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Le Grand Meaulnes Puis, vociférés à chaque endroit par huit ou dix inconnus aux voix déguisées, les cris de: "Amenez-le!

Publié le 11/04/2014

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Le Grand Meaulnes Puis, vociférés à chaque endroit par huit ou dix inconnus aux voix déguisées, les cris de: "Amenez-le!" éclatèrent successivementsur le toit du cellier qu'ils avaient dû atteindre en escaladant un tas de fagots adossé au mur extérieursur un petit mur qui joignait le hangar au portail et dont la crête arrondie permettait de se mettre commodément à chevalsur le mur grillé de la route de La Gare où l'on pouvait facilement monter... Enfin, par derrière, dans le jardin, une troupe retardataire arriva, qui fit la même sarabande, criant cette fois: "A l'abordage!" Et nous entendions l'écho de leurs cris résonner dans les salles de classe vides, dont ils avaient ouvert les fenêtres. Nous connaissions si bien, Meaulnes et moi, les détours et les passages de la grande demeure, que nous voyions très nettement, comme sur un plan, tous les points où ces gens inconnus étaient en train de l'attaquer. A vrai dire, ce fut seulement au tout premier instant que nous eûmes de l'effroi. Le coup de sifflet nous fit penser tous les quatre à une attaque de rôdeurs et de bohémiens. Justement il y avait depuis une quinzaine, sur la place, derrière l'église, un grand malandrin et un jeunge garçon à la tête serrée dans des bandages. Il y avait aussi, chez les charrons et les maréchaux, des ouvriers qui n'étaient pas du pays. Mais, dès que nous eûmes entendu les assaillants crier, nous fûmes persuadés que nous avions affaire à des genset probablement à des jeunes gensdu bourg. Il y avait même certainement des gaminson reconnaissait leurs voix suraiguësdans la troupe qui se jetait à l'assaut de notre demeure comme à l'abordage d'un navire. "Ah! bien, par exemple..." s'écria mon père. Et Millie demanda à mi-voix: "Mais qu'est-ce que cela veut dire?" lorsque soudain les voix du portail et du mur grillépuis celle de la fenêtres'arrêtèrent. Deux coups de sifflet partirent derrière la croisée. Les cris des gens grimpés sur le cellier, comme ceux des assaillants du jardin, décrurent progressivement, puis cessèrent; nous entendîmes, le long du mur de la salle à manger le frôlement de toute la troupe qui se retirait en hâte et dont les pas étaient amortis par la neige. Quelqu'un évidemment les dérangeait. A cette heure où tout dormait, ils avaient pensé mener en paix leur assaut contre cette maison isolée à la sortie du bourg. Mais voici qu'on troublait leur plan de campagne. A peine avions-nous eu le temps de nous ressaisircar l'attaque avait été soudaine comme un abordage bien conduitet nous disposions-nous à sortir, que nous entendîmes une voix connue appeler à la petite grille: "Monsieur Seurel! Monsieur Seurel!" C'était M. Pasquier, le boucher. Le gros petit homme racla ses sabots sur le seuil, secoua sa courte blouse saupoudrée de neige et entra. Il se donnait l'air finaud et effaré de quelqu'un qui a surpris tout le secret d'une mystérieuse affaire: "J'étais dans ma cour, qui donne sur la place des Quatre-Routes. J'allais fermer l'étable des cheveaux. Tout d'un coup; dressés sur la neige, qu'est-ce que je vois: deux grands gars qui semblaient faire sentinelle ou guetter quelque chose. Ils étaient vers la croix. Je m'avance: je fais deux pasHip! les voilà partis au grand galop du côté de chez vous. Ah! je n'ai pas hésité, j'ai pris mon falot et j'ai dit: Je vais aller raconter ça à M. CHAPITRE PREMIER. Le Grand Jeu. 42 Le Grand Meaulnes Seurel..." Et le voilà qui recommence son histoire: "J'étais dans la cour derrière chez moi..." Sur ce, on lui offre une liqueur, qu'il accepte, et on lui demande des détails qu'il est incapable de fournir. Il n'avait rien vu en arrivant à la maison. Toutes les troupes mises en éveil par les deux sentinelles qu'il avait dérangées s'étaient éclipsées aussitôt. Quant à dire qui ces estafettes pouvaient être... "Ça pourrait bien être des bohémiens, avançait-il. Depuis bientôt un mois qu'ils sont sur la place, à attendre le beau temps pour jouer la comédie, ils ne sont pas sans avoir organisé quelque mauvais coup". Tout cela ne nous avançait guère et nous restions debout, fort perplexes tandis que l'homme sirotait la liqueur et de nouveau mimait son histoire, lorsque Meaulnes, qui avait écouté jusque-là fort attentivement, prit par terre le falot du boucher et décida: "Il faut aller voir!" Il ouvrit la porte et nous le suivîmes, M. Seurel, M. Pasquier et moi. Millie, déjà rassurée, puisque les assaillants étaient partis, et, comme tous les gens ordonnés et méticuleux, fort peu curieuse de sa nature, déclara: "Allez-y si vous voulez. Mais fermez la porte et prenez la clef. Moi, je vais me coucher. Je laisserai la lampe allumée". CHAPITRE II. Nous tombons dans une embuscade. Nous partîmes sur la neige, dans un silence absolu. Meaulnes marchait en avant, projetant la lueur en éventail de sa lanterne grillagée... A peine sortions-nous par le grand portail que, derrière la bascule municipale, qui s'adossait au mur de notre préau, partirent d'un seul coup, comme perdreaux surpris, deux individus encapuchonnés. Soit moquerie, soit plaisir causé par l'étrange jeu qu'ils jouaient là, soit excitation nerveuse et peur d'être rejoints, ils dirent en courant deux ou trois paroles coupées de rires. Meaulnes laissa tomber sa lanterne dans la neige, en me criant: "Suis-moi, François!..." Et laissant là les deux hommes âgés incapables de soutenir une pareille course, nous nous lançâmes à la poursuite des deux ombres, qui, après avoir un instant contourné le bas du bourg, en suivant le chemin de la Vieille-Planche, remontèrent délibérément vers l'église. Ils couraient régulièrement sans trop de hâte et nous n'avions pas de peine à les suivre. Ils traversèrent la rue de l'église où tout était endormi et silencieux, et s'engagèrent derrière le cimetière dans un dédale de petites ruelles et d'impasses. C'était là un quartier de journaliers, de couturières et de tisserands, qu'on nommait les Petits-Coins. Nous le connaissons assez mal et nous n'y étions jamais venu la nuit. L'endroit était désert le jour: les journaliers absents, les tisserands enfermés; et durant cette nuit de grand silence il paraissait plus abandonné, plus endormi encore que les autres quartiers du bourg. Il n'y avait donc aucune chance pour que quelqu'un survînt et nous prêtât main-forte. CHAPITRE II. Nous tombons dans une embuscade. 43
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« Seurel..." Et le voilà qui recommence son histoire: "J'étais dans la cour derrière chez moi..." Sur ce, on lui offre une liqueur, qu'il accepte, et on lui demande des détails qu'il est incapable de fournir. Il n'avait rien vu en arrivant à la maison.

Toutes les troupes mises en éveil par les deux sentinelles qu'il avait dérangées s'étaient éclipsées aussitôt.

Quant à dire qui ces estafettes pouvaient être... "Ça pourrait bien être des bohémiens, avançait-il.

Depuis bientôt un mois qu'ils sont sur la place, à attendre le beau temps pour jouer la comédie, ils ne sont pas sans avoir organisé quelque mauvais coup". Tout cela ne nous avançait guère et nous restions debout, fort perplexes tandis que l'homme sirotait la liqueur et de nouveau mimait son histoire, lorsque Meaulnes, qui avait écouté jusque-là fort attentivement, prit par terre le falot du boucher et décida: "Il faut aller voir!" Il ouvrit la porte et nous le suivîmes, M.

Seurel, M.

Pasquier et moi. Millie, déjà rassurée, puisque les assaillants étaient partis, et, comme tous les gens ordonnés et méticuleux, fort peu curieuse de sa nature, déclara: "Allez-y si vous voulez.

Mais fermez la porte et prenez la clef.

Moi, je vais me coucher.

Je laisserai la lampe allumée". CHAPITRE II.

Nous tombons dans une embuscade. Nous partîmes sur la neige, dans un silence absolu.

Meaulnes marchait en avant, projetant la lueur en éventail de sa lanterne grillagée...

A peine sortions-nous par le grand portail que, derrière la bascule municipale, qui s'adossait au mur de notre préau, partirent d'un seul coup, comme perdreaux surpris, deux individus encapuchonnés.

Soit moquerie, soit plaisir causé par l'étrange jeu qu'ils jouaient là, soit excitation nerveuse et peur d'être rejoints, ils dirent en courant deux ou trois paroles coupées de rires. Meaulnes laissa tomber sa lanterne dans la neige, en me criant: "Suis-moi, François!..." Et laissant là les deux hommes âgés incapables de soutenir une pareille course, nous nous lançâmes à la poursuite des deux ombres, qui, après avoir un instant contourné le bas du bourg, en suivant le chemin de la Vieille-Planche, remontèrent délibérément vers l'église.

Ils couraient régulièrement sans trop de hâte et nous n'avions pas de peine à les suivre.

Ils traversèrent la rue de l'église où tout était endormi et silencieux, et s'engagèrent derrière le cimetière dans un dédale de petites ruelles et d'impasses. C'était là un quartier de journaliers, de couturières et de tisserands, qu'on nommait les Petits-Coins.

Nous le connaissons assez mal et nous n'y étions jamais venu la nuit.

L'endroit était désert le jour: les journaliers absents, les tisserands enfermés; et durant cette nuit de grand silence il paraissait plus abandonné, plus endormi encore que les autres quartiers du bourg.

Il n'y avait donc aucune chance pour que quelqu'un survînt et nous prêtât main-forte.

Le Grand Meaulnes CHAPITRE II.

Nous tombons dans une embuscade.

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