau pourfairedes aveux : mais,deson plein gré !pour sapropre satisfaction ! allantrôderlanuit pour rencontrer nosennemis déclaréset jasant aveceux ! m’entendez-vous, s’écrialejuif, dont lesyeux lançaient desflammes.

Supposons qu’ilaitfait tout cela, qu’arriverait-il ? – Ce quiarriverait ! réponditSikesavecunaffreux jurement.

S’ilavait vécujusqu’à monarrivée, jelui broierais lecrâne sous lestalons ferrésdemes bottes enautant demorceaux qu’ilade cheveux surlatête. – Et si moi j’avais faitcela, hurla lejuif, moi qui ensais silong etqui pourrais fairependre tantdegens, sansme compter ? – Je nesais, ditSikes engrinçant desdents eten pâlissant rienqu’à l’idée d’une telletrahison : jeferais danslaprison quelque chosequime ferait mettre auxfers ; etsion me mettait enjugement enmême tempsquevous, jetomberais sur vous enplein tribunal etjevous briserais lecrâne devant toutlemonde.

J’auraisassezdeforce, murmura lebrigand en brandissant sonbras nerveux, j’auraisassezdeforce pourvousécraser latête comme siune lourde charrette eûtpassé dessus. – Vous ! – Moi ! ditlebrigand.

Essayez.Etsic’était Charlot, ouleMatois, ouBetsy, ou... – Peu importe qui,interrompit Sikesaveccolère.

Celui-là, quelqu’ilsoit,peut êtresûrdeson affaire. » Fagin seremit àconsidérer fixementlebrigand ; puis,luifaisant signedegarder lesilence, ilse pencha verslematelas où dormait Noéetsecoua ledormeur pourl’éveiller : Sikes,penché aussisursachaise etles mains appuyées surlesgenoux, regardait detous sesyeux, comme s’ilsedemandait avecsurprise àquoi allaient aboutircemanège ettoutes ces questions. « Bolter ! Bolter !ditFagin enlevant latête avec uneexpression diaboliqueeten appuyant surchaque parole.Lepauvre garçon ! ilest fatigué...

fatiguéd’avoirépiésilongtemps lesdémarches decette fille...

lesdémarches decette fille, entendez-vous, Guillaume ? – Que voulez-vous dire ? »demanda Sikesenseredressant detoute sahauteur. Le juif nerépondit rien,mais sepencha denouveau versledormeur etlefit asseoir surlematelas.

Aprèss’êtrefait répéter plusieurs foissonnom d’emprunt, Noésefrotta lesyeux etregarda autourdeluien bâillant. « Redites-moi encoretoutcela, encore unefois, pour qu’ill’entende, ditlejuif enmontrant dudoigt lebrigand. – Redire quoi ?demanda Noéàdemi endormi. – Ce quiconcerne...

Nancy,ditlejuif ensaisissant lepoignet deSikes, comme pourl’empêcher des’en aller avant d’avoir. »

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