- Mais malheureux, réfléchis donc, tu n'es pas ivre.
Publié le 04/11/2013
Extrait du document
«
XIV
–Orthon
Henri, mêmeaprèslerefus duduc d’Alençon quiremettait toutenquestion, jusqu’àsonexistence, était
devenu, s’ilétait possible, encoreplusgrand amiduprince qu’ilnel’était auparavant.
Catherine conclutdecette intimité quelesdeux princes nonseulement s’entendaient, maisencore
conspiraient ensemble.Elleinterrogea là-dessusMarguerite ; maisMarguerite étaitsadigne fille,etlareine de
Navarre, dontleprincipal talentétaitd’éviter uneexplication scabreuse,segarda sibien desquestions desa
mère, qu’après avoirrépondu àtoutes, ellelalaissa plusembarrassée qu’auparavant.
La Florentine n’eutdoncpluspour laconduire quecetinstinct intrigant qu’elleavaitapporté delaToscane,
le plus intrigant despetits Étatsdecette époque, etce sentiment dehaine qu’elle avaitpuisé àla cour deFrance,
qui était lacour laplus divisée d’intérêts etd’opinions decetemps.
Elle comprit d’abordqu’unepartiedelaforce duBéarnais luivenait deson alliance avecleduc d’Alençon, et
elle résolut del’isoler.
Du jour oùelle eutpris cette résolution, elleentoura sonfilsavec lapatience etletalent dupêcheur, qui,
lorsqu’il alaissé tomber lesplombs loindupoisson, lestraîne insensiblement jusqu’àceque detous côtés ils
aient enveloppé saproie.
Le duc François s’aperçut deceredoublement decaresses, etde son côté fitun pas vers samère.
Quant à
Henri, ilfeignit dene rien voir, etsurveilla sonallié deplus près qu’il nel’avait faitencore.
Chacun attendait unévénement.
Or, tandis quechacun étaitdans l’attente decet événement, certainpourlesuns, probable pourlesautres, un
matin quelesoleil s’était levérose etdistillant cettetiède chaleur etce doux parfum quiannonce unbeau jour,
un homme pâle,appuyé surunbâton etmarchant péniblement, sortitd’une petite maison sisederrière l’Arsenal
et s’achemina parlarue duPetit-Musc.
Vers laporte Saint-Antoine, etaprès avoirlongé cettepromenade quitournait commeuneprairie
marécageuse autourdesfossés delaBastille, illaissa legrand boulevard àsa gauche etentra danslejardin de
l’Arbalète, dontleconcierge lereçut avecdegrandes salutations.
Il n’y avait personne danscejardin, qui,comme l’indique sonnom, appartenait àune société particulière :
celle desarbalétriers.
Mais,yeût-il eudes promeneurs, l’hommepâleeûtétédigne detout leurintérêt, carsa
longue moustache, sonpasquiconservait uneallure militaire, bienqu’il fûtralenti parlasouffrance, indiquaient
assez quec’était quelque officierblessédansuneoccasion récentequiessayait sesforces parunexercice modéré
et reprenait lavie ausoleil.
Cependant, choseétrange !lorsque lemanteau dont,malgré lachaleur naissante, cethomme enapparence
inoffensif étaitenveloppé s’ouvrait,illaissait voirdeux longs pistolets pendantauxagrafes d’argent desa
ceinture, laquelleserraitenoutre unlarge poignard etsoutenait unelongue épéequ’ilsemblait nepouvoir tirer,
tant elleétait colossale, etqui, complétant cetarsenal vivant,battaitdeson fourreau deuxjambes amaigries et
tremblantes.
Enoutre, etpour surcroît deprécautions, lepromeneur, toutsolitaire qu’ilétait, lançait àchaque
pas unregard scrutateur, commepourinterroger chaquedétourd’allée, chaque buisson, chaquefossé.
Ce fut ainsi quecethomme pénétra danslejardin, gagnapaisiblement uneespèce depetite tonnelle donnant
sur lesboulevards, dontiln’était séparé queparune haie épaisse etun petit fossé quiformaient sadouble
clôture.
Là,ils’étendit surunbanc degazon àportée d’unetableoùlegardien del’établissement, quijoignait à
son titre deconcierge l’industrie degargotier, vintaubout d’uninstant luiapporter uneespèce decordial.
Le malade étaitlàdepuis dixminutes etavait àplusieurs reprisesportéàsa bouche latasse defaïence dontil
dégustait lecontenu àpetites gorgées, lorsquetoutàcoup sonvisage prit,malgré l’intéressante pâleurquile
couvrait, uneexpression effrayante.Ilvenait d’apercevoir, venantdelaCroix-Faubin parunsentier quiest
aujourd’hui larue deNaples, uncavalier enveloppé d’ungrand manteau, lequels’arrêta prochedubastion et
attendit.
Ilyétait depuis cinqminutes, etl’homme auvisage pâle,quelelecteur apeut-être déjàreconnu pour
Maurevel, avaitàpeine euletemps deseremettre del’émotion queluiavait causée saprésence, lorsqu’un jeune
homme aujustaucorps serrécomme celuid’unpage arriva parcechemin quifutdepuis larue des Fossés-Saint-
Nicolas, etrejoignit lecavalier.
Perdu danssatonnelle defeuillage, Maurevel pouvaittoutvoiretmême toutentendre sanspeine, etquand
on saura quelecavalier étaitdeMouy etlejeune homme aujustaucorps serréOrthon, onjugera siles oreilles et
les yeux étaient occupés.
L’un etl’autre regardèrent autourd’euxaveclaplus minutieuse attention ;Maurevelretenaitsonsouffle..
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