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Guillevic : Le poète et le monde social

Publié le 29/03/2011

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   Toujours et partout reste vraie la parole prométhéenne d'Apollinaire : « ...Nous qui combattons toujours aux frontières De l'illimité et de l'avenir. « Oui, c'est la fonction même de la poésie de tendre à rendre présente « la vraie vie «. Et pour cela d'adapter l'homme au monde et le monde à l'homme.    Et d'abord : adapter l'homme au monde. Examinons : le poète est un homme en contact avec le monde; il l'explore, l'expérimente, il veut y voir clair, il le force à se révéler. Et c'est ainsi, enrichi par cette confrontation, qu'il esquisse, projette, modèle les contours de l'homme, de cet homme qu'a produit le monde. Qui, autant que le poète, a donné à l'homme son visage, qui lui a appris à vivre ce qu'il vit, qui lui a donné autant conscience de ce qu'il est dans le monde et ce ce à quoi il peut aspirer? [...]    Et pour cela, il agira, comme ses semblables, en citoyen. Mais pourquoi n'agirait-il pas aussi par le poème? Pourquoi ne se servirait-il pas de ses pouvoirs propres? Pourquoi cette démission? Parce que, dit-on parfois, c'est trahir la poésie que de s'en servir comme moyen.    Je rejette cette considération. La poésie est utile, par nature : je l'ai assez dit. Et elle est à la fois la fin et les moyens; ou bien elle n'est ni l'une ni l'autre...    Faire du poème un levier pour changer le monde, c'est être fidèle à la poésie, c'est appeler le monde à se hausser jusqu'au poème; c'est incarner cette force qu'est la poésie. Nous poètes, nous sommes des chimistes qui puisons dans le monde la matière première dont nous faisons la poésie, ce levain que nous rendons au monde pour qu'il y travaille.    Extrait d'une intervention à la Biennale de Poésie 1965.

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