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- Mon fils, dit Catherine, vous recevez des gens suspects.

Publié le 04/11/2013

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- Mon fils, dit Catherine, vous recevez des gens suspects. - Bien, dit Henri ; et ces gens suspects me compromettent, n'est-ce pas, madame ? - Oui, Henri. - Nommez-les-moi, nommez-les-moi ! Quels sont-ils ? Confrontez-moi avec eux ! - En effet, dit Charles, Henriot a le droit de demander une explication. - Et je la demande ! reprit Henri, qui, sentant la supériorité de sa position, en voulait tirer parti ; je la demande à mon frère Charles, à ma bonne mère Catherine. Depuis mon mariage avec Marguerite, ne me suis-je pas conduit en bon époux ? qu'on le demande à Marguerite ; en bon catholique ? qu'on le demande à mon confesseur ; en bon parent ? qu'on le demande à tous ceux qui assistaient à la chasse d'hier. - Oui, c'est vrai, Henriot, dit le roi ; mais, que veux-tu ? on prétend que tu conspires. - Contre qui ? - Contre moi. - Sire, si j'eusse conspiré contre vous, je n'avais qu'à laisser faire les événements, quand votre cheval ayant la cuisse cassée ne pouvait se relever, quand le sanglier furieux revenait sur Votre Majesté. - Eh ! mort-diable ! ma mère, savez-vous qu'il a raison ! - Mais enfin qui était chez vous cette nuit ? - Madame, dit Henri, dans un temps où si peu osent répondre d'eux-mêmes, je ne répondrai jamais des autres. J'ai quitté mon appartement à sept heures du soir ; à dix heures mon frère Charles m'a emmené avec lui ; je suis resté avec lui pendant toute la nuit. Je ne pouvais pas à la fois être avec Sa Majesté et savoir ce qui se passait chez moi. - Mais, dit Catherine, il n'en est pas moins vrai qu'un homme à vous a tué deux gardes de Sa Majesté et blessé M. de Maurevel. - Un homme à moi ? dit Henri. Quel était cet homme, madame ? nommez le... - Tout le monde accuse M. de La Mole. - M. de La Mole n'est point à moi, madame ; M. de La Mole est à M. d'Alençon, à qui il a été recommandé par votre fille. - Mais enfin, dit Charles, est-ce M. de La Mole qui était chez toi, Henriot ? - Comment voulez-vous que je sache cela, Sire ? Je ne dis pas oui, je ne dis pas non... M. de La Mole est un fort gentil serviteur, tout dévoué à la reine de Navarre, et qui m'apporte souvent des messages, soit de Marguerite à qui il est reconnaissant de l'avoir recommandé à M. le duc d'Alençon, soit de M. le duc lui-même. Je ne puis pas dire que ce ne soit pas M. de La Mole. - C'était lui, dit Catherine ; on a reconnu son manteau rouge. - M. de La Mole a donc un manteau rouge ? - Oui. - Et l'homme qui a si bien arrangé mes deux gardes et M. de Maurevel... - Avait un manteau rouge ? demanda Henri. - Justement, dit Charles. - Je n'ai rien à dire, reprit le Béarnais. Mais il me semble, en ce cas, qu'au lieu de me faire venir, moi, qui n'étais point chez moi, c'était M. de La Mole, qui y était, dites-vous, qu'il fallait interroger. Seulement, dit Henri, je dois faire observer une chose à Votre Majesté. - Laquelle ? - Si c'était moi qui, voyant un ordre signé de mon roi, me fusse défendu au lieu d'obéir à cet ordre, je serais coupable et mériterais toutes sortes de châtiments ; mais ce n'est point moi, c'est un inconnu que cet ordre ne concernait en rien : on a voulu l'arrêter injustement, il s'est défendu, trop bien défendu même, mais il était dans son droit. - Cependant... murmura Catherine. - Madame, dit Henri, l'ordre portait-il de m'arrêter ? - Oui, dit Catherine, et c'est Sa Majesté elle-même qui l'avait signé. - Mais portait-il en outre d'arrêter, si l'on ne me trouvait pas, celui que l'on trouverait à ma place ? - Non, dit Catherine. - Eh bien, reprit Henri, à moins qu'on ne prouve que je conspire et que l'homme qui était dans ma chambre conspire avec moi, cet homme est innocent. Puis, se retournant vers Charles IX : - Sire, continua Henri, je ne quitte pas le Louvre. Je suis même prêt à me rendre, sur un simple mot de Votre Majesté, dans telle prison d'État qu'il lui plaira de m'indiquer. Mais en attendant la preuve du contraire, j'ai le droit de me dire et je me dirai le très fidèle serviteur, sujet et frère de Votre Majesté. Et avec une dignité qu'on ne lui avait point vue encore, Henri salua Charles et se retira. - Bravo, Henriot ! dit Charles quand le roi de Navarre fut sorti. - Bravo ! parce qu'il nous a battus ? dit Catherine. - Et pourquoi n'applaudirais-je pas ? Quand nous faisons des armes ensemble et qu'il me touche, est-ce que je ne dis pas bravo aussi ? Ma mère, vous avez tort de mépriser ce garçon-là comme vous le faites. - Mon fils, dit Catherine en serrant la main de Charles IX, je ne le méprise pas, je le crains. - Eh bien, vous avez tort, ma mère. Henriot est mon ami, et, comme il l'a dit, s'il eût conspiré contre moi, il n'eût eu qu'à laisser faire le sanglier. - Oui, dit Catherine, pour que M. le duc d'Anjou, son ennemi personnel, fût le roi de France ? - Ma mère, n'importe le motif pour lequel Henriot m'a sauvé la vie ; mais il y a un fait, c'est qu'il me l'a sauvée, et, mort de tous les diables ! je ne veux pas qu'on lui fasse de la peine. Quant à M. de La Mole, eh bien, je vais m'entendre avec mon frère d'Alençon, auquel il appartient. C'était un congé que Charles IX donnait à sa mère. Elle se retira en essayant d'imprimer une certaine fixité à ses soupçons errants. M. de La Mole, par son peu d'importance, ne répondait pas à ses besoins. En rentrant dans sa chambre, à son tour Catherine trouva Marguerite qui l'attendait. - Ah ! ah ! dit-elle, c'est vous, ma fille ; je vous ai envoyé chercher hier soir. - Je le sais, madame ; mais j'étais sortie. - Et ce matin ? - Ce matin, madame, je viens vous trouver pour dire à Votre Majesté qu'elle va commettre une grande injustice. - Laquelle ? - Vous allez faire arrêter M. le comte de la Mole. - Vous vous trompez, ma fille, je ne fais arrêter personne, c'est le roi qui fait arrêter, et non pas moi. - Ne jouons pas sur les mots, madame, quand les circonstances sont graves. On va arrêter M. de La Mole, n'est-ce pas ? - C'est probable. - Comme accusé de s'être trouvé cette nuit dans la chambre du roi de Navarre et d'avoir tué deux gardes et blessé M. de Maurevel ? - C'est en effet le crime qu'on lui impute. - On le lui impute à tort, madame, dit Marguerite ; M. de La Mole n'est pas coupable. - M. de La Mole n'est pas coupable ! dit Catherine en faisant un soubresaut de joie et en devinant qu'il allait jaillir quelque lueur de ce que Marguerite venait lui dire. - Non, reprit Marguerite, il n'est pas coupable, il ne peut pas l'être, car il n'était pas chez le roi. - Et où était-il ? - Chez moi, madame. - Chez vous ! - Oui, chez moi. Catherine devait un regard foudroyant à cet aveu d'une fille de France, mais elle se contenta de croiser ses mains sur sa ceinture. - Et... dit-elle après un moment de silence, si l'on arrête M. de La Mole et qu'on l'interroge... - Il dira où il était et avec qui il était, ma mère, répondit Marguerite, quoiqu'elle fût sûre du contraire. - Puisqu'il en est ainsi, vous avez raison, ma fille, il ne faut pas qu'on arrête M. de La Mole. Marguerite frissonna : il lui sembla qu'il y avait dans la manière dont sa mère prononçait ces paroles un sens mystérieux et terrible : mais elle n'avait rien à dire, car ce qu'elle venait demander lui était accordé. - Mais alors, dit Catherine, si ce n'était point M. de La Mole qui était chez le roi, c'était un autre ? Marguerite se tut. - Cet autre, le connaissez-vous, ma fille ? dit Catherine. - Non, ma mère, dit Marguerite d'une voix mal assurée. - Voyons, ne soyez pas confiante à moitié. - Je vous répète, madame, que je ne le connais pas, répondit une seconde fois Marguerite en pâlissant malgré elle. - Bien, bien, dit Catherine d'un air indifférent, on s'informera. Allez, ma fille : tranquillisez-vous, votre mère veille sur votre honneur. Marguerite sourit. - Ah ! murmura Catherine, on se ligue ; Henri et Marguerite s'entendent : pourvu que la femme soit muette, le mari est aveugle. Ah ! vous êtes bien adroits, mes enfants, et vous vous croyez bien forts ; mais votre force est dans votre union, et je vous briserai les uns après les autres. D'ailleurs un jour viendra où Maurevel pourra parler ou écrire, prononcer un nom ou former six lettres, et ce jour-là on saura tout... - Oui, mais d'ici à ce jour-là le coupable sera en sûreté. Ce qu'il y a de mieux, c'est de les désunir tout de suite. Et en vertu de ce raisonnement, Catherine reprit le chemin des appartements de son fils, qu'elle trouva en conférence avec d'Alençon. - Ah ! ah ! dit Charles IX en fronçant le sourcil, c'est vous, ma mère ? - Pourquoi n'avez-vous pas dit encore ? Le mot était dans votre pensée, Charles. - Ce qui est dans ma pensée n'appartient qu'à moi, madame, dit le roi de ce ton brutal qu'il prenait uelquefois, même pour parler à Catherine. Que me voulez-vous ? dites vite.

« – Mon fils,ditCatherine enserrant lamain deCharles IX,jene leméprise pas,jelecrains. – Eh bien, vousaveztort,mamère.

Henriot estmon ami,et,comme ill’a dit, s’ileût conspiré contremoi,il n’eût euqu’à laisser fairelesanglier. – Oui, ditCatherine, pourqueM. le ducd’Anjou, sonennemi personnel, fûtleroi deFrance ? – Ma mère, n’importe lemotif pourlequel Henriot m’asauvé lavie ; mais ilya un fait, c’est qu’ilmel’a sauvée, et,mort detous lesdiables !je ne veux pasqu’on luifasse delapeine.

Quant àM. de La Mole,ehbien, je vais m’entendre avecmon frère d’Alençon, auquelilappartient. C’était uncongé queCharles IXdonnait àsa mère.

Elleseretira enessayant d’imprimer unecertaine fixitéà ses soupçons errants. M. de La Mole,parson peu d’importance, nerépondait pasàses besoins. En rentrant danssachambre, àson tour Catherine trouvaMarguerite quil’attendait. – Ah !ah !dit-elle, c’estvous, mafille ; jevous aienvoyé chercher hiersoir. – Je lesais, madame ; maisj’étais sortie. – Et cematin ? – Ce matin, madame, jeviens voustrouver pourdireàVotre Majesté qu’ellevacommettre unegrande injustice.

–Laquelle ? – Vous allezfaire arrêter M. lecomte delaMole. – Vous voustrompez, mafille, jene fais arrêter personne, c’estleroi qui fait arrêter, etnon pasmoi. – Ne jouons passurlesmots, madame, quandlescirconstances sontgraves.

Onvaarrêter M. de La Mole, n’est-ce pas ? – C’est probable. – Comme accusédes’être trouvé cettenuitdans lachambre duroi deNavarre etd’avoir tuédeux gardes et blessé M. de Maurevel ? – C’est eneffet lecrime qu’onluiimpute. – On lelui impute àtort, madame, ditMarguerite ; M. de LaMolen’estpascoupable. – M. de La Molen’estpascoupable !dit Catherine enfaisant unsoubresaut dejoie eten devinant qu’ilallait jaillir quelque lueurdeceque Marguerite venaitluidire. – Non, reprit Marguerite, iln’est pascoupable, ilne peut pasl’être, cariln’était paschez leroi. – Et où était-il ? – Chez moi,madame. – Chez vous! – Oui, chez moi.

Catherine devaitunregard foudroyant àcet aveu d’une filledeFrance, maisellesecontenta de croiser sesmains sursaceinture. – Et… dit-elle aprèsunmoment desilence, sil’on arrête M. de La Moleetqu’on l’interroge… – Il dira oùilétait etavec quiilétait, mamère, répondit Marguerite, quoiqu’ellefûtsûre ducontraire. – Puisqu’il enest ainsi, vousavezraison, mafille, ilne faut pasqu’on arrête M. de La Mole. Marguerite frissonna :illui sembla qu’ilyavait danslamanière dontsamère prononçait cesparoles unsens mystérieux etterrible : maisellen’avait rienàdire, carcequ’elle venaitdemander luiétait accordé. – Mais alors, ditCatherine, sice n’était pointM. de La Molequiétait chezleroi, c’était unautre ? Marguerite se tut. – Cet autre, leconnaissez-vous, mafille ? ditCatherine. – Non, mamère, ditMarguerite d’unevoixmalassurée. – Voyons, nesoyez pasconfiante àmoitié. – Je vous répète, madame, quejene leconnais pas,répondit uneseconde foisMarguerite enpâlissant malgré elle. – Bien, bien,ditCatherine d’unairindifférent, ons’informera.

Allez,mafille : tranquillisez-vous, votremère veille survotre honneur. Marguerite sourit. – Ah !murmura Catherine, onseligue ; HenrietMarguerite s’entendent : pourvuquelafemme soitmuette, le mari estaveugle.

Ah!vous êtesbien adroits, mesenfants, etvous vous croyez bienforts ; maisvotre forceest dans votre union, etjevous briserai lesuns après lesautres.

D’ailleurs unjour viendra oùMaurevel pourra parler ouécrire, prononcer unnom ouformer sixlettres, etce jour-là onsaura tout… – Oui, mais d’iciàce jour-là lecoupable seraensûreté.

Cequ’il ya de mieux, c’estdeles désunir toutde suite.

Eten vertu deceraisonnement, Catherinerepritlechemin desappartements deson fils, qu’elle trouvaen conférence avecd’Alençon. – Ah !ah !dit Charles IXenfronçant lesourcil, c’estvous, mamère ? – Pourquoi n’avez-vous pasdit encore ? Le mot était dans votre pensée, Charles. – Ce qui estdans mapensée n’appartient qu’àmoi, madame, ditleroi deceton brutal qu’ilprenait quelquefois, mêmepourparler àCatherine.

Quemevoulez-vous ? ditesvite.. »

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