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l'entrevue que le duc a eu chez Mme la connétable avec

Publié le 04/11/2013

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l'entrevue que le duc a eu chez Mme la connétable avec la reine, le soir que Mme la connétable a donné une fête asquée ; vous lui direz, afin qu'il ne doute de rien, qu'il y est venu sous le costume du grand mogol que devait orter le chevalier de Guise, et qu'il a acheté à ce dernier moyennant la somme de trois mille pistoles. - Bien, Monseigneur. - Tous les détails de son entrée au Louvre et de sa sortie pendant la nuit où il s'est introduit au palais sous le costume d'un diseur de bonne aventure italien me sont connus ; vous lui direz, pour qu'il ne doute pas encore de l'authenticité de mes renseignements, qu'il avait sous son manteau une grande robe blanche semée de larmes noires, de têtes de mort et d'os en sautoir : car, en cas de surprise, il devait se faire passer pour le fantôme de la Dame blanche qui, comme chacun le sait, revient au Louvre chaque fois que quelque grand événement va s'accomplir. - Est-ce tout, Monseigneur ? - Dites-lui que je sais encore tous les détails de l'aventure d'Amiens, que j'en ferai faire un petit roman, spirituellement tourné, avec un plan du jardin et les portraits des principaux acteurs de cette scène nocturne. - Je lui dirai cela. - Dites-lui encore que je tiens Montaigu, que Montaigu est à la Bastille, qu'on n'a surpris aucune lettre sur lui, c'est vrai, mais que la torture peut lui faire dire ce qu'il sait, et même... ce qu'il ne sait pas. - À merveille. - Enfin ajoutez que Sa Grâce, dans la précipitation qu'elle a mise à quitter l'île de Ré, oublia dans son logis certaine lettre de Mme de Chevreuse qui compromet singulièrement la reine, en ce qu'elle prouve non seulement que Sa Majesté peut aimer les ennemis du roi, mais encore qu'elle conspire avec ceux de la France. Vous avez bien retenu tout ce que je vous ai dit, n'est-ce pas ? - Votre Éminence va en juger : le bal de Mme la connétable ; la nuit du Louvre ; la soirée d'Amiens ; l'arrestation de Montaigu ; la lettre de Mme de Chevreuse. - C'est cela, dit le cardinal, c'est cela : vous avez une bien heureuse mémoire, Milady. - Mais, reprit celle à qui le cardinal venait d'adresser ce compliment flatteur, si malgré toutes ces raisons le duc ne se rend pas et continue de menacer la France ? - Le duc est amoureux comme un fou, ou plutôt comme un niais, reprit Richelieu avec une profonde amertume ; comme les anciens paladins, il n'a entrepris cette guerre que pour obtenir un regard de sa belle. S'il sait que cette guerre peut coûter l'honneur et peut-être la liberté à la dame de ses pensées, comme il dit, je vous réponds qu'il y regardera à deux fois. - Et cependant, dit Milady avec une persistance qui prouvait qu'elle voulait voir clair jusqu'au bout, dans la mission dont elle allait être chargée, cependant s'il persiste ? - S'il persiste, dit le cardinal..., ce n'est pas probable. - C'est possible, dit Milady. - S'il persiste... « Son Éminence fit une pause et reprit « S'il persiste, eh bien, j'espérerai dans un de ces événements qui changent la face des États. - Si Son Éminence voulait me citer dans l'histoire quelques-uns de ces événements, dit Milady, peut-être partagerais-je sa confiance dans l'avenir. - Eh bien, tenez ! par exemple, dit Richelieu, lorsqu'en 1610, pour une cause à peu près pareille à celle qui fait mouvoir le duc, le roi Henri IV, de glorieuse mémoire, allait à la fois envahir les Flandres et l'Italie pour frapper à la fois l'Autriche des deux côtés, eh bien, n'est-il pas arrivé un événement qui a sauvé l'Autriche ? Pourquoi le roi de France n'aurait-il pas la même chance que l'empereur ? - Votre Éminence veut parler du coup de couteau de la rue de la Ferronnerie ? - Justement, dit le cardinal. - Votre Éminence ne craint-elle pas que le supplice de Ravaillac épouvante ceux qui auraient un instant l'idée de l'imiter ? - Il y aura en tout temps et dans tous les pays, surtout si ces pays sont divisés de religion, des fanatiques qui ne demanderont pas mieux que de se faire martyrs. Et tenez, justement il me revient à cette heure que les puritains sont furieux contre le duc de Buckingham et que leurs prédicateurs le désignent comme l'Antéchrist. - Eh bien ? fit Milady. - Eh bien, continua le cardinal d'un air indifférent, il ne s'agirait, pour le moment, par exemple, que de trouver une femme, belle, jeune, adroite, qui eût à se venger elle-même du duc. Une pareille femme peut se rencontrer : le duc est homme à bonnes fortunes, et, s'il a semé bien des amours par ses promesses de constance éternelle, il a dû semer bien des haines aussi par ses éternelles infidélités. - Sans doute, dit froidement Milady, une pareille femme peut se rencontrer. - Eh bien, une pareille femme, qui mettrait le couteau de Jacques Clément ou de Ravaillac aux mains d'un anatique, sauverait la France. - Oui, mais elle serait complice d'un assassinat. - A-t-on jamais connu les complices de Ravaillac ou de Jacques Clément ? - Non, car peut-être étaient-ils placés trop haut pour qu'on osât les aller chercher là où ils étaient : on ne rûlerait pas le Palais de Justice pour tout le monde, Monseigneur. - Vous croyez donc que l'incendie du Palais de Justice a une cause autre que celle du hasard ? demanda Richelieu du ton dont il eût fait une question sans aucune importance. - Moi, Monseigneur, répondit Milady, je ne crois rien, je cite un fait, voilà tout, seulement, je dis que si je m'appelais Mlle de Monpensier ou la reine Marie de Médicis, je prendrais moins de précautions que j'en prends, m'appelant tout simplement Lady Clarick. - C'est juste, dit Richelieu, et que voudriez-vous donc ? - Je voudrais un ordre qui ratifiât d'avance tout ce que je croirai devoir faire pour le plus grand bien de la France. - Mais il faudrait d'abord trouver la femme que j'ai dit, et qui aurait à se venger du duc. - Elle est trouvée, dit Milady. - Puis il faudrait trouver ce misérable fanatique qui servira d'instrument à la justice de Dieu. - On le trouvera. - Eh bien, dit le duc, alors il sera temps de réclamer l'ordre que vous demandiez tout à l'heure. - Votre Éminence a raison, dit Milady, et c'est moi qui ai eu tort de voir dans la mission dont elle m'honore autre chose que ce qui est réellement, c'est-à-dire d'annoncer à Sa Grâce, de la part de Son Éminence, que vous connaissez les différents déguisements à l'aide desquels il est parvenu à se rapprocher de la reine pendant la fête donnée par Mme la connétable ; que vous avez les preuves de l'entrevue accordée au Louvre par la reine à certain astrologue italien qui n'est autre que le duc de Buckingham ; que vous avez commandé un petit roman, des plus spirituels, sur l'aventure d'Amiens, avec plan du jardin où cette aventure s'est passée et portraits des acteurs qui y ont figuré ; que Montaigu est à la Bastille, et que la torture peut lui faire dire des choses dont il se souvient et même des choses qu'il aurait oubliées ; enfin, que vous possédez certaine lettre de Mme de Chevreuse, trouvée dans le logis de Sa Grâce, qui compromet singulièrement, non seulement celle qui l'a écrite, mais encore celle au nom de qui elle a été écrite. Puis, s'il persiste malgré tout cela, comme c'est à ce que je viens de dire que se borne ma mission, je n'aurai plus qu'à prier Dieu de faire un miracle pour sauver la France. C'est bien cela, n'est-ce pas, Monseigneur, et je n'ai pas autre chose à faire ? - C'est bien cela, reprit sèchement le cardinal. - Et maintenant, dit Milady sans paraître remarquer le changement de ton du duc à son égard, maintenant que j'ai reçu les instructions de Votre Éminence à propos de ses ennemis, Monseigneur me permettra-t-il de lui dire deux mots des miens ? - Vous avez donc des ennemis ? demanda Richelieu. - Oui, Monseigneur ; des ennemis contre lesquels vous me devez tout votre appui, car je me les suis faits en servant Votre Éminence. - Et lesquels ? répliqua le duc. - D'abord une petite intrigante du nom de Bonacieux. - Elle est dans la prison de Mantes. - C'est-à-dire qu'elle y était, reprit Milady, mais la reine a surpris un ordre du roi, à l'aide duquel elle l'a fait transporter dans un couvent. - Dans un couvent ? dit le duc. - Oui, dans un couvent. - Et dans lequel ? - Je l'ignore, le secret a été bien gardé... - Je le saurai, moi !

« rencontrer : leduc esthomme àbonnes fortunes, et,s’il asemé biendesamours parsespromesses deconstance éternelle, iladû semer biendeshaines aussiparseséternelles infidélités. – Sans doute,ditfroidement Milady,unepareille femmepeutserencontrer. – Eh bien, unepareille femme, quimettrait lecouteau deJacques Clément oudeRavaillac auxmains d’un fanatique, sauveraitlaFrance. – Oui, maiselleserait complice d’unassassinat. – A-t-on jamaisconnulescomplices deRavaillac oudeJacques Clément ? – Non, carpeut-être étaient-ils placéstrophaut pour qu’on osâtlesaller chercher làoù ilsétaient : onne brûlerait paslePalais deJustice pourtoutlemonde, Monseigneur. – Vous croyezdoncquel’incendie duPalais deJustice aune cause autrequecelle duhasard ? demanda Richelieu duton dont ileût fait une question sansaucune importance. – Moi, Monseigneur, réponditMilady,jene crois rien,jecite unfait, voilà tout,seulement, jedis que sije m’appelais Mlle de Monpensier oulareine Marie deMédicis, jeprendrais moinsdeprécautions quej’enprends, m’appelant toutsimplement LadyClarick. – C’est juste,ditRichelieu, etque voudriez-vous donc ? – Je voudrais unordre quiratifiât d’avance toutceque jecroirai devoirfairepour leplus grand biendela France. – Mais ilfaudrait d’abordtrouverlafemme quej’aidit, etqui aurait àse venger duduc. – Elle esttrouvée, ditMilady. – Puis ilfaudrait trouvercemisérable fanatiquequiservira d’instrument àla justice deDieu. – On letrouvera. – Eh bien, ditleduc, alors ilsera temps deréclamer l’ordrequevous demandiez toutàl’heure. – Votre Éminence araison, ditMilady, etc’est moiquiaieu tort devoir dans lamission dontellem’honore autre chose quecequi estréellement, c’est-à-dired’annoncer àSa Grâce, delapart deSon Éminence, quevous connaissez lesdifférents déguisements àl’aide desquels ilest parvenu àse rapprocher delareine pendant lafête donnée parMme la connétable ; quevous avezlespreuves del’entrevue accordéeauLouvre parlareine à certain astrologue italienquin’est autre queleduc deBuckingham ; quevous avezcommandé unpetit roman, des plus spirituels, surl’aventure d’Amiens, avecplan dujardin oùcette aventure s’estpassée etportraits des acteurs quiyont figuré ; queMontaigu estàla Bastille, etque latorture peutluifaire diredeschoses dontilse souvient etmême deschoses qu’ilaurait oubliées ; enfin,quevous possédez certainelettrede Mme de Chevreuse, trouvéedanslelogis deSa Grâce, quicompromet singulièrement, nonseulement cellequi l’a écrite, maisencore celleaunom dequi elle aété écrite.

Puis,s’ilpersiste malgrétoutcela, comme c’estàce que jeviens dedire queseborne mamission, jen’aurai plusqu’à prier Dieudefaire unmiracle poursauver la France.

C’estbiencela, n’est-ce pas,Monseigneur, etjen’ai pasautre chose àfaire ? – C’est biencela, reprit sèchement lecardinal. – Et maintenant, ditMilady sansparaître remarquer lechangement deton duduc àson égard, maintenant que j’aireçu lesinstructions deVotre Éminence àpropos deses ennemis, Monseigneur mepermettra-t-il delui dire deux mots desmiens ? – Vous avezdonc desennemis ? demandaRichelieu. – Oui, Monseigneur ; desennemis contrelesquels vousmedevez toutvotre appui, carjeme lessuis faits en servant VotreÉminence. – Et lesquels ? répliqualeduc. – D’abord unepetite intrigante dunom deBonacieux. – Elle estdans laprison deMantes. – C’est-à-dire qu’elleyétait, reprit Milady, maislareine asurpris unordre duroi, àl’aide duquel ellel’afait transporter dansuncouvent. – Dans uncouvent ? ditleduc. – Oui, dansuncouvent. – Et dans lequel ? – Je l’ignore, lesecret aété bien gardé… – Je lesaurai, moi !. »

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