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Réduction à un seul principe.

Publié le 11/05/2011

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Je dis donc que le seul principe de contradiction suffit pour démontrer la seconde et la troisième figure des syllogismes par la première. Par exemple on peut conclure dans la première figure, en barbara : Tout B est C. Tout A est B. Donc Tout A est C. Supposons que la conclusion soit fausse (ou qu'il soit vrai que quelque A n'est point C), donc l'une ou l'autre des prémisses sera fausse aussi. Supposons que la seconde est véritable, il faudra que la première soit fausse, qui prétend que tout B est C. Donc sa contradictoire sera vraie, c'est-à-dire quelque B ne sera point C. Et ce sera la conclusion d'un argument nouveau, tiré de la fausseté de la conclusion et de la vérité d'une des prémisses du précédent. Voici cet argument nouveau : Quelque A n'est point C. Ce qui est opposé à la conclusion précédente supposée fausse. Tout A est B. C'est la prémisse précédente supposée vraie. Donc quelque B n'est point C. C'est la conclusion présente vraie, opposée à la prémisse précédente fausse.

Cet argument est dans le mode disamis (1) de la troisième figure, qui se démontre ainsi manifestement et d'un coup d'oeil du mode barbara de la première figure, sans employer que le principe de contradiction. Et j'ai remarqué dans ma jeunesse, lorsque j'épluchais ces choses, que tous les modes de la seconde et de la troisième figure se peuvent tirer de la première par cette seule méthode, en supposant que le mode de la première est bon, et par conséquent que la conclusion étant fausse, ou sa contradictoire étant prise pour vraie, et une des prémisses étant prise pour vraie aussi, il faut que la contradictoire de l'autre prémisse soit vraie. Il est vrai que dans les écoles logiques on aime mieux se servir des conversions pour tirer les figures moins principales de la première, qui est la principale, parce que cela paraît plus commode pour les écoliers. Mais pour ceux qui cherchent les raisons démonstratives, où il faut employer le moins de suppositions qu'on peut, on ne démontrera pas par la supposition de la conversion ce qui peut se démontrer par le seul principe primitif, qui est celui de la contradiction et qui ne suppose rien. J'ai même fait cette observation, qui paraît remarquable, c'est que les seules figures moins principales, qu'on appelle directes, savoir la seconde et la troisième, se peuvent démontrer par le principe de contradiction tout seul, mais la figure moins principale indirecte, qui est la quatrième, et dont les Arabes attribuent l'invention à Galien, quoique nous n'en trouvions rien dans les ouvrages qui nous restent de lui, ni dans les autres auteurs Grecs, la quatrième, dis-je, a ce désavantage, qu'elle ne saurait être tirée de la première ou principale par cette méthode seule, et qu'il faut encore employer une autre supposition, savoir les conversions ; de sorte qu'elle est plus éloignée d'un degré que la seconde et la troisième, qui sont de niveau et également éloignées de la première, au lieu que la quatrième a besoin encore de la seconde et de la troisième pour être démontrée. Car il se trouve fort à propos que les conversions mêmes dont elle a besoin se démontrent par la figure seconde ou troisième, démontrables indépendamment des conversions, comme je viens de faire voit.  

LEIBNIZ.

1. Erreur : bocardo. La forme disamis ne s'obtient que si l'on transforme O en I par un prédicat négatif, la copule devenant positive.   

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