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Robur-le-Conquerant hurracan sur l'Atlantique, typhon dans les mers de Chine, simoun au Sahara, tornade sur la côte occidentale, c'est toujours une tempête tournante - et redoutable.

Publié le 12/04/2014

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typhon
Robur-le-Conquerant hurracan sur l'Atlantique, typhon dans les mers de Chine, simoun au Sahara, tornade sur la côte occidentale, c'est toujours une tempête tournante - et redoutable. Oui! redoutable pour tout bâtiment, saisi par ce mouvement giratoire qui s'accroît de la circonférence au centre et ne laisse qu'un seul endroit calme, le milieu de ce maelstrom des airs. Robur le savait. Il savait aussi qu'il était prudent de fuir un cyclone, en sortant de sa zone d'attraction par une ascension vers les couches supérieures. Jusqu'alors il y àvait toujours réussi. Mais il n'avait pas une heure à perdre, pas une minute peut-être! En effet la violence du vent s'accroissait sensiblement. Les lames, découronnées à leurs crêtes, faisaient courir une poussière blanche à la surface de la mer. Il était manifeste, aussi, que le cyclone, en se déplaçant, allait tomber vers les régions du pôle avec une vitesse effroyable. «En haut! dit Robur. - En haut!» répondit Tom Turner. Une extrême puissance ascensionnelle fut communiquée à l'aéronef, et il s'éleva obliquement, comme s'il eût suivi un plan qui se fût incliné dans le sud-ouest. En ce moment, le baromètre baissa encore, -une chute rapide de la colonne de mercure de huit, puis de douze millimètres. Soudain l' Albatros s'arrêta dans son mouvement ascensionnel. A quelle cause était dû cet arrêt? Evidemment à une pesée de l'air, à un formidable courant, qui, se propageant de haut en bas, diminuait la résistance du point d'appui. Lorsqu'un steamer remonte un fleuve, son hélice produit un travail d'autant moins utile que le courant tend à fuir sous ses branches. Le recul est alors considérable, et il peut même devenir, égal à la dérive. Ainsi de l'Albatros, en ce moment. Cependant Robur n'abandonna pas la partie. Ses soixante-quatorze hélices, agissant dans une simultanéité parfaite, furent portées à leur maximum de rotation. Mais, irrésistiblement attiré par le cyclone, l'appareil ne pouvait lui échapper. Durant de courtes accalmies, il reprenait son mouvement ascensionnel. Puis la lourde pesée l'emportait bientôt, et il retombait comme un bâtiment qui sombre. Et n'était-ce pas sombrer dans cette mer-aérienne, au milieu d'une nuit dont les fanaux de l'aéronef ne rompaient la profondeur que sur un rayon restreint? Evidemment, si la violence du cyclone s'accroissait encore, l' Albatros ne serait plus qu'un fétu de paille indirigeable, emporté dans un de ces tourbillons qui déracinent les arbres, enlèvent les toitures, renversent des pans de murailles. Robur et Tom ne pouvaient se parler que par signes. Uncle Prudent et Phil Evans, accrochés à la rambarde, se demandaient si le météore n'allait pas faire leur jeu en détruisant l'aéronef, et avec lui l'inventeur, et avec l'inventeur, tout le secret de son invention! Mais, puisque l'Albatros ne parvenait pas à se dégager verticalement de ce cyclone, ne semblait-il pas qu'il n'avait eu qu'une chose à faire gaguer le centre, relativement calme, où il serait plus maître de ses manuvres? Oui! mais, pour l'atteindre, il aurait fallu rompre ces courants circulaires qui l'entraînaient à leur périphérie. Possédait-il assez de puissance mécanique pour s'en arracher? Soudain la partie supérieure du nuage creva. Les vapeurs se condensèrent en torrents de pluie. XIV. Dans lequel l'Albatros fait ce qu on ne pourra peut-être jamais faire. 83 Robur-le-Conquerant Il était deux heures du matin. Le baromètre, oscillant avec des écarts de douze millimètres, était alors tombé à 709 - ce qui, en réalité, devait être diminué de la baisse due à la hauteur atteinte par l'aéronef au-dessus du niveau de la mer. Phénomène assez rare, ce cyclone s'était formé hors des zones qu'il parcourt le plus habituellement, c'est-à-dire entre le trentième parallèle nord et le vingt-sixième parallèle sud. Peut-être cela explique-t-il comment cette tempête tournante se changea subitement en une tempête rectiligne. Mais quel ouragan! Le coup de vent du Connecticut du 22 mars 1882 eût pu lui être comparé, lui dont la vitesse fut de cent seize mètres à la seconde, soit plus de cent lieues à l'heure. Il s'agissait donc de fuir vent arrière, comme un navire devant la tempête, ou plutôt de se laisser emporter par le courant, que l' Albatros ne pouvait remonter et dont il ne pouvait sortir. Mais, à suivre cette imperturbable trajectoire, il fuyait vers le sud, il se jetait au-dessus de ces régions polaires dont Robur avait voulu éviter les approches, il n'était plus maître de sa direction, il irait où le porterait l'ouragan! Tom Turner s'était mis au gouvernail. Il fallait toute son adresse pour ne pas embarder sur un bord ou sur l'autre. Aux premières heures du matin. - si on peut appeler ainsi cette vague teinte qui nuança l'horizon -, l'Albatros avait franchi quinze degrés depuis le cap Horn, soit plus de quatre cents lieues, et il dépassait la limite du cercle polaire. Là, dans ce mois de juillet, la nuit dure encore dix-neuf heures et demie. Le disque du soleil, sans chaleur, sans lumière, n'apparaît sur l'horizon que pour disparaître presque aussitôt. Au pôle, cette nuit se prolonge pendant soixante-dix-neuf jours. Tout indiquait que. l'Albatros allait s'y plonger comme dans un abîme. Ce jour-là, une observation, si elle eût été possible, aurait donné 66° 40' de latitude australe. L'aéronef n'était donc plus qu'à quatorze cents milles du pôle antarctique. Irrésistiblement emporté vers cet inaccessible point du globe, sa vitesse « mangeait », pour ainsi dire, sa pesanteur, bien que celle-ci fût un peu plus forte alors, par suite de l'aplatissement de la terre au pôle. Ses hélices suspensives, il semblait qu'il eût pu s'en passer. Et, bientôt, la violence de l'ouragan devint telle que Robur crut devoir réduire les propulseurs au minimum de tours, afin d'éviter quelques graves avaries, et de manière à pouvoir gouverner, tout en conservant le moins possible de vitesse propre. Au milieu de ces dangers, l'ingénieur commandait avec sang-froid., et le personnel obéissait comme si l'âme de son chef eût été en lui. Uncle Prudent et Phil Evans n'avaient pas un instant quitté la plate-forme. On y pouvait rester sans inconvénient, d'ailleurs. L'air ne faisait pas résistance ou faiblement. L'aéronef était là comme un aérostat qui marche avec la masse fluide dans laquelle il est plongé. Le domaine du pôle austral comprend, dit-on, quatre millions cinq cent mille mètres carrés en superficie. Est-ce un continent? est-ce un archipel? est-ce une mer paléocrystique, dont les glaces ne fondent même pas pendant la longue période de l'été? On l'ignore. Mais ce qui est connu, c'est que ce pôle austral est plus froid que le pôle boréal, - phénomène dû à la position de la terre sur son orbite durant l'hiver des régions antarctiques. Pendant cette journée, rien n'indiqua que la tempête allait s'amoindrir. C'était par le soixante-quinzième méridien, à l'ouest, que l'Albatros allait aborder la région circumpolaire. Par quel méridien en sortirait-il, - s'il en sortait? XIV. Dans lequel l'Albatros fait ce qu on ne pourra peut-être jamais faire. 84
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« Il était deux heures du matin.

Le baromètre, oscillant avec des écarts de douze millimètres, était alors tombé à 709 - ce qui, en réalité, devait être diminué de la baisse due à la hauteur atteinte par l'aéronef au-dessus du niveau de la mer. Phénomène assez rare, ce cyclone s'était formé hors des zones qu'il parcourt le plus habituellement, c'est-à-dire entre le trentième parallèle nord et le vingt-sixième parallèle sud.

Peut-être cela explique-t-il comment cette tempête tournante se changea subitement en une tempête rectiligne.

Mais quel ouragan! Le coup de vent du Connecticut du 22 mars 1882 eût pu lui être comparé, lui dont la vitesse fut de cent seize mètres à la seconde, soit plus de cent lieues à l'heure. Il s'agissait donc de fuir vent arrière, comme un navire devant la tempête, ou plutôt de se laisser emporter par le courant, que l' Albatros ne pouvait remonter et dont il ne pouvait sortir.

Mais, à suivre cette imperturbable trajectoire, il fuyait vers le sud, il se jetait au-dessus de ces régions polaires dont Robur avait voulu éviter les approches, il n'était plus maître de sa direction, il irait où le porterait l'ouragan! Tom Turner s'était mis au gouvernail.

Il fallait toute son adresse pour ne pas embarder sur un bord ou sur l'autre. Aux premières heures du matin.

- si on peut appeler ainsi cette vague teinte qui nuança l'horizon -, l'Albatros avait franchi quinze degrés depuis le cap Horn, soit plus de quatre cents lieues, et il dépassait la limite du cercle polaire. Là, dans ce mois de juillet, la nuit dure encore dix-neuf heures et demie.

Le disque du soleil, sans chaleur, sans lumière, n'apparaît sur l'horizon que pour disparaître presque aussitôt.

Au pôle, cette nuit se prolonge pendant soixante-dix-neuf jours.

Tout indiquait que.

l'Albatros allait s'y plonger comme dans un abîme. Ce jour-là, une observation, si elle eût été possible, aurait donné 66° 40' de latitude australe.

L'aéronef n'était donc plus qu'à quatorze cents milles du pôle antarctique. Irrésistiblement emporté vers cet inaccessible point du globe, sa vitesse « mangeait », pour ainsi dire, sa pesanteur, bien que celle-ci fût un peu plus forte alors, par suite de l'aplatissement de la terre au pôle.

Ses hélices suspensives, il semblait qu'il eût pu s'en passer.

Et, bientôt, la violence de l'ouragan devint telle que Robur crut devoir réduire les propulseurs au minimum de tours, afin d'éviter quelques graves avaries, et de manière à pouvoir gouverner, tout en conservant le moins possible de vitesse propre. Au milieu de ces dangers, l'ingénieur commandait avec sang-froid., et le personnel obéissait comme si l'âme de son chef eût été en lui. Uncle Prudent et Phil Evans n'avaient pas un instant quitté la plate-forme.

On y pouvait rester sans inconvénient, d'ailleurs.

L'air ne faisait pas résistance ou faiblement.

L'aéronef était là comme un aérostat qui marche avec la masse fluide dans laquelle il est plongé. Le domaine du pôle austral comprend, dit-on, quatre millions cinq cent mille mètres carrés en superficie. Est-ce un continent? est-ce un archipel? est-ce une mer paléocrystique, dont les glaces ne fondent même pas pendant la longue période de l'été? On l'ignore.

Mais ce qui est connu, c'est que ce pôle austral est plus froid que le pôle boréal, - phénomène dû à la position de la terre sur son orbite durant l'hiver des régions antarctiques. Pendant cette journée, rien n'indiqua que la tempête allait s'amoindrir.

C'était par le soixante-quinzième méridien, à l'ouest, que l'Albatros allait aborder la région circumpolaire.

Par quel méridien en sortirait-il, - s'il en sortait? Robur-le-Conquerant XIV.

Dans lequel l'Albatros fait ce qu on ne pourra peut-être jamais faire.

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