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- Mais malheureux, réfléchis donc, tu n'es pas ivre.

Publié le 04/11/2013

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- Mais malheureux, réfléchis donc, tu n'es pas ivre. - Heureusement ; car si je l'étais, je mettrais le feu au Louvre. - Voyons, Annibal, reprit La Mole, sois raisonnable. Retourne là-bas. Le service est chose sacrée. - Retournes-tu avec moi ? - Impossible. - Penserait-on encore à te tuer ? - Je ne crois pas. Je suis trop peu important pour qu'il y ait contre moi un complot arrêté, une résolution uivie. Dans un moment de caprice, on a voulu me tuer, et c'est tout : les princes étaient en gaieté ce soir-là. - Que fais-tu, alors ? - Moi, rien : j'erre, je me promène. - Eh bien, je me promènerai comme toi, j'errerai avec toi. C'est un charmant état. Puis, si l'on t'attaque, nous serons deux, et nous leur donnerons du fil à retordre. Ah ! qu'il vienne, ton insecte de duc ! je le cloue comme un papillon à la muraille ! - Mais demande-lui un congé, au moins ! - Oui, définitif. - Préviens-le que tu le quittes, en ce cas. - Rien de plus juste. J'y consens. Je vais lui écrire. - Lui écrire, c'est bien leste, Coconnas, à un prince du sang ! - Oui, du sang ! du sang de mon ami. Prends garde, s'écria Coconnas en roulant ses gros yeux tragiques, prends garde que je m'amuse aux choses de l'étiquette ! - Au fait, se dit La Mole, dans quelques jours il n'aura plus besoin du prince, ni de personne ; car s'il veut venir avec nous, nous l'emmènerons. Coconnas prit donc la plume sans plus longue opposition de son ami, et tout couramment composa le morceau d'éloquence que l'on va lire. « Monseigneur, « Il n'est pas que Votre Altesse, versée dans les auteurs de l'Antiquité comme elle l'est, ne connaisse l'histoire touchante d'Oreste et de Pylade, qui étaient deux héros fameux par leurs malheurs et par leur amitié. Mon ami La Mole n'est pas moins malheureux qu'Oreste, et moi je ne suis pas moins tendre que ylade. Il a, dans ce moment-ci, de grandes occupations qui réclament mon aide. Il est donc impossible que je e sépare de lui. Ce qui fait que, sauf l'approbation de Votre Altesse, je prends un petit congé, déterminé que je uis de m'attacher à sa fortune, quelque part qu'elle me conduise : c'est dire à Votre Altesse combien est grande a violence qui m'arrache de son service, en raison de quoi je ne désespère pas d'obtenir son pardon, et j'ose continuer de me dire avec respect, « De Votre Altesse royale, « Monseigneur, « Le très humble et très obéissant « ANNIBAL, COMTE DE COCONNAS, « ami inséparable de M. de La Mole. » Ce chef-d'oeuvre terminé, Coconnas le lut à haute voix à La Mole qui haussa les épaules. - Eh bien, qu'en dis-tu ? demanda Coconnas, qui n'avait pas vu le mouvement, ou qui avait fait semblant de ne pas le voir. - Je dis, répondit La Mole, que M. d'Alençon va se moquer de nous. - De nous ? - Conjointement. - Cela vaut encore mieux, ce me semble, que de nous étrangler séparément. - Bah ! dit La Mole en riant, l'un n'empêchera peut-être point l'autre. - Eh bien, tant pis ! arrive qu'arrive, j'envoie la lettre demain matin. Où allons-nous coucher en sortant d'ici ? - Chez maître La Hurière. Tu sais, dans cette petite chambre où tu voulais me daguer quand nous n'étions pas encore Oreste et Pylade ? - Bien, je ferai porter ma lettre au Louvre par notre hôte. En ce moment le panneau s'ouvrit. - Eh bien, demandèrent ensemble les deux princesses, où sont Oreste et Pylade ? - Mordi ! madame, répondit Coconnas, Pylade et Oreste meurent de faim et d'amour. Ce fut effectivement maître La Hurière qui, le lendemain à neuf heures du matin, porta au Louvre la respectueuse missive de maître Annibal de Coconnas. XIV - Orthon   Henri, même après le refus du duc d'Alençon qui remettait tout en question, jusqu'à son existence, était devenu, s'il était possible, encore plus grand ami du prince qu'il ne l'était auparavant. Catherine conclut de cette intimité que les deux princes non seulement s'entendaient, mais encore onspiraient ensemble. Elle interrogea là-dessus Marguerite ; mais Marguerite était sa digne fille, et la reine de avarre, dont le principal talent était d'éviter une explication scabreuse, se garda si bien des questions de sa ère, qu'après avoir répondu à toutes, elle la laissa plus embarrassée qu'auparavant. La Florentine n'eut donc plus pour la conduire que cet instinct intrigant qu'elle avait apporté de la Toscane, e plus intrigant des petits États de cette époque, et ce sentiment de haine qu'elle avait puisé à la cour de France, ui était la cour la plus divisée d'intérêts et d'opinions de ce temps. Elle comprit d'abord qu'une partie de la force du Béarnais lui venait de son alliance avec le duc d'Alençon, et lle résolut de l'isoler. Du jour où elle eut pris cette résolution, elle entoura son fils avec la patience et le talent du pêcheur, qui, orsqu'il a laissé tomber les plombs loin du poisson, les traîne insensiblement jusqu'à ce que de tous côtés ils ient enveloppé sa proie. Le duc François s'aperçut de ce redoublement de caresses, et de son côté fit un pas vers sa mère. Quant à enri, il feignit de ne rien voir, et surveilla son allié de plus près qu'il ne l'avait fait encore. Chacun attendait un événement. Or, tandis que chacun était dans l'attente de cet événement, certain pour les uns, probable pour les autres, un atin que le soleil s'était levé rose et distillant cette tiède chaleur et ce doux parfum qui annonce un beau jour, n homme pâle, appuyé sur un bâton et marchant péniblement, sortit d'une petite maison sise derrière l'Arsenal t s'achemina par la rue du Petit-Musc. Vers la porte Saint-Antoine, et après avoir longé cette promenade qui tournait comme une prairie arécageuse autour des fossés de la Bastille, il laissa le grand boulevard à sa gauche et entra dans le jardin de 'Arbalète, dont le concierge le reçut avec de grandes salutations. Il n'y avait personne dans ce jardin, qui, comme l'indique son nom, appartenait à une société particulière : elle des arbalétriers. Mais, y eût-il eu des promeneurs, l'homme pâle eût été digne de tout leur intérêt, car sa ongue moustache, son pas qui conservait une allure militaire, bien qu'il fût ralenti par la souffrance, indiquaient ssez que c'était quelque officier blessé dans une occasion récente qui essayait ses forces par un exercice modéré t reprenait la vie au soleil. Cependant, chose étrange ! lorsque le manteau dont, malgré la chaleur naissante, cet homme en apparence noffensif était enveloppé s'ouvrait, il laissait voir deux longs pistolets pendant aux agrafes d'argent de sa ceinture, laquelle serrait en outre un large poignard et soutenait une longue épée qu'il semblait ne pouvoir tirer, ant elle était colossale, et qui, complétant cet arsenal vivant, battait de son fourreau deux jambes amaigries et remblantes. En outre, et pour surcroît de précautions, le promeneur, tout solitaire qu'il était, lançait à chaque as un regard scrutateur, comme pour interroger chaque détour d'allée, chaque buisson, chaque fossé. Ce fut ainsi que cet homme pénétra dans le jardin, gagna paisiblement une espèce de petite tonnelle donnant ur les boulevards, dont il n'était séparé que par une haie épaisse et un petit fossé qui formaient sa double lôture. Là, il s'étendit sur un banc de gazon à portée d'une table où le gardien de l'établissement, qui joignait à on titre de concierge l'industrie de gargotier, vint au bout d'un instant lui apporter une espèce de cordial. Le malade était là depuis dix minutes et avait à plusieurs reprises porté à sa bouche la tasse de faïence dont il égustait le contenu à petites gorgées, lorsque tout à coup son visage prit, malgré l'intéressante pâleur qui le ouvrait, une expression effrayante. Il venait d'apercevoir, venant de la Croix-Faubin par un sentier qui est ujourd'hui la rue de Naples, un cavalier enveloppé d'un grand manteau, lequel s'arrêta proche du bastion et ttendit. Il y était depuis cinq minutes, et l'homme au visage pâle, que le lecteur a peut-être déjà reconnu pour aurevel, avait à peine eu le temps de se remettre de l'émotion que lui avait causée sa présence, lorsqu'un jeune omme au justaucorps serré comme celui d'un page arriva par ce chemin qui fut depuis la rue des Fossés-Sainticolas, et rejoignit le cavalier. Perdu dans sa tonnelle de feuillage, Maurevel pouvait tout voir et même tout entendre sans peine, et quand n saura que le cavalier était de Mouy et le jeune homme au justaucorps serré Orthon, on jugera si les oreilles et es yeux étaient occupés. L'un et l'autre regardèrent autour d'eux avec la plus minutieuse attention ; Maurevel retenait son souffle.

« XIV –Orthon   Henri, mêmeaprèslerefus duduc d’Alençon quiremettait toutenquestion, jusqu’àsonexistence, était devenu, s’ilétait possible, encoreplusgrand amiduprince qu’ilnel’était auparavant. Catherine conclutdecette intimité quelesdeux princes nonseulement s’entendaient, maisencore conspiraient ensemble.Elleinterrogea là-dessusMarguerite ; maisMarguerite étaitsadigne fille,etlareine de Navarre, dontleprincipal talentétaitd’éviter uneexplication scabreuse,segarda sibien desquestions desa mère, qu’après avoirrépondu àtoutes, ellelalaissa plusembarrassée qu’auparavant. La Florentine n’eutdoncpluspour laconduire quecetinstinct intrigant qu’elleavaitapporté delaToscane, le plus intrigant despetits Étatsdecette époque, etce sentiment dehaine qu’elle avaitpuisé àla cour deFrance, qui était lacour laplus divisée d’intérêts etd’opinions decetemps. Elle comprit d’abordqu’unepartiedelaforce duBéarnais luivenait deson alliance avecleduc d’Alençon, et elle résolut del’isoler. Du jour oùelle eutpris cette résolution, elleentoura sonfilsavec lapatience etletalent dupêcheur, qui, lorsqu’il alaissé tomber lesplombs loindupoisson, lestraîne insensiblement jusqu’àceque detous côtés ils aient enveloppé saproie. Le duc François s’aperçut deceredoublement decaresses, etde son côté fitun pas vers samère.

Quant à Henri, ilfeignit dene rien voir, etsurveilla sonallié deplus près qu’il nel’avait faitencore. Chacun attendait unévénement. Or, tandis quechacun étaitdans l’attente decet événement, certainpourlesuns, probable pourlesautres, un matin quelesoleil s’était levérose etdistillant cettetiède chaleur etce doux parfum quiannonce unbeau jour, un homme pâle,appuyé surunbâton etmarchant péniblement, sortitd’une petite maison sisederrière l’Arsenal et s’achemina parlarue duPetit-Musc. Vers laporte Saint-Antoine, etaprès avoirlongé cettepromenade quitournait commeuneprairie marécageuse autourdesfossés delaBastille, illaissa legrand boulevard àsa gauche etentra danslejardin de l’Arbalète, dontleconcierge lereçut avecdegrandes salutations. Il n’y avait personne danscejardin, qui,comme l’indique sonnom, appartenait àune société particulière : celle desarbalétriers.

Mais,yeût-il eudes promeneurs, l’hommepâleeûtétédigne detout leurintérêt, carsa longue moustache, sonpasquiconservait uneallure militaire, bienqu’il fûtralenti parlasouffrance, indiquaient assez quec’était quelque officierblessédansuneoccasion récentequiessayait sesforces parunexercice modéré et reprenait lavie ausoleil. Cependant, choseétrange !lorsque lemanteau dont,malgré lachaleur naissante, cethomme enapparence inoffensif étaitenveloppé s’ouvrait,illaissait voirdeux longs pistolets pendantauxagrafes d’argent desa ceinture, laquelleserraitenoutre unlarge poignard etsoutenait unelongue épéequ’ilsemblait nepouvoir tirer, tant elleétait colossale, etqui, complétant cetarsenal vivant,battaitdeson fourreau deuxjambes amaigries et tremblantes.

Enoutre, etpour surcroît deprécautions, lepromeneur, toutsolitaire qu’ilétait, lançait àchaque pas unregard scrutateur, commepourinterroger chaquedétourd’allée, chaque buisson, chaquefossé. Ce fut ainsi quecethomme pénétra danslejardin, gagnapaisiblement uneespèce depetite tonnelle donnant sur lesboulevards, dontiln’était séparé queparune haie épaisse etun petit fossé quiformaient sadouble clôture.

Là,ils’étendit surunbanc degazon àportée d’unetableoùlegardien del’établissement, quijoignait à son titre deconcierge l’industrie degargotier, vintaubout d’uninstant luiapporter uneespèce decordial. Le malade étaitlàdepuis dixminutes etavait àplusieurs reprisesportéàsa bouche latasse defaïence dontil dégustait lecontenu àpetites gorgées, lorsquetoutàcoup sonvisage prit,malgré l’intéressante pâleurquile couvrait, uneexpression effrayante.Ilvenait d’apercevoir, venantdelaCroix-Faubin parunsentier quiest aujourd’hui larue deNaples, uncavalier enveloppé d’ungrand manteau, lequels’arrêta prochedubastion et attendit.

Ilyétait depuis cinqminutes, etl’homme auvisage pâle,quelelecteur apeut-être déjàreconnu pour Maurevel, avaitàpeine euletemps deseremettre del’émotion queluiavait causée saprésence, lorsqu’un jeune homme aujustaucorps serrécomme celuid’unpage arriva parcechemin quifutdepuis larue des Fossés-Saint- Nicolas, etrejoignit lecavalier. Perdu danssatonnelle defeuillage, Maurevel pouvaittoutvoiretmême toutentendre sanspeine, etquand on saura quelecavalier étaitdeMouy etlejeune homme aujustaucorps serréOrthon, onjugera siles oreilles et les yeux étaient occupés. L’un etl’autre regardèrent autourd’euxaveclaplus minutieuse attention ;Maurevelretenaitsonsouffle.. »

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