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Le luxe de Jean-Jacques Rousseau, Fragments politiques, chap. VII, in Oeuvres complètes

Publié le 28/03/2011

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Parties du programme abordées: - Le XVIIIe siècle. - Le luxe. Conseils pratiques: Le résumé est très délicat pour de multiples raisons : c'est un texte littéraire écrit par un grand écrivain (qu'il est un peu incongru de «réduire«); un texte du XVIIIe siècle avec un vocabulaire spécifique; un texte enfin où le «je« est très envahissant... La discussion est relativement simple — mais nécessiterait, pour être traitée correctement, une bonne connaissance de la philosophie des Lumières (encore que le sujet puisse être abordé en s'appuyant seulement sur l'époque contemporaine). Difficulté du sujet: *** Le luxe La question que je me propose d'examiner ici regarde le luxe, le commerce et les arts, non précisément par rapport aux mœurs, mais par rapport à la prospérité de l'État. Tous les anciens ont regardé le luxe comme le signe de corruption dans les mœurs et de faiblesse dans le gouvernement. Les lois somptuaires (1) sont presque aussi anciennes que les sociétés politiques. Il y en avait chez les Égyptiens, les Hébreux en reçurent de leur législateur; on en trouve même chez les Perses, et quant aux Grecs, leur profond mépris pour le faste asiatique était la meilleure des lois somptuaires qu'ils pussent avoir. Ce mépris était encore plus sensible chez les Romains. Le luxe et la magnificence des autres nations étaient pour eux de vrais objets de risée, et l'usage qu'ils en faisaient dans leurs triomphes était beaucoup plus propre à tourner en ridicule toute cette vaine pompe des peuples vaincus qu'à donner aux vainqueurs le désir de l'imiter. Il était naturel que le commerce se sentît du mépris qu'on avait pour le luxe. Les Romains le dédaignaient, les Grecs le laissaient faire chez eux aux étrangers, les arts mécaniques n'étaient presque exercés que par les esclaves, et les arts libéraux (2) mêmes exigeaient une grande supériorité de talent dans ceux qui les exerçaient pour leur donner quelque considération, encore n'en purent-ils jamais obtenir à Rome durant tout le temps de la République. En un mot dans les pays où l'argent était méprisé, il ne se pouvait guère que tous les moyens d'en gagner n'eussent quelque chose d'ignominieux. Quand ces peuples commencèrent à dégénérer, que la vanité et l'amour du plaisir eurent succédé à celui de la patrie et de la vertu, alors le vice et la mollesse pénétrèrent de toutes parts, et il ne fut plus question que de luxe, et d'argent pour y satisfaire. Les particuliers s'enrichirent, le commerce et les arts fleurirent et l'État ne tarda pas à périr. Cependant durant la plus grande dépravation, les philosophes et les politiques ne cessèrent de crier contre tous ces désordres dont ils prévoyaient les suites; personne ne les contredit et personne ne se corrigea ; on convint que leurs raisons étaient bonnes et l'on se conduisit de manière à les rendre encore meilleures. Ces déclamateurs eux-mêmes ne semblaient relever les fautes des peuples que pour rendre les leurs plus inexcusables ; ils blâmaient publiquement les vices dont ils auraient donné l'exemple s'ils n'avaient été prévenus. C'est ainsi qu'en se livrant à une conduite opposée à leurs propres maximes les hommes ne laissaient pas de rendre hommage à la vérité. C'est ainsi que toutes les nations se sont accordées dans tous les temps à condamner le luxe, même en s'y abandonnant, sans que durant une aussi longue suite de siècles aucun philosophe se soit avisé de contredire là-dessus l'opinion publique. Je ne prétends point tirer avantage de ce consentement universel pour le parti que j'ai à soutenir. Je sais que la philosophie en adoptant les preuves des philosophes se passe bien de leur témoignage et que la raison n'a que faire d'autorités. Mais, instruit par l'expérience du tort que peut faire le nom de paradoxe à des propositions démontrées, je suis bien aise d'ôter d'avance cette ressource à ceux qui n'en auront point d'autre pour combattre ce que j'ai à prouver. Je les avertis donc que c'est l'opinion que j'attaque qu'on doit appeler un paradoxe aussi inouï jusqu'à ce jour qu'il est ridicule et pernicieux, et qu'en réfutant cette philosophie molle et efféminée dont les commodes maximes lui ont acquis tant de sectateurs parmi nous, je ne fais que joindre ma voix au cri de toutes les nations et plaider la cause du sens commun ainsi que celle de la société. Jean-Jacques Rousseau, Fragments politiques, chap. VII, in Œuvres complètes, éd. Gallimard, «La Pléiade«. (1) Lois somptuaires: lois par lesquelles l'État règle la dépense des particuliers. (2) Les arts mécaniques sont les arts et activités manuels ou encore la partie matérielle et pratique d'un art, tandis que les arts libéraux sont ceux qui exigent particulièrement l'intervention de l'esprit et de l'intelligence, et qui étaient autrefois l'apanage des gens de condition libre. Résumé (8 points) Vous résumerez ce texte en 170 mots, une marge de 10% en plus ou en moins étant admise. Vous indiquerez à la fin de votre résumé le nombre de mots que vous aurez utilisés. Vocabulaire (2 points) Vous donnerez le sens, dans le texte, des expressions soulignées : - «la philosophie en adoptant les preuves des philosophes se passe bien de leur témoignage «, - «paradoxe«.

Discussion (10 points) Partagez-vous le mépris de Jean-Jacques Rousseau pour le luxe ou pensez-vous qu'il soit naturel, voire moral, de l'aimer? Vous justifierez votre réponse en vous appuyant sur des exemples précis.   

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