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Henri Anglès d'AuRiAC Le Monde, 20 octobre 1977 (Texte)

Publié le 30/03/2011

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Sur les champs de bataille apparemment nouveaux du nucléaire et de l'écologie, c'est une vieille guerre de religion qui continue ; les armées en présence sont toujours les mêmes, les causes qu'elles défendent n'ont pas changé d'un côté, « ceux qui croient au progrès «, les prométhéens ; de Vautre, « ceux qui n'y croient pas «. Ecoutons-les, et d'abord les « incroyants «. Que disent-ils ?    « Nous nous battons pour la Sagesse... L'humanité a choisi la voie de la Puissance et n'en a tiré que des avantages apparents et ponctuels. Globalement, elle n'est pas plus heureuse qu'autrefois. S'il était légitime que l'homme cultive et aménage la nature, cette « culture « devait constamment être contrôlée par la raison. Nous ne sommes pas contre le progrès, mais contre la progression inconsciente et barbare de Prométhée. II est grand temps de substituer à cette démarche sans projet et sans interdits celle du civilisé qui sait où il veut aller et comment il ira. Dans la formule des anciens, selon laquelle « on ne commande à la nature qu'en y obéissant «, les apprentis sorciers de la technologie n'ont voulu lire qu'une recette pour l'action. Alors qu'il s'agissait aussi et surtout d'une règle morale indiquant les limites permises de cette action de l'homme sur le monde, limites qui consistent précisément dans le respect de la nature de la Nature, et d'abord de la nature de l'homme. Non, nous n'avons pas le droit de laisser se développer sans conscience (la conscience de l'être « conscient «, et non de l'être « consciencieux «) ni morale une culture qui ne serait que le fruit d'une histoire instinctive et hasardeuse, indigne de l'être pensant et raisonnable qu'est l'homme. «    A ce plaidoyer passionné et, à première vue, si raisonnable, les croyants répondent : « Vous nous tenez le vieux langage de l'obscurantisme. Ce n'est pas seulement le droit, c'est aussi le devoir — la mission — de l'homme de prendre en main son histoire et de créer chaque jour un monde et un homme nouveaux. Vous n'arrêterez pas ce mouvement irrésistible, qui a commencé avec les premiers âges de l'humanité, et que rien ni personne n'a jamais pu ralentir. Et, au surplus, vous n'en avez pas le droit. Il est vrai que la démarche de l'humanité se poursuit dans l'incertitude et l'obscurité. L'espèce, obéissant à un légitime instinct, ne sait pas davantage quelle humanité nouvelle elle va enfanter que l'individu ne sait quel enfant va lui donner la femme vers laquelle le pousse un autre instinct, également fort, également légitime. Tout enfantement comporte un risque. Vouloir éviter ce risque absolument conduit à l'immobilité, à l'inaction, à la pire des morts, celle de celui qui, par fausse prudence, refuse de vivre.    « Nous, nous croyons à la vie et en acceptons les dangers et les risques. Mais c'est dans la vie elle-même et non dans un immobilisme peureux que nous trouverons de quoi combattre ces dangers et ces risques, de quoi atténuer et faire disparaître ces apports négatifs du progrès qui vous fascinent et vous aveuglent. Et puis, au nom de quelle « nature « parlez-vous? De la jungle préhistorique ? De l'homme des cavernes?... Où et quand faudra-t-il arrêter la « culture « ? Pourquoi accepter le bon chemin rural et rejeter comme criminelle la « Transamazonienne«? Renoncerez-vous à l'aspirine, à la piqûre antitétanique ?    « Non, il n'est de vraies natures de l'homme et de la nature que celles qui se dégageront, à la fin des temps, de l'histoire même que l'homme aura écrite. Il est vain de vouloir définir quelque « optimum « en arrêtant l'histoire au jour d'aujourd'hui ou à tel jour de naguère ou de jadis. Et arrêter l'histoire, cela veut dire à la fois « renoncer à Mozart «... et, par exemple, à cette découverte qui, demain, rendra inutile 3u inoffensif ce nucléaire qui vous fait si peur... «    Henri Anglès d'AuRiAC Le Monde, 20 octobre 1977 (Texte)    1. Vous ferez de ce texte, à votre choix, un résumé (en suivant le fil du développement) ou une analyse (en dégageant la structure logique de la pensée). Vous indiquerez îettement votre choix au début de la copie.    2. Dans une seconde partie, que vous intitulerez discus-ion vous choisirez dans le texte un problème auquel vous attachez un intérêt particulier, vous en préciserez les données ît vous exposerez, en les justifiant, vos propres vues sur la question.

« pas pu payer l'imprimeur, les 500 autres exemplaires seront retrouvés en 1901. Une saison en enfer relate ses souffrances proches de la folie qui l'ont conduit aux portes de la mort, l'échec de sonexpérience de poète voyant.

Il parle de ses désillusions, de ses doutes, mais aussi de ses espoirs, une remontéevers une sorte de résurrection.Composition rigoureuse de l'ouvrage : on y distingue un prologue (sans titre), un épilogue (Adieu) et trois grandsensembles, parfois d'un seul tenant (Nuit de l'enfer), parfois constitués d'un certain nombre de sections (Mauvaissang et Délires I et II).

À cela s'ajoutent trois textes plus courts : L'Impossible, L'Éclair et Matin. On y trouve une dédicace (à Satan), l'annonce d'un genre, sorte de journal ou carnet d'écrivain ("ces quelqueshideux feuillets de mon carnet de damné"), l'annonce d'une problématique, c'est-à-dire ici d'une réflexion ayant pourenjeu le choix entre deux options de vie contradictoires :− "j'ai songé à rechercher la clef du festin ancien, où je reprendrais peut-être appétit.

/ La charité est cette clef"(c'est la voie du réarmement moral, une forme de conversion)− "Cette inspiration prouve que j'ai rêvé !" / "Tu resteras hyène etc." (Il s'agit de la persévérance dans la négationviolente des valeurs établies). L'évocation de la trajectoire du narrateur nous mène d'un passé idéalisé, "festin où s'ouvraient tous les cœurs",jusqu'à ce jour où il s'est "trouvé sur le point de rendre son dernier couac" (allusion probable de Rimbaud à ce 10juillet 1873 où il a été pris pour cible par son plus intime compagnon, le poète Paul Verlaine).

Se demandantcomment il en est venu là, il se souvient du "soir" où il a "pris la Beauté sur [s]es genoux" (c'est à dire où il s'estreconnu poète) et où il l'a "trouvée amère" : moment symbolique d'une chute marquée par la découverte simultanéede la poésie et de la sexualité (référence sans doute à son adolescence).

Il rappelle que sa poésie fut synonyme derévolte, et explique allusivement − à travers une série d'images − comment la violence du révolté se retourna contrelui-même, comment il fut en même temps la victime et le bourreau. L'œuvre qui s'annonce aura donc quelque chose d'une autobiographie, dont l'enjeu sera de savoir si le poète peutinverser une destinée placée sous le signe de "la haine", et retrouver le chemin de "la charité", c'est-à-dire del'amour.

Mais les exigences de la "Beauté" (dans la conception que Rimbaud en hérite de Baudelaire) sont telles quele choix de la conversion exigerait sans aucun doute l'abandon de la Poésie.

C'est au fond le dilemme formulé parl'auteur des Fleurs du Mal dans Le Confitéor de l'artiste : "Ah ! faut-il éternellement souffrir, ou fuir éternellement lebeau ?".

La réflexion s'engage dans un vocabulaire fortement marqué par la religion, référence chrétienne que lepoète caractérise simultanément comme un rêve ("cette inspiration prouve que j'ai rêvé !"), donc comme une utopiemensongère.

Ainsi se trouve fixé l'horizon philosophique du débat qui s'ouvre à la fin du texte entre le narrateur etcelui qui est devenu son maître : Satan.. »

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