FLAUBERT : ANTHOLOGIE
Publié le 25/01/2012
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FLAUBERT
Fils d'un chirurgien de Rouen. A part quelques voyages, passe sa vie dans sa propriété de Croisset, près de Rouen. Il a écrit Madame Bovary, l'Education Sentimentale, Salammbô, la Tentation de Saint-Antoine, Trois contes.
Salammbo.
La vasque de porphyre contenait encore un peu d'eau claire pour les ablutions de Salammbo. Malgré sa répugnance et tout son orgueil, le suffète y plongea l'enfant, et, comme un marchand d'esclaves, il se mit à le laver et à le frotter avec des strigilles et de la terre rouge. Il prit ensuite, dans les casiers autour de la muraille, deux carrés de pourpre, lui en posa un sur la poitrine, l'autre sur le dos, et il les réunit contre ses clavicules par deux agrafes de diamant. Il versa un parfum sur sa tête, il passa autour de son cou un collier d'électrum, et il le chaussa de sandales à talons de perles, les propres sandales de sa fille ...

«
Mais il trépi ait de honte et d'irritation.
Salammbô, qui s'em
pressait
à le s rvir, était aussi pâle que lui.
L'enfant souriait,
ébloui par ces
s ~endeurs, et même, s'enhardissant, il commen
çait
à battre des ains et à sauter quand Hamilcar l'entraiDa.
,
11 le tenait par 1 bras, fortement, comme s'il avait eu peur de
le perdre;
et l'enfan .auquel il faisait mal, pleurait un peu -tout
en courant près de lui.
A
la hauteur de l'ergastule, sous un palmier, une voix s'~leva,
une voix lamentable et suppliante.
Elle murmurait : « Maitre !
oh ! maitre ! >>
Hamilcar se retourna, et il aperçut à ses côtés un homme
d'apparence abjecte,
un de ces misérables vivant au hasard dans
la.
maison.
- « Que veux-tu? >> dit le suffète.
L'esclave, qui
tremblait horriblement, balbutia : « Je suis son père! n
Hamilcar marchait toujours; l'autre le suivait, les reins cour
bés, les jarrets fléchis, la tête en avant.
Son visage était convulsé
par une angoisse indicible, et
les sanglots qu'il retenait l'étouf
faient, tant
il avàit envie tout à la fois de le questionner et de
lui crier : « Grâce! ·n
Enfin il osa le toucher d'un doigt, sur le coude, légèrement.
11 Est-ce que tu vas le ...
? >> II n'eut pas la force d'achever, et
Hamilcar s'arrêta, tout ébahi de cette douleur.
II n'avait jamais pensé -tant l'abîme les séparant l'un de
l'autre se trouvait immense -qu'il
pOt y avoir entre eux rien
de commun.
Cela même lui parut une sorte d'outrage et comme un empié
tement sur ses privilèges.
II répondit par un regard plus froid
et plus lourd
~ue la hache d'un bourreau; l'esclave s'évanouis
sant tomba dans la poussière,
à ses pieds ..
Hamilcar enjamba par
dessus.
Les trois hommes en robe noire l'attendaient dans la grande
salle, debout contre
le disque de pierre.
Tout de suite il déchira
ses vêtements et
il se roulait sur les dalles en poussant des cris
aigus:
•
"
Ah! mon pauvre petit Hannibal! Oh! mon fils! ma consola
tion!
mon espoir! ma vie! Tuez-moi aussi, emportez-moi,
Malheur! malheur !
n II se labourait la face avec ses ongles,
s'arrachait les cheveux et hurlait comme les
pleureuses des funé
railles.
« Emmenez-le donc! Je souffre trop! allez-vous-en! tuez
moi comme lui.
n Les serviteurs de Moloch s'étonnaient que le
grand Hamilcar
eOt "le cœur si faible.
Ils en étaient presque
attendris.
·
On
entendit un bruit de pieds nus avec un râle saccadé, pareil
à la respiration d'une bête féroce qui accourt; et sur le seuil
de la troisième.
galerie, entre les montants d'ivoire, un homme.
»
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